Christian Gavelle

par

Christian Gavelle est le photographe officiel du PSG depuis 30 ans. A cette occasion il a sorti un magnifique livre compilant une sélection de ses meilleurs clichés. On lui a demandé de faire son Onze Type pour Virage.

….. INTERVIEW …..

David Beckham et Zlatan Ibrahimović

13 mai 2013

Beckham, même si il n’est pas resté longtemps, et Ibra sont peut être les deux plus grandes stars qui ont joué au Paris Saint-Germain. Il y a eu Ronaldhino mais il est devenu une star après son passage à Paris. Ce sont deux personnalités complètement opposées mais sur cette photo, ils sont comme deux potes qui prennent une petite bière. J’aime bien cette photo pour l’opposition des deux styles, des deux personnalités car c’est ça qui m’a marqué. Ibra tout le monde le connait, très grand joueur, très fort sur le terrain, une enfance difficile qui explique en partie son comportement. Mais je pense qu’il exagère ce côté là pour se protéger. Pour l’avoir suivi durant sa carrière au PSG, il était sollicité tout le temps, donc à un moment tu pètes un plomb ou tu te protèges.

Quant à Beckham, c’était quelqu’un de très poli, très bien élevé, un peu le gendre idéal. Je me souviens du match à Lorient où il n’a pas joué lors de la dernière journée de championnat 2012-2013 où nous sommes champions. Avant d’atterrir, il est allé saluer tout le monde dans l’avion, rangée par rangée, et pas seulement les joueurs, tout le staff, c’était classe de sa part.
Beckham se protégeait plus via son entourage. Il avait tout une équipe de communication autour de lui. Vu qu’il a vraiment un fond très gentil, il est capable de dire oui à tout le monde donc c’est plus facile de dire non via une tierce personne.

Luis Fernandez

Camp des Loges, Eté 1995

On va donc parler du Luis entraîneur. Luis est d’origine espagnole et je retrouve en Emery les mêmes traits de caractère sur le banc de touche. Luis comme Emery sont des garçons hyper démonstratifs. A tel point qu’ils doivent savoir que la moitié de ce qu’ils disent, aucun joueur ne peut l’entendre sur le terrain. Mais ça ne les empêche pas de parler, d’apostropher leurs joueurs comme si ils les entendaient. Et pour en avoir parlé avec un certain nombre de joueurs, à part ceux qui sont du bon côté du terrain, ils n’entendent et ne voient rien pendant le match. Mais ce côté « sans chaud » peut générer de belles photos.

David Ginola

Juillet 1994, stage à Pouligny-Notre-Dame

Je me souviens très bien de ce moment là. On était en stage chez Michel Denisot, à côté de Châteauroux. La séance d’entraînement était terminée et les adjoints étaient en train de ranger le matériel. David s’est fait un petit concours de penalty avec un autre joueur dont j’ai oublié le nom.
Il faisait chaud, c’était l’été et il a retiré son maillot d’entraînement. Sur la photo on le voit tirer un penalty. Et là voilà, c’est un peu le summum du corps masculin parfait. Quand on voit la photo on est tous un petit peu jaloux de El Magnifico… Et c’est vrai que sur celle-ci il a des petits airs de Zlatan.

Raí
Ce n’est pas original mais je choisis la photo de la couverture du livre, mais je vais te raconter une histoire à ce sujet. On a hésité avec d’autres photos. Il y avait une photo de Thiago Silva, une de Zlatan, mais la photo de Raí est symbolique. Et comme Thiago Silva joue encore et que Zlatan venait de partir, on trouvait ça un peu gênant. Raí s’inscrivait plus dans l’histoire, dans mes 30 ans au club. Mais je ne savais pas comment il allait réagir au fait d’être en couverture. Donc je lui ai écrit un mail avant que le livre ne sorte en lui expliquant que j’avais envie d’une photo forte, émouvante, symbolique, que je me souvenais de cette scène où il poussait des cris. Et je lui ai donc annoncé que c’est lui qui ferait la couverture de mon livre. Il m’a envoyé une réponse très émouvante en me disant qu’il vivait ça comme un énorme hommage et que ça l’avait fait pleurer en repensant à ce moment là de sa carrière.

25 avril 1998, Parc des Princes

Et puis tu sais on me demande souvent quel a été le plus grand joueur que j’ai pu côtoyer au PSG. Dans ces moments là tu es obligé, ou pas, de dissocier le joueur de foot, de la personnalité du mec. Raí a été un grand joueur mais c’est une personnalité très touchante. Passer un moment avec Raí c’est délicieux. J’ai d’ailleurs pris un petit déjeuner avec lui il n’y a pas longtemps. Je lui ai parlé de deux anecdotes. La première c’est à ses débuts au PSG. On était dans un avion et j’étais assis à côté de lui. Et dans un français encore approximatif il se tourne vers moi et me demande « Christian, tu peux m’expliquer le fonctionnement de la sécurité sociale ? »… Un joueur de foot qui s’intéresse à la façon dont les gens cotisent etc… Et la deuxième anecdote c’était lié à une rubrique dans le magazine du PSG qui s’appelait « Mon Paris à moi ». On demandait à des joueurs de choisir un endroit à Paris pour se faire photographier. Les mecs choisissaient souvent les Champs-Elysées, l’Arc de Triomphe, la Tour Eiffel. Raí, lui, a répondu immédiatement « le pont Alexandre III ». Et puis on sait aussi qu’il a pris la double nationalité française. Il est la preuve que le foot peut changer un homme. Il aurait pu aller jouer en Italie mais il est vraiment tombé amoureux de la France, de Paris. Il adore ce pays, il s’est intéressé au vin, chose qu’il ne connaissait pas en arrivant en France. Mais aussi à la gastronomie, à la musique française, il aimait beaucoup le groupe Les Innocents

Ronaldinho

26 octobre 2002, PSG-OM

Plus que la photo en elle même c’est le mec qui m’a marqué. Tous les brésiliens ont un point commun. Ils ont un regard très positif sur la vie. Ils sont plus ou moins extravertis mais Ronnie c’était le brésilien exacerbé par excellence. Le football pour lui c’était un jeu, c’était le plaisir, on s’amuse avec un ballon. Le jour où il a signé je m’en souviens très bien. Il était dans un bureau en train d’attendre pour signer tout un tas de papiers. Et il y avait un vieux ballon dégonflé par terre. Je me demande si ce n’était pas le ballon du chien d’un des financiers du club. Il a pris le ballon et a fait des trucs incroyables avec. J’ai regretté de n’avoir pas osé prendre une photo de lui à ce moment là. Pareil, quand on faisait les photos et les vidéos officielles pour les écrans du Parc, il se mettait à danser et j’étais un peu décontenancé… Il aurait pu être un immense joueur si il avait été un peu plus sérieux dans la gestion de sa carrière. Mais en même temps si il avait ce grain de folie qui lui faisait faire des passes du dos, c’est parce qu’il était comme ça. Je me souviens aussi de la soirée organisée par le club en 2002 à la Favela Chic à Paris pour son retour après le titre du Brésil en coupe du Monde. Il était dans son élément, il jouait des percussions avec les musiciens, il était infatigable, je suis rentré bien avant lui…

Bernard Lama

Février 1995

Pourquoi cette photo chez lui à Mesnil-le-Roi, car c’est une époque où je faisais des photos chez les joueurs, en famille. Il y en a plusieurs dans le livre. C’était sympa car tu passais un moment plus ou moins long avec les joueurs, tu les voyais dans un autre contexte. Et il fallait trouver des angles avant d’aller faire la photo et parfois en arrivant je n’avais pas forcément d’idée car je ne connaissais pas leur intérieur. Ça a été le cas pour cette photo avec Bernard. Comme je connaissais son attachement à la Guyane, à la musique, je lui ai proposé cette photo. J’ai mis un peu de lumière pour créer une ambiance de fin de journée un peu tamisée. Et puis Bernard c’est surtout devenu un copain. Ça fait partie des gars qui m’appellent encore aujourd’hui, comme ça. C’est le cas aussi de Pedro Miguel Pauleta. Décembre dernier, je suis en famille pour Noël et je reçois un appel, c’est Pedro qui me souhaite de joyeuses fêtes. C’est sympa quoi. Et puis je le dis souvent, je n’essaye pas de devenir copain avec les joueurs, ça ne vient jamais de moi ou rarement, comme avec Lionel Letizi car on était voisin. J’essaye juste d’avoir de bonnes relations avec eux pour bien travailler.

Pedro Miguel Pauleta
C’était une thématique à l’époque du magazine 100% PSG. L’organisation de ce shooting avait été compliquée. J’avais acheté moi même des casiers à bouteille chez Castorama pour poser les 81 ballons représentant son nombre de buts marqués. J’avais demandé les ballons à Nike mais ils sont arrivés tous dégonflés dans des cartons. J’ai donc demandé à la boutique de m’envoyer un gars avec un gonfleur… Et quand Pauleta est arrivé on était tout juste prêt. On a fait cette photo dans la salle de presse des photographes du Parc des Princes. C’était chaud. Aujourd’hui je ne sais pas si j’aurais le courage de monter ce genre de photo tellement ça prenait du temps. J’étais tout seul à l’époque, sans assistant ni rien.

Safet Sušić

14 Septembre 1988, PSG-Bordeaux

Je choisis cette photo car il est en action sur le terrain et c’est là qu’il était le plus impressionnant. C’est un joueur qui m’a fasciné, il était très complet et surtout c’est un joueur qui avait une influence énorme sur l’équipe. A l’époque on disait que quand Safet toussait, toute l’équipe prenait un rhume. Un joueur de cette classe là, c’est un miracle qu’il soit venu au PSG à cette période de l’histoire du club. On était une équipe européenne moyenne. On l’a récupéré sur un mic mac car son agent l’avait fait signer dans deux clubs italiens en même temps, donc il a été exclu du championnat italien. Mais il a marqué l’histoire du PSG. Il fait partie des joueurs comme Dhaleb, Raí, Weah, Ginola, Pauleta, Ibra. Avant l’arrivée d’Ibra à Paris, je disais souvent que Sušić était le plus grand, le plus fort. Il est resté longtemps, le club est champion de France pour la première fois en 85-86 avec lui, il gagne la coupe de France en 83 contre Nantes, il a un palmarès. Mais depuis, ce qu’a fait Ibra au PSG est énorme, à tout point de vue.

George Weah

21 octobre 1992, Stade San Paolo

Il faut savoir que cette photo est tirée d’une diapositive. On le voit car le grain est très particulier. On ne voit plus ce type de rendu aujourd’hui avec le numérique. Ça donne un côté Vintage. J’aime bien aussi cette photo car George rentre parfaitement dans mon cadrage. Ce sont les débuts européens du PSG à Naples en 1992. Le PSG n’est pas encore vraiment connu. Et on gagne 2-0 en 16ème de finale avec 2 buts de Mister George. C’est à ce moment qu’il commence à marquer de son empreinte le football européen. C’était un sacré joueur, un sacré buteur. Quand il était lancé, c’était difficile de l’arrêter, un vrai TGV.

Javier Pastore
Tout comme Marco Verratti, c’est un gamin et il est adorable. Jerome Touboul, le directeur de la communication du club a offert mon livre à tous les joueurs. je ne voulais pas être là quand ça s’est fait. Javier est le seul qui m’ait cherché partout pour me faire dédicacer son bouquin. Il m’a dit « Christian, tu veux bien me dédicacer ton livre ? », je lui ai répondu « Attends je réfléchis (rires) ». C’était le monde à l’envers… Alors pourquoi cette photo ? Premièrement car il y a parfois des duos d’amitié qui se font en football. Ces amitiés se construisent au PSG comme Marquinhos et Lucas qui ne se connaissaient pas avant de jouer ensemble. Ou dans d’autres clubs comme Maxwell et Ibra à l’Ajax, et Javier et Salva à Palerme. Ces deux derniers sont très potes et étaient tout le temps ensemble. Et ces couples parfois se séparent puisque Sirigu est parti en Espagne.

Trophée de Champions, Vol Paris-Libreville, Aout 2013

La deuxième raison de choisir cette photo c’est que l’avion est un endroit particulier. Quand j’ai commencé, il y avait l’équipe, le staff technique et médical et moi. Aujourd’hui il y a les attachés de presse, des gens qui filment, petit à petit on a grossi. J’ai moins l’occasion d’être au contact du groupe. A l’arrivée, l’équipe est dans un bus et je suis avec un autre moyen de locomotion, mais dans l’avion je peux discuter avec eux, c’est encore un moment de partage. Même si sur cette photo ils dorment. Mais il faut savoir que les joueurs sont de très gros consommateurs de sommeil. Sur cette photo c’est la matinée. ils ont déjà fait leur nuit mais ils sont capables de se rendormir très vite et n’importe où. D’autant qu’ils sont jeunes. C’est assez impressionnant.

Culture Club – 30 ans de photographies au coeur du Paris Saint-Germain (Solar)
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