The Sound Of Silence

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Je suis affalé dans mon canapé. Il est 23 heures et des poussières.
Voilà. Nous y sommes. J’y suis. Il part. Officiel.

C‘est écrit en toutes lettres sur cet écran de merde que je fixe comme un détraqué. Au même instant, certains supporters parisiens, en apprenant que Javier Pastore a embarqué pour le passé, vont se contenter de faire la soustraction imposée par le FDP de FPF. Et qu’ensuite, ils souriront, ils souffleront peut-être, satisfaits… « 60 – 20 millions, reste plus que 40 à trouver et on est bon » pensent-ils, ces petits trous du cul pragmatiques qui gèrent leur passion comme on fait tourner une supérette.

Javier n’est plus… Là. Javier ne me sourira plus, dans l’écran, après une passe éternelle. Javier ne saluera plus sa famille depuis la pelouse du Parc. Javier jouera sur Bein2. Avec un autre maillot. Il m’imposera de nouveaux rendez-vous télévisuels. La Roma. Elle lui ira bien, je le crois.

l’Histoire est une lessiveuse cannibale

Je sais qu’aujourd’hui, l’Histoire est une lessiveuse cannibale, tout efface tout. Rien ne reste, rien ne dure, rien n’existe. Suivant !
Javier Pastore est pourtant notre plus beau fantôme depuis bien longtemps. Sušić vient de lui faire une place sur le banc des immortels. Les nôtres d’immortels, depuis toujours: géniaux et décevants, beaux et mélancoliques, magiques et inutiles, seuls et au cœur même de notre flamme.

Le football va mourir un été hivernal de 2022. Le mundial se jouera dans un pays qui n’en a jamais été un, avec 48 équipes, autant dire l’Ecole des Fans. Et une assistance vidéo devenue évidemment omnipotente. Cette politique démoniaque égalitariste… Le football sera officiellement devenu cette chose prévisible et divertissante. Morale et rentable. Cet énième loisir qui ne comble plus rien.

Un camarade qui rejoint l’horizon

Le football va crever et Javier est parti.
Ce n’est ni injuste, ni incroyable.
C’est un camarade qui rejoint l’horizon . Un songe qu’un vent noir emporte.
Javier était l’empereur de nos paradoxes.
Javier était des miens.

« Boys don’t cry » chantait Robert Smith. Certes. Mais certains soirs, les hommes peuvent s’accorder une petite larme. En solitaire. Cette petite larme, rare, qui tarde à couler et qui semble brûler la joue. Cicatrice à la fois furtive et tatouée.
Javier.


Jérôme Reijasse

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