Il y a des matchs qui restent, plus que d’autres
et on ne sait pas trop pourquoi.
Ce sont des madeleines de Proust auxquelles on s’attache comme un vieux 45 tours de Break Machine dont la pochette prend la poussière depuis des années en attendant la rédemption.
Sans remonter aussi loin, il y a ce match joué le 10 avril 2004 au Stade du Ray face à l’OGC Nice.
Cette saison le PSG est de retour aux affaires après des années de cache misère. Coach Vahid est aux commandes d’une équipe de revanchards prêts à crever ensemble sur le terrain.
Alonzo, Mendy, Dehu, Pierre-Fanfan, Fiorèse, Sorin, Ljuboja et bien-sur Pauleta pour sa première saison au club…
Paris joue le titre avec un esprit
de Bosniaque enragé
Sur le papier c’est pas si dégueu. Mais c’est moins sexy que les stars de l’AS Monaco et de l’Olympique Lyonnais qui caracolent au sommet du championnat. Mais Paris joue le titre avec un esprit de Bosniaque enragé. Paris veut se qualifier pour la Champions League, car ça fait trop longtemps que le club et ses supporters sont en manque et ont des spasmes en regardant l’équipe d’Aulas enfiler les titres et les belles prestations en C1.
Ce match, je n’y étais pas, je l’ai vécu par procuration. Je l’ai imaginé sans les images. Je l’ai sublimé en écoutant la radio sur les routes alsaciennes (ça c’est une autre histoire).
Victoire impérative donc, ce soir là, pour les parisiens si ils veulent recoller au peloton de tête.
Je me souviens que je ne le sentais pas ce match, (comme tous les matchs d’ailleurs). Et vite mes craintes se sont confirmées. Dès la 16ème minute on se prend un pion de Lilian Laslandes. Lilian Laslandes putain, et son physique peroxydé de livreur de fruits et légumes. Sur la quasi seule occasion du Gym…
J’enrage dans la bagnole, je peste. Ça pue encore plus quand à la 54ème minute Jérôme Alonzo ceinture à l’extérieur de la surface un inconnu portant le nom de Christophe Meslin qui part seul au but. Jérôme, ce héros, ce visionnaire, s’est dit qu’il valait mieux se prendre un rouge qu’un but. A ce moment là je l’ai admiré pour sa folie. Je l’imagine avec ses gros sourcils et sa tête de mec honnête s’excuser auprès de l’arbitre. Perdu pour perdu il sera de toute façon l’homme du match pour moi.
Entre temps, il y a eu les coups du sort en faveur de Paname. José Cobos, le capitaine niçois, ancien parisien, sort K.O. dès la 3ème minute suite à un choc avec l’un de ses coéquipiers. C’est au tour d’Olivier Echouafni de se blesser et d’être remplacé par la légende Sammy Traoré. Sans parler de Marco Simone, alors niçois, qui a refusé de cirer le banc ce soir-là.
Juanpi, le couteau suisse albiceleste
Bref on est quand même à 11 contre 10, chez une équipe qui mène, qui nous déteste comme à peu près tout le monde, et il ne reste que 10 minutes.
C’est sans compter sur l’incroyable rage de vaincre de cette légion parisienne qui, même si elle ne produit pas un jeu flamboyant, compte des bonhommes à chaque poste, surtout derrière.
A la 80ème minute Fabrice Fiorèse, tire un corner qui finit sur la tête du Capitaine Pierre-Fanfan qui nous fait une Thiago Silva du pauvre en lobant Gregorini. 1-1. Je jubile. Mais le kif n’est pas terminé. C’est encore les défenseurs qui montrent l’exemple à 3 minutes de la fin. Fred Dehu tire un coup franc que reprend l’incroyable Juan Pablo Sorin. Juanpi, le couteau suisse albiceleste, alors défenseur latéral gauche, a décidé de monter dans la surface pour placer une tête plongeante improbable. Victoire 2-1. Folie totale.
Je pense à mes potes niçois qui ont l’habitude de chambrer dur à chaque défaite parisienne.
Je me demande alors si Paris n’est pas en train de redevenir une grande équipe. Ça me fait la soirée. Entre une fameuse flammeküeche, la spécialité du coin, et de la bière locale, j’ai le coeur léger.
Finalement on finira la saison avec une magnifique 2ème place en championnat et une victoire en Coupe de France, une autre spécialité maison.