C’est dans son Home-Studio parisien que Lil’Mike nous reçoit.
En pleine production du prochain album des Birdy Nam Nam « Dance Or Die » (Sortie le 16 septembre), il revient sur ses souvenirs d’abonné en tribune Auteuil.
– – – – [ Interview ] – – – –
Virage : Tu as grandi où ?
Lil’Mike : Dans une cité à à Vigneux sur Seine dans l’Essonne
Virage : Ton premier match au parc ?
Lil’Mike : J’ai un doute en fait. Je ne sais pas si j’ai commencé à y aller avec la maison de quartier ou si c’était pour la demi-finale de Ligue des Champions PSG-Milan AC où j’étais juste derrière les cages en tribune Auteuil.
Virage : Quel match a servi pour toi de déclic définitif pour devenir supporter du PSG ou t’as tout simplement rendu fou amoureux de ce club ?

Lil’Mike : J’étais déjà piqué avant d’aller au stade. En bas de chez moi il y a des gars qui étaient pour Marseille, d’autres pour Paris. Une majorité était pour Marseille quand même. Mais le premier match qui m’a marqué c’est le PSG-Real (1993) que j’ai suivi à moitié en crypté sur Canal et à moitié à la radio. Je me souviens globalement de cette époque, celle de Weah, c’est ce qui m’a fait m’accrocher au club.
Virage : Quel joueur a marqué ta vie de supporter ?
LilMike : Ma vie de supporter ? J’ai été abonné plus tard et le meilleur joueur à ce moment là c’est Peguy Luyindula alors tu vois c’était difficile de s’attacher à un joueur, le plaisir était ailleurs, dans les tribunes. Mais le premier joueur que j’ai aimé c’était Eric Cantona, mais ça n’a rien à voir avec Paris en fait. Après à Paris celui qui m’a marqué c’est Weah. C’était incroyable mais trop court.
Virage : Combien de temps es-tu resté abonné au Parc ?
Lil’Mike : Je suis resté abonné 3 saisons, les 3 dernières avant le plan Leproux. Mais avant j’y allais beaucoup avec la maison de quartier car le conseil régional donnait des places.
Virage : Le plan Leproux, c’est ce qui a mis fin à ton abonnement ?
Lil’Mike : Vu que j’étais abonné en virage, c’est ce qui a amené la fin pour tout le monde.
Virage : Tu es resté en contact avec tes potes d’Auteuil, ou c’est un peu comme les copains de Lycée qu’on perd de vue ?
Lil’Mike : A la base j’y allais car des potes à moi y allaient aussi. A un moment j’ai lâché le foot et du coup je n’y suis plus allé. Mais c’est via ces mêmes potes que je suis retourné au Parc. Donc ça reste des potes car on l’était déjà avant.
Maintenant Thiago Silva va rester
le patron du vestiaire
Virage : Le départ de Zlatan ça t’inspire quoi ? Un mal pour un bien ?
Lil’Mike : Il faut que je te dise déjà qu’avant qu’il ne signe à Paris c’était un de mes joueurs préférés. Comme Canto. L’idée qu’il signe à Paris ça me rendait dingue. Les années qu’il a passé ici c’était juste la folie. Pour moi il a marqué l’histoire du club. Mais le fait qu’il s’en aille c’est effectivement un mal pour un bien. Tout tournait trop autour de lui. Il avait une emprise trop importante sur l’équipe. Maintenant Thiago Silva va rester le patron du vestiaire. Et j’espère que ça laissera plus de place à Pastore. Car selon moi c’est Zlatan qui a empêché de jouer Pastore alors qu’il mérite d’être le leader de l’équipe. Le schéma tactique n’était pas en sa faveur.
Virage : Puisqu’on parle tactique, qu’as-tu pensé du travail de Laurent Blanc depuis son arrivée ?
Lil’Mike : A vrai dire j’étais déçu qu’ils ne gardent pas Ancelotti, c’était une erreur incroyable. Après Laurent Blanc, déjà c’est un marseillais. Un marseillais dans le coeur et il retournera à ses amours de jeunesse après le PSG. Après avec l’équipe qu’il a eu à gérer, j’ai du mal à imaginer qu’ils gagnent moins de titres sans lui. Je n’ai pas l’impression que Laurent Blanc ait imprimé sa patte sur le jeu du PSG. Concrètement c’est Zlatan qui décidait de beaucoup de choses et c’est sans doute pour ça que Zlatan l’a remercié aussi chaleureusement lorsqu’il est parti. Au contraire ce que je dirais c’est qu’il n’a pas pris ses couilles, il n’a pas fait jouer suffisamment Marquinhos, et il nous a fait un 3-5-2 mémorable face à City, pour moi il ne restera que ça… (soupir)
Virage : Quel joueur actuel te fait le plus plaisir ?
Lil’Mike : J’adore Pastore, Di Maria, Verratti parce que je suis supporter de l’Italie en fait. Verratti c’est notre crack et j’ai l’impression qu’il pourrait faire toute sa carrière au PSG, en plus de sa sympathie naturelle et de son talent, j’ai donc un faible pour lui.
Virage : Et inversement un qui t’agace ?
Lil’Mike : (longue réflexion) Lucas… Il a du talent mais il manque de régularité. Après humainement, même Aurier j’ai pas envie de lui jeter une pierre de plus.
Virage : En France une équipe honnie ? A part Marseille bien sur ?
Lil’Mike : Après Marseille il y a Lyon car c’est une grande équipe du Championnat de France. Mais franchement, le championnat de France il n’y a plus de suspens, du coup ça n’a pas vraiment d’intérêt. Difficile de répondre à cette question…
Virage : Et en Europe ?
Lil’Mike : J’étais content qu’on tombe sur Madrid cette année. On aurait pu les taper mais bon… Trop d’erreurs.
Contre City, c’était infernal d’entendre les anglais gueuler si fort
Virage : Tu essayes de retourner au parc malgré ton planning avec les BNN ?

Lil’Mike : J’y suis retourné quand j’ai officié en tant que DJ au Parc pendant une saison. Mais ça a brisé quelque-chose. Car tu passes de l’autre côté du décor. Et c’est encore plus difficile d’y retourner quand tu vois l’ambiance. Ça fait plus de peine qu’autre chose. Contre City, c’était infernal d’entendre les anglais gueuler si fort. En même temps j’ai respecté car ces supporters sont réputés pour être assez bouillants en déplacement et ils ont répondu présent. Mais avec les supporters du parc de l’époque, des matchs à domicile comme celui là, on n’en perd pas un !
Virage : L’ambiance en tribune, j’imagine que pour un ancien des KOP ça doit te faire mal au coeur, tu préconiserais quoi pour solutionner en partie le problème ?
Lil’Mike : Le problème il est politique. Il est dans l’affrontement de deux groupes qui ne seront jamais d’accord. A vrai dire c’est mort, je suis assez pessimiste à ce sujet. Comme en Angleterre, les stades sont voués à s’éteindre. Les fumis, les tambours, c’est voué à disparaitre. Mais clairement ça manque de bordel dans les stades aujourd’hui (soupir).
Virage : Le nouveau maillot, un avis ?
Lil’Mike : J’aime bien en vrai. Mais je trouve que ça manque d’extravagance. Je ne suis pas de ces supporters qui veulent que rien ne change. C’est Paris, c’est une ville très inspirée par la mode, ça doit avoir une classe qui s’assume, il faudrait des maillots de oufs. Mais bon les ultras sont souvent un peu trop conservateurs en général.
Virage : Parlons musique, le Deejaying, est-ce que ça s’apparente en terme de répétition des enchainements à ce que peuvent travailler les footballeurs d’après toi ?
Lil’Mike : Le parallèle existe quand on prépare un nouveau concert. L’objectif est d’avoir des automatismes. Comme les joueurs qui au fil des entrainements savent où se placer par rapport aux autres.
Virage : Et Crazy B (membre fondateurs des BNN), c’est un peu votre Carlo Ancelotti ?
Lil’Mike : (Rires) ouais carrément !
Virage : Si tu devais choisir un joueur du PSG pour intégrer les BNN et remplacer DJ Pone qui est parti tu choisirais qui ?
Lil’Mike : (Penseur) Je ne prendrais pas Zlatan parce qu’on s’embrouillerait, c’est sûr ! Mais certainement Aurier ou Lucas, ils m’ont l’air bien festif.
Virage : Il y a 3 ans tu composais « PSG Anthem ». Un hymne non officiel électro. Est-ce que ça t’a ouvert des portes au PSG ? Notamment pour mixer avant l’entrée des joueurs au parc ?
Lil’Mike : Non pas spécialement. Ce truc je l’ai fait de façon informelle et je l’ai mis sur le net. En fait les gens du club cherchaient à s’attacher les services d’un DJ et les gens qui s’occupaient de moi en booking à l’époque étaient en relation direct avec le club. Du coup ça s’est fait naturellement vu mon attachement au club. Je l’ai fait au Parc pour le dernier match lors du titre en 2013. Puis après ça on m’a proposé de le refaire la saison suivante. J’ai accepté avec plaisir.
Etre là quand Beckham sort en pleurs, c’était au delà de tout
Virage : Quel a été ton ressenti lorsque tu as pris les platines sur la pelouse du parc ?

Lil’Mike : C’était autre chose que monter sur scène. J’avais pas l’impression d’être vraiment à ma place. J’estime en fait que c’est à la base le boulot des supporters de mettre l’ambiance. Et j’imaginais plus un truc en mode NBA, hyper Hip Hop, avec de l’attitude. Mais ça ne plaisait pas trop aux équipes du PSG. Ils considéraient que je jouais plus pour les gens de la corbeille. Alors que la plupart des gens qui sont dans le foot écoute du Rap. Les gens qui regardent le foot, ils ne sont pas trop fans de David Guetta ou de musique électronique. Donc naturellement je l’aurais fait comme ça d’autant que j’ai tendance à être un peu radical.
Virage : Mais tu as apprécié ce moment malgré tout ?
Lil’Mike : Ouais, c’était carrément au delà de ce que j’imaginais. J’étais comme un gosse. Je rentrais par l’entrée des joueurs, le simple fait d’être là, dans ces couloirs, c’était ouf. Voir le match du bord de la pelouse à 3 mètres des joueurs, être là quand Beckham sort en pleurs, c’était au delà de tout. C’est pour ça que retourner ensuite en latéral tout en haut, pas pouvoir de fumer de garette-ci…
Virage : Tu continues à porter des maillots du PSG quand tu mixes avec les BNN ou tu t’es calmé ?
Lil’Mike : (Amusé) J’essaye maintenant d’éviter toutes les provocations. Même si des fois ça me dépasse. J’essaye de me détacher de cette part de mon image car les gens n’ont pas forcément toujours le second degré pour capter qu’il n’y a aucune haine derrière tout ça. Même si je continue à « hoster » et à être un peu punk quand je prends le micro sur scène. En me moquant un peu du public… En fait c’est jamais fait avec mauvaise intention mais c’est parfois mal perçu. Ca m’a causé beaucoup de soucis…
Virage : Ca ne t’est jamais arrivé de te faire embrouiller à cause de ça ? Notamment le maillot sur scène.
Lil’Mike : Jamais, mais les autres membres du groupe m’ont déjà demandé de l’enlever une fois quand on jouait près de Marseille.
Virage : Lorsque tu mixes sur scène, tu peux faire le parallèle avec les joueurs sur le terrain, qui sont au centre de toutes les attentions ?
Lil’Mike : Le parallèle c’est qu’il faut être présent à l’instant T. Il faut se mettre dans le concert, au début il y a une certaine tension, les 5 premières minutes il faut bien les passer sinon le reste du concert peut mal se passer.
Virage : En tournée, tu en profites pour aller à des matchs quand tu te retrouves dans des villes de foot, ou pas le temps ?
Lil’Mike : Avec la technologie on peut regarder le match sur son téléphone ou sur son ordi. C’est ce que je fais car malheureusement on a rarement l’occasion d’aller voir des matchs. Souvent quand on est en Angleterre ou en Espagne, j’essaye de demander des places mais c’est souvent très compliqué.
Comme si on donnait le ballon d’or à Ben Arfa au lieu de le donner à Ronaldo
Virage : En 2007 sort le premier maxi Dancefloor des BNN « Trans Boulogne Express ».
Venant de la part d’un ancien d’Auteuil, ça sent quand même la provoc’ non ?
Lil’Mike : Nan ça n’a rien à voir, ça parle plus des travelos que des gars du Kop (rigolade)
Virage : En 2010, les BNN remportent le prix de la révélation électronique ou Dance de l’année, aux Victoires de la musique. Quand tu as eu le trophée, tu t’es senti au ballons d’or ?
Lil’Mike : Pas du tout, je l’ai très mal vécu. J’étais trop déglingué. Le présentateur (Nagui) n’avait pas été agréable, ça m’avait mis dans un très mauvais mood. Mauvais souvenir… En plus, la vérité, c’était comme si on donnait le ballon d’or à Ben Arfa au lieu de le donner à Ronaldo. A l’époque c’était David Guetta qui pétait tout dans le monde. On prend toujours les choses comme elles viennent surtout quand c’est agréable mais on avait un minimum de recul pour se dire que ce n’était pas la victoire de la musique la plus méritée, en tout cas pas sous cette forme. On méritait plus la victoire du Live.
Virage : Le nouvel album des BNN, c’est toi qui le produit, et c’est une première. T’as l’impression de passer titulaire au poste de numéro 10, tu as la pression ?
Lil’Mike : De Ouf… Carrément. C’est une grosse pression. En plus j’ai pas forcément une confiance en moi démesurée, donc j’appréhende un peu. Je donne le meilleur, je suis là tôt à l’entraînement, je repars le dernier, j’fais des heures sup’, j’travaille les coups francs ah ah…
Virage : Si le club te demandait de travailler sur un titre d’ouverture au parc, tu fonces ? Un remix de « Oh Ville Lumière » ?
Lil’Mike : « Oh ville lumière » c’était génial quand c’était chanté par les supporters, mais là ils ont refait le truc pour l’entrée des joueurs, mais pour être franc, la mélodie n’est pas la même, il y a des fausses notes, c’est invivable de l’entendre… J’y mettrais un truc de modernité, pas d’agressivité mais un truc qui ait du charisme et qui s’assume. Un truc à la Fenerbahçe, je ne sais pas tu as déjà vu l’entrée des joueurs là bas, il y a une tension incroyable et pas seulement dans les Kops, dans tout le stade ! Tout le monde chante !
Virage : Dernière question, tu penses qu’on a une chance de gagner l’Euro, même avec un hymne composé
par David Guetta ?
Lil’Mike : En fait j’espère qu’ils ne vont pas gagner l’Euro.. Je ne remets pas de la non sélection de Hatem Ben Arfa, j’ai envie de chialer carrément. Je trouve ça totalement injuste, c’est dégueulasse, dégueulasse vraiment… En vrai j’aimerais bien qu’ils fassent quelque chose même si tu l’as compris je suis plus supporter de l’Italie. Mais suis tellement déçu que je n’ai pas envie de les supporter…

Sortie le 16 septembre 2016