Akhenaton

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La rencontre est fixée dans un hôtel parisien proche de la Bastille qui compte trois étoiles de plus que le maillot marseillais. Akhenaton arrive, déjà rigolard. Il est là parce qu’il a accepté de parler de football et du PSG plus particulièrement.

Nouvelle imageMoins supporter que d’autres membres de IAM mais tout de même marseillais à 100% (et aussi grand amateur du Napoli, ses origines italiennes évidemment), AKH est surtout un véritable passionné de ballon rond, quand même capable de jeter des sorts les soirs où Paris joue son avenir en coupe d’Europe pour lui garantir la défaite et de faire une vidéo en survêtement de Chelsea après l’élimination en 2014 à Stamford Bridge, avec, en bande-son, la chanson “Happy”.
Lui qui avoue avoir reçu un maillot parisien dédicacé par Lavezzi et être pote avec Nicolas Douchez n’est pas prêt de s’abonner au Parc, qu’il n’a d’ailleurs jamais visité. L’entretien débute et Akhenaton tient à préciser en guise de préambule: “Je vais être très objectif, ne vous inquiétez pas.”
Le fantôme de Ravanelli plane au dessus de nos têtes…

– – – – [ Interview ] – – – –

Virage: Le titre de ton nouvel album solo, “Je Suis En Vie”, est-il une façon de signifier que l’ultra sudiste a retrouvé des couleurs avec l’arrivée de Bielsa ?

Akhenaton: Oui, c’est une sorte de métaphore pour le supporter marseillais qui porte fièrement son étoile sur le coeur et qui, lui, a vu des grandes choses dans son passé. Qui a gagné une coupe qui elle n’a pas été ensuite annulée. La Coupe des Coupes, elle a été supprimée juste après que Paris la remporte (rires).

Virage: Tu penses qu’un jour, un journaliste parviendra à raconter comment l’OM a pu acheter le grand Milan en 1993 ?

Akhenaton: Non, ce match-là, on ne l’a pas acheté. Pas celui-là… D’autres peut-être (rires). Et vous, votre match à Sochaux en 2008 pour ne pas descendre en Ligue 2, acheté, non ? Il était odieux ce match (rires). Et c’est Diané qui vous sauve ce soir-là. Diané que vous récompenserez en le transférant l’année d’après. Quelle bande d’ingrats (rires) !

Virage: On peut aussi te reparler du match historique PSG-Bordeaux, quand on offre le titre aux Girondins ?

Akhenaton: Ah ouais, il est bien douteux celui-là aussi…

Virage: Plus sérieusement, que pense Akhenaton du PSG nouvelle formule ?

Akhenaton: Qu’est ce que tu veux que je te dise ? Si tu veux t’inscrire dans une politique de football européenne, si tu veux pouvoir rivaliser avec les grands clubs, tu es obligé d’avoir une équipe compétitive. Mais je pense que le PSG a laissé passer sa chance en Ligue des Champions l’année dernière. Honnêtement! Cette année, aucune chance.

Je ne déteste pas Paris, seulement le PSG

Virage: Toi qui détestes Paris, tu…

Akhenaton: (Il coupe) Ah non ! Je ne déteste pas Paris, seulement le PSG (rires).

Virage: Tu es quand même moins radical que d’autres mecs d’IAM par exemple. Tu es le modéré du groupe…

Akhenaton: Pour moi, le foot, c’est d’abord un spectacle. Bien sûr, je chambre comme un salaud mes potes parisiens dès que je le peux mais ça reste de la rigolade. J’aime le foot et je sais reconnaître une bonne équipe et des bons joueurs. Je sais que quand Pastore est bon, vous êtes bons et quand il est nul, vous êtes nuls…

Pastore, montez lui une statue !

Virage: Pastore, si tu aimes le foot, tu es obligé de l’aimer même quand il foire ses matchs, on est d’accord ?

Akhenaton: Moi, supporter marseillais, je dis que Pastore est bon, très bon même alors que vos supporters fatigués passent leur temps à vouloir qu’on le transfère. Je le dis officiellement: « Donnez nous Pastore! Nous, on le veut bien ! Cavani aussi, donnez nous le ! »

Pastore, je le regardais déjà à Palerme. C’est un mec fragile dans sa tête. Mais capable de créer, d’enflammer en un seul geste. Un joueur, oui, un peu à l’ancienne. Montez lui une statue !

Virage: Si tu devais choisir trois joueurs du PSG ?

Akhenaton: Pastore. Je prendrais aussi Lavezzi. Et Verratti. C’est un monstre au milieu, un monstre ! Et j’achèterai Lorenzo Insigne pour le faire jouer avec son copain d’enfance. Et on ferait une équipe italienne (rires). Pourquoi pas Cavani mais je préfère Lavezzi en tant que supporter de Naples. Tu peux vérifier mais à Naples, Lavezzi est une sorte de petit Maradona alors que Cavani, lui, est en ombres et lumières.

Virage: Revenons à ton album. Tu as quand même une chanson sur Zlatan, “Vrai Missile”. Qu’est ce qui t’a pris d’écrire sur notre géant suédois ?

Akhenaton: N’importe quoi (rires)…“On va te zlatanner”, ces expressions sont dignes des encouragements du stade de Colombes en 1946 (rires). 1: Il est vraiment phénoménal. 2: On est les champions. 3: Et 1 et 2 et 3 zéro! 4: On va te zlatanner. Ah les Footix…

Virage: Des Footix, il y en a partout…

Akhenaton: Bien sûr mais quand même plus chez vous (rires). Non mais c’est vrai qu’au Parc, malheureusement, a débarqué toute une population qui ne s’intéressait pas au football et que l’argent et les stars ont attirée. Zlatan, c’est un joueur hors-normes, exceptionnel. On a la chance de le voir évoluer en Ligue 1, soyons contents. Je souhaite juste que des équipes parviennent à rivaliser avec Paris, que notre championnat ne se limite pas à une seule équipe et 19 punching ball.

Virage: Tu as aussi une chanson intitulée “À Part les €”. Appartiens-tu à cette catégorie de Marseillais qui pointent du doigt le fric du Qatar en oubliant qu’une milliardaire est à la tête de leur propre club ?

Akhenaton: Non ! Tu sais pourquoi ? Parce que le jour où quelqu’un va venir racheter l’OM avec encore plus de budget que Paris, tous ces mecs vont se sentir un peu couillons… Et puis, si tu commences à secouer les comptes de tous les propriétaires des très gros clubs en Europe, tu vas tomber soit sur de la mafia, soit sur du Prince blindé, soit sur des extorsions. Qu’est ce que tu veux faire ? Le football génère de l’argent et là où il y a beaucoup d’argent, il y a de la violence, de la saleté… Bienvenue dans le football moderne ! Mais ce n’est de toute façon pas une question de fric mais d’état d’esprit…

Rien à foutre des clubs français
en Ligue des Champions

Virage: Tu supportes le PSG les soirs européens ?

Akhenaton: Rien à foutre des clubs français en Ligue des Champions. Rien à foutre (rires) ! Je ne veux pas qu’un autre club hexagonal gagne la Ligue des Champions, point barre (rires). Il faut qu’il n’y ait que nous. Je suis un vrai supporter et je ne suis pas un menteur ! Maintenant, la vérité, quand Paris a joué remarquablement bien contre Barcelone, j’ai envoyé des textos pour féliciter mes potes parisiens. Je ne suis pas un négationniste, je suis un malocchioiste (malocchio = mauvais oeil en italien, ndr). Je jette le mauvais oeil mais quand ça joue bien, je l’admets (rires). Mais le supporter marseillais ressent que Paris peut le faire aujourd’hui. Peut gagner la LDC. C’est pour ça qu’il prie pour que le club soit racheté, pour pouvoir être compétitif en Europe et empêcher Paris de le faire…

Virage: Et mercredi prochain, tu seras pour qui (l’entretien se déroule quelques jours avant le match de poule retour au Nou Camp) ?

Akhenaton: Quelle question ! Barcelone! Bien sûr. Je ne suis pas un hypocrite. Je suis partial, de mauvaise foi mais jamais haineux. Chez moi, ça a toujours été de la vanne. Et mes vannes s’arrêtent là où les matchs s’arrêtent. L’OM n’est pas le prolongement de ma vie. Deux heures après une défaite, même importante, je suis déjà passé à autre chose. Il y a la santé des miens, mon travail, toutes ces choses du quotidien qui comptent beaucoup plus. Mon ego n’a pas besoin d’être prolongé par les victoires du club de ma ville. Je n’ai jamais d’écharpe, jamais de drapeau…

Virage: Tu es un indépendant en fait (rires) ?

Akhenaton: Tu es trop con (rires)… Mais par exemple, tu vois, j’ai été très fier de faire un maillot spécial pour l’OM. Bon, on peut en parler, mon père était malheureusement sur le point de partir et le jour où il a appris que j’allais créer un maillot pour l’OM, il était heureux, tu ne peux pas savoir. C’est moi qui ait fait le maillot réversible de l’OM, le Third, avec Pablo Reinoson. Moi, je croyais que j’allais faire juste un t-shirt, je me prenais pour Dior (rires). Et je me suis frotté aux nombreuses difficultés inhérentes à la conception d’un nouveau maillot. On a galéré ! Pour en revenir à mon père, il était limite plus fier que je fasse un maillot pour l’OM que de mes albums. Il est malheureusement parti juste après…

Virage: Tu as une vanne ultime sur Paris ? Une vanne préférée ?

Akhenaton: J’en ai plein. J’en ai trop. La numéro 1 c’est vraiment cette histoire de Coupe des Coupes. Quand vous avez gagné contre des matelassiers, le Rapid de Vienne. Et que l’année d’après, ils se sont réunis pour supprimer cette coupe. À l’époque, j’ai pleuré de rire. Tu es carrément obligé d’enlever la coupe de ton armoire (rires). Il y a aussi le clip Pet Shop Boys avec tous les joueurs du PSG, ça, c’est juste impossible. Il y a Mickaël Madar (rires), qui a blessé plusieurs personnes dans les tribunes avec ses tirs foireux. Il y a aussi ces kleenex PSG que j’ai vus dans le bureau de Benjamin Chulvanij (directeur du label Dej Jam France). J’ai collé dessus un Post-It disant : “Utiles contre Chelsea”… Non, il y en a trop, des vannes, il faudrait une semaine. Non… En revanche, il y a un truc que je n’ai pas aimé et ça risque de te surprendre : Vous aviez un joueur qui été une des idoles de mon adolescence, c’était George Weah. Un vrai grand. Et quand Weah a voulu organiser son jubilé, il a voulu le faire à Paris. Mais il l’a finalement monté à Marseille parce que Paris a refusé. Ça, c’est la honte!

À l’époque, c’était Toulon
qui jouait le rôle de Paris

Virage: Tu es de l’ancienne école et tu n’ignores donc pas que le classico est une invention marketing de Denisot, Tapie et de quelques autres. Avant tout ça, comment voyais-tu le PSG ?

Akhenaton: Ce n’était pas un blocage. À l’époque, c’était Toulon qui jouait le rôle de Paris. Les matchs contre Toulon, c’était la guerre ! Avec Nice et Bastia un peu aussi mais Toulon, c’était la guerre ! C’est avec Canal+ que j’ai commencé à détester le PSG.

Virage: Notre rivalité est donc une pure fiction, elle n’existe pas ?

Akhenaton: Non. Et le truc encore plus dingue, c’est que parfois, c’est allé beaucoup trop loin. Mais ça a aussi pimenté le championnat. Et puis, tu as quand même le truc capitale et province, nord et sud, si on veut…

Virage: Tu as un souvenir du PSG qui t’a plus marqué qu’un autre ?

Akhenaton: Au début des années 90, mon père habitait dans un bâtiment et là, il avait un voisin de palier, Gilbert, qui était parisien. Et un vrai fan du PSG. Il était descendu à Marseille pour le travail. Et je me rappelle qu’il me collait des trucs sur la porte pour me charrier. J’ai grandi avec ça. Je rentrais parfois le soir à deux heures du matin et je trouvais ses messages collés sur la porte. Plus tard, Boskovic m’a offert son maillot après avoir marqué en coupe de France et je suis allé le déposer sur la tombe de Gilbert. C’était un vrai fou du PSG, il me faisait des laïus pendant des heures. J’avais beau lui dire que j’en avais rien à foutre de son club, il continuait. C’était un vrai bon mec, adorable.

Virage: Dans le Parisien l’autre jour, un article racontait que de plus en plus de Marseillais portaient des maillots PSG. Ça, avant, c’était impossible ?

Akhenaton: Ca arrive. De plus en plus. Mon pote d’enfance Kamel, je l’ai toujours vu en survêtement PSG. On l’a chambré, bien sûr, mais c’est tout.

Virage: Tu as une superstition en tant que supporter ?

Akhenaton: Non, pas du tout. Je ne suis pas du genre supersitieux. Je l’ai été énormément plus jeune mais je ne le suis plus. Tu souffres quand tu es superstitieux. Juste, sur les corners, je fais ça. Malocchio, malocchio (rires) ! Et quand Zlatan tire un coup franc, j’imagine qu’il se casse le pied. Comme ça, il rate le coup franc et est indisponible pendant au moins huit mois (rires).

Virage: Dernière question. Tu n’es jamais allé au Parc, vraiment ?

Akhenaton: Non, c’est interdit ! Et puis, j’ai l’habitude de rentrer dans de vrai stade, avec des vraies ambiances. Je t’avais prévenu que j’allais être objectif (rires).

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