Interview

Akhenaton

La rencontre est fixée dans un hôtel parisien proche de la Bastille qui compte trois étoiles de plus que le maillot marseillais. Akhenaton arrive, déjà rigolard. Il est là parce qu’il a accepté de parler de football et du PSG plus particulièrement.

Nouvelle imageMoins supporter que d’autres membres de IAM mais tout de même marseillais à 100% (et aussi grand amateur du Napoli, ses origines italiennes évidemment), AKH est surtout un véritable passionné de ballon rond, quand même capable de jeter des sorts les soirs où Paris joue son avenir en coupe d’Europe pour lui garantir la défaite et de faire une vidéo en survêtement de Chelsea après l’élimination en 2014 à Stamford Bridge, avec, en bande-son, la chanson “Happy”.
Lui qui avoue avoir reçu un maillot parisien dédicacé par Lavezzi et être pote avec Nicolas Douchez n’est pas prêt de s’abonner au Parc, qu’il n’a d’ailleurs jamais visité. L’entretien débute et Akhenaton tient à préciser en guise de préambule: “Je vais être très objectif, ne vous inquiétez pas.”
Le fantôme de Ravanelli plane au dessus de nos têtes…

– – – – [ Interview ] – – – –

Virage: Le titre de ton nouvel album solo, “Je Suis En Vie”, est-il une façon de signifier que l’ultra sudiste a retrouvé des couleurs avec l’arrivée de Bielsa ?

Akhenaton: Oui, c’est une sorte de métaphore pour le supporter marseillais qui porte fièrement son étoile sur le coeur et qui, lui, a vu des grandes choses dans son passé. Qui a gagné une coupe qui elle n’a pas été ensuite annulée. La Coupe des Coupes, elle a été supprimée juste après que Paris la remporte (rires).

Virage: Tu penses qu’un jour, un journaliste parviendra à raconter comment l’OM a pu acheter le grand Milan en 1993 ?

Akhenaton: Non, ce match-là, on ne l’a pas acheté. Pas celui-là… D’autres peut-être (rires). Et vous, votre match à Sochaux en 2008 pour ne pas descendre en Ligue 2, acheté, non ? Il était odieux ce match (rires). Et c’est Diané qui vous sauve ce soir-là. Diané que vous récompenserez en le transférant l’année d’après. Quelle bande d’ingrats (rires) !

Virage: On peut aussi te reparler du match historique PSG-Bordeaux, quand on offre le titre aux Girondins ?

Akhenaton: Ah ouais, il est bien douteux celui-là aussi…

Virage: Plus sérieusement, que pense Akhenaton du PSG nouvelle formule ?

Akhenaton: Qu’est ce que tu veux que je te dise ? Si tu veux t’inscrire dans une politique de football européenne, si tu veux pouvoir rivaliser avec les grands clubs, tu es obligé d’avoir une équipe compétitive. Mais je pense que le PSG a laissé passer sa chance en Ligue des Champions l’année dernière. Honnêtement! Cette année, aucune chance.

Je ne déteste pas Paris, seulement le PSG

Virage: Toi qui détestes Paris, tu…

Akhenaton: (Il coupe) Ah non ! Je ne déteste pas Paris, seulement le PSG (rires).

Virage: Tu es quand même moins radical que d’autres mecs d’IAM par exemple. Tu es le modéré du groupe…

Akhenaton: Pour moi, le foot, c’est d’abord un spectacle. Bien sûr, je chambre comme un salaud mes potes parisiens dès que je le peux mais ça reste de la rigolade. J’aime le foot et je sais reconnaître une bonne équipe et des bons joueurs. Je sais que quand Pastore est bon, vous êtes bons et quand il est nul, vous êtes nuls…

Pastore, montez lui une statue !

Virage: Pastore, si tu aimes le foot, tu es obligé de l’aimer même quand il foire ses matchs, on est d’accord ?

Akhenaton: Moi, supporter marseillais, je dis que Pastore est bon, très bon même alors que vos supporters fatigués passent leur temps à vouloir qu’on le transfère. Je le dis officiellement: « Donnez nous Pastore! Nous, on le veut bien ! Cavani aussi, donnez nous le ! »

Pastore, je le regardais déjà à Palerme. C’est un mec fragile dans sa tête. Mais capable de créer, d’enflammer en un seul geste. Un joueur, oui, un peu à l’ancienne. Montez lui une statue !

Virage: Si tu devais choisir trois joueurs du PSG ?

Akhenaton: Pastore. Je prendrais aussi Lavezzi. Et Verratti. C’est un monstre au milieu, un monstre ! Et j’achèterai Lorenzo Insigne pour le faire jouer avec son copain d’enfance. Et on ferait une équipe italienne (rires). Pourquoi pas Cavani mais je préfère Lavezzi en tant que supporter de Naples. Tu peux vérifier mais à Naples, Lavezzi est une sorte de petit Maradona alors que Cavani, lui, est en ombres et lumières.

Virage: Revenons à ton album. Tu as quand même une chanson sur Zlatan, “Vrai Missile”. Qu’est ce qui t’a pris d’écrire sur notre géant suédois ?

Akhenaton: N’importe quoi (rires)…“On va te zlatanner”, ces expressions sont dignes des encouragements du stade de Colombes en 1946 (rires). 1: Il est vraiment phénoménal. 2: On est les champions. 3: Et 1 et 2 et 3 zéro! 4: On va te zlatanner. Ah les Footix…

Virage: Des Footix, il y en a partout…

Akhenaton: Bien sûr mais quand même plus chez vous (rires). Non mais c’est vrai qu’au Parc, malheureusement, a débarqué toute une population qui ne s’intéressait pas au football et que l’argent et les stars ont attirée. Zlatan, c’est un joueur hors-normes, exceptionnel. On a la chance de le voir évoluer en Ligue 1, soyons contents. Je souhaite juste que des équipes parviennent à rivaliser avec Paris, que notre championnat ne se limite pas à une seule équipe et 19 punching ball.

Virage: Tu as aussi une chanson intitulée “À Part les €”. Appartiens-tu à cette catégorie de Marseillais qui pointent du doigt le fric du Qatar en oubliant qu’une milliardaire est à la tête de leur propre club ?

Akhenaton: Non ! Tu sais pourquoi ? Parce que le jour où quelqu’un va venir racheter l’OM avec encore plus de budget que Paris, tous ces mecs vont se sentir un peu couillons… Et puis, si tu commences à secouer les comptes de tous les propriétaires des très gros clubs en Europe, tu vas tomber soit sur de la mafia, soit sur du Prince blindé, soit sur des extorsions. Qu’est ce que tu veux faire ? Le football génère de l’argent et là où il y a beaucoup d’argent, il y a de la violence, de la saleté… Bienvenue dans le football moderne ! Mais ce n’est de toute façon pas une question de fric mais d’état d’esprit…

Rien à foutre des clubs français
en Ligue des Champions

Virage: Tu supportes le PSG les soirs européens ?

Akhenaton: Rien à foutre des clubs français en Ligue des Champions. Rien à foutre (rires) ! Je ne veux pas qu’un autre club hexagonal gagne la Ligue des Champions, point barre (rires). Il faut qu’il n’y ait que nous. Je suis un vrai supporter et je ne suis pas un menteur ! Maintenant, la vérité, quand Paris a joué remarquablement bien contre Barcelone, j’ai envoyé des textos pour féliciter mes potes parisiens. Je ne suis pas un négationniste, je suis un malocchioiste (malocchio = mauvais oeil en italien, ndr). Je jette le mauvais oeil mais quand ça joue bien, je l’admets (rires). Mais le supporter marseillais ressent que Paris peut le faire aujourd’hui. Peut gagner la LDC. C’est pour ça qu’il prie pour que le club soit racheté, pour pouvoir être compétitif en Europe et empêcher Paris de le faire…

Virage: Et mercredi prochain, tu seras pour qui (l’entretien se déroule quelques jours avant le match de poule retour au Nou Camp) ?

Akhenaton: Quelle question ! Barcelone! Bien sûr. Je ne suis pas un hypocrite. Je suis partial, de mauvaise foi mais jamais haineux. Chez moi, ça a toujours été de la vanne. Et mes vannes s’arrêtent là où les matchs s’arrêtent. L’OM n’est pas le prolongement de ma vie. Deux heures après une défaite, même importante, je suis déjà passé à autre chose. Il y a la santé des miens, mon travail, toutes ces choses du quotidien qui comptent beaucoup plus. Mon ego n’a pas besoin d’être prolongé par les victoires du club de ma ville. Je n’ai jamais d’écharpe, jamais de drapeau…

Virage: Tu es un indépendant en fait (rires) ?

Akhenaton: Tu es trop con (rires)… Mais par exemple, tu vois, j’ai été très fier de faire un maillot spécial pour l’OM. Bon, on peut en parler, mon père était malheureusement sur le point de partir et le jour où il a appris que j’allais créer un maillot pour l’OM, il était heureux, tu ne peux pas savoir. C’est moi qui ait fait le maillot réversible de l’OM, le Third, avec Pablo Reinoson. Moi, je croyais que j’allais faire juste un t-shirt, je me prenais pour Dior (rires). Et je me suis frotté aux nombreuses difficultés inhérentes à la conception d’un nouveau maillot. On a galéré ! Pour en revenir à mon père, il était limite plus fier que je fasse un maillot pour l’OM que de mes albums. Il est malheureusement parti juste après…

Virage: Tu as une vanne ultime sur Paris ? Une vanne préférée ?

Akhenaton: J’en ai plein. J’en ai trop. La numéro 1 c’est vraiment cette histoire de Coupe des Coupes. Quand vous avez gagné contre des matelassiers, le Rapid de Vienne. Et que l’année d’après, ils se sont réunis pour supprimer cette coupe. À l’époque, j’ai pleuré de rire. Tu es carrément obligé d’enlever la coupe de ton armoire (rires). Il y a aussi le clip Pet Shop Boys avec tous les joueurs du PSG, ça, c’est juste impossible. Il y a Mickaël Madar (rires), qui a blessé plusieurs personnes dans les tribunes avec ses tirs foireux. Il y a aussi ces kleenex PSG que j’ai vus dans le bureau de Benjamin Chulvanij (directeur du label Dej Jam France). J’ai collé dessus un Post-It disant : “Utiles contre Chelsea”… Non, il y en a trop, des vannes, il faudrait une semaine. Non… En revanche, il y a un truc que je n’ai pas aimé et ça risque de te surprendre : Vous aviez un joueur qui été une des idoles de mon adolescence, c’était George Weah. Un vrai grand. Et quand Weah a voulu organiser son jubilé, il a voulu le faire à Paris. Mais il l’a finalement monté à Marseille parce que Paris a refusé. Ça, c’est la honte!

À l’époque, c’était Toulon
qui jouait le rôle de Paris

Virage: Tu es de l’ancienne école et tu n’ignores donc pas que le classico est une invention marketing de Denisot, Tapie et de quelques autres. Avant tout ça, comment voyais-tu le PSG ?

Akhenaton: Ce n’était pas un blocage. À l’époque, c’était Toulon qui jouait le rôle de Paris. Les matchs contre Toulon, c’était la guerre ! Avec Nice et Bastia un peu aussi mais Toulon, c’était la guerre ! C’est avec Canal+ que j’ai commencé à détester le PSG.

Virage: Notre rivalité est donc une pure fiction, elle n’existe pas ?

Akhenaton: Non. Et le truc encore plus dingue, c’est que parfois, c’est allé beaucoup trop loin. Mais ça a aussi pimenté le championnat. Et puis, tu as quand même le truc capitale et province, nord et sud, si on veut…

Virage: Tu as un souvenir du PSG qui t’a plus marqué qu’un autre ?

Akhenaton: Au début des années 90, mon père habitait dans un bâtiment et là, il avait un voisin de palier, Gilbert, qui était parisien. Et un vrai fan du PSG. Il était descendu à Marseille pour le travail. Et je me rappelle qu’il me collait des trucs sur la porte pour me charrier. J’ai grandi avec ça. Je rentrais parfois le soir à deux heures du matin et je trouvais ses messages collés sur la porte. Plus tard, Boskovic m’a offert son maillot après avoir marqué en coupe de France et je suis allé le déposer sur la tombe de Gilbert. C’était un vrai fou du PSG, il me faisait des laïus pendant des heures. J’avais beau lui dire que j’en avais rien à foutre de son club, il continuait. C’était un vrai bon mec, adorable.

Virage: Dans le Parisien l’autre jour, un article racontait que de plus en plus de Marseillais portaient des maillots PSG. Ça, avant, c’était impossible ?

Akhenaton: Ca arrive. De plus en plus. Mon pote d’enfance Kamel, je l’ai toujours vu en survêtement PSG. On l’a chambré, bien sûr, mais c’est tout.

Virage: Tu as une superstition en tant que supporter ?

Akhenaton: Non, pas du tout. Je ne suis pas du genre supersitieux. Je l’ai été énormément plus jeune mais je ne le suis plus. Tu souffres quand tu es superstitieux. Juste, sur les corners, je fais ça. Malocchio, malocchio (rires) ! Et quand Zlatan tire un coup franc, j’imagine qu’il se casse le pied. Comme ça, il rate le coup franc et est indisponible pendant au moins huit mois (rires).

Virage: Dernière question. Tu n’es jamais allé au Parc, vraiment ?

Akhenaton: Non, c’est interdit ! Et puis, j’ai l’habitude de rentrer dans de vrai stade, avec des vraies ambiances. Je t’avais prévenu que j’allais être objectif (rires).

Le supporter insolite

L’interview d’un supporter improbable.

Cyril Colonna – Être corse de pure souche, et supporter le PSG, oui c’est possible.

VIRAGE a interviewé Cyril Colonna, patron volubile et enflammé de la fameuse Pizzeria bien nommée CHEZ COLONNA (34 rue Remercier dans le 17ème à Paris), un supporter parisien qui sort du maquis.

Il est 11H45, on prend un café serré, offert par la maison, on peut commencer.

NDLR : l’interview sera coupée à plusieurs reprises par l’apparition d’un vieil insulaire, qui vient livrer des bouteilles d’on ne sait quoi, et pour lequel on nous demande gentiment de couper le magnéto pour ne pas enregistrer la conversation ou ses propos. Ississi Corsica.

– – – – [ Interview ] – – – –

Virage: Tu es supporter du PSG depuis quand ?

(c) Vanessa Vercel
(c) Vanessa Vercel

Colonna: Depuis 1982, depuis La finale ASSE/PSG. Et je peux pas encadrer Platini, depuis tout petit. Pourquoi ? Je l’aime pas. Je n’aime pas le joueur, je n’aime pas ce qu’il dégageait. Aucun rapport avec sa brioche qu’il a toujours eu même quand il jouait. En fait mon père était fou de Platini et comme j’ai toujours été en opposition, même si j’adore viscéralement mon père… Et c’est pour ça que je suis supporter du PSG et pas de l’OM. Donc 82, LA finale, Rocheteau que j’adore et puis la scène mythique de Borelli qui embrasse la pelouse…

Virage: Pourquoi avoir choisi ce club et pas un club corse.

Colonna: Tout mon village (Sartene dans le sud de l’île de beauté) est pro OM. 3000 habitants, un village très dur, avec quelques supporters de Bastia mais en grande majorité pro OM. En réaction je suis devenu supporter du PSG, en arborant fièrement mes couleurs, j’avais le drapeau du PSG, devant le fronton de la librairie de mes parents…

A part Marius Trésor en corse du Sud, il n’y a jamais eu de football là bas.

Virage: Et tu n’as jamais eu d’emmerdes ?

Colonna: Oh si, des sacrées même… des trucs dans la cour d’école, bousculé, des trucs très cons, mais ça va je faisais du judo, je n’avais pas peur…

Virage: Sinon tu es plutôt Sporting Club de Bastia ou AC Ajaccio, ou aucun des deux ?

Colonna: (ferme) Bastia. A part Marius Trésor en corse du Sud, il n’y a jamais eu de football là bas. Non, Bastia, l’histoire de Bastia et on le voit encore aujourd’hui. 

D’ailleurs soyons clair, je suis un vrai supporter du PSG mais pour la finale de la coupe de la ligue j’étais derrière Bastia. Pour une seule raison : Il n’y a que le vainqueur de la compétition qui va en coupe d’Europe. Donc je préfèrais que ce soit Bastia et pas le 4ème ou 5ème du championnat… Ca me faisait chier de revoir Rennes ou une équipe à la con, à Bastia il y a une ambiance et je pense qu’en Coupe d’Europe c’est une équipe qui peut marcher. Avec les joueurs qu’ils ont, des mercenaires, ils peuvent la jouer… Certainement pas la gagner mais la jouer et faire des rencontres de dingues contre le Feyenord ou contre une équipe italienne, ça aurait été bien cool.

Virage: On dit que les Corses du Sud sont surtout des supporters de l’OM, c’est vrai ?

Colonna: Oui beaucoup. En corse on est un peu rouleur de mécanique et on n’a jamais eu une équipe pour aller plus loin, à part un peu Bastia quand elle a brillé. Donc on s’est tous choisi une équipe ailleurs. Souvent à l’étranger. Il y a eu les pros Milan, les pros AS Rome, les pros Real… Et en France c’était naturellement les pros OM. C’est sympa de supporter une équipe qui gagne (rires). Et comme il y a beaucoup de corses à Marseille, donc l’OM.

Virage: Et donc toi l’OM ? Pourquoi non ?

Colonna: Je leur chie dessus. Pas Marseille, j’adore cette ville, mais le club. J’adore le conflit, j’adore nourrir le conflit, ça m’a toujours excité. Et puis j’aime pas tout ce qui tourne autour de l’OM, ces critiques viscérales de Paris. Quand l’OM gagne ça ne m’excite pas mais ça ne me dérange pas. Mais quand Paris gagne, ça les rend fou et je n’aime pas ça. Et puis j’aurais aimé voir certains joueurs jouer ailleurs qu’à Marseille, Waddle, Abedi Pele et ses dribbles de fou… Ca me peinait de les voir jouer à Marseille. Comme certains traitres parisiens. Enfin il fallait bien qu’ils continuent leur carrière. Et il n’y en a que 11 qui peuvent jouer au Parc.

Virage: Tu te fais encore chambrer quand tu rentres en Corse ?

Colonna: Non plus maintenant. Mais après moi il y a eu pas mal de supporters du PSG à Sartène. Et aujourd’hui il y en a toujours, qui portent le maillot du PSG lors des tournois de sixte…

Virage: Ton joueur préféré au PSG de tous les temps ?

Colonna: Weah (sans hésiter). Il y avait un truc chez lui. j’ai adoré plein de joueurs, Rai, Ginola, Susic… Mais Weah… Et c’est pour ça que j’aime Zlatan par dessus tout aujourd’hui, car je trouvais qu’à lui tout seul, Weah, il faisait vraiment le truc. Verratti c’est un artiste, Pastore c’est un magicien, j’adore David Luiz même si il n’a pas le rendement pour l’instant, je suis pas un grand fan de Thiago Silva…

Virage: Tu ne crois pas que Weah nous a lâché quand il a annoncé sa signature au Milan ?

Colonna: Mais Zlatan aussi va nous lâcher. Il y a toujours un moment où les joueurs lâchent. Zlatan il commence à en avoir marre qu’on lui chie dans les baskets.

Il est chasseur, il a du sang corse,
C’est Zlatani !

Virage: …Et aujourd’hui, ton joueur préféré ?

Colonna: Zlatan parce qu’il manquait une Rock Star à Paris. L’année dernière je lui aurais donné le ballon d’or, pas parce qu’il le méritait mais pour l’engouement qu’il a apporté aux jeunes, c’est énorme… C’est ce genre de joueurs qui doivent le remporter. Même si quand je vois Verratti tricoter dans la défense, dans sa propre surface au milieu de 4 joueurs et ressortir et relancer, putain je me dis « il est énorme ». Mais Zlatan, il y a les gestes, j’aime bien ce côté titan.

Virage: Il aurait pu être corse ?

Colonna: il l’est à mon avis, il est chasseur, il a du sang corse… C’est Zlatani (avec l’accent)

Virage: Ton entraineur préféré ?

Colonna: je suis un bon fan d’Ancelotti. Je regrette vraiment son départ. Ancelotti c’est le foot quoi. On avait l’impression qu’il ne se passait rien quand il y avait Carlo et à la fois il avait tout mis en place. J’étais pas très heureux de l’arrivée de Laurent Blanc et sur ses 8 premiers mois j’ai été émerveillé, je me suis dit que je m’étais trompé comme beaucoup d’autres, il battait tous les records, mais en fait on avait l’héritage Ancelotti, et maintenant on voit ce que ça donne. Sur une première année il est capable de chambouler les choses comme il l’avait fait avec Bordeaux et après il n’y a plus personne…

Virage: Qu’est ce que ça veut dire pour toi être supporter du PSG aujourd’hui ?

Colonna: C’est dur, aujourd’hui supporter le PSG c’est très dur. J’en pleure à chaque match. La souffrance c’est un truc qui est lié à Paris et au PSG. La souffrance on l’a eu depuis 1982 au Parc… Et on l’a encore aujourd’hui… On a une équipe pour gagner mais à chaque fois il y a truc de mal-être, de je m-en-foutisme qui fait qu’on est là où on ne devrait pas être. Et puis au Parc il n’y a pas d’ambiance, ça ne chante pas c’est effrayant, vu le coût de l’abonnement, l’année prochaine je me pose la question… Certes on est devenu exigeant mais on nous a donné l’équipe pour, et on a le stade qui pour moi est un des plus beaux de France et on a eu une ambiance qui était une des plus belles de France et quand je vois qu’à Bastia ils étaient 3000 à Monaco pour la demi finale, putain si il n’y a pas de ferveur là, il n’y en a nulle part.

Virage: Est-ce que ce n’est pas le prix à payer pour avoir une grande équipe ?

Colonna: Je ne pense pas. On peut avoir les deux. Tu vois j’ai un fils de 8 ans, ça me fait kiffer de l’emmener au Parc. Demain je ne pourrai pas l’emmener à cause de l’ambiance qu’il y avait il y a 10 ans, ça ne ferait pas de peine de ne pas l’emmener. 

Aujourd’hui je viens en moto au match, je peux presque la garer dans le Parc, demain ils vont nous faire un skybar sur le toit du parc, OK ça va, on n’est pas à Dubai, à Courchevel ou à St Tropez. C’est un club de foot merde. Ca doit être un peu plus roots le foot. J’aurais rêvé d’être turc ou grec pour voir la ferveur dans ces pays.

Virage: Parlons cuisine, si tu devais donner la recette d’une bonne Pizza PSG, tu y mettrais quoi ?

Colonna: (rires) J’y réfléchis sérieusement. Elle serait un peu piquante, il y aurait des notes sud-américaines, plus à base de viande que de fromage… La pizza Pastore Gaucho !

Virage: As-tu déjà invité des joueurs du club à venir manger dans ton restaurant ?

Colonna: Tous, mais aucun n’est venu.

Virage: Quel joueur du PSG ferait un bon commis de cuisine ou un bon pizzaiolo ?

Colonna: Thiago Silva (rires). Je m’en débarrasserais bien ! Il est appliqué comme garçon ceci dit. Très attentionné, son attitude avec le petit supporter à Lyon qui avait froid, je l’aurais embrassé ce mec mais c’est ça qui m’énerve avec Thiago Silva. C’est le monstre mais à la fois il est tellement fragile. Quand il est à son poste il est impassable, mais dès qu’il est sur le reculoir il est trop en difficulté. Pour moi d’ailleurs il n’est plus Thiago Silva depuis sa blessure bien avant la coupe du monde…

Virage: Aparté musicale. On sait que les mecs d’IAM mettaient une télé planquée sur scène pour mater les matchs de l’OM pendant leur concert. Tu fais pareil en cuisine, tu planques une télé quand tu es au piano ?

Colonna: Bien sur, j’ai ma tablette avec tous les abonnements pour mater les matchs quand je cuisine, il m’arrive même de fermer pour les aller aux grands matchs car j’interdis la télé dans le restaurant.

Virage: Est-ce que tu chantes des chants de supporters quand tu fais la cuisine ?

Colonna: Oui je chante mais surtout pour faire chier le mec en cuisine avec moi qui est supporter de l’OM. Il m’arrive de lui chanter « Oh ville lumière »…

Virage:  Quand tu es chez toi et qu’il y a un match, tu fais soirée pizza ou on ne parle pas boulot à la maison ?

Colonna: Pizza/Foot oui ! C’est pratique j’habite à 30 mètres de mon restaurant. Quand je ne suis pas au Parc, les potes viennent à la maison… Mes voisins le savent tous d’ailleurs, ils connaissent les scores en direct, les occasions ratées… !

C’est de base
tu es élevé
dans la mauvaise foi…

Virage: Quel joueur corse aurais tu aimé voir jouer à Paris ?

Colonna: Claude Papi. (Silence). C’était un joueur de foot dingue, il avait ce petit côté Pastore, le mec capable de tout, de traits de génie, mais surtout c’était un bonhomme, un papa, un mec qui assoit tout le truc. Il y avait lui et les joueurs qui jouaient pour lui. Un peu comme Zlatan l’année dernière. J’aurais aimé le voir au PSG, mais il ne l’aurait jamais fait (rires).

Virage: Tu es plutôt Pierrot Bianconi ou plutôt Bruno Rodriguez ?

Colonna : Bianconi, j’aime bien. Bon, finir les pieds dans le ciment c’est con quand même… J’aime bien le gros tacle, c’est pour ça que j’ai bien aimé à l’époque Cyril Rool, malgré son passage à l’OM.

Virage: Tu penses qu’on peut être Corse et de bonne foi ?

Colonna: Non, jamais. C’est de base, tu es élevé dans la mauvaise foi.

Virage: Pas de superstition, de croyance ?

Colonna: Si. Je ne vais plus au Parc avec un maillot du PSG. J’ai remarqué qu’à force d’aller au Parc avec mon maillot au mieux c’est match nul. Je n’emmène plus mon fils, à chaque fois c’est match nul aussi !  (rires).

Virage: Une préférence de tribune au Parc ?

Colonna: Je suis un gosse de bourges, je suis en latérale, quoique l’année prochaine je vais sans doute retourner avec les ploucs en virage… (rires en nous regardant)… parce qu’il n’y a pas assez d’ambiance en latérale. Mais j’aime bien être en latérale pour bien voir le match, pour avoir une vue d’ensemble…

Virage: On dit que les Corses sont de très bons comédiens, pourtant on les voit rarement se rouler par terre pendant les matchs, comment tu peux expliquer cette anomalie ?

Colonna: Parce qu’on est trop costaud pour tomber… Tu vois j’aimais bien Lavezzi pour ça, c’est un sanglier, on le tacle, il se relève tout suite, il continue… Même les joueurs du continent ou d’ailleurs qui viennent jouer en Corse arrêtent de tomber. Si tu es un vrai joueur de football, tu n’as pas le temps de te rouler par terre. Si tu veux être un vrai conquérant ! Quand tout le monde s’attend à ce que tu tombes, tu continues et tu fais la différence…

Sur cette dernière tirade, Colonna retourne illico derrière son bar, car il est temps pour lui d’accueillir ses premiers clients, qui se trouvent tous être des supporters de foot (PSG, Sainté, OM…)… Le déjeuner s’annonce comme un subtile mélange de sauce tomate, de mozzarella, de bière corse et de ballon rond. Et de mauvaise foi. On est bien. Pace E Salute.