Interview

Dwen Correa

A chaque fois que BLAISE MATUIDI monte les marches de Clairefontaine
pour les rassemblements de l’équipe de France, on le voit affublé d’une tenue sur laquelle apparait une inscription surprenante : DWN TWN.

C’est tout simplement la ligne de vêtement avec laquelle il entretient une relation privilégiée. Née à Paris et créée par DWEN CORREA,
elle est associée au monde du football depuis plusieurs années.

On a rencontré Dwen avec qui on parlé ballon et chiffon.
Il nous raconte son histoire, leur histoire.


SUPPORTER DU PSG

Je suis supporter du PSG depuis George Weah. C’était un truc de fou pour moi.
Mister George c’était mon idole. J’ai été invité à son jubilé et j’étais trop heureux. J’ai fait ma photo avec lui. Je me rappellerais toujours ce qu’il a fait lors du match contre le Bayern (ndlr : 23 novembre 1994 – Victoire du PSG à Munich sur un but de Weah). Des fois il faisait des trucs comme si il te prévenait à l’avance. Il te montre qu’il va faire un crochet, il le fait et ça passe ! Il a pas volé son ballon d’or.

Je suis originaire de Guinée Bissau. Je suis arrivé en France à l’âge de 5 ans, en région parisienne. J’ai découvert le football très tard car au départ j’étais plus branché Arts-Martiaux. A 13-14 ans je me suis inscrit en minime à Domont dans le 95. Mon père me parlait tout le temps de Michel Platini dont il était fan. J’ai tout de suite voulu percer dans le foot mais c’était déjà trop tard. J’ai quand même réussi à jouer en DH au Racing 92. Je suivais surtout les coupes du Monde qu’on ne ratait jamais à la télé avec mon père. Et puis il y a eu l’ère Canal Plus au PSG avec donc Weah et aussi Ginola. Paris est devenu mon club.

On n’avait pas les moyens dans la famille d’aller au Parc hélas. C’était la galère, je me débrouillais tout seul. J’avais pas cet argent. Mais j’ai pu y aller une fois grâce au Trophée Tourtel de l’époque, avec mon club. Ce jour là c’était magique. C’était pour un PSG-Lens. Tony Vairelles jouait pour Lens et il me semblait géant. Il est trop balaise, trop costaud.

LA NAISSANCE D’UNE MARQUE

J’ai lancé ma marque DWN TWN en 2004. Mais avant ça, je ne connaissais personne dans le foot. Jusqu’au jour où je rencontre Joaquim Fernandez qui avait joué aux Girondins et au Milan AC (ancien joueur pro franco-sénégalais, décédé tristement à Domont en 2016 à 43 ans). C’était en 2003. Il me dit qu’il va me présenter ses anciens coéquipiers à Bordeaux : Zidane, Dugarry… Sur le moment je ne le crois pas. Et pourtant. Je suis invité à Bordeaux en juillet 2003 où Zidane organise un événement pour les enfants du Sahara. Et ce jour là il y a tout le monde. Je suis comme un fou. J’étais plus pressé de faire des photos avec les joueurs pour les montrer aux potes du quartier que de parler de mon projet ! Mais c’est à ce moment là que mon projet a vraiment commencé.

Ensuite je suis parti à Manchester rencontrer Nicolas Anelka pour signer mon premier contrat avec lui. Suite à ça je m’en suis servi pour convaincre d’autres joueurs. Au final je suis rentré à Paris avec 32 contrats signés par des joueurs pro ! Mon objectif était de monter une marque foot un peu comme Eden Park pour le Rugby ou Lacoste dans le Tennis. Sauf que ce sont des marques qui coûtent cher. Je me suis dit qu’il fallait être accessible en terme de prix car le football est un sport populaire. Et les joueurs ont adhéré à cette idée. Mais au début ça ne s’est pas passé comme je le pensais. Car si j’avais beaucoup de joueurs prêts à me suivre, ça ne suffisait pas. J’avais des problèmes de fabrication. Car le plus important quand tu lances une marque, ce n’est pas le nom, c’est surtout la structure, la distribution. Avant même d’être connu il faut avoir une structure solide. Certaines marques fonctionnent très bien sans être connues du grand public. Car elles sont bien organisées et bien distribuées. Et je ne savais pas ça au départ. J’ai fait l’erreur de communiquer alors que je n’avais rien. Tout le monde du foot connaissait la marque mais personne ne pouvait l’acheter… C’est au moment où j’ai signé avec Nené et Claude Makelele que ma marque a pris de l’ampleur en terme de notoriété et de structure. Puis arrive ensuite l’ère Blaise Matuidi. J’arrive à rentrer chez Courir, on monte une gros événement pour le lancement du portable Blaise Matuidi où les joueurs du PSG sont venus, c’était un truc de dingue, Zlatan, Kevin Trapp, Maxwell, Adrien Rabiot, David Luiz…

DU RÊVE A LA RÉALITÉ

Et le PSG me contacte. On développe une collection pour eux.
On devait lancer la collection 2 semaines après le 6-1 à Barcelone… Après le match j’étais abattu. Je me suis dit que ma collection était morte. Mais c’est là que j’ai vu que les gens qui aiment le PSG sont vraiment des fidèles. La collection a cartonné. Je me suis dit qu’on avait des vrais supporters à Paris. Quand on prend le 6-1, j’ai des cousins qui en pleuraient, des potes qui me disaient qu’ils ne pourraient plus jamais soutenir Paris après ça, et ils ont été les premiers à aller acheter la collection en boutique (rires).

Ma première rencontre Blaise se fait grâce à un RDV que je monte au culot avec Sport 2000. Je leur explique que je suis prêt à payer mon stand lors des salons qu’ils organisent dans leur siège pour les marques et les acheteurs. Et que je vais faire venir des célébrités du foot. Ils m’ont laissé faire. Au final j’ai réussi à faire venir Blaise, mais aussi Bafé Gomis, Claude Makelele. A cette époque Blaise était à Saint-Etienne. Un de mes cousins le connaissait. On a été mis en relation. Et j’ai tenté ma chance. Et puis tu sais, si tu essayes jamais, tu n’y arrives jamais. C’est comme une belle fille qui passe dans la rue. Si tu ne tentes pas d’aller la voir, tu ne sauras jamais si tu lui plais. Je fonctionne comme ça. Ça marche ou ça ne marche pas, ce n’est pas grave, mais si ça marche, c’est Bingo. Les mecs accrochent à mon concept, ils jouent le jeu et ils m’aident, ils m’aident vraiment.

Et puis pour parler de Blaise, c’est vraiment quelqu’un d’humain, qui est prêt à aider n’importe qui, il a ça en lui. Quand on organise des events et que j’ai besoin lui, il se déplace toujours, il paye lui même ses billets, c’est un vrai investissement pour lui. Ce mec là c’est un délire à lui tout seul. Et j’en ai rencontré des footballeurs. D’ailleurs Nicolas Anelka est comme Blaise. Bizarrement Nicolas n’a pas cette image là auprès du grand public et pourtant… Ils ont tous les deux le coeur sur la main. On a souvent une image erronée des footballeurs, il faut vraiment connaitre la personne en vrai. Pour revenir sur Blaise, c’est un mec droit, bosseur, il ressemble aux gens de tous les jours. Il est parti de rien pour arriver au sommet. Il est riche, il a une carrière exceptionnelle mais il reste lui même.

DWN TWN ET LE PSG

Depuis on a monté un nouveau partenariat DWN TWN-PSG avec Footlocker et pour la première fois le PSG sera présent dans leurs magasins grâce notre gamme. On organise un event au Footlocker des Champs-Elysées le 14 mai pour présenter la collection. Blaise sera là et sera interviewé par Pierre Ménès.

Avec le PSG ça se passe du coup très bien. J’ai été surpris de la liberté qu’ils me laissent. On est en train de développer une gamme avec les joueurs brésiliens du club pour lancer la marque au Brésil. On a aussi une collection pour le mois de juin où les joueurs du PSG seront associés à des super-héros de la Justice League des studios Warner : Neymar en Batman, Mbappe en Flash, Verratti en Cyborg, Cavani en Aquaman et Laure Boulleau en Wonder Woman… Et puis j’ai développé des produits spécifiques pour Neymar, Mbappe, Rabiot et Verratti. Avec Marco je suis toujours super bien inspiré, je ne sais pas pourquoi. Et ça se ressent car ses 2 modèles fonctionnent super bien. Surtout celui avec le petit hibou aux yeux bleus qui est brodé et magnifique. Tout ce qui est créé sort de mon imagination. Au début je débrouillais avec mes crayons à papier et le logiciel Paint ! Aujourd’hui heureusement j’ai une équipe, mais je suis toujours derrière.
Dans le futur j’aimerais travailler avec d’autres clubs du haut niveau mais à l’étranger. En France ce ne sera que Paris.

LE FOOT C’EST A VIE

Aujourd’hui je retourne parfois au Parc quand j’ai le temps pour voir les matchs. Mais en vrai j’adore analyser ce qui se passe sur le terrain. Je ne peux pas me taire, je suis obligé de parler, je suis dedans, je parle tout seul, je m’embrouille tout seul… Du coup je préfère rester chez moi car j’aime trop m’énerver devant ma télé. Quand je vais au Parc, j’y vais pour rigoler avec les amis. Mais bon ils sont obligés de me supporter quand même. Et puis quand je vais au Parc, peu importe l’endroit où je suis placé, là bas on est chez nous, c’est la maison. Le foot de toute façon c’est un truc vraiment à part. C’est le sport que tu peux pratiquer partout. Tu vois des mecs dans la rue se passer la balle comme au rugby ou avec une raquette taper la balle contre un mur ? Non. Le foot, tu prends n’importe quoi, un bout de caillou, une boite de conserve, tu joues où tu veux quand tu veux. Et puis quand tu joues, tu peux faire un match de malade mais le perdre quand même, sur un geste, une action tout peut changer, c’est comme la vie, le foot c’est la vie !

Perso, je suis pour l’assistance vidéo dans la surface mais je suis contre dans le jeu en général. Le football c’est la nature. Il ne faut pas jouer contre la nature, il faut laisser libre court à l’improvisation, mais tu peux ajuster un peu. En mettant la vidéo dans la surface tu peux corriger certaines injustices. Regarde cette année contre le Real. Il y a pénalty pour Paris sur la main de Ramos. Il touche la balle puis il met sa main dans le dos. OK ça va vite mais il y a pénalty ! En dehors de la surface ça ne sert à rien, ça fait chier les gens, ça ralentit le jeu.

PRESNEL ET JUNIOR

Parmi les joueurs de l’effectif actuel, j’aime bien Presnel Kimpembe. Il incarne trop la sagesse dans son jeu. Je ne connais pas la personne mais il sait s’imposer quand il le faut, il montre qu’il est là, technique au moment où il faut l’être, c’est le défenseur moderne ce petit. C’est l’avenir du PSG et de l’équipe de France, facile, les mains dans les poches. Quand je le vois jouer j’ai l’impression qu’il a 30 ans. Il me fait penser à Beckenbauer ou Baresi. Baresi il n’était pas costaud mais il savait jouer du physique quand il le fallait, et puis il était super tactique, comme Beckenbauer mais lui avait en plus le physique. Kimpembe c’est un mélange de tout ça ! Mais bon je crois qu’on a aussi une grande chance au PSG, c’est d’avoir Neymar. Le problème que l’on a en France c’est qu’on ne sait pas savourer les bonnes choses. On est comme des gourmands. On mange, on se goinfre et puis on s’en dégoutte. On n’a juste pas compris le personnage. Il a ses trucs de superstar mais c’est normal. Depuis qu’il est tout petit on lui dit qu’il est une star. Au bout d’un moment, surtout à l’âge rebelle, tu finis par le croire. J’ai un fils de 19 ans, il est en plein dans cet âge ingrat. Il se croit invincible. C’est à 25 ans que tu commences à cogiter.

Neymar il est forcément sur une autre planète et c’est un peu à cause de tout le monde. On leur donne trop d’amour en fait. Et puis on a quand même un joueur qui a tenu son équipe nationale à bout de bras, même Messi n’a pas fait ça. Et aujourd’hui il est à Paris. OK il est perso dans son jeux, mais il a toujours joué comme ça, à Santos, à Barcelone, avec la Seleção ! Comment on peut le critiquer ? Il est comme ça. Encore, on l’aurait formé chez nous pourquoi pas, mais c’est son jeu ! Alors il pourrait faire un peu plus de passes mais si on veut l’obliger à changer ce ne sera plus Neymar. Du coup il voudra partir… On est quand même contradictoire. J’aime ce joueur. Il ramène un truc qu’on trouve de moins en moins dans le football ; la folie. La folie de Ronnie, les dribbles de Robinho, la puissance de Ronaldo le brésilien. Il réunit ces 3 caractéristiques à lui tout seul et nous on le critique… Et pourtant on a le même pour le prix de 3 !

DU TRAVAIL ET DES ETOILES

Sinon j’aurais aimé que Blaise reste au PSG. Blaise aime tellement Paris, tellement le PSG. En plus c’est un mec fidèle. Ça a été un crève coeur pour lui de partir, ça m’a fait trop mal. Il représente tellement le mec d’en bas qui essaye de monter. Le mec de banlieue… Blaise incarnait parfaitement ce symbole du travail dans un PSG qui grandit, qui monte. Même avec Neymar qui arrive et qui représente les étoiles, Blaise aurait représenté le pendant opposé. Blaise dans le vestiaire était super respecté et écouté. Comme un De Rossi à la Roma. Il aurait fédéré tout le monde. Le foot ce ne sont pas que les stars. Il faut aussi une osmose. Il faut que les joueurs soient prêts à mourrir les uns pour les autres et là, tu as une équipe de foot. Il manque cette rage au PSG aujourd’hui. Il y des matchs que tu ne gagnes pas avec la technique. Pendant les coupes du monde il y a des équipes plus faibles qui vont loin car les mecs jouent pour leur pays. Ils ne jouent plus au foot, ils font du sport, tous leurs muscles se mettent en marche. A Paris tous les joueurs sont surdoués techniquement mais quand il s’agit de devenir sale, ils n’y arrivent pas.

La priorité du mercato estival c’est de trouver un milieu récupérateur. Et un latéral gauche. On n’a besoin de rien d’autre. Le trio d’attaque ne joue ensemble que depuis un an. L’année prochaine ils vont tout défoncer. Et il faut laisser Neymar tranquille, il faut lui filer les clés en mettant un chien de la casse derrière lui. C’était une erreur de faire partir Blaise dan ce sens. Tu laisses faire Neymar et tu demandes à Blaise de couvrir derrière. Si Neymar perd la balle, Blaise vient couper direct. Et puis le football c’est ça, un dribble, deux dribbles, à un moment ça finit par passer. Tu peux pas gagner la C1 avec que des attaquants sinon le Real en aurait gagné plus à l’époque des Galactiques… la meilleure équipe du Real c’est celle d’aujourd’hui, y a que des bouchers, des mecs qui lâchent rien et techniques en plus. Le milieu de terrain du Real, ce sont des tueurs à gage, Modrić, Casemiro, Kroos. Au PSG, on est en train de faire la même erreur que le Real à l’époque. Il faut recruter un récupérateur, un mec pas beau, sale, qui vient pas pour faire le beau gosse. Je serai le premier à le signer chez DWN TWN !

Retrouvez l’ensemble de la collection DWN TWN sur le site officiel de la marque : www.dwntwnparis.com


Xavier Chevalier

Alain Roche

Alain Roche. Un nom prédestiné pour un défenseur solide et rigoureux.
Puis l’homme passe de la pelouse du Parc à la cellule des recrutements.
C’est là que tout bascule pour lui au
PSG.
Il traine alors cette réputation de faute de casting
depuis le transfert inutile d’Éverton et Souza à Paris. Comme un fardeau.

Voilà tout le paradoxe d’un homme adoré comme joueur et (injustement) détesté en tant qu’employé du club. Et pourtant il a tout vécu.
Le meilleur sur le terrain, le pire sur le parking du Camp des Loges face à des ultras mécontents… Mais il assume, à 100%, et s’explique pour nous.
Car comme souvent dans le football, le fantasme dépasse la réalité.


VIRAGE : Tu es né en Corrèze, comme Laurent Koscielny, autre défenseur central de renom. On aime donc les profils sérieux dans ce département ?

Ah ah… Non en fait l’hôpital où je suis né était surtout le plus proche du petit village où vivaient mes parents qui s’appelle Peyrillac-et-Millac. Ça se trouve entre Sarlat et Souillac en Dordogne. Mais après on s’est installé à Bordeaux. Puis dans le Massif Central et c’est là que j’ai commencé à jouer au football au Riom FC. Et je ne sais plus comment, mais mes parents ont rencontré André Ferri qui jouait aux Girondins. Et quand mon père a été muté à Bordeaux, il nous a permis, à mon frère et moi, de passer les tests aux Girondins. Mon frère a été gardé mais pas moi. Mais ma mère ne voulait pas que ses deux fils jouent dans un club différent, donc elle m’a dit « Toi tu vas jouer dans l’équipe C car je vous veux aux même endroit ! Je ne vais pas aller te chercher à l’autre bout de la ville à chaque fois ! »

VIRAGE : Tu viens d’une famille de sportifs ?

Complètement. Mon grand père et mon père adoraient le rugby mais mon père préférait encore plus le foot. Moi même j’aime regarder du rugby. J’ai même essayé, mais il faut éviter de ces trucs… J’ai fait aussi du tennis, de la gym, du judo, mon père m’a fait faire plusieurs sports.

VIRAGE : Comment commence ta carrière ?

Premiers matchs avec les Girondins, tu passes dans la catégorie supérieure et ainsi de suite. Je jouais attaquant à l’époque. Ailier gauche. J’étais costaud et j’allais plus vite que les autres. Et puis Christian Fétis, responsable de la ligue d’Aquitaine, m’a dit un jour qu’il valait mieux que je joue derrière. Ça faisait chier de descendre, mais à la sortie ça se passe plutôt bien. L’entraineur des cadets des Girondins m’a donc positionné à ce poste. Et puis à l’âge de 14 ans je faisais beaucoup de match avec la Ligue, et le foot commençait à empiéter beaucoup sur le reste. Je ratais pas mal de week-ends, il a donc fallu faire un choix. Comme j’avais un bon niveau on m’a proposé de rentrer au centre de formation des Girondins mais mes parents n’ont pas voulu car ils trouvaient la structure inadaptée. A l’époque il y avait peu de centres de formation. C’étaient les débuts. Donc je suis rentré en sport-étude à Mérignac. J’ai passé 2 ans au lycée Fernand Doguin puis j’ai commencé à toucher l’équipe réserve des Girondins. De plus j’étais aussi en équipe cadet de l’équipe de France. Donc tu commences à réfléchir même si je n’avais aucune pression familiale pour devenir pro. A 18 ans on m’a appelé pour aller m’entraîner avec les pros. Je venais de rencontrer ma future femme… Qui l’est toujours d’ailleurs, je fais partie de ces dinosaures encore mariés 30 ans après (rires). A 19 ans je signe pro. A l’époque il fallait faire 25 matchs en professionnel pour devenir pro.

Une napolitaine et un verre de rouge pour la 8.

VIRAGE : Te souviens-tu de ton premier match ?

Bien-sur, à Bordeaux contre Brest (ndlr : 19 novembre 1985). Je m’en souviens parfaitement. J’avais été appelé le lundi par l’entraîneur de la CFA qui m’a annoncé que j’étais convoqué par Aimé Jacquet pour m’entrainer avec les pros. C’était la première fois. A l’époque tu ne rentrais pas comme ça dans le vestiaire. Tu frappais à la porte, on te disait de rentrer, tu disais bonjour à tout le monde, on te disait où t’assoir et tu fermais ta gueule. Le capitaine de l’équipe était Alain Giresse. Il n’y avait que des internationaux. Jean Tigana, Bernard Lacombe, Patrick Battiston, Léonard Specht, Thierry Tusseau, Jean-Christophe Thouvenel, René Girard… c’était la grosse équipe. Premier entrainement et première bagarre entre Tigana et le gardien Dragan Pantelić… On m’a dit « t’inquiète pas, c’est pas grave… ». J’ai été retenu et je suis remplaçant pendant le match. A 3-0 pour Bordeaux, Aimé Jacquet m’appelle à 20 minutes de la fin pour remplacer Alain Giresse. Et je marque ! (ndlr : à la 89ème minute). Alors je peux m’en souvenir tu vois. Et première interview par Bernard Montiel pour France 3 Aquitaine…

VIRAGE : Forcément, ces débuts ce ne sont que des bons souvenirs ?

Je souhaite à tout le monde de commencer dans une équipe comme celle-là. C’était le rêve. On gagne la coupe de France, on finit deuxième du championnat. Lors de la finale de la coupe, Specht se blesse et c’est moi qui joue la finale. L’année d’après on fait le doublé avec l’arrivée de Jean-Marc Ferreri, Philippe Vercruysse, José Touré, Didier Sénac. C’était trop facile car c’était une super équipe. Mais à 22 ans je dois quitter Bordeaux à contre coeur pour Marseille.

Tapie m’appelle, j’ai à peine 22 ans

VIRAGE : Raconte nous pourquoi, car c’était deux clubs rivaux ?

C’était la guerre entre les deux présidents (Claude Bez et Bernard Tapie). Bez a beaucoup investi pour suivre le rythme de l’OM et aussi celui du Matra Racing qui venait d’arriver dans le championnat. Et le club commençait à avoir des soucis financiers. On était en stage et Bez me convoque dans son bureau. Alors quand le président te convoque tu y vas et tu écoutes. Il me dit « Alain j’ai un truc à te demander, il faut que tu rendes service au club en partant ». Je n’avais pas envie de partir, je lui ai dit que je ne leur coutais rien en plus, j’étais payé 12000 francs par mois ! Mais il m’a dit qu’en plus je devais partir à Marseille ! Et avec Jean Tigana, car on était les deux seules monnaies d’échange. Je lui ai dit non mais il m’a dit que Tapie voulait quand même me parler. Tapie m’appelle, j’ai à peine 22 ans. Il me convainc en me disant que Bordeaux risque la ligue 2 à cause de ses problèmes, il m’annonce l’arrivée de Francescoli, Waddle, Mozer, Amoros. Que je vais gagner beaucoup plus que ce que je gagne à Bordeaux.
Il me dit « parles-en avec ta femme »… On venait de se marier, on se dit que je vais jouer dans une équipe bâtie pour jouer le titre, et que c’est peut être le moment de basculer. Et en plus cela arrange le club de mes débuts.

Erreur de jeunesse

Donc j’ai dit oui même si au final je ne suis resté qu’un an. Au cours de la saison je me suis fait opérer de la cheville et j’ai perdu ma place au profit de Franck Sauzée qui est descendu en défense centrale avec Carlos Mozer. J’ai eu du mal à retrouver ma place. C’était dur à accepter mais j’ai joué quand même 25 matchs, puis nous avons été champion.
A la fin de la saison, Tapie m’annonce que l’AJ Auxerre souhaite m’embaucher. J’en parle à ma femme avec qui on venait d’avoir notre premier enfant. C’était une décision commune. Mais on n’arrive pas à trouver d’accord avec Guy Roux et Auxerre. Tapie est rentré dans la négociation et a trouvé une solution. Je signais pour 2 ans à Auxerre et en échange il récupérait Basile Boli pour l’OM.

VIRAGE : Donc c’est grâce à toi si L’OM a été champion d’Europe !

Ah ah ! Non, quand même pas parce qu’ils auraient fini par trouver un accord pour Basile. Et puis je t’avoue qu’il fallait vraiment que je parte parce que je supportais de moins en moins la pression infligée par Tapie. Il te parlait avec véhémence, mais il avait le même discours pour des joueurs d’expérience que pour de jeunes joueurs alors que j’avais besoin d’un discours de confiance.
A posteriori c’est un vrai regret car je pense que j’avais le niveau. Et puis l’OM gagnait tout à cette époque. Mais à 22 ans il faut que tu joues tous les matchs. Et avec l’arrivée de Boli et Casoni ça devenait compliqué.

A un moment à Auxerre tu as fait le tour

VIRAGE : Tu arrives au PSG en 1992 et l’équipe est déjà forte. Comment se fait ton transfert de l’AJA ?

Oui, Canal+ était déjà là. Ils avaient signé Laurent Fournier, David Ginola, Vincent Guerin, Bernard Lama, Paul Le Guen et Patrick Colleter. C’est Jean-Michel Moutier et Michel Denisot qui m’ont appelé. Ça faisait deux ans que j’étais à Auxerre, je n’avais pas raté un match ! Mais Paris construisait une équipe capable de rivaliser avec Marseille et si je voulais retrouver l’équipe de France il fallait que je joue dans une grande équipe. D’ailleurs Platini m’avait appelé avant l’Euro 92 pour m’expliquer qu’il ne pouvait pas me prendre car son effectif avait gagné tous les matchs de qualifications…
Il n’y avait pas photo sportivement et financièrement. Et puis à un moment à Auxerre tu as fait le tour.

Tout le monde s’éclate…

VIRAGE : Mais tu parlais de la pression que tu avais eu du mal à gérer à Marseille, alors pourquoi aller à Paris ?

Parce que j’avais 2 ans de plus d’expérience, et en fait ce qui m’effrayait le plus à Paris c’était la grandeur de la ville, pas le foot… Quand tu es provincial, Paris c’est impressionnant. Je pensais que j’allais être tout le temps dans les bouchons pour les entrainements sauf que je ne savais pas que tout se passait à Saint Germain et que le cadre de vie était même plus agréable.

VIRAGE : Première année plutôt pas mal du coup ?

Oui, on finit deuxième derrière Marseille qui se fera choper et destituer, mais on ne nous donnera pas le titre pour autant ! On ne l’a même pas réclamé. 25 ans après avec Daniel Bravo on s’est dit qu’on avait été un peu cons quand même. Mais bon on a gagné la coupe de France face à Nantes.

J’ai connu 9 présidents différents

VIRAGE : Parlons de l’ambiance en tribune et aux camps des Loges lors de ces premières années. Comment se passait votre relation avec les supporters ?

Nous on avait juste une main courante et un grillage qui nous séparaient des supporters. Il y a avait une vraie proximité, on discutait qu’avec les mecs de Boulogne car il n’y avait qu’eux à l’époque. A Auteuil il n’y avait quasiment personne. On avait des discussions franches, on était conscient qu’une certaine frange d’entre eux avait des orientations politiques difficiles. On pouvait néanmoins s’engueuler mais ça restait la plupart du temps amical. C’est plus tard, dans les années 2000 que ça s’est compliqué, quand je suis revenu comme dirigeant, les relations ont commencés à se tendre, une nouvelle génération de supporters est arrivée où c’était limite d’en venir aux mains avec quelques joueurs lors de nos rencontres … Il y eu un changement de mentalité dans les tribunes et une grande rivalité s’est exercée entre les 2 tribunes.
Les mauvais résultats du club ont amené moins de respect, plus de violence, une radicalisation de la pensée, avec le sentiment que les joueurs sont tous de passage, ce qui peut se comprendre avec la mise en place de l’arrêt Bosman et surtout avec l’instabilité au PSG mais le club n’appartient pas aux supporters uniquement. Mais je comprends aussi que les supporters en aient eu marre par moment et montrent leur mécontentement. A titre personnel j’ai connu 9 présidents différents ! Chacun avec son idée de stratégie et de recrutement. Difficile de construire quelque-chose de solide. Pendant que eux, les supporters, sont toujours là ! Mais ce n’est pas une raison pour faire n’importe quoi, de rentrer dans de la violence verbale voire physique. Il faut comprendre que tout le monde doit aller dans le même sens, et pas contre le club, que ce soit en interne ou dans les tribunes

Une coupe de France et deux coupes de cheveux.

VIRAGE : Revenons à des choses plus légères et à ton look de l’époque. Peux-tu nous en dire plus sur cette fameuse décoloration en blond ? Et de la chanson qui venait des tribunes « Oh Alain Roche j’aime tes cheveux »… Est-ce que tu l’entendais pendant les matchs ?

Oui bien-sur (rires) ! Au départ ce n’est pas du tout blond mais gris ! C’est ma femme qui m’a poussé à faire ça et pourtant elle n’était pas coiffeuse ! Donc c’était des teintures grises. Mais il faut savoir que lorsque tu teins des cheveux en gris, au bout d’un moment ils basculent sur le jaune… Donc je n’allais pas faire des couleurs tous les 15 jours ! Tu attends alors que ça passe un peu et tu refais une couleur. Mais voilà, j’ai été un précurseur dans les coupes de cheveux les gars ! Et oui ! Et Santi Cañizares à Valence m’a imité lorsque je jouais là bas, sauf que lui a gardé cette couleur très longtemps !

Je préfère que ce soit toi 

VIRAGE : Reparlons ballon rond. Tu as été capitaine du PSG lors de la saison 94-95. Avant ça, c’était David Ginola qui portait le brassard. Pourquoi ce changement ? Un choix de Luis Fernandez qui venait de prendre les commandes ?

Oui c’était un choix fort de Luis. J’étais Vice-Capitaine. Luis était en conflit ouvert avec David. Luis m’a appelé pour me prévenir qu’il allait me donner le brassard. Je lui ai dit que je ne le prenais pas. J’ai été en chambrée avec David pendant 4 ans, donc on était très proche. Impossible de lui faire ça. J’ai prévenu David de la situation et je lui ai dit « Il n’y a que toi qui prendra la décision, si je le prends ou pas ». David m’a dit « Je préfère que ce soit toi plutôt qu’un autre ». Et voilà comment j’ai pris le brassard.

Fifa 93

VIRAGE : Puisqu’on parle de grand joueur, y-en-t ‘il un qui t’a impressionné plus que les autres durant tes 6 saisons au club ?

Difficile. Raí a marqué les esprits car il est resté longtemps, mais celui qui sortait du lot c’était George Weah. Il était déjà le précurseur de l’attaquant moderne. Il allait vite, il sautait haut, il était bon techniquement, il avait toutes les qualités. Il était impressionnant par son jeu mais aussi par son charisme et sa sagesse. Pour avoir joué contre lui c’était compliqué, et avec lui c’était un bonheur. C’était un mec d’exploit. Il a été le seul africain à avoir un ballon d’OR et ce qu’il a fait au Milan AC… Voilà.

VIRAGE : Tu es surpris de son élection en tant que Président du Liberia ?

Oui. Après il a toujours eu l’idée d’aider son pays. Il donnait de l’aide aux mal-nourris, aux mal-logés, aux pauvres, il récupérait des vêtements et les envoyait dans son pays. Il a toujours eu un rôle social mais de là à devenir Président… C’est un parcours hors-norme.

L’homme qui parlait à l’oreille des Présidents.

VIRAGE : Et y a-t-il un match qui t’a marqué plus qu’un autre en tant que joueur du PSG ?

C’est sur que lorsque tu gagnes une Coupe des Coupes en tant que titulaire c’est à part. Et puis le match retour contre le Milan AC (ndlr : 19 avril 1995). J’ai rarement eu un tel sentiment d’impuissance sur un terrain. Tu es en face d’une équipe et tu ne sais pas comment faire. Fabio Capello avait mis en place une tactique, un bloc où il était impossible de passer. Autant à l’aller on s’en était plutôt bien sorti même si on s’était fait entuber, mais au retour je n’ai jamais ressenti ça sur un terrain. Après il y avait une très grosse équipe. Maldini, Costacurta, Desailly, Savićević, Boban… Quand Savićević a marqué le sol tremblait, ça faisait un bruit impressionnant ! San Siro, c’était une cocote minute ! Tout ça fait que ça m’a marqué.

C’était un truc de dingue

VIRAGE : Et au Parc ? Tu as aussi eu des émotions rapport à l’ambiance ?

L’ambiance a rarement était mauvaise au Parc hormis quand on se faisait siffler (rires) mais par 2 fois elle a était folle, surréaliste.
La 1ère c’était lorsque j’étais sur le terrain contre le Steaua de Bucarest quand on s’est imposé 5 à 0 (ndlr : 27 avril 1997). C’était un truc de dingue.
Et puis bien-sûr face à Madrid au Parc. J’étais en tribune suite à mon expulsion au match aller, Je n’ai jamais vu le stade comme ça. Il y avait une joie indescriptible, le stade était en feu, tout le monde était joyeux, fier, le bruit était indescriptible, on a toujours pas revécu un moment aussi merveilleux.
Niveau ambiance j’ai connu aussi le pire au Parc en 1993 pour le fameux France-Bulgarie (ndlr : 17 novembre 1993). Le silence de mort. 50000 personnes dans le stade mais plus personne ne parle. Même pas un sifflet…

VIRAGE : Ce match avec les bleus c’est ta plus grosse déception footballistique ?

Oui, tu rates une coupe du Monde, c’est le Graal pour tout joueur.

Pendant que Blanc médite, la roche posait

VIRAGE : Et l’Euro 96. Mauvais ou bon souvenir du coup ?

Ça devait être un bon souvenir mais juste avant de partir en stage de préparation avec l’équipe de France, je fais une connerie et je me blesse au dos. A ce moment là j’étais en charnière centrale avec Laurent Blanc. Marcel Desailly était encore au milieu avec Didier Deschamps. 10 jours bloqués sous infiltration donc. On fait un match de préparation en Allemagne. Marcel jouait déjà en centrale au Milan. Aimé Jacquet le fait descendre avec Laurent et ils font un match exceptionnel là bas. On gagne 1-0, pour la première fois en Allemagne. Du coup je suis resté sur le banc et après c’était dur de leur reprendre la place. Mais j’ai joué la demi finale perdue à Old Trafford (ndlr : 26 juin 1996) car Didier était suspendu donc Marcel est revenu au milieu. C‘était magnifique de jouer ce match dans le temple des rêves même si on l’a perdu aux pénos.

VIRAGE : On parlait tout à l’heure de défenseur avec Antoine Kombouaré… Avec qui te sentais-tu le plus à l’aise en charnière centrale au PSG ?

Ricardo. J’ai beaucoup appris avec lui. Au niveau placement et anticipation. Parfois on ne se parlait même pas sur le terrain, on était parfaitement coordonnés.

Et un Ricard pour la une.

VIRAGE : Tu quittes Paris en 1998 pour Valence. Pourquoi ?

Déjà il y a un nouveau Président qui arrive et tu sens qu’il ne veut pas de toi. (ndlr : Charles Bietry)
On était 4 joueurs : Guerin, Le Guen, Fournier et moi. On a été convoqué par Alain Giresse, le nouvel entraineur, à 1/4 d’heure d’intervalle chacun. Alain je le connaissais de Bordeaux. Il m’a dit qu’il ne pouvait pas me garantir d’être titulaire mais il voulait me garder dans l’effectif pour l’expérience. J’avais 30 ans. Je sors du RDV, j’appelle mon agent et je lui dis que ça c’était bien passé avec Alain. Il me dit qu’il est surpris car Bietry venait de l’appeler pour lui dire qu’il ne voulait pas me garder. Bref il fallait que je parte. On a trouvé Valence qui n’avait rien gagné depuis 25 ans. Et on a trouvé un accord financier.

J’ai passé 2 années merveilleuses là bas

VIRAGE : L’Espagne, un bon choix ?

Le Milan AC et le Real Madrid m’avaient appelé à une certaine époque mais les blessures m’ont empêché de m’expatrier. Et puis Valence s’est manifesté, puis quand tu as connu Paris, qu’est ce que tu veux trouver après en France ?
L’étranger c’était quelque chose qui m’intéressait. Mais j’avais 3 enfants et il fallait que je trouve une ville avec une école française et ça tombait bien il y en avait une à Valence. J’ai passé 2 années merveilleuses là bas. Ça a été un véritable crève-coeur de partir de ce pays. 300 jours de beau-temps par an mais surtout la passion autour du foot. Pas d’agressivité dans la rue, les gens sont respectueux, il sont des vrais connaisseurs, tu as 60000 personnes au stade ! Et puis il y a le jeu, fait de passes, de technique, l’envie d’aller vers l’avant.

Alain et Santiago, un amour au soleil.

J’avais Claudio Ranieri comme entraîneur. C’était la première fois que j’avais un entraîneur italien. Et là j’ai appris ce que c’était la tactique à l’italienne. On faisait des entrainements sans ballon, que des plots sur le terrain avec des chasubles à la main « allez les verts on va presser tous ensemble » et ça pendant une heure et demi. Après ça tu es une machine tactiquement. Et puis on faisait des exercices physiques individuels en fonction de ton poste. En France on ne faisait pas ça à l’époque,. C’était dur mais c’était génial. Je me suis fondu dans le groupe, en 4 mois je parlais espagnol, je ne traînais qu’avec les espagnols, même pas avec Jocelyn Angloma, on ne se voyait qu’à l’entrainement, pas en dehors. Du coup j’ai fait toutes les fêtes de village, les ferias avec les joueurs. Un vrai bonheur. Le meilleur ami que j’avais là bas c’était Amedeo Carboni, un italien. (ndlr : Joueur de Valence de 1997 à 2006). Nos femmes et enfants s’entendaient bien.
La première année on gagne la Coupe du Roi (ndlr : 1999), on a été reçus comme des champions du monde, on a été accueillis comme jamais à l’aéroport, 60000 personnes dans le stade, c’était comme si nous avions gagné la coupe du monde. Nous avons marqué les gens et ils ne nous ont pas oublié. Et il y a une vraie reconnaissance des anciens en Espagne, pas comme en France où il n’y a quasiment rien même si cela change un peu dans certains clubs.

Il n’y a pas d’école qui t’apprend ce métier

VIRAGE : Parlons maintenant de ton arrivée à la cellule de recrutement du PSG en 2003. Est-ce un choix de carrière prémédité ?

Non pas du tout. C’était une opportunité. Je venais d’arrêter aux Girondins de Bordeaux. Michel Denisot me permettait de commenter des matchs sur Canal+ et un jour Laurent Perpère m’appelle pour me dire qu’il souhaite installer Antoine Kombouaré à la place de Luis Fernandez au poste d’entraîneur du PSG. Et comme il savait qu’on était bons amis, il m’a proposé le poste de directeur sportif. J’avais 35 ans, c’était une vraie opportunité, mais 10 jours après il se fait virer et j’apprends dans la presse que Francis Graille arrive avec Vahid Halilhodžić avec qui il avait travaillé à Lille.
Francis m’appelle fin juin pour me proposer de travailler à la cellule de recrutement. Je n’avais jamais fait ça mais le challenge était fantastique. De toute façon il n’y a pas d’école qui t’apprend ce métier, tu apprends sur le tas. Il me dit que Jean-Michel Moutier et Eric Pécout, qui font ça depuis une dizaine d’années, seront toujours là et qu’ils vont m’apprendre le métier. Je ne prenais aucun risque. Ils voulaient recruter un ancien du club, qui connaissait l’histoire, la culture.

Everton ou Souza ? Souza ou Everton ? Les 2 ?

VIRAGE : Tu as aimé ce métier ?

C’est un métier de fou. Et c’est toute l’année. Tu pars le vendredi voir les matchs, tu essayes d’en voir 2 le même jour le WE, tu reviens le lundi, tu fais tes rapports car tu ne pouvais pas les faire en direct du stade à l’époque. L’après midi tu vas regarder des vidéos que tu as reçues et c’est comme ça toute la semaine. Et on était que 3 alors que tous les grands clubs européens étaient pourvu d’équipes d’au moins 15 personnes. En France tu as encore des clubs où ils ne sont que un ou deux ! C’est simple, je n’ai pas vu grandir mes gosses, je rentrais tard, j’étais tout le temps pris. Je ne me plains pas mais c’était dur.
J’avais 35 ans, j’avais envie d’apprendre, de voir des matchs, de discuter avec les agents, d’apprendre des entraineurs. Mes débuts étaient très instructifs avec un entraîneur qui était à l’écoute. Vahid était exceptionnel avec moi. Tous les lundis à 8H00 dans son bureau il fallait faire un débriefing du match joué par l’équipe le week end ou des recherches en cours. En plus l’année de son arrivée, on finit 2ème, qualifiés direct pour la ligue des Champions. On avait fait venir Pauleta que je connaissais de Bordeaux, Yepes que j’avais rencontré à Miami pendant ses vacances pour son contrat, c’était bandant. Mais quand tu as un entraineur qui ne t’écoute pas, qui considère que tu es incompétent…cela devient complexe.

VIRAGE : Paul Le Guen par exemple ?

Oui Paul. Tout le monde sait que j’ai eu des problèmes avec lui.

On avait 8 millions pour recruter 5 joueurs

VIRAGE : Y a-t-il un recrutement dont tu es particulièrement fier ?

Il y en a plusieurs. Mais par exemple il y a Christophe Jallet. Ce n’est peut être pas le plus prestigieux mais quand tu vois où il en est arrivé. Au début tout le monde se demandait qui il était mais à la sortie… Il marque des buts, fait des passes décisives, finit en Equipe de France. Quand tu vois la progression, tu es fier de ce parcours. Pareil pour Guillaume Hoarau, j’avais insisté auprès du Président car on perdait Pauleta qui avait marqué 109 buts. Je croyais en son potentiel. Même chose pour Marcos Ceará. Niveau rapport qualité prix, vu le budget qu’on avait, il n’y avait pas photo.
On avait 8 millions pour recruter 5 joueurs, compliqué… Donc tu fais des conneries. Comme Mateja Kežman. Paul Le Guen voulait un deuxième attaquant de métier car on allait jouer l’Europa League. On avait recruté Hoarau mais on ne savait pas si il avait le niveau. Du coup on obtient l’aval pour Kežman. Sauf que 10 jours après Guillaume met deux buts face à Bordeaux au Parc. Paul ne veut alors plus de Kežman sauf que la machine était enclenchée. On a dit à Paul qu’il ne serait pas de trop dans l’effectif. On a imposé un joueur à l’entraineur et il ne faut jamais faire ça. Ça a été la guerre toute l’année avec Paul. Et Kežman a été un peu con aussi.

Toi, tu réussiras jamais avec ta moustache d’Eddy Murphy.

VIRAGE : Et Éverton et Souza alors, parlons-en.

Je l’ai déjà raconté mais voici l’histoire. On devait prendre un joueur qui s’appelait Miloš Krasić, un joueur serbe qui jouait au CSKA Moscou. On doit faire l’affaire mais au dernier moment le club russe nous demande des sommes astronomiques. On s’était dit que si on ne faisait pas ce joueur là, on ne faisait personne. Mais dans la panique générale, car c’est l’année où on a failli descendre, la direction nous demande de recruter. Valdo nous parle de Souza. L’entraineur, l’adjoint et la cellule de recrutement regardent quelques vidéos et on le trouve intéressant il jouait à Sao Paulo. On négocie pour lui mais une personne dans le staff voulait un deuxième joueur donc on a pris Everton, nous les avons recrutés cher comme souvent dans cette période de mercato hivernal.
Ils sont arrivés en hiver, ils étaient en vacances depuis fin novembre, pas en état physiquement, entre le froid, le style de jeu français, la langue, les habitudes alimentaires on aurait du attendre pour les mettre sur le terrain mais on les a fait jouer tout de suite, tout a été mal fait.
Comme je l’ai toujours dit, il faut laisser le temps nécessaire pour s’adapter aux joueurs Brésiliens qui viennent pour la première fois en Europe.
La pire chose qui pouvait m’arriver à la venue de ces 2 joueurs c’est la conférence de presse où la présidence justifie leur arrivée en disant que la cellule de recrutement les a vu jouer 40 fois…

Bataille ! Fontaine ! Bataille et Fontaine !

On avait simplement vu jouer Everton 2 fois au Brésil et Souza en vidéo.
Les responsables de cette décision n’ont pas été solidaires de ces transferts et beaucoup ont parlé en off, sauf moi… Je me sens responsable, comme d’autres auraient du l’être pour assumer ces choix mais on m’a jeté en pâture. J’étais le coupable désigné et cela arrangeait bien des gens.
Combien de fois la cellule de recrutement aurait pu s’épancher dans la presse quand c’était des recrutements réalisés par l’entraineur ou par la présidence. Mais on s’est toujours tu.
Sans compter les fois où tu proposais des joueurs sans jamais être écouté. Mais tu te traines cette histoire tout le temps. Les gens dans la rue ne te parlent que de ça. Tout cela m’agaçait sérieusement. Maintenant j’en ai fait mon deuil mais ça m’a fait mal. Sans compter les violentes déclarations de Paul (Le Guen) à l’époque à mon égard.
Désormais, c’est de l’histoire ancienne, heureusement que j’ai pu travailler par la suite sur le recrutement avec des gens ouverts à la discussion.
Je rappellerais qu’il y a eu pas loin de 30, 50 joueurs qu’on a fait venir au PSG avec plus ou moins de réussite certes. Mais on ne me parle jamais de Pauleta, Yepes, Armand, de Jallet, de Sessegnon, de Hoarau, de Rothen, de Nenê…et j’en oublie. On ne te parle que de ces deux mecs qui n’ont quasi jamais joué de la demi-saison.
La presse a relayé tout ça en disant que c’était de ma faute sans faire aucune investigation, ce que je leur reproche beaucoup. J’avais comme principe de ne jamais parler à la presse pour éviter de faire du tort au club alors que d’autres ne cessaient de le faire pour se protéger.
Si les gens s’arrêtent à ces 2 recrutements alors qu’est ce que tu veux que je te dise et que je fasse, ce sont des cons.

Il y a des soucis d’état d’esprit

VIRAGE : Comment juges-tu les recrutements de l’ère Qatari ?

Ils ont pris des joueurs exceptionnels, comme cela arrive parfois, il y a peut être eu une connerie ou deux. Comme Lugano mais ça n’a pas eu d’impact. Ce qu’ils ont fait est extrêmement cohérent. On reparle de Paris dans le monde entier on existe de nouveau sur la planète football.
Il y a des soucis d’état d’esprit mais ce n’est pas que les joueurs. Un état d’esprit ça se forge de l’entraîneur jusqu’à la direction.
Je regrette qu’ils aient fait partir Matuidi mais je comprends qu’il puisse s’en aller car il voulait du temps de jeu ainsi que faire de la place à d’autres, l’essentiel est qu’il joue à la Juve. Après je trouve qu’ils n’ont pas recruté l’entraineur qui puisse gérer les joueurs actuels et imposer sa vision du football. Je ne dis pas qu’Emery est un mauvais entraineur au vue de son palmarès avec Séville, on le sent honnête et bosseur. Mais à ce niveau le management est plus important que l’entrainement. J’aurais souhaité qu’il s’impose et impose davantage ses choix tactiques mais sans le soutien de ses dirigeants cela était plus complexe.

Le roc et la roche.

VIRAGE : tu ferais venir qui du coup pour la saison prochaine ? (ndlr : l’interview a été faite avant la rumeur insistante sur Tuchel)

Sur le marché il n’y en a pas énormément. Allegri, Ancelotti, Henrique. Conté ce serait du court terme, avec lui tu auras un conflit avec les joueurs ou les dirigeants à un moment ou à un autre.
Pochettino, je l’adore, je le connais, c’est exceptionnel ce qu’il fait mais il gère de jeunes joueurs et il doit continuer à faire grandir le projet des Spurs.
Il faut un entraineur de caractère car ce qui se passe depuis 3 ans est par moment inacceptable dans la liberté qui est accordée à certains joueurs. Maintenant tu as même les femmes des joueurs qui font des tweets ! Je parle aujourd’hui comme un supporter car ça fait des années que je vais au stade en tant qu’abonné. Mais ça fait quand même chier de voir que l’institution et certains entraineurs ne soient pas plus défendus que ça.
J’aimerais des dirigeants forts, capables de dire deux mots à des joueurs qui ne savent pas que le club a déjà gagné une coupe d’Europe.
Ibra, malgré tout le respect que j’ai pour lui et ce qu’il a fait pour le club, ses déclarations sur la France et le club étaient par moment forts déplacées, ce n’était pas possible.

Et puis quand Draxler parle sur l’entraineur, le match d’après il est titulaire. Ce n’est pas possible ça et pourtant j’apprécie le joueur. C’est comme Verratti, magnifique joueur, qui pose avec le maillot du Barca, en début de saison puis se fait expulser contre le Real. Néanmoins on l’applaudit comme si rien ne s’était passé. Par moment j’ai du mal à comprendre, on me parle de fidélité, de respect de l’institution, c’est ce que veulent les supporters.
je me rappelle qu’à mon époque on nous pardonnait moins de chose on se serait fait siffler. Donc pour franchir le palier, il faut un entraîneur de poigne et une direction de poigne. Regarde Lewandowski qui fait des déclarations comme quoi il veut aller au Real. Il s’est fait reprendre sérieusement par l’entraineur et la direction du Bayern.
Je souhaiterais un entraineur qui puisse transmettre des émotions à ses joueurs, qui leur donne cette force de pourvoir renverser des montagnes. Comme certaines équipes en ont eu dans cette ligue des champions avec plusieurs systèmes tactiques qui peuvent faire la différence dans les matchs de très niveau.

J’ai adoré travailler sur la préformation

VIRAGE : Parlons de ton présent, tu es Président de la société Sponsorlive. Comme ça s’est passé ?

Encore une opportunité. On m’a présenté ce projet via des connaissances. A l’époque je commentais les matchs, j’avais du temps. J’ai toujours été salarié donc je me suis dit pourquoi pas. Je commençais à faire des missions commerciales pour eux et puis quelqu’un a quitté la présidence de la société, on m’a proposé d’en prendre la tête, j’ai dit oui. Aujourd’hui c’est 80% de mon temps.

VIRAGE : Mais alors qu’est ce que SPONSORLIVE ?

C’est une application de gaming communautaire dédiée aux fans de foot pour le moment mais on a pour objectif de dupliquer le concept sur d’autres sports. Sur FANLIVE tu as plusieurs fonctionnalités, des quizz, des pronostics, divers jeux qui te permettent de cumuler des points, Ces points te donnent droit à des lots en fin de mois en fonction de ton classement. Tu as aussi des news car on a un partenariat avec Sport 365. On a toutes les informations en temps réel que tu peux filtrer en choisissant les news de ton club favori.
Nous sommes en phase de fournir à certains clubs professionnels, qui ne sont pas munis d’application mobile, la possibilité d’utiliser notre application en marque blanche aux couleurs de leur club.
La prochaine nouveauté dans les mois à venir sera du Fantasy Football intégré à l’application actuelle. Nous sommes très ambitieux pour la suite de notre projet car le potentiel est très important.
Néanmoins, le nerf de la guerre est l’argent afin de nous permettre de nous développer plus rapidement ce que nous recherchons actuellement.

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Gare au Renard

VIRAGE : Tu aimerais retravailler dans un club ?

C’est mon rêve. En tant que directeur sportif. Pas seulement le recrutement. S’occuper des jeunes, de la formation, des contrats, des joueurs. J’ai adoré travailler sur la préformation et la formation au PSG avec Bertrand Reuzeau. Notre travail et celui des éducateurs a porté ses fruits avec les Sakho, Rabiot, Kimpembe, Augustin, Coman, Nkunku… Je suis super fier de ce qu’on a fait avec Adrien Rabiot par exemple. C’est Pierre Reynaud (ndlr : recruteur chez les jeunes) qui est venu me voir avec Bertrand Reuzeau (directeur du centre de formation à l’époque) quand Adrien avait 15 ans. Il revenait de Manchester City et il m’a dit qu’il fallait qu’on le recrute et que l’on ne le regretterait pas. Je ne le connaissais pas. On a rencontré sa mère une première fois et ça ne s’est pas très bien passé mais tout s’est apaisé par la suite et lui et sa maman nous on fait confiance. Adrien s’est engagé avec le PSG. Ce sont des coups dont tu es fier, qui se sont faits avec des gens de confiance.

Comme nous sommes fiers de la réussite de Mamadou Sakho, même si certains éducateurs (déclarations lues dans les journaux) tentent de s’approprier la réussite du joueur mais c’est lui qui a passé toutes les catégories de jeunes au PSG avec brio. Les entraineurs différents qui l’ont accompagné dans sa progression ne peuvent revendiquer seuls cette réussite.
La reconnaissance individuelle dans le foot est inadmissible, elle est toujours collective.
N’oublions pas que les jeunes joueurs font bien plus d’efforts que quiconque pour réussir à devenir un joueur professionnel.
Tout ça reste un travail d’équipe.


Xavier Chevalier
 
Benjamin Navet

Stickers PSG

On continue notre voyage au coeur du monde du supporterisme avec un volet consacré aux stickers des groupes installés dans les Virages du Parc des Princes.
A cette occasion, on a rencontré Guillaume Bassimon qui collectionne
tous les stickers depuis presque 15 ans.
Plongeons dans cet univers haut en couleurs.


Virage : Comment commence ton histoire avec le PSG

Je suis supporter depuis l’âge de 12 ans. C’est mon parrain qui m’a transmis la passion. Il m’a emmené au parc, j’ai fait des déplacements avec lui, ça m’a permis d’en apprendre plus sur le club. La passion est venue petit à petit. Depuis je n’ai jamais lâché.

Virage : Premier Match ?

Je crois que c’était la saison 2002-2003. C’était un PSG-Lille. Victoire 1-0 (ndlr : 29 janvier 2003 – But de Pochettino).

Virage : Vous alliez dans quelle tribune ?

Tribune Boulogne. Dans le Kop. En R1 Rouge. Je me souviens on allait avec ses amis aux 3 obus, on prenait des bières tranquillement, on se rapprochait du stade. Victoire ou pas, ça restait conviviale, on retournait boire un verre après le match.

 

Virage : Tu as té pris par l’ambiance ?

Oui par la ferveur.

Virage : Puisqu’on parle de ferveur, que penses-tu de l’ambiance actuelle en Virage Auteuil ?

Je trouve que c’est une bonne chose. Après 2010 lorsqu’il n’y avait plus de groupe, tu voyais tout de suite la différence. Ce qui me choquait c’est lorsque l’équipe perdait, ça sifflait. On m’a toujours dit « siffler sur nos joueurs, c’est craché sur nos couleurs ». Ça m’a dégoutté du coup je suis moins allé au Parc. Aujourd’hui l’ambiance revient progressivement. Il faut que les nouveaux intègrent la mentalité ultra, car c’est particulier. On mange avec le club, on vit avec le club, H24…

    

Virage : Est-ce qu’il a des joueurs qui t’ont marqué pendant tes premières années ?

Pedro Miguel Pauleta et Mamadou Sakho. J’ai pas accroché sur l’ère actuelle avec Zlatan et les autres stars. Mais j’aimas bien Lavezzi. C’est un peu dur ce que je vais dire mais j’ai l’impression que les joueurs d’aujourd’hui n’ont pas intégré la ferveur, l’esprit club. Ils portent le maillot mais ils n’ont pas l’amour du maillot. Il manque un peu ça aujourd’hui. Peut être que ça viendra. Et puis quand le match est terminé, ne pas rentrer au vestiaire. Il faut qu’ils viennent saluer les supporters. Pas forcément jeter des maillots mais au moins remercier les supporters d’être venus les soutenir. C’est la moindre des choses.

   

Virage : Comment en es-tu arrivé à collectionner les stickers des groupes de supporters du PSG ?

Une fois encore c’est mon parrain qui en est à l’origine. A la fin des matchs il m’en donnait. Je les gardais dans une pochette plastique. Et puis au fur et à mesure que la collection grandissait, je me suis pris au jeu. Je me suis dit qu’il fallait faire quelque-chose, que ça pourrait servir plus tard.

Virage : En fait c’est un peu comme une collection Panini ?

Oui mais en mieux (rire). Et puis aucun d’entre eux n’a été collé sur un mur ! Ils sont dans leur état d’origine.

Virage : Et comment faisais-tu pour trouver tous ces stickers ?

A la sortie du stade après les matchs. Ou en déplacement. Je repérais les personnes à leurs écharpes. Et j’allais à leur rencontre pour leur demander si ils avaient des stickers à me donner. Je me présentais comme un collectionneur. Parfois ils étaient réticents mais on faisait parfois des échanges comme avec les images Panini. Il y a aussi des amis qui récupéraient des stickers pour moi au Parc. En tout cas pour moi ça n’a jamais été un business. Un sticker ça se colle ou ça se garde pour soi.

      

Virage : Tu sais combien tu as de stickers au total ?

Difficile à dire, dans les 250 je pense. Mais de tous les groupes. Des Firebirds aux Rangers. Je crois que j’ai à peu près tout ce qui est sorti. Par contre je ne peux pas te donner la datation même si je sais qu’il y en a qui datent pas mal.

Virage : Est-ce qu’il y a dans ta collection un sticker qui compte plus pour toi ?

C’est dur à dire. Le premier bien sur, celui que mon parrain m’a offert.

Virage : Tu continues ta collection avec les groupes actuels ?

Non parce que je vais moins au Parc des Princes. Mais j’aimerais bien continuer, si il y a moyen d’avoir des contacts avec le CUP je suis preneur (*). 

   

Virage : Si un jour le club te propose de prêter ta collection pour monter une exposition ou un musée sur l’histoire du club et de ses supporters, tu serais partant ?

Bien-sur. J’attends de voir l’évolution du club mais je serais partant.

*Pour contacter Guillaume en vue d’échanges ou de dons de stickers : guillaume.bassimon@orange.fr


Xavier Chevalier

L’aigle des Açores

Pedro Miguel Pauleta et le PSG, c’est pour la vie. Il existe, entre le buteur portugais (109 buts avec Paris) et le public parisien un amour inconditionnel.
Durant 5 saisons (2003-2008), l’Aigle a fait rêver le Parc en déployant ses ailes. Inoubliables sensations. Le PSG enchaînait les crises sportives, lui enchaînait les buts. Et marquait pour toujours le Paris Saint-Germain.

Le 6 mars, Pedro Miguel Pauleta était au Parc pour le 1/8ème de finale retour face au Real Madrid. Le lendemain, nous le rencontrions Porte d’Auteuil. Un grand merci à lui.

Pedro, quelle est votre sentiment après PSG – Real ?
Je suis triste. C’est dommage de perdre comme ça. A l’aller, Paris avait mieux joué. Je n’avais pas senti de différence entre les 2 équipes. Au Parc, Paris n’a pas fait un bon match, je trouve qu’on a trop respecté le Real. Quand tu joues pour le Paris Saint-Germain, tu dois tout donner pour le club quand tu es sur le terrain. C’est le plus important.

Après, se qualifier, je comprends que ce ne soit pas facile… Le Real, c’est 12 Ligues des Champions, dont les 2 dernières. Paris a encore besoin de grandir. Il faut continuer de chercher, trouver les bonnes solutions…

Comment vivez-vous les matches dans la tribune ?
Comme un supporter du PSG. J’ai toujours envie de les voir gagner. Quand on a la chance d’avoir été sur le terrain, ce n’est pas trop facile d’être “en dehors“. Cela fait 10 ans que j’ai arrêté mais vous savez, parfois, j’ai toujours envie d’aller sur la pelouse avec les joueurs (sourires). Après, j’aime bien chercher à comprendre le match, lire le jeu, lire l’équipe. Je suis toujours attentif aux énergies qui émergent du terrain.

Vol Plané N°1

Le PSG peut-il gagner la Ligue des Champions ?
Je continue de penser que oui. Un jour, Paris la gagnera. Mais cela ne se fait pas en un jour. Il faut s’habituer à cette pression. Regardez Manchester City, cela fait des années qu’ils investissent beaucoup d’argent. Ils ne l’ont toujours pas gagnée. Il faut apprendre, et y croire.

Vous avez joué la C1 une saison avec Paris, en 2004-2005 ?
Oui la 1ère saison (2003-2004), nous avons fini 2è en championnat, derrière Lyon. Ensuite, nous avons perdu des joueurs importants. La saison suivante a été compliquée. Nous n’avons pas fait un bon parcours en Ligue des Champions*. Nous avons aussi joué la Coupe UEFA (2006-2007).

Vol plané N°2

Comment ressentez-vous le lien qui vous unit aux supporters ?
J’ai terminé ma carrière au PSG il y a 10 ans. Depuis, chaque fois, vraiment chaque fois que je retourne à Paris, je ressens quelque chose de fort. Dès le 1er jour, j’ai été très bien reçu ici. J’ai tout de suite aimé les supporters. Les gens attendaient que je marque des buts. En même temps, j’ai toujours senti la confiance de tout le monde. Les supporters ont toujours été gentils avec moi. Quand à l’échauffement, tu entends 40 000, 45 000 personnes qui t’encouragent, qui disent ton nom, tu n’as qu’une envie, marquer pour eux. Je me disais, je suis obligé de marquer pour eux.

Les supporters, ils ne trichent pas avec le club. Pour moi leur soutien, leurs regards, c’est le plus important.
Au Parc face au Real, ils n’ont rien lâché. J’espère que cela va continuer.

Quelle est votre plus grande émotion en Rouge et Bleu ?
PSG – Saint-Etienne, mon dernier match au Parc (J37, PSG 1-1 ASSE, 10 mai 2008). Le Parc était magnifique, les tifos, l’Aigle des Açores… Je garde toujours cette image dans ma tête. Je la garderai pour toujours. J’ai été touché beaucoup. Ce match, il n’a pas été facile à gérer. Il fallait jouer, et ensuite dire au revoir au Parc.

L’hommage du Virage.

A ce moment, Paris n’avait pas assuré son maintien.
Il restait un match, et la finale de Coupe de France. Mais le maintien, c’était la priorité des priorités. Quitter Paris en Ligue 2 était pour moi inimaginable. Je m’étais dit : “si on descend, tu as l’obligation de rester“. Je n’aurais pas pu partir là-dessus. Ce fut une année éprouvante, il y a eu beaucoup de bêtises qui ont été faites. Nous sommes quand même restés soudés.

Amaré Diané nous confiait qu’à Sochaux (J38) dans le vestiaire, vous avez eu des mots qui l’ont touché, mis en confiance.
On comptait beaucoup sur lui, et quand Amara était en confiance, il était très important. La confiance, c’est très important pour un attaquant. Il a été décisif, on était heureux pour lui, pour le club. Tout cela a été un grand soulagement, même si tout de suite après, on pensait à gagner la Coupe.

Vol plané N°3

Comment s’est passé votre 1er contact avec Paris ?
C’était à l’Olympia, aux Trophées UNPF en 2003. J’avais reçu mon trophée (meilleur joueur du championnat de France, ndlr) et à la fin de la cérémonie, j’étais en train de partir. Là je croise un Monsieur qui me dit : “Je veux te faire venir à Paris“. A l’époque, je ne connaissais pas encore Francis Graille**, donc il me dit ça et cela s’arrête ici. Après effectivement, le PSG a pris contact avec Bordeaux.

Quitter Bordeaux a été une décision difficile à prendre. Ce club m’a vraiment bien accueilli en France. Je lui suis reconnaissant pour cela. Quand je suis arrivé, Elie Baup ne me connaissait pas trop. On s’est beaucoup appréciés. On est restés amis.

Lors de votre 1er match en Ligue 1, vous annoncez la couleur : 3 buts, face à Nantes et Mickael Landreau ?
Je m’en souviens très bien. C’était la 6è journée (Nantes 0-5 Bordeaux, 06 septembre 2000, ndlr). Marquer un triplé dès ton 1er match, cela te procure une confiance énorme. Je venais d’arriver. Avec La Corogne, on avait gagné la SuperCoupe d’Espagne (27 août 2000, La Corogne 2-0 Espanyol Barcelone, ndlr), ensuite je suis parti en sélection et je signe à Bordeaux vraiment dans les dernières heures du mercato. Sylvain Wiltord venait d’être transféré à Arsenal.

Vol plané N°4

Auriez-vous pu jouer à un autre poste que celui d’attaquant ?
(Sourires) Non… Défenseur, gardien de but, ce n’est pas mon truc. Le foot pour moi, c’est marquer des buts ! Je ne pensais qu’à ça sur le terrain. A partir de l’âge de 9 ans, dans le petit club des Açores “Comunidad Jovem“ où j’ai commencé, je voulais toujours marquer des buts.

Quel est votre plus beau but avec Paris ?
Il y en a plusieurs mais c’est vrai que celui contre Marseille lors de mon 1er classico (PSG-OM, 2-1, 25 avril 2004, ndlr) est pour moi, peut-être le plus spectaculaire. C’était au Parc, je découvrais l’ambiance extraordinaire d’un PSG-OM. J’arrive sur Barthez dans la surface de réparation, je sais qu’il ne va pas tomber ni plonger alors je m’éloigne le plus vite possible vers le bord du terrain et je cadre pour marquer le but. Je vois qu’il est battu, la balle passe juste en dessous de la transversale. J’ai marqué 2 buts ce soir-là mais le 1er était le plus beau.

Vol plané N°5

J’aime bien aussi mon but en ½ finale de Coupe de France à Nantes (FCNA 1-2 PSG, 20 avril 2006, ndlr). J’avais une contracture, j’ai tout fait pour essayer de jouer. J’ai la chance de marquer (86’) et on va jouer l’OM en finale.

Le but face à Ajaccio aussi, le dernier match au Parc en 2006. Une reprise de volée du droit avec de l’effet, sur une belle passe d’Edouard Cissé. La reprise de volée, c’était mon geste préféré.

Avez-vous toujours célébré vos buts en déployant vos ailes ?
J’ai commencé à le faire quand je suis arrivé à Salamanque. C’est un hommage à mon île, à laquelle je suis très attaché.

Vol plané N°6

Durant 3 saisons (2005-2008), vous avez été un capitaine toujours humble, exemplaire, même quand Paul Le Guen vous a mis sur le banc.
A un moment, Paul Le Guen et son adjoint avaient décidé que je devais être remplaçant (2007-2008). Je ne vais pas dire que je l’ai bien vécu. J’avais toujours été titulaire, alors c’était une situation spéciale. Mais j’ai toujours respecté mes entraineurs, le club. J’aurais pu parler mais je n’ai pas voulu. L’intérêt du club passe toujours avant. Je devais continuer à donner le meilleur de moi-même.

Voulez-vous adresser un message aux supporters ?
Je veux toujours leur dire merci. Je veux leur dire que j’ai beaucoup de respect pour eux. Ce sont de grands supporters. Le regard qu’ils me portent reste ma plus grande fierté.

L’amour toujours. Et la fidélité aussi.

Pedro Miguel Pauleta
Ne le 28 avril 1973 à Ponta Delgada (Ile des Açores, Por.)
Attaquant, 1m80
International portugais (88 sélections, 47 buts)

Clubs : Uniao Micaelense (1994-1995, Ile des Açores, D3 portugaise), Estoril (1995-1996, D2 portugaise), Salamanque (1996-1998, D2 puis D1 espagnole), Deportivo La Corogne (1998-2000, Esp.), Bordeaux (2000-2003), PSG (2003-2008)

Palmarès :
Meilleur buteur du championnat du Portugal D2 (1996)
Champion d’Espagne (2000)
Vainqueur de la Super Coupe d’Espagne (2000)
Joueur étranger du Championnat de France par France Football (2001, 2002)
Meilleur Joueur du Championnat de France (2002, 2003, Trophées UNFP)
Meilleur buteur du Championnat de France (2002, 2006, 2007)
Finaliste du Championnat d’Europe 2004 avec le Portugal
Meilleur buteur des phases qualificatives de la Coupe du monde 2006
Vainqueur de la Coupe de France (2004, 2006)
Vainqueur de la Coupe de la Ligue (2002, 2008)

211 matches, 109 buts avec le PSG
Actuel 3ème meilleur buteur de l’histoire du PSG
200 buts en France (91 avec Bordeaux, 109 avec Paris)

Actuellement, directeur de la formation et vice-président de la Fédération Portugaise de Football

*1 seule victoire en 6 matches de Ligue des Champions, face au champion en titre Porto 2-0 (buts de Coridon, Pauleta). Le PSG termine dernier du groupe H (Chelsea, Porto, PSG, CSKA Moscou) et est éliminé dès la phase de poule. En 2006-2007, Pauleta a inscrit 6 buts en Coupe UEFA
**Président du PSG de 2003 à 2005


Emilie Pilet

Welcome Neymar Jr.

Devant sa galerie, les passants défilent pour prendre leur selfie avec Neymar.
Tout au moins avec son imposant portrait, peint par le graffeur parisien Banga.
L’artiste a peint ce tableau XXL en septembre dernier
pour la venue de la star brésilienne à Paris.
Il nous a reçus dans sa galerie, aux Puces de Clignancourt.


Banga, qu’est-ce qui vous a donné envie de peindre Neymar ?
J’aime le foot et mon idole depuis tout jeune, c’est Pelé. Quand Neymar a signé à Paris, je me suis automatiquement dit qu’il fallait marquer le coup. Pour moi Neymar, c’est l’héritier du « Roi » Pelé. Il fait rêver tous les jeunes, dont mon fils, qui s’appelle Riyo.

Il y a 10 ans, je l’ai emmené au Brésil. Je voulais qu’il voit les conditions de vie là-bas, dans les favelas, comment les jeunes sont livrés à eux-mêmes. On a partagé avec eux, joué au foot… Ça m’a rappelé mon enfance en Guadeloupe. Il y a des favelas aux Antilles, sauf qu’on appelle ça le « ghetto ». Nous avons une histoire commune issue de l’esclavage.

Avec cette toile, j’ai voulu faire un clin d’œil à Neymar, qui a grandi dans les favelas. De par ses origines, son parcours, il représente une immense réussite. Pour les gamins des favelas, c’est une vraie fierté. Ça donne la force. C’est un espoir pour énormément de jeunes. On peut partir de zéro et réussir. Neymar vit son rêve et il le fait partager au monde. Sans oublier d’où il vient. Et ici, on est dans la « Street Dream Gallery ». Tout ce qui touche au rêve m’inspire.

(c) SEKA Photography

Quelles sont les dimensions de votre toile ?
Elle mesure 2 mètres de large et 1 mètre 35 pour la hauteur.

Parlez-nous de sa réalisation…
J’ai mis une semaine en tout. Cela s’est passé dans mon atelier juste à côté (marché Malik, aux Puces de Clignancourt).

J’ai commencé par dessiner le drapeau du Brésil en fond. Les Brésiliens ont un rapport très fort avec leur pays, et même à Paris, au PSG on aime les couleurs du Brésil. Ensuite, j’ai pris une photo de Neymar en noir et blanc que j’ai voulu retranscrire en couleur. J’ai peint son visage avec une technique qui s’appelle le dripping (projection de peinture sur une toile posée à plat). J’ai intégré le drapeau dans la couleur de sa peau.
Pour le fond, j’ai pris les couleurs du Paris Saint-Germain. Il venait de signer à Paris. J’ai d’ailleurs appelé la toile « Welcome Neymar Jr ».

Et ensuite, je suis rentré davantage dans les détails, comme ses tatouages. Les écritures, sur son torse, c’est son vrai tatouage. A sa droite, c’est le portrait de sa maman que j’ai essayé de reproduire au plus ressemblant. Les mamans, c’est très important.
J’ai peint à la bombe, et les détails, à l’aérographe, à main levée.

Vous êtes né en 1970 comme le PSG. Parlez-nous un peu de vous ?
Je suis né en Guadeloupe, je suis arrivé à l’âge de 5 ans à Paris, dans le 18ème avec ma mère, mes frères et soeurs. Je n’ai pas connu mon père. A côté de chez moi, il y avait un squat : « Chicago ». Tous les meilleurs danseurs de Paris venaient là-bas. J’ai appris à danser avec eux. J’avais 8 ans. 

A 12 ans, j’ai eu une révélation quand j’ai vu le clip de Grandmaster Flash « The Message ». J’ai compris que la rue avait une culture puissante qui est le hip-hop. C’est devenu une passion, je me suis mis à la danse (Electric Boogie, Break Dance). Au début des années 1980, il y avait les danseurs de Mickael Jackson au Trocadéro, ceux qui ont fait le clip « Beat It ». On était là avec eux, ils nous apprenaient des pas. Ils nous ont beaucoup transmis.

(c) SEKA Photography

Comment en êtes vous venu au graffiti ?
J’étais corps et âmes dans la culture hip-hop…
J’ai signé mes premiers tags en 1984, à 14 ans. Paco Rabanne avait ouvert une salle à Paris. J’allais danser là-bas. Et un jour, j’ai vu un graff de Bando. Ça a été un déclic. Ça m’a donné envie de peindre, ainsi que le livre « Subway Art » (Martha Cooper – Henry Chalfant) qui est devenu un best seller. Il a véhiculé le graffiti dans le monde entier.

Au début, c’était beaucoup de métros, de terrains vagues, fresques : il y avait énormément de concurrence. La philosophie du hip-hop, c’est d’être le meilleur dans ce que tu fais, cela fait évoluer le style, ça t’oblige à travailler trois fois plus. 

En 1990, j’ai créé le collectif BASALT (Expression Murale). C’est une association avec comme but : transmettre et initier les plus jeunes aux fondations et à l’art du graffiti dans les quartiers les plus défavorisés. C’est important pour nous de faire perdurer cette culture. Elle est, à nos yeux, la plus complète et la plus importante de ce siècle. Elle a fait sortir énormément de jeunes du ghetto, comme Jean-Michel Basquiat, Rihanna, Jay-Z pour ne citer qu’eux.

Vous avez aussi donné des cours de graff à la Fac !
Oui, c’était à l’Université Paris VIII Saint-Denis avec une Professeur des Beaux-Arts. Une UV (Unité de Valeur) avait été créée sur « L’art de la rue ». Une petite révolution à l’époque. J’ai aussi créé ma marque « Banga Style », spécialisée dans la personnalisation de vêtements. Nous avions plusieurs boutiques à Paris, et avons fait beaucoup de t-shirts.
Aujourd’hui, j’ai ma galerie ici aux Puces de Clignancourt (Street Dream Gallery). C’est un rêve qui est devenu réalité.

(c) Emilie Pilet

Liens :
Site officiel de Banga : Cliquez ici
Collectif Basalt : Cliquez ici


Emilie Pilet

PSG-REAL pour la vie

Les PSG-Real, il connaît bien. Il en a vécu quatre avec le Paris Saint-Germain. Deux à Bernabeu, deux au Parc dont l’exploit inoubliable (4-1) en 1993. Le match le plus intense de sa vie. Probablement aussi de celle du PSG. Patrick Colleter est un défenseur qui ne lâchait jamais rien. Y compris face au Real.
Il a tout vécu de l’intérieur, alors il nous raconte. En attendant demain.


Bernabeu plein à craquer

D’abord, il y a le match à Bernabeu (2 mars 1993). Un mardi. En face, c’était la grosse grosse équipe du Real, leader de la Liga. Avant d’en arriver là, on avait sorti le PAOK Salonique, Naples, Anderlecht. Entre Paris et Madrid, on se remet donc en configuration Coupe d’Europe. On ne se met pas plus de pression que ça. On n’était pas intimidés. On avait beaucoup d’envie. L’enjeu, c’était les ½ finales.

Jour J… On y est. La causerie d’Artur Jorge, je ne m’en souviens pas du tout. Moi avant un match, je suis totalement dans ma bulle. J’ai juste besoin de savoir qui joue, la tactique et ensuite je suis vraiment dans mon truc. Je n’ai pas besoin d’être motivé. Et puis face au Real, c’est vraiment le très, très haut niveau, tu joues au foot pour vivre ça.

Hey, Give Me Five !

Je découvrais Santiago Bernabeu. Un stade magnifique, plein à craquer, ambiance de folie. Encore une fois, on joue au foot pour ça. Aucune appréhension.

On est menés 2-0 à la pause, buts de Butragueño et Zamorano. Juste après la mi-temps, on réussit à marquer rapidement, tête de David Ginola sur un corner de Valdo (49’).

Et là, à la 89ème, j’ai une grosse occasion pour égaliser. Je ne sais pas ce que je fais là, je pars seul en direction du but, je donne la balle à Valdo, qui me la redonne, je me retrouve tout seul face au gardien. Je rate et on prend le 3ème juste derrière. Zamorano part en contre, penalty… En une minute, on passe de presque 2-2 à 3-1. Ce n’est plus du tout la même histoire.

Je m’en suis beaucoup voulu

Sur le coup, je m’en suis beaucoup voulu car cela change beaucoup nos chances de qualification. Après je me dis que c’était peut-être écrit… Sans grosse défaite, pas d’exploit possible au Parc (sourires).

Dans le vestiaire après le match, l’état d’esprit qui domine, en un mot c’est : déception. On fait plutôt un bon match, on a les occasions et au final on en prend 3. Ça pique. On était très déçus mais on sentait qu’il y avait la place.

On sentait que malgré tout, on les avait un peu bousculés. On n’était pas sûrs à 100% de notre fait, mais on était confiants. On rentre sur Paris, on enchaîne avec le championnat, qu’il ne fallait pas non plus négliger. Avec toujours le Real dans un coin de la tête.

Mister Président

Le Parc prêt à exploser

18 mars 1993. On y est. PSG-Real. Un jeudi. On entre sur la pelouse, et là on sent tout de suite une atmosphère spéciale. Très spéciale. Une ambiance de malade, je n’avais jamais vu ça au Parc. C’était exceptionnel. Extraordinaire. On avait le Parc tout entier derrière nous. On l’a senti dès les premiers ballons. Le public était prêt à exploser avec nous. Ils nous ont énormément aidés.

(Weah, 31’), 2-0 (Ginola, 81’), 3-0 (Valdo, 89’), là on est qualifiés… Quand on prend le but de Zamorano à la fin (3-1, 90’), si les supporters ne sont pas là, s’ils ne nous poussent pas comme ils le font, je ne sais pas si on met le 4ème (96’)…

Stop, look, listen to your heart, Valdo t’écarte

C’est grâce à nos supporters

Tous ensemble, on a poussé. Il faut leur rendre hommage là-dessus. Même en championnat, c’était une période où vraiment, ils étaient derrière nous. On avait confiance en nous, mais cette victoire, c’est aussi grâce à eux. C’est sûr et certain.

Moi personnellement cette ambiance, ça me transcende. Elle te motive quand tu n’es pas bien physiquement, tu n’as pas le droit de baisser les bras. Je le ressentais quand je commençais à puiser dans mes réserves.

Les demi c’est par là !

Je n’ai jamais revu le match. Enfin si mais il y a longtemps. Je ne sais pas si cela se voit mais on avait cette confiance. On savait au fond de nous qu’il y avait la possibilité de passer.

L’an dernier, quand Paris gagne 4-0 au Parc face au Barça, c’est quelque chose d’énorme. Le 6-1 au Camp Nou a malheureusement mis aux oubliettes l’exploit de l’aller… Nous c’était l’inverse, on perd 3-1 et on arrive avec un scénario exceptionnel, en plus au Parc.

C’est le match le plus intense que j’ai jamais joué. Il y a tout eu. C’était fou. Il y avait une telle qualité dans le jeu, une telle communion avec le public, une telle dramaturgie. Des moments comme celui-là, je n’en revivrai plus jamais.

Butragueño, Zamorano : compliqué

Au Real, il y avait une paire d’attaquants redoutable : Butragueño & Zamorano. Des adversaires très compliqués à marquer. Michel au milieu était un super joueur de ballon. Hierro en défense… C’était du lourd. En tant que défenseur, la paire d’attaquants que j’avais face à moi, elle n’était pas facile du tout à contenir. Butragueño, il était très dur à marquer dans ses déplacements. Zamorano, c’est un super attaquant aussi, excellent de la tête.

Pour préparer les matches, on n’utilisait pas la vidéo comme aujourd’hui. C’était plus des rapports écrits sur les joueurs, leurs caractéristiques. On s’imprégnait un peu de tout ça… Même si ça ne suffisait pas toujours (sourires).

El Commodore

Tonio “Casque d’Or“

96ème. Coup franc pour nous. Je ne montais jamais sur les coups de pied arrêtés, surtout avec les joueurs de tête qu’on avait. Quand Valdo frappe, je suis dans le rond central, je vois la tête d’Antoine, je suis la trajectoire des yeux… Ensuite, c’est l’euphorie. L’euphorie totale. Le stade est bouillant, tu cours partout, tu ne sais plus où tu es.

C’était magique. Si on pouvait revenir en arrière pour vivre de tels moments…. Mais c’est une fois dans une vie. Je suis déjà content de l’avoir vécu.

Qu’est ce qui se passe ensuite ? Je ne me souviens pas trop. Je sais qu’on est resté un bon moment sur le terrain, partager notre joie avec le public, mais j’étais dans un état second. Dans le vestiaire, je me souviens simplement qu’on saute partout. C’était une joie absolue. On vient de faire un match qui va rester dans l’histoire du club. Quelque part, c’est une fierté.

Douche VIP : Woody Harrelson et Patrick en arrière plan…

Antoine Kombouaré est devenu « Casque d’Or », « Tête d’Or ». Pour nous, c’était toujours Tonio. On était heureux pour lui. C’est un super mec. Il ne faut pas oublier que sur ce match, il remplaçait Alain (Roche) qui avait pris un rouge à l’aller. Il ne faut pas oublier non plus qu’il a marqué d’autres buts très très importants. A Anderlecht en 1/8èmes, c’est lui qui nous qualifie pour les ¼, de la tête aussi ! (74’, but de Kombouaré de la tête sur un corner de Valdo, Anderlecht 1-1 PSG, ndlr).

Face au Real, c’est encore sa tête qui nous qualifie en ½. Le problème ensuite, c’est qu’on se fait éliminer par la Juve (Juventus 2-1 PSG, PSG 0-1 Juventus, ndlr). Là bas, on se fait tordre. Doublé de Baggio, avec un but sur coup franc à la dernière minute. Au retour, l’arbitre oublie de siffler une faute flagrante sur Weah, après un de ses slaloms dont il a le secret. C’est une grosse frustration de ne pas aller au bout. Sur les 2 matches, on ne mérite pas de se qualifier.

Le match le plus fort de ma vie

En 1996, on gagne la Coupe d’Europe (PSG 1-0 Rapid de Vienne, Coupe des Vainqueurs de Coupe), c’était magnifique, mais ce ¼ de finale face au Real, dans son scénario, son suspens, reste le plus fort. Il y a tout eu. Le match en lui-même est inoubliable.

En 1994, on a rejoué 2 fois face au Real (1/4 de finale, Coupe des Vainqueurs de Coupe). On gagne chez eux 1-0 (but de George Weah), match nul au Parc (1-1, buts de Butragueño et Ricardo). J’ai beaucoup moins de souvenirs cette année-là. Mais éliminer deux fois le Real coup sur coup, ça voulait dire qu’on avait grandit.

En Coupe d’Europe avec Paris, j’ai vécu des moments intenses. On a joué le Milan AC, Barcelone, le Bayern, La Corogne, Naples, Arsenal, la Juve. On a gagné la Coupe d’Europe, on a descendu les Champs en voitures décapotables, on est allés à l’Elysée.

Le Onze Real : Kombouaré – Ricardo – Le Guen – Sassus – Lama – Weah – Simba – Ginola – Colleter – Guérin – Valdo.

14 février 2018

Le 14 février je serai devant ma télévision, il n’y a pas de débat possible. Le 6 mars, je ne sais pas, peut-être que le PSG va nous inviter ? Ce serait un beau clin d’œil (sourires). Quoiqu’il arrive, je serai à fond derrière eux.

Le PSG va-t-il passer ? Aujourd’hui je suis très partagé. Je me dis d’un côté, au Real, ils n’ont plus que la Ligue des Champions, A Paris, il faut « absolument » qu’ils gagnent. Ne pas passer les 1/8èmes à nouveau, ce serait un problème.

Une chose est sûre, Paris actuellement est sûr de son football.

Le Real, beaucoup moins, mais on sait que les grandes équipes se réveillent toujours quand il faut. Je donne un petit avantage à Paris. Mon pronostic : Real 1-1 PSG à l’aller, PSG 2-1 Real au retour.

Bon match à tous, et allez Paris !


Feuille de match PSG – Real Madrid (1/4 finale retour Coupe de l’UEFA)
3-1 (1-0), 18 mars 1993, Parc des Princes (46 000)
Paris SG : Lama – Sassus (Germain 77’), Kombouaré, Ricardo, Colleter – Le Guen, Guérin, Valdo – Simba (Bravo 72’), Weah, Ginola
Entraîneur : Artur Jorge

Real Madrid : Buyo – Nando, Ramis, Ricardo Rocha, Lasa, Hierro – Luis Enrique (Alfonso 80), Proinecki, Michel – Butragueno (Villaroya 63’), Zamorano
Entraîneur : Benito Floro

Buts : Weah 33’, Ginola 81’, Valdo 89’, Kombouaré 96’ pur le PSG; Zamorano 91’ pour le Réal

Arbitre : M.Puhl (Hongrie)
Avertissements : Sassus (60’) pour le PSG ; Villaroya (69’) pour le Real

Patrick Colleter
Né le 6 novembre 1965 à Brest
Défenseur, 1m78
Joueur du PSG : 1991-1996

Palmarès au PSG
Vainqueur de la Coupe de France (1993)
Champion de France (1994)
Vainqueur de la Coupe de France et de la Coupe de la Ligue (1995)
Vainqueur du Trophée des Champions (1995)
Vainqueur de la Coupe des Vainqueurs de Coupe (1996)
Champion de France (1994)
Vainqueur de la Coupe de France et de la Coupe de la Ligue (1995)
Vainqueur du Trophée des Champions (1995)


Emilie Pilet

François Berléand

Le comédien, né à Paris en 1952, a vu naître le club de la capitale.
Depuis, François Berléand n’a pas manqué une saison du Paris Saint-Germain au Parc. Il fut même abonné dans les années 1980.
Apprenons à mieux connaître le supporter qu’il est…


François, votre toute 1ère fois au Parc, c’était quand ?
PSG-Nancy, en 1974. Si mes souvenirs sont exacts, c’était l’un des premiers matches de Platini. Dans l’équipe du PSG, il y avait M’Pelé. Et à l’époque, j’étais avec ma future femme. C’était le 1er match de foot qu’elle voyait de sa vie. Elle me dit : « Pelé joue ? » Je dis : « Oui, Pelé joue », « Ah oui, ils ont une super équipe à Paris ». Je n’ai pas démenti, jamais ! De toute façon elle s’en foutait.

En fait, vous suivez le PSG depuis le début ?
Oui c’est drôle car j’habitais juste à côté du Parc des Princes. J’ai connu le Parc d’avant, rouge en briques, les travaux, et le nouveau Parc en 1972. Quand le PSG s’y est installé (1974), j’y allais à pied, c’était pratique. C’est vraiment le PSG qui m’a fait venir au Parc. J’achetais des places au jour le jour.

L’abonnement c’était autour de 1 600 Francs

Avez-vous été abonné ?
Le problème que j’ai comme je suis tout le temps au théâtre, c’est que c’est compliqué de prendre un abonnement… J’ai pu m’abonner 1 saison, quand je jouais à 18h au théâtre Chaillot. C’est vraiment la seule année où j’ai pu le faire. J’ai eu de la chance car c’était une superbe saison. L’année où Sušić signe à Paris (1982-1983) avec les Ardiles, Dahleb… Et donc au mois de décembre est arrivé Safet Sušić (1er match PSG 0-1 Monaco, 18/12/1982, entrée de Safet Sušić à la 53’, ndlr).

Osvaldo Ardiles, Georges Peyroche et Safet Sušić

C’était une année extraordinaire. J’étais avec 2 copains, nous étions 3 abonnés dans la tribune, au même niveau que la présidentielle actuelle, mais en face. C’était extraordinaire. Le seul problème, c’est que quand tu es abonné, tu as toujours les mêmes personnes à côté de toi, donc c’est un peu à quitte ou double… Et nous, on n’était pas forcément bien tombés (sourires). Si mes souvenirs sont bons, l’abonnement c’était autour de 1 600 Francs.

Comment était le Parc à l’époque ?
Ce n’était pas majoritairement un public de supporters du PSG. Il y avait beaucoup de « faux Parisiens ». Quand Paris jouait face à Saint-Etienne, il y avait tous les Stéphanois qui venaient, d’autres fois c’était les Bretons. Au Parc, la plupart des gens étaient pour l’équipe adverse. On était plus amoureux du beau jeu. C’était assez étrange car j’étais un vrai supporter du PSG et on se sentait un peu en infériorité numérique. Mais c’était très bon enfant.

J’adore le Parc. L’ambiance, elle est extraordinaire. Le bruit est énorme, les couleurs… On ressent une atmosphère unique, beaucoup plus que dans d’autres stades. Quand les supporters jouent le jeu, l’ambiance est exceptionnelle.
Avec l’équipe qu’on a aujourd’hui, les supporters qui reviennent, c’est magnifique. C’est festif. Et c’est ce que doit être le foot, une fête.

Comment suivez-vous les matches quand vous êtes au théâtre ?
J’enregistre. Depuis que le magnétoscope existe, je n’ai jamais eu de problème pour voir Paris jouer. Par contre, il ne faut rien me dire. Dans le taxi, la radio est éteinte, je mets des Boules Quies du théâtre jusque chez moi, ou du théâtre à l’hôtel… Personne ne doit me dire quoique ce soit. J’arrive assez bien à maîtriser. Le seul « risque » c’est si des proches m’appellent et me disent « tu as vu le match ? », des choses comme ça. Mais maintenant j’éteins mon téléphone.

De temps en temps je suis contre nature

Que ferez-vous le 14 février ?
Je vais jouer en Bretagne, c’est horrible ! Bon, on joue à 20h, donc la pièce finit à 21h30. Je vais tout de suite me brancher sur mon IPad, rentrer à l’hôtel très vite, je vais me mettre le match au début, en différé. Entre la mi-temps, les arrêts de jeu, je vais essayer de rattraper ma ½ heure de retard pour regarder en direct.

Au Parc, comment vivez-vous votre match ?
Le « problème » si je puis dire, quand je suis invité en présidentielle, c’est qu’il faut se tenir. Et donc de temps en temps je suis contre nature. Un peu comme les dirigeants qui ne doivent pas montrer leurs émotions, benh moi je ne bouge pas je ne dis plus rien. Sauf quand il y a un but, là je me lève c’est plus fort que moi.
Je suis un grand passionné de rugby aussi, et c’est la même chose : en présidentielle on parle plus doucement, on ne hurle pas. Il y a l’âge qui fait que je suis plus calme aussi. Il ne faudrait pas risquer la crise cardiaque (sourires).

Vous êtes depuis plusieurs années un habitué de la « corbeille », avez-vous toujours la même place ?
Non, cela change à chaque fois. Il y a pas mal de comédiens. Je connais à peu près 20 personnes à chaque fois.

Comment cela se passe quand on est invité dans le carré ?
Le club vous envoie un message : « bonjour, est-ce que vous voulez venir voir tel match ? ».
Je réponds toujours de façon très reconnaissante, courtoise, même quand je ne peux pas. C’est un privilège de pouvoir assister à un match dans ces conditions. Quand on arrive, c’est assez impressionnant, ils ont fait un travail extraordinaire, les conditions sont exceptionnelles. On peut par exemple revoir les actions sur une télé.

Gerard Darmon est là depuis le début

Le plus fidèle du carré, c’est vous ?
Il y a Gérard Darmon aussi. Il est là depuis le début.

Gérard Darmon

Et Nicolas Sarkozy ?
Oui, il très passionné mais comme je suis plus âgé, c’est moi le plus ancien des deux (sourires).

La composition de la corbeille a-t-elle changé ces derniers temps ?
Non, il y a pas mal de gens qui étaient là avant, même si avec l’arrivée de Neymar, il y a des nouvelles têtes, parfois du très lourd.
Il y a toujours des gens qui n’en n’ont rien à faire et qui viennent se montrer. Ils viennent « dans le dernier endroit où il faut être vu ». Mais cela a toujours été un peu comme ça.
En 1998 pendant la Coupe du monde, au Stade de France, ½ finale France-Croatie. J’étais invité dans une loge par un grand couturier avec beaucoup de gens de la mode. Ils ne connaissaient rien, mais rien de rien au foot. Ils n’en avaient absolument rien à faire. On devait être deux à s’intéresser au match.

Quand tout à coup, je me mets à crier : « Enculé l’arbitre !!! » (rires) Tout le monde me regarde. Je dis : « Bah oui, c’est aussi ça le foot ! » Une comédienne qui était là renchérit « Tu as raison, c’est un gros enfoiré l’arbitre ». C’était rigolo.
De toute façon au Stade de France, l’ambiance est froide. Cela n’a rien à voir avec le Parc. Pour le rugby, c’est un peu différent avec les bandas. Mais rien ne vaut le Parc. L’ambiance y est inouïe.

Rai était venu au théâtre voir l’Enfant Do

Avez-vous déjà fait des déplacements ?
Jamais. Ah si une fois à Marseille au Vélodrome. J’étais en tournage et le réalisateur me propose une place qu’on lui avait donnée. Ce n’était pas en présidentielle. J’étais au milieu de supporters marseillais. Et là, je peux vous dire que je n’ai pas fait le mariolle. Quand le PSG a marqué, je ne pensais qu’à une chose : me maîtriser. Paris gagne 1-0. A la sortie du Vélodrome, j’ai même pris l’accent marseillais : « le PSG, c’est vraiment une équipe de merde ». Ce n’est qu’une fois à l’hôtel que j’ai pu redevenir moi-même et extérioriser ma joie.

Vous venez voir le PSG au Parc, des joueurs sont-ils venus vous voir sur les planches ?
En général, je rencontre plus de joueurs de rugby que de football. Une fois, j’ai rencontré Jallet dans une émission tv, on avait échangé les numéros.
Un jour, il s’est passé quelque chose d’assez incroyable. Raí, qui carrément est venu au théâtre. On ne le savait pas. En coulisses, quelqu’un me dit : « il y a un joueur de foot qui est là ». « Un joueur de foot ? » Je regarde et là, je vois Raí. C’était incroyable, un Brésilien qui vient voir l’Enfant Do. Je viens le saluer, il me dit qu’il adore le théâtre. Luis Fernandez, Alain Roche, sont déjà venus aussi. Des dirigeants également, comme Alain Cayzac, quelqu’un de très courtois et avec qui on rit beaucoup.
Quand je travaillais à la Comédie de Saint-Etienne, en 1975, pas mal de joueurs de l’ASSE venaient nous voir. C’était une autre époque.

Lorenzo Callegari, c’est un petit bijou

Avez-vous des maillots du PSG chez vous ?
J’en ai, mais ils sont floqués à mon nom ! (sourires) Je n’achète pas de maillots, cela ne m’intéresse pas. Les maillots floqués « Berléand », ce sont des cadeaux des dirigeants.

Lorenzo Callegari

Vous avez joué dans « Mon idole », de Guillaume Canet. Avez-vous une idole au PSG ?
Safet Sušić. Pour moi, c’est vraiment le plus beau. C’est magnifique d’avoir vu jouer un tel artiste. Il savait tout faire avec le ballon. Raí aussi. il y avait ce respect du maillot. Les joueurs du PSG qui partent à Marseille, j’ai toujours eu du mal. Je suis sensible à un Messi qui fait toute sa carrière au Barça… Là on commence à parler de Neymar au Real… Ça m’agace. Suis je devenu ringard ? (sourires) J’apprécie les Mbappé, Kimpembe, Areola… Il y a une histoire avec Paris. J’aime aussi Cavani.

Si vous étiez Unai Emery, que feriez-vous ?
Déjà, je changerais de coupe de cheveux (sourires). Si j’avais été lui au Camp Nou, j’aurais fait rentré Javier Pastore. J’ai encore du mal à digérer. J’aurais plus donné sa chance à Lucas. Et je ferais davantage confiance aux jeunes. Il y a un super jeune, extraordinaire. Lorenzo Callegari c’est un petit bijou. Je ferais aussi entrer le petit Nkunku un peu plus que 2-3 minutes en fin de matches.


Emilie Pilet

Alioune Touré

« Allô c’est Luis, ça te dit te venir à Paris ? » : cet appel de Luis Fernandez, un matin de l’été 2002, le natif de Saint-Denis s’en souvient parfaitement. Alioune Touré, 23 ans, s’engageait quelques jours plus tard pour 5 ans avec le Paris Saint-Germain.
Après l’INF Clairefontaine, Nantes, Manchester City, « la Tour » devenait Parisien au côté d’un certain Ronaldinho. Le Parc allait aussi lui dédier un chant,
rapport à sa pointe de vitesse…


Avant de nous rejoindre dans un café parisien, il a tenu parole :
passer chez sa mère récupérer quelques souvenirs Rouge et Bleu. Place aux confidences.


De Saint-Denis à Clairefontaine

Je suis né à Saint-Denis dans le 93, j’ai 5 sœurs, 3 grandes, 2 petites, je suis le seul garçon de la fratrie. Je suis arrivé au foot car j’étais très turbulent, je bougeais partout. Mon père m’a inscrit à Villeneuve-La-Garenne, j’avais 7 ans. 1ère licence, on avait un maillot orange, comme la Hollande, j’adorais ! J’avais foot tous les mercredis.

Ensuite, on a déménagé dans le 95, j’ai changé de club : Saint-Leu-La-Forêt. C’est là que je me suis vraiment passionné pour le foot, Olive et Tom tout ça. J’étais à fond, avec mon ballon 24h/24. Je mangeais foot, je respirais foot, je dormais foot…

Un jour, Saint-Leu reçoit une convocation pour les sélections de l’INF. J’avais 13 ans. Mes parents me disent : « ça commence à devenir sérieux ton football ». Mon père nous emmène avec 3 autres coéquipiers. Quand on arrive à Clairefontaine, je suis émerveillé par les terrains. C’était magnifique, extraordinaire, on avait le sourire jusqu’aux oreilles. La pelouse, elle était exceptionnelle. Nous, à l’époque, on jouait encore sur les terrains rouges, stabilisés. Je courais déjà vite, mais là sur cette pelouse, je m’envolais (sourires).

Au départ, on était, je ne sais pas combien, peut-être 1000. Ils en gardent 25. Et sur les 25 de notre promo, on est 15 à être devenus pros. Nicolas Anelka, Louis Saha, Philippe Christanval, Sébastien Piocelle, Yves Deroff, etc. On a passé 3 ans ensemble (1992-1995).

En chambre avec Nicolas Anelka

Il était le 1er de la liste alphabétique, moi le dernier. Pour les chambres, ils prenaient le 1er et le dernier de la liste, et ainsi de suite. Donc on se retrouve ensemble. Comme il était n°9, moi ailier, on s’entendait bien sur le terrain. En dehors aussi. Avec Louis Saha on formait le trio d’attaquants. Nico Anelka, il avait un an de moins que nous, mais des qualités exceptionnelles. C’était un finisseur, il ne loupait pas beaucoup d’occasions.

Tous les jeunes rêvaient de signer au PSG, mais les bruits de couloirs disaient que c’était un club de stars, pas fait pour les jeunes. J’étais suivi par Auxerre, Monaco, Toulouse et Nantes. J’ai choisi Nantes, avec Coco Suaudeau qui m’a lancé en D1, et Claude Makelele, mon parrain. L’année où j’intègre le centre de formation de Nantes, à 15 ans, je perds mon père. Depuis, chaque fois que je mets un maillot, je pense à lui. C’est lui qui m’a inscrit au foot.

En 2002, Nico quitte Paris pour Manchester City, je quitte Manchester City pour Paris. Je n’ai pas ressenti, en tout cas on ne me l’a pas fait ressentir, être une monnaie d’échange dans le transfert. J’étais international espoirs, Luis (Fernandez) m’a dit : « Paris, maintenant c’est le club qu’il te faut : pour grandir, pour progresser ». Mais ça, j’y reviendrai plus tard.

1er aux tests de vitesse

4’8’’ aux 40m. J’arrivais toujours 1er aux tests de vitesse. Enfin presque. Un jour, j’étais à Clairefontaine avec l’équipe de France Espoirs, Franck Le Gall (actuel médecin des Bleus, ndlr) vient me voir : « Alioune, Alioune il y a quelqu’un qui t’a battu ! » Si je me rappelle bien c’était Soufiane Koné, un U18, qui jouait à Nancy.

J’allais vite, mais il fallait que j’apprenne à maîtriser cette vitesse… Le changement de rythme, de direction, le travail d’appuis. Apprendre à accélérer, à décélérer comme une voiture.

En U17 à Nantes, le coach insistait : « Alioune, il faut que tu gères tes efforts ». Parfois le souci, c’est que comme j’allais vite, mes partenaires oubliaient que j’étais aussi un footballeur. On me disait « Alioune, accélère, accélère ! ». C’était un peu Alioune, on veut voir sa pointe de vitesse. Mais moi aussi je voulais jouer au ballon. Surtout à Nantes.

« Alioune Touré, c’est le sprinteur du PSG, sous les 10 secondes il va passer et aux JO il va aller… oh oh, Alioune Touré la la la la la… » : cette chanson, je l’ai entendue plusieurs fois au Parc. On disait aussi que j’allais tout droit. J’étais rarement titulaire. Quand je rentrais, je voulais tellement montrer. J’y allais à fond. Je voulais semer les défenseurs. J’avais fait de l’athlétisme petit, mais je sentais que sans ballon, ça n’allait pas le faire.

« Allô c’est Luis, ça te dit de venir ? »

En 2002, comme chaque année, je pars au Sénégal pour recharger les batteries. Chaque intersaison, je me faisais une semaine de prépa athlétique avant la reprise. Encore plus là, je sortais d’une saison quasi blanche à Manchester City.

Un matin, je reviens de courir sur la plage, je suis tranquille en train de boire un thé et là coup de fil de Pape Diouf, mon agent : « Luis va t’appeler“, moi “Luis qui ? » Pape : « Luis Fernandez, il faut que tu décroches ». On raccroche, mon téléphone sonne : « Allô, c’est Luis, ça te dit de venir à Paris ? » Moi : « Oui, mais je suis à Manchester City, il me reste 2 ans de contrat » Luis : « C’est un club comme Paris qu’il te faut. Là, tu es encore un espoir, il faut que tu passes le cap dans un club comme Paris ». Il ajoute : « Attention, on m’a dit que tu étais sérieux, car si à Paris tu n’es pas sérieux, on sait comment ça se passe avec les amis, la famille… Si tu es sérieux, ça se passera bien ». On raccroche, après j’en parle avec Pape Diouf. J’étais déçu de ma 1ère année à City, je ne voulais pas rester là-dessus.
Pape me dit : « C’est bien pour toi, pour rebondir ». Paris, c’est un club qui me faisait rêver je ne vais pas le cacher.

Pape Diouf m’envoie les billets d’avion au Sénégal. Ils viennent me chercher à l’aéroport et je pars signer mon contrat au Parc. Il y avait Laurent Perpère (alors président du PSG, ndlr), Luis Fernandez, je visite le Parc avec eux : c’est comme dans un rêve. Je signe 5 ans.

De retour à Dakar, c’était la fête. Il me restait une semaine de vacances. C’était pendant la Coupe du monde, avec France-Sénégal (0-1). Un magnifique souvenir. Il faut profiter de ces moments.

Quand j’ai signé, je ne savais même pas que Ronaldinho allait arriver. Il nous a rejoint en stage à Jesé (Espagne). Dans l’équipe, il y avait déjà Pochettino, Heinze… Pochettino, il arrivait à 7h à l’entraînement. Un grand capitaine, un gentleman. Je découvre tout de suite que Paris, c’est un autre monde : il fallait gagner chaque week-end, tu ressens vraiment cette pression.

Ronnie, c’est un soleil

Quand il arrive, la 1ère chose qui me marque : ses cuisses, exceptionnelles ! Et sa façon d’être : très décontracté, souriant. C’est un soleil. Sa simplicité, son humilité m’ont marqué. Il ne se prenait pas la tête… A l’entraînement, tout le monde le regardait jongler. Avant la séance, Romain Rocchi, Filipe Teixeira allaient le voir : « Montre nous tes jongles, comment tu fais ». Par contre, on avait peur de faire un toro avec les Sud-Américains. Entre les Argentins, les Brésiliens, si tu te retrouves au milieu, ça peut être gênant.

Ronnie déjà il arrive, il a un préparateur physique perso. Un staff dans le staff. Dans le jargon footballistique, on parle de travail invisible. Il y en a, ils vont jouer 4-5 heures à la Playstation, d’autres ils vont apprendre une langue, d’autres regarder leur match, faire la sieste… Pendant les journées « à la carte », Ronnie venait s’entraîner le matin physiquement avec son préparateur physique : changements de rythme, de direction, dribbles… L’après midi, il travaillait les coups francs. C’est là, que je me suis dit : « il ne faut pas se fier aux apparences » de mec cool, qui aime rigoler… J’ai vu ses mollets, ses cuisses, ça tu ne l’as pas comme ça, en claquant des doigts. Puissant, rapide, technique, il avait tout. C’était un athlète et un génie.

Son vrai pote : Talal El Karkouri

Parfois il faisait des soirées il invitait les joueurs mais son vrai pote, c’était Talal El Karkouri. La maman de Ronnie préparait des plats brésiliens pour lui. Je suis heureux de l’avoir connu en tant que joueur bien sûr, mais en tant qu’homme il est extraordinaire. C’est une star, sans être une star, il ne se prenait jamais au sérieux.

Dans le bus, on lui faisait écouter « N°10 » de Booba « Que des n°10 dans ma team »… On lui disait : c’est que toi le n°10, c’est toi le patron de l’équipe.

Luis : « Allez Ronnie, fais pas la gueule ! » 

Avec Luis Fernandez, il y avait parfois des tensions. J’essaie de me mettre à la place de Luis : on attend beaucoup des joueurs talentueux, y compris dans le repli défensif. Mais en même temps, Ronnie c’était vraiment un artiste, un électron libre. Il y avait toujours du respect mais parfois on sentait la tension. Si on le voyait arriver à l’entraînement avec son bonnet enfoncé, tête basse, on savait que ce n’était pas ça (sourires). Et Luis : « Allez Ronnie, fais pas la gueule ! ».

Son match au Vélodrome (0-3, 9 mars 2003), c’était fou. Tous les grands joueurs sont là dans les grands rendez-vous. Depuis le banc, j’ai aussi vu Luis danser la samba devant les supporters marseillais. Dans le vestiaire après le match, il disait à Ronnie : « C’est ça mon petit ! Ça doit être comme ça tout le temps ». Et ils rigolaient.

Numéro 21, comme Ronnie ! Enfin presque

Quand Ronnie a récupéré le n°10 de Benarbia, j’ai pris le 21. S’il avait pu me donner un peu de sa technique avec (sourires). J’ai quand même marqué un but, à Nantes (J34, 1-1)… J’étais titulaire. Et là, 2 choses m’ont marqué : mon 1er but avec Paris, face à mon club formateur et Ronnie qui sort avant moi (73’, remplacé par Aloisio). Je ne comprenais plus trop ce qui se passait (sourires).

J’ai donné mon maillot au kiné de Nantes, l’autre, je l’ai gardé (sur la photo ci-dessus, ndlr). A Nantes, j’ai eu plusieurs blessures, dont une phlébite (6 mois) qui aurait pu mettre un terme à ma carrière. Et là, je revenais avec Paris, Ronnie, Pochettino, et je marque. Le kiné me dit : « Franchement, tu as une bonne étoile ».

Jérôme Leroy, le grand frère

Je parlais beaucoup avec Jérôme Leroy, il était calme, c’était un peu le grand frère. Il me disait : « Alioune, lâche pas, il faut que tu sois patient. Même si tu vas en CFA, essaie de te montrer. Ta chance va venir ».

Après Nantes, je me suis dit : ça y est on m’a donné ma chance, je l’ai saisie (sourires). Je finis la saison sur le banc. Luis me dit : « Tu fais la gueule ? » J’étais frustré mais c’est vrai que Fiorèse faisait la saison de sa vie, on parlait même de lui en équipe de France. L’équipe tournait bien. Et Luis me disait : « N’oublie jamais une chose. Tu fais partie du plus grand club français. N’oublie pas qu’il y en a beaucoup qui ne viendront jamais à Paris ».

En finale de Coupe de France (Auxerre 2-1 PSG, 2001), je suis 18ème joueur, en tribunes. Je me rappelle après le match, des joueurs sont allés dire à Luis : « Il fallait mettre Alioune dans le groupe, c’est notre porte bonheur » (sourires).

L’année d’après (PSG 1-0 Châteauroux, 2004) je suis dans le groupe, je remplace Pauleta en fin de match. Avant la finale, Vahid dit : « Alioune, il faut le mettre, partout où il va, il gagne, il faut le mettre sur la feuille de match ». Superstition ou humour ? On rigolait avec ça, car j’avais gagné 2 Coupes de France, le championnat avec Nantes. Là, Reinaldo s’était blessé en ½ finale. Bon, je pense que c’est plus ça qui a fait que j’ai joué.

Fiorèse à l’OM : gros coup de massue

L’été 2004, je pars en prêt à Guingamp. Le dernier jour du mercato, j’apprends que Fiorèse part à Marseille. Ça a été un gros coup de massue. Si j’étais resté, peut-être que… Mon entourage me disait : « Tu as signé 5 ans, pourquoi tu es pressé ? » Et Pape Diouf me disait : « Il faut que tu joues ». Noël Le Graët m’a un peu remonté le moral, c’est quelqu’un que je respecte beaucoup. A Guingamp, il y a ce côté humain, j’ai été très bien accueilli, les gens ont été super gentils.

L’été suivant, tout avait changé à Paris. Laurent Fournier entraineur, Pierre Blayau président, qui me dit : « On veut tout changer, on ne t’a pas fait venir ». Il me restait 2 ans de contrat, mais clairement, on ne voulait plus de moi. Nous avons résilié à l’amiable. Je suis parti sur un goût d’inachevé.

Au Portugal, à Leiria, j’ai retrouvé des couleurs. il fallait que je reparte dans un autre cycle. J’ai retrouvé de la confiance, du plaisir grâce à Jorge Jesus, qui portait bien son nom : il m’a redonné le sourire, le plaisir de jouer. Un super entraineur, proche de ses joueurs. Son idole, c’était Cruyff, on jouait en 4-3-3, au sol et en mouvement, avec 2 ailiers. Ces 2 ans au Portugal m’ont fait énormément de bien.

Anelka : « Viens entrainer avec moi » 

Là on est en 2012. Un soir, je suis chez moi à Paris, Nico Anelka, alors en Chine, m’appelle : « Je viens de reprendre l’équipe (Shanghai Shenhua), ils me proposent d’être entraîneur-joueur, tu fais quoi toi ? » Je venais de finir ma formation de préparateur mental. « Ça tombe bien, je cherche un coach adjoint » (…) « Tu as rendez-vous à l’Ambassade de Chine ». Moi : « Mais qu’est ce que je vais faire ? » Lui : « Mais t’inquiète pas, tu as connu plein de grands entraineurs ». Une semaine plus tard je récupère mon visa, et je pars le rejoindre.

C’était improbable, un peu irréel… mais sincèrement une superbe expérience. Florent Ibengue, l’actuel sélectionneur du Congo, faisait aussi partie de l’aventure. Il nous couvrait car il avait le diplôme.

La saison se passe plutôt bien. A la fin, le président dit à Nico : « Tu es prêt à être entraineur maintenant ? » Lui : « Non, moi je veux être entraîneur-joueur ». Moi, je lui ai dit : « Tu fais comme tu veux, je ne veux pas être à l’origine de ta fin de carrière… ». Il avait 33 ans, il était parti en Chine juste après Chelsea. Et là, la Juve l’appelle, Antonio Conte veut le faire venir. Nico avait encore cette flamme du compétiteur… et la Juve, ça ne se refuse pas. L’aventure à Shanghai s’est terminée comme ça. Le club a pris Sergio Batista.

Cela reste une magnifique expérience, dépaysante. On prenait des cours de chinois mais bon, c’était pas gagné ! A l’entraînement, il y avait un traducteur, Cheng, il traduisant avec un haut parleur aux joueurs. Il y avait un côté folklo mais tu sentais vraiment l’envie d’apprendre. Anelka, les joueurs le respectaient énormément. On s’est initié à la méditation, aux arts martiaux, on est allé à Hong-Kong sur les traces de Bruce Lee.

De retour en France, j’ai passé mes diplômes d’entraîneur (licence UEFA A) et suis devenu consultant pour le championnat chinois.

La Tour, bip-bip, TGV, 2Pac…

Mes potes dans le foot, ils m’appellent « La Tour ». Il y a aussi eu TGV, Bip Bip, la mobylette du 93, 2Pac… « Keep your head up ». J’en ai fait ma devise. Quelles que soient les difficultés, garde la tête haute, positif… Je suis un compétiteur mais il y a pire dans le monde qu’être sur le banc. Pas de place pour les états d’âmes. Tous les jours, je savais ma chance et je remerciais le bon Dieu de vivre de ma passion.

« Non, j’ai mes parents qui s’en occupent… »

Mon rêve ultime, c’était de devenir footballeur professionnel. Aujourd’hui, j’aimerais redonner, par exemple avoir un rôle en dehors du terrain, notamment auprès des jeunes, les accompagner. J’ai connu l’école nantaise, le PSG, des blessures, des déconvenues, des trophées, la patience, la persévérance.

A Nantes au centre de formation, les choses qu’on nous a apprises, c’est dire non ! Les éducateurs nous ont dit : « Enormément de monde va vous solliciter », il y a 3 choses à répondre : « Non, j’ai mes parents qui s’en occupent », « Non, j’ai une sœur qui s’occupe de ça », « Non, j’ai déjà un agent ».

Mon cercle, c’était mes sœurs et ma mère. Les mamans sont économes ! Elle me disait : « Ne t’achète pas de Porsche ou de grosse voiture, c’est jeter l’argent par les fenêtres ». A l’époque, je m’étais acheté un Nokia 3310, j’étais content. Mes sœurs c’était plus un peu les a côtés, le soutien moral, elles gardaient aussi les photos.

Ma phlébite au mollet, au début de ma carrière, m’a aussi fait ouvrir les yeux : ok je réalise mon rêve, mais cela peut s’arrêter à tout moment…

Je n’étais pas du genre à faire des excès. Mes excès pour moi c’était des DVD, des casquettes, des baskets. Ma mère me disait : « Ça ne sert à rien d’acheter tous ces DVD, après tu ne vas même plus les regarder ». Ma 1ère voiture ? Une 106 rouge à Nantes ! On me disait « Ne t’achète pas de grosse voiture car après il faut frotter ». Ma plus grosse voiture, je l’ai eu à 25 ans au PSG. C’était la voiture du club, une Volvo S80. Une voiture de président de la République (sourires).


Emilie Pilet

Big Sam

Un touriste japonais de passage au Parc, à la carte bleue décomplexée, ou un abonné récent qui siffle Cavani ou Pastore sans vergogne, ne le connaissent pas. Son nom : Sammy Traoré. Un géant au sourire de bitume. Un défenseur à l’époque où le PSG flirtait avec le vide. Un mec de Créteil qui reçoit dans un PMU un samedi après-midi au soleil de glace et qui fume sa clope tranquille, en saluant tous les gens qui passent.


Sammy Traoré. Les anciens l’aiment encore aujourd’hui et l’ont aimé au coeur de la tempête. Ils ne l’oublieront jamais. Aujourd’hui, il entraîne l’équipe 3 de Créteil et bûche pour obtenir ses diplômes. Il n’évite aucune question, on devine un homme solide, fidèle, qui n’a pas besoin du regard des autres pour savoir qui il est. Il parle de football avec une fièvre très fédératrice. Le gamin qu’il était n’a pas été complètement écrasé. Il est là, encore, derrière une petite vanne explosive, un commentaire délicieux. Il parle de l’éviction récente de Tex, de cette époque qui, au nom de la liberté, rêve de prison pour tous, d’Evra, “il donne le bâton ce con ”, de lui et des autres et du PSG. Il avoue n’avoir pas gardé beaucoup de maillots échangés avec ses adversaires tout au long de sa carrière. “Le musée, il est dans ma tête ” précise-t-il, un petit sourire en coin parfait. Son pronostic pour la Saint-Valentin de 2018 ? “Ça va se jouer à peu. Faut juste pas se faire ouvrir là-bas. Moi, je vois 2-2 à Madrid et 2-1 au Parc…”. D’entrée, Sammy Traoré impose le tutoiement et on s’exécute.


Virage : C’est quoi ton plus beau souvenir au PSG ?
Sammy Traoré : Ce n’est pas forcément un souvenir footbalistique. Quand je suis arrivé au PSG, il y a des gens qui m’ont dit : “Tu as fait Nice, beau club, mais tu vas voir la dimension que ça va prendre ici. Les gens vont te reconnaître, la notoriété, tout ça…” Moi, je n’étais pas forcément préparé à ça. Et c’est vrai que quand tu arrives là-bas, tu le sens tout de suite : Que c’est un grand club, un club aimé par les gens, suivi par les gens. Ça, c’était vraiment impressionnant. Et si tu n’es pas costaud mentalement, tu exploses ! Regarde moi, je ne suis pas le meilleur défenseur au monde. Mais je n’ai pas explosé, j’étais là ! Tu peux crier, siffler, je m’en bats les couilles (rires). Mais si tu n’es pas fort mentalement… C’est ça, les grands clubs ! Regarde David Hellebuyck. Lui, il arrive au PSG, il est super fort. Il mettait des buts de partout. Il arrive ici, déjà, dans le vestiaire, ce n’était plus le même.

Sammy From The Block

Y’a une vraie pression à Paris. Je t’explique : Le premier jour, j’arrive dans le vestiaire du Camp des Loges. Je fais un peu le tour et je vois Pauleta, Dhorasoo, Rothen, Kalou, Mendy, M’Bami, les petits comme Chantôme qui montaient, hé, y’avait du monde ! Tu sens direct que c’est autre chose, un autre club… Et puis, de mettre le pied au Parc des Princes… Moi, j’y avais déjà joué contre le PSG. Mais quand tu joues pour… Et même si, à mon époque, c’était un peu plus difficile que maintenant, ça reste le meilleur stade de France, y’a rien à dire… Et quand t’as ce public-là derrière toi, voilà quoi… Aujourd’hui, l’ambiance, ça n’a plus rien à voir mais quand je jouais encore… Incomparable ! C’était incroyable ! Ces joueurs extraordinaires d’aujourd’hui, je suis désolé mais ils ne méritent pas un Parc comme ça. C’est désolant ! Les pauvres… Le Parc des Princes ne redeviendra jamais comme il était avant. C’est fini. Et ouais, c’est vraiment désolant…

Virage : Pour toi, c’était le meilleur stade de France ?
Sammy Traoré : Le Parc, c’est une sorte de cuve. Dès que ça commence à crier, tous ensemble, tu t’entends plus sur le terrain. Marseille, ils avaient ce problème avant, un stade vachement évasif. Maintenant qu’ils ont fermé, tu ressens plus cette atmosphère de match de football. Moi, j’ai connu le Parc comme ça… Aujourd’hui, ils te cassent la tête avec des fumigènes, des ceci, des cela mais ça fait partie du football, un match avec des fumigènes, un match qui commence en retard sur Canal à cause des fumis, parce que tu vois rien, moi, j’ai connu ça, des banderoles de partout…

Virage : On rappelle qu’à l’époque, Canal, la Ligue, tout le monde faisait sa promo avec des images de kops sous fumigènes…
Sammy Traoré : Ouais, c’est le football que moi j’ai connu et c’est ça qui m’a marqué d’entrée au PSG. Ce stade, avec cet engouement. Après, il y a eu des résultats, pas de résultats, il y a eu des moments durs, des moments de tristesse, ça fait partie du football, c’est comme la vie.

Surtout ne pas le regarder dans les yeux. Et tout ira bien.

Virage : Et s’il n’y avait qu’un seul match à retenir ? Il y a celui où on t’a tous aimé pour l’éternité, quand tu as traversé balle au pied tout le terrain…
Sammy Traoré : C’était Lille. Lille à domicile. On m’avait même surnommé Sammyradona (rires)… Il y a des moments comme ça. Y’a zéro-zéro. Si ça ne tenait qu’à moi, si le coach m’avait laissé, j’aurais pu amener un surnombre à chaque fois devant ! C’est ce que je reproche à un joueur comme Thiago Silva… Il a une capacité, une qualité technique, une vision de jeu. À un moment donné, tu peux amener ce petit surplus en te faisant plaisir. Donc, y’a zéro-zéro et je me suis dit: “Je suis parti dans l’action, on va continuer”. Je me retrouve à trente mètres, c’était mon pote Malicki (dans les cages lilloises), je dis: “Si je te décroche une frappe, on fait comment ?”. Au final, je suis assez loin. Imagine, tu frappes, t’es contré, contre-attaque et but. Tout ça d’éliminé pour rien ? Non !!! Donne la à Sessegnon, il va se débrouiller après… Il la perdra ou Rothen la perdra, ce con (rires). Il y a eu tellement de bons moments au PSG…

Virage : Tu avais été plus jeune, gamin, au Parc ?
Sammy Traoré : Tu sais, à mon époque, moi, je suis de 1976, le Parc, c’était difficile. On y allé, emmené par le centre social. Ils nous installaient loin de Boulogne (rires). Mais on s’est fait courser… Tu sais ce qu’ils faisaient, les mecs de Boulogne ? Ils sortaient dix minutes avant la fin du match pour attendre des mecs comme nous dans les coursives du métro… Donc nous, on était obligé de partir bien avant. Tout ça, ça ne donnait plus envie d’aller au Parc. C’était malheureux…

Un TIENS! vaut mieux que deux tu l’auras.

Virage : Mais ton club de coeur, petit, c’était Paris ?
Sammy Traoré : Ouais, ouais, j’aimais bien Paris parce qu’ayant grandi à Créteil, quand même ! Créteil était représentatif pour moi mais après, il y avait quand même le gros club de la région qui était le Paris Saint Germain. Après, moi, étant jeune, jouer contre Paris, c’était la guerre ! On était un peu jaloux, ils étaient tous bien habillés, tous beaux, y’avait celui qu’avait la coupe de Ginola, qui voulait ressembler à Ginola, jouer comme Ginola (il grogne avec une nostalgie délicieuse dans les yeux).

Virage : On sait que tu admirais Karl-Heinz Förster. Toi, tu as toujours joué défenseur ? Et quel joueur de Paris, quand tu allais au parc à la fin des années 80, t’impressionnait le plus ?
Sammy Traoré : J’ai toujours joué défenseur. Mais j’étais plus attiré par les attaquants parce que ce sont eux qui font le spectacle. À l’époque, t’avais Mozer à Marseille dont tu entendais parler parce qu’il était méchant, t’avais Boli, qui était un gorille. Après, à Paris, t’avais surtout des milieux de terrain qui étaient des chiens, comme Vincent Guérin, t’avais des attaquants qui étaient magnifiques à voir jouer. Des mecs comme Ginola, c’était la classe atomique ! Je parle même pas de Mister George ! Et de tous les Brésiliens qui sont venus. Même les défenseurs brésiliens du PSG, c’étaient des beaux joueurs. Ricardo, c’était la classe !

Virage : Quand tu quittes Nice pour le PSG, c’est un choix de ta part ? Tu veux vraiment aller à Paris ?
Sammy Traoré : Je t’explique comment ça se passe. Depuis le mercato hivernal, je sais que Paris a un oeil sur moi. C’est mon agent qui m’en a parlé. À Nice, je sors d’une grosse saison. On finit quatrième ou cinquième en championnat, on fait finaliste de la Coupe de la Ligue. Je mets six buts dans la saison. On fait partie des trois-quatre meilleures défenses du championnat. Et donc, Paris commence à se renseigner. Moi, je finis ma saison avec Nice. Tout se passe bien. Au départ, je donne ma priorité à Nice. Je suis encore sous contrat, il me reste un an. Je vais voir la direction : “Il me reste encore un an de contrat, moi, j’aimerais bien prolonger chez vous mais il y a un club qui s’intéresse à moi et qui a plus les moyens que nous, comment on fait ?”. Eux me disent : “Il te reste un an de contrat, on reste sur nos positions.” Moi : “C’est Paris qui est intéressé.” Eux : “Ouais mais si Paris est intéressé, ils auraient déjà dû prendre contact avec nous…”. Ils commencent à me prendre un peu de haut. Moi, je leur dis : “C’est simple, à partir du moment où Paris prend contact avec vous, c’est fini pour moi, je ne parle plus avec vous.”

L’aigle et l’aiglon

Paris les a appelés. Là, Nice a voulu commencer à négocier avec moi. Moi : “C’est fini ! Je vous avais prévenu. Vous étiez ma priorité, vous m’avez pris pour un con, je ne porterai plus jamais le maillot niçois. Je suis décidé, je pars à Paris !”. Nice a voulu gagner de l’argent sur mon dos alors que j’étais arrivé là-bas gratuit, je n’avais rien coûté, j’étais là depuis quatre ans, je n’avais jamais eu d’histoire, j’ai toujours honoré le maillot. Antonetti ne voulait pas me croire. Je ne suis pas venu à la reprise. Fred m’appelait, me disait que même si je partais, je devais m’entraîner et vu que Fred, c’était un bon entraîneur, je suis revenu à l’entraînement quelques jours plus tard. Et puis j’ai signé dans les derniers jours du mercato avec Paris.

Virage : Tu aurais donc pu signer n’importe où, à Lyon, à Marseille, pas forcément qu’à Paris ?
Sammy Traoré : Moi, ma priorité, c’était Nice. J’étais là-bas depuis quatre ans, j’étais capitaine, vice capitaine, j’étais bien là-bas moi ! Après, tu pèses un peu le pour et le contre. J’avais trente ans, je savais que ce n’était pas avec Nice que j’allais gagner des titres… Paris, c’était une vraie opportunité. Et puis, tu rentres chez toi. À trente ans, tu signes trois ans et tu rentres chez toi ! Après, c’est à toi d’être bon !

Virage : C’était important pour toi cette perspective de rentrer chez toi ?
Sammy Traoré : Quand t’es Parisien et que tu vas au PSG, ce n’est que du bonheur de toute façon. Tu sors de ton match à 23 heures, tu peux aller manger dans n’importe quelle brasserie. À Auxerre, impossible, le MacDo ferme à 23h30, c’est mort, c’est fini (rires) ! Si le mec s’en fout du foot, il peut aller au théâtre avec sa femme, au cinéma, il y a tellement de choses à faire à Paris ! C’est merveilleux !

Virage : Et comment penses-tu avoir été perçu pendant tes années parisiennes ? Sous-estimé, sur-estimé ? Comment ?
Sammy Traoré : J’estime que je n’ai pas été traité à ma juste valeur dans la mesure où je suis tombé dans la période un peu délicate du PSG… Tu me ramènes Sammy Traoré maintenant avec Di Maria là-bas, Verratti ici, Thiago Silva. Mais je prends le ballon, je le donne là, je le donne là, ouais, c’est facile. Quand tu joues au PSG aujourd’hui, ton premier adversaire, il est à la médiane ! Moi, il n’y a aucun entraîneur qui m’a appris quelque chose au PSG. Aucun ! Tout ce que je savais, je l’avais appris avant de venir.

Un Papus-Sammy, au shaker, pas à la cuiller

Heureusement que je suis arrivé à trente ans avec une longue expérience en Ligue 1, Ligue 2 et National, heureusement que j’étais un chien parce que sinon… C’est pas avec Antoine (Kombouaré) qui siffle et qui gueule “au combat, au combat” que… Ça va cinq minutes ! Papus (Zoumana Camara), il me dit qu’aujourd’hui, ça n’a plus rien à voir au PSG, il y a du vrai coaching… Nous, on s’est entraîné toute notre vie comme des cons, à courir. Quand tu vois aujourd’hui ! Les GPS, tout ça, c’est comme avec l’ADN à la brigade criminelle (rires) !

Virage : Quand tu jouais à Paris, c’était effectivement une période délicate. Pour un supporter, c’était infernal. Chaque match nous plongeait dans un océan de doute et de rage…
Sammy Traoré : Ce que vous ne comprenez pas, vous, en tant que supporters, c’est que ce que vous, vous ressentez… Comment, toi, en tant que supporter, tu peux être plus dégoûté qu’un mec qui a été acteur ? C’est impossible ! Non, c’est impossible ! C’est sûr, les supporters amènent de l’engouement, ils payent pour voir un spectacle… Moi, j’ai joué à huis clos, au moins trois matchs dans ma carrière. C’est horrible ! Je préfère jouer un match avec des potes. Au moins, il y a des gens qui passent et qui crient “allez les gars !”, tu te sens aimé. À huis clos, il n’y a rien ! Donc oui, le football n’existerait pas sans cette masse populaire, sans les supporters. On en a besoin. Évidemment, quand ça se passe mal, tu ne peux pas avoir tout un stade acquis à ta cause. Mais ce que vous ne comprenez pas, vous, les supporters, c’est que tu ne peux pas être plus énervé, plus dégoûté que le joueur qui a joué et perdu, même s’il vient d’un championnat à l’étranger et qu’il n’est pas imprégné de cette culture parisienne. Nous, en tant que joueurs, on a ressenti cette frustration des supporters, bien sûr…

« C’est l’histoire d’un gars qui est passé trop près le jour où Sammy a tenté une aile de pigeon » se remémore Sylvain Armand

Virage : Tous les joueurs ?
Sammy Traoré : Je ne peux pas me mettre dans la tête de tous les joueurs… Dans un groupe d’individus, tu vas toujours en avoir huit qui vont être plus touchés que les autres, c’est tout à fait normal ! Après, tu as toujours des mecs qui vont relativiser le football. Intérioriser. Ils vont être touchés mais ils vont moins le montrer. Moi, je pense qu’à un moment, le PSG a fait une erreur en donnant trop de pouvoir aux supporters. Et donc, quand ça se passait moins bien, ils avaient la possibilité de venir contrarier l’institution du PSG. Ce n’est pas la meilleure des solutions. S’il y a des tensions entre vous, les supporters et nous, les joueurs, ça ne peut que créer d’autres tensions ! Des tensions entre joueurs, avec le coach, entre supporters… Je me suis pris un jour la tête avec un groupe de supporters d’Auteuil. Après un om-Paris où on s’était fait taper, ils viennent au Camp des Loges. Ceux qui ont joué font leur décrassage et ceux qui n’ont pas joué, on travaille. On travaille les volées, boum, bam, boum. Je marque deux fois sur volée. “Ouais, fallait faire ça hier soir !”. Moi : “Va te faire enculer, arrête de me casser les couilles et laisse moi travailler !”. Derrière, Antoine qui commence à s’en mêler. Tu vois ? Et après, tout le monde pleure…

Du sang, de la chique et du mollard.

Virage : On a quand même l’impression que Sammy Traoré, même à l’époque où c’était très difficile pour Paris, a plutôt été épargné par les critiques des supporters, non ?
Sammy Traoré : Pas spécialement épargné… Tu ne peux pas dire que Sammy Traoré quand il a joué au PSG a fait une erreur monumentale, a voulu dribbler et s’est fait prendre le ballon… Épargné peut-être parce que les supporters ont compris, ont vu que malgré les difficultés, j’ai quand même toujours mouillé le maillot. L’engagement, ouais. Je n’ai jamais triché.

Virage : Il y a aussi cette image de toi qui court avec une doudoune trop grande sur un but de Luyindula. Et aussi quand tu t’es embrouillé avec le banc lyonnais pendant un match de coupe.
Sammy Traoré : C’est marrant, j’allais te parler de ça. C’est un très bon moment ça aussi… Quant aux Lyonnais, c’est propre à leur mentalité ! Les joueurs lyonnais comme l’institution lyonnaise, c’est une frange bourgeoise de la France qui ne se prend pas pour de la merde. Je suis désolé mais c’est la vérité… Et Aulas est à l’image de son club… Quand tu vois Tolisso, très bon joueur, magnifique, joueur en devenir, mais il a toujours ce truc un peu hautain, tu vois ? Et qu’ont d’autres Lyonnais. Quand tout va bien pour eux, c’est normal et quand tout va mal, c’est le reste du monde qui est toujours contre eux. Non, à Paris, ce n’est pas pareil. Nous, on est détesté, on déteste aussi les gens, on se le raconte parce qu’on est le PSG, on est beau à voir, on est la capitale, c’est comme ça !

Virage : C’était une motivation de savoir que peu importe où vous alliez jouer, ce serait de la haine anti parisienne, systématiquement ?
Sammy Traoré : Mais qui remplit les stades de France ? Saint-Étienne, Marseille et Paris ! C’est tout !

Virage : Sammy Traoré a-t-il des regrets au PSG ?
Sammy Traoré : Il y a toujours un peu de regrets. Tu aimerais bien continuer mais tu arrives à 35 ans, fin de contrat… Sachant que l’année où tu pars, t’as pas joué un match. Antoine t’a fait la misère toute l’année. Je lui ai dit : “Hé, je suis pas un GO, tu m’emmènes à droite, à gauche, dans tous les stades de France, pour juste prendre des douches. Vas-y, laisse moi chez moi si c’est pour me faire ça.”

Les deux tours Mercuriales

Virage : À 35 ans, tu préférais quand même encore jouer que de prendre ton pognon, tranquille ?
Sammy Traoré : Mais quel pognon ? Je ne suis pas là pour prendre du pognon. Si je veux faire du pognon, je me casse dans un autre championnat ! Moi, je suis content de l’argent que j’ai pris. J’ai pu en faire profiter ma famille, mes amis. Mais ce n’est pas une question d’argent, je n’ai pas joué au football pour l‘argent ! J’étais en fin de contrat, j’avais 35 ans, Coupet, Makélélé, Giuly quittaient le PSG, je ne voulais pas jouer avec la réserve, j’ai un plan à l’étranger, au Qatar, qui a foiré, Créteil me cassait les couilles pour que je signe chez eux, je me suis grave embrouillé avec le président et j’ai décidé d’arrêter. Et de rester ici. Mes enfants étaient là, je pouvais les amener tous les jours à l’école, voilà ! Et puis, à Créteil, je suis chez moi. Je sors, je connais tout le monde, on se dit bonjour. J’allais pas repartir dans une autre aventure à 35 piges, je suis bien là.

Virage : On a l’impression que le Sammy Traoré qui est né et qui a grandi à Créteil n’a jamais été quelqu’un d’autre que lui-même et que c’est ça qui lui a permis de tenir ?
Sammy Traoré : Pour moi, le football, c’est toujours relatif. Déjà, je me lève le matin, je vais taper dans un ballon, essayer de progresser tactiquement, techniquement, hé, je ne vais pas me plaindre ! Mon père, il a fait quarante ans à la ville de Créteil, à se lever tous les jours à sept heures du matin pour aller balayer les rues. L’autre, son père, il bosse à l’usine, l’autre, son père, il est au chômage ! J’ai grandi avec des mecs comme ça toute ma vie ! Et j’ai joué au football comme ça toute ma vie ! En essayant d’aller au plus haut niveau possible. Mon but, quand j’étais petit, c’était de jouer sur un terrain en herbe et avec du public ! Parce que nous, on ne jouait que sur des stabilisés, y’avait pas encore de synthétiques, que des stabilisés. Je rentrais chez moi tout écorché.

Virage : Quel est le meilleur joueur avec qui tu as joué à Paris ?
Sammy Traoré : Il y en a tellement… Un gardien ? Landreau ? Ouais, lui, il a fait beaucoup d’erreurs. Pas normal. Tout le monde critique Apoula Edel. Alors qu’il a fait moins d’erreurs que Micka ! Apoula, il t’en a fait deux grosses. Mais Landreau ! Beaucoup plus ! Et en Coupe de la Ligue, et en coupe d’Europe ! On en rigolait encore avec Jérôme (Rothen) l’autre jour chez SFR… Micka, on l’a allumé pendant un mois après ! On ne l’a pas lâché avec ça ! On lui envoyait des ballons en disant : “Tiens, Micka !”. On rigolait ! Ouais, on l’appelait Gros Cul. C’était moi qui trouvait tous les surnoms. Tu sais comment je l’appelais ? Grand Nain ! Parce qu’il a une tête de nain avec un grand corps (rires). Mais je vais quand même répondre Micka comme gardien. Il a été bon quand même…

« Allo Sammy ? c’est Rooccoo ! » : le SAM (Service Après Match)

Après, en défenseur, moi, j’étais pas mal quand même (rires). Après, il y avait Mario (Yépès) mais ils l’ont trop gonflé, il mettait un tacle les cheveux dans le vent et c’était le meilleur défenseur du monde (rires). Tu lui envoyais un ballon, il attendait le 44ème rebond avant de réagir, c’était un malin Mario… Non, en défenseur, je vais dire Papus. Il a fait ses matchs, dans la longévité. Après, au milieu, je vais dire mon vieux, Maké. C’est la classe. Devant, je vais envoyer Nenê. Déjà, à l’entraînement, c’était beau à voir jouer, Nenê. Pauleta, c’était un malin, un vicelard, un vrai buteur mais je prends Nenê. Nenê, il ferme sa gueule six mois et il rejoue au PSG, c’est con. Comme entraîneur ? À Paris, aucun. Comme président ? Cayzac. Amoureux du club, il a fait ce qu’il a pu, avec les moyens du bord…

Virage : Maintenant, une question cruciale et pas du tout orientée. Que pense Sammy Traoré du meilleur joueur du monde, Javier Pastore (rires) ?
Sammy Traoré : Tu sais qu’à chaque fois que je vais au Camp des Loges, c’est toujours lui qui vient à moi pour me dire bonjour. C’est une classe atomique le mec ! Après, en tant que footballeur, qu’est ce que tu veux que je te dise ? C’est le genre de joueur qui voit quelque chose que même nous, on ne pensait pas imaginable…


Jérôme Reijasse

Remerciement à Grégory Protche pour sa participation à l’interview.

Sur un air de Simba

Il nous a donné rendez-vous dans un petit bar PMU près de Cambronne.
Il arrive en costume, salue tout le monde, balance une vanne au patron, commande un café et nous aborde chaleureusement. Il est comme chez lui.
On s’installe au fond dans un petit endroit tranquille, difficile d’imaginer qu’on a une légende du PSG en face de nous. Et pourtant.

Tu es né à Dakar en 1961. Avant la création du PSG et tu as commencé ta carrière en 1975. Tu connaissais le club à ce moment là ?

Non. Quand j’étais au Sénégal le PSG n’était pas dans ma tête, j’étais trop jeune. Et puis ce n’était pas l’époque où l’on avait les informations d’aujourd’hui. Là bas il n’y avait qu’une seule chaîne et le foot ce n’était qu’un jour par semaine.

Comment commences-tu à jouer au foot ?

Comme pour tous les africains on commence dans la rue. On pousse tout ce qui peut rouler. Et puis après j’ai commencé à m’intéresser au foot avec Hafia, une équipe guinéenne, qui était la meilleure équipe d’Afrique. Ils ont gagné 3 fois de suite l’équivalent de la ligue des champions africaine. Il y avait des grands joueurs. J’ai donc pris ma première licence en Guinée.

Mais tu vivais en Guinée à ce moment là ?

Oui en fait mes parents sont guinéens. Je suis né à Dakar mais on est retourné vivre en Guinée. Je suis revenu à Dakar en 1974 à l’âge de 13 ans pour y rester 7 ans. C’est là que j’ai commencé à côtoyer un autre championnat plus étoffé. J’ai fait quelques années à l’ASC Jeanne D’arc qui était un bon club et où ils avaient repéré mon niveau qui était un peu au dessus. Et puis en 1981 je suis arrivé en France.

Comment atterris-tu dans les Yvelines en 1981 ?

Je suis arrivé en France à Plaisir en février pour rejoindre mon père qui était déjà installé ici. Je suis venu pour faire mon service militaire car j’avais la double nationalité grâce à mon père qu’il l’a obtenue en étant ancien combattant pour la France. Avant le service j’ai joué en jeune à Plaisir. En octobre je suis parti faire mon service à Montlhéry dans le régiment de marche du Tchad. Je crois que ça n’existe plus depuis… C’est marrant car à l’armée je suis tombé sur un capitaine qui était fou de ballon. Donc on jouait beaucoup. Et quand je suis sorti de l’armée en 1982 j’ai fait un essai à Saint-Ouen au Red Star. Ça n’a pas été concluant. J’ai ensuite été à Versailles car un copain de quartier connaissait l’entraîneur de l’équipe. Le frère de cet entraineur était à Houdan qui était en première division de district. Et ils m’ont proposé d’aller jouer là bas. J’ai dit OK.

Il n’y avait pas de plan de carrière en fait ?

Non aucun, j’étais complètement amateur dans ma tête. Ça se faisait comme ça. Au premier entrainement, je prends le ballon, je pars tout seul au but et je marque. Là ils m’ont gardé. On est monté deux fois de suite en championnat, j’ai fini meilleur buteur. Je suis parti à Versailles où l’on est aussi monté deux fois de suite jusqu’en Division 3, mais là je n’ai pas commencé le championnat car le PSG m’a sollicité. C’était en 1985.

Je suis arrivé Mezzo Piano

Qui est venu te chercher à Versailles pour signer à Paris ?

Cette phase est hyper importante car c’est dans ce genre de situation que ta carrière peut basculer. Quand je suis arrivé à Versailles, les clubs pro qui s’intéressaient à moi ne savaient pas si j’étais français. Et puis j’avais déjà un certain âge. Avec Versailles on a affronté l’équipe de la Celle Saint-Cloud dans laquelle jouait Marc Colas. Il a arrêté sa carrière de joueur l’année d’après pour entrainer les cadets nationaux du PSG. En 1986 le PSG venait d’être champion et Marc a conseillé à Gerard Houiller, alors entraîneur du PSG, de me recruter. Gerard a dit à Marc de se renseigner en priorité sur ma nationalité à cause des quotas. Du coup Marc a contacté un de mes potes qui était un peu dans le système. Il lui a dit « Dis à Amara d’appeler Gérard Houiller, ils sont intéressés pour le recruter ». Mon pote me donne le numéro de Gérard Houiller et je le mets dans ma poche. Pendant 3 jours je ne l’ai pas appelé. Et ce n’était même pas pour le snober. Je n’y pensais même pas ! Au bout des 3 jours Marc a appelé mon pote en lui disant « Amara n’a toujours pas appelé, qu’est-ce qui se passe ? » Mon pote m’a rappelé furax « Si tu n’appelles pas le PSG tout de suite je viens te chercher pour te forcer à le faire ». Il connaissait l’importance de cet appel. J’ai donc appelé et on m’a donné rendez-vous au Camp des Loges.

Comment se passe ton arrivée ?

C’était l’avant saison. J’ai déjà été impressionné par les voitures des joueurs sur le parking ! Et il y avait au moins 6 joueurs de l’effectif qui revenaient du Mondial 86 au Mexique ! Bats, Rocheteau, Xuereb, Sušić… ! Je suis arrivé Mezzo Piano. On m’a proposé de rester une saison pour me tester. Et si j’étais bon on me faisait un contrat. Moi je voulais jouer, c’est tout ce qui m’intéressait. Je suis resté un an en réserve, coaché par Erick Mombaerts, un entraineur très doué. Cette saison là on a cartonné. On avait une équipe de folie. Barrabé, Vasseur… Des fois les pros venaient aussi jouer avec nous. Et cette saison l’équipe première peinait en championnat.

Pourtant l’effectif est pléthorique avec Bats, Pilorget, et surtout Halilhodžić, Xuereb, Rocheteau, Sušić et Bocande. Ça faisait du monde devant !

Et il y avait aussi les frères Sandjak qui jouaient avec moi en réserve et qui parfois étaient appelés en première ! Donc à la fin de cette saison, il restait peu de matchs à disputer et Gérard Houiller décide de me lancer. C’était pour un PSG-Bordeaux (ndlr : 4 avril 1987). Gérard me dit la veille du match « Tu es dans le groupe ». Alors là je n’ai pas dormi de la nuit. En plus c’était la grosse équipe de Bordeaux avec Battiston, Giresse, Tigana, Thouvenel et José Touré. Je suis bien-sur remplaçant mais un quart-d’heure avant la fin Gérard décide de me faire rentrer à la place de Liazid Sandjak. Personne ne me connaissait. Premier ballon que je touche, je rentre dans la surface en dribblant et j’ai failli marqué. Et là tout le monde a vu que j’avais le niveau. Ça m’a permis de signer mon contrat pour 3 ans. Mon premier contrat pro avec Borelli. Francis il est arrivé en me disant « Mon fils ! Tu n’as pas de voiture, je vais t’en acheter une ! » c’était énorme.

Il te mettait le ballon où il voulait

Tu gardes un bon souvenir de ce PSG made in Borelli ?

Tu ne peux pas oublier, aucun de ceux qui ont vécu cette époque n’ont oublié. Humainement c’était fabuleux. Déjà dans le vestiaire ça chambrait…

Pas Safet quand même ?

Détrompe-toi. Il ne parlait pas beaucoup mais ce n’était pas le dernier non plus. Et puis c’était quelqu’un de vachement calé. Tout était analysé, pour moi c’était le top. Pied gauche, pied droit, il te mettait le ballon où il voulait. Le coup d’oeil ! Je n’ai pas vu plus fort.

Ton premier match titulaire c’est quand ?

Contre Marseille au Parc (ndlr : 8 novembre 1987). Je marque du pied gauche contre Joseph-Antoine Bell !

Pourquoi tu pars à Cannes en 1990, tu étais apprécié pourtant ?

Oui surtout quand j’ai marqué ma première bicyclette contre Mulhouse au Parc en 1990 (ndlr : 7 avril 1990). J’étais remplaçant, je rentre et au bout de 13’’ je mets ma fameuse bicyclette. C’était sous les ordres de Tomislav Ivić. Ivić est remplacé en fin de saison par Henri Michel. Le PSG lance sa campagne de pub avant le début de saison avec une photo de moi en train de faire une bicyclette et le slogan « PSG fais nous rêver ». Le championnat commence mais je ne suis pas titulaire. Mais l’équipe gagne ses matchs. Du coup on me dit qu’on n’a pas besoin de moi. C’était dur. Borelli qui aimait le beau jeu ne voulait pas me vendre car j’étais un de ses chouchous. Il décide donc de me prêter. Et Erick Mombaerts était parti entre temps à Cannes. Il y avait aussi Luis Fernandez à Cannes. Ils m’ont demandé de venir. « Tu verras le climat est bien, c’est top ». Mais moi je n’avais jamais bougé de Paris, je n’avais pas envie de partir, il y avait tous les supporters qui m’appréciaient… Finalement je suis parti. En me disant que ce serait peut être une chance.

Borelli était fou !

Finalement ça s’est avéré un bon choix ?

Et comment ! Les deux premiers mois ont été difficiles car j’avais encore la tête à Paris. Et puis on était 18ème alors que le PSG était 3ème. Puis on est parti sur une série de 13 matchs sans défaite. Le PSG est venu jouer à Cannes (ndlr : 13 avril 1991) durant cette série. Ce qui est marrant c’est qu’à l’époque le journal But interviewerait 2 joueurs la veille du match, un de chaque équipe. Ils m’avaient choisi pour Cannes. J’avais annoncé que j’allais marqué une bicyclette contre le PSG. Et je l’ai marquée, contre Joël Bats ! Borelli était fou ! Henri Michel a pris pour tout le monde. Et je suis revenu en 1991 à Paris.

Cette année 1991 correspond à tes premières sélections en équipe de France. C’était un accomplissement pour toi ce maillot bleu ?

Sincèrement je ne me suis pas posé la question. Car ça allait très très vite. Et j’avais déjà un certain âge (30 ans). Mais Michel Platini (ndlr : entraineur de l’équipe de France de 1988 à 1992) savait ce que je pouvais apporter. J’ai commencé en A prime. Mais je suis appelé pour Pologne-France (ndlr : 14 aout 1991 – Score : 1-5) car Cantona est suspendu. Et je marque le 3ème but. C’est comme ça que je commence ma carrière en bleu.

Revenons au PSG. Tu n’auras pas officiellement remporté de titre avec ce club mais tu auras marqué les esprits avec ta spéciale. Avoue, c’est quoi ta marque de vélo préférée ?

Si je devais coller un nom sur mon vélo ce serait AUTEUIL-BOULOGNE car chacun a eu sa bicyclette ! Ah Ah, je viens de la trouver celle-là…

Les grands gardiens français en ont pris un

C’était déjà une de tes spécialités avant celle de Mulhouse ?

Non, c’était juste de l’instinct, surtout cette première face à Mulhouse, sur un terrain gelé. Le centre arrive un peu « neigeux » et je viens en fait pour mettre la tête mais la balle arrive dans l’autre sens. Donc j’ai improvisé. Et j’ai senti que les gens s’identifiaient à ce geste spectaculaire.
Certains disaient que je ne l’avais pas fait exprès mais je savais que cette souplesse, je l’avais en moi.

Tu as conscience d’avoir marqué les esprits avec ce geste ?

Oui d’autant que ça correspond aussi à l’époque. Car Jean-Michel Larqué et Thierry Roland venaient juste de lancer le Top But. Et j’ai été le premier à être classé N°1 de ce top. La fois d’après il fallait faire mieux. Et ça valait pour moi aussi. Donc je gardais ça dans un coin de ma tête. SI j’avais l’opportunité de reproduire ce geste… Mais tu ne peux pas le faire n’importe quand. J’ai quand même réussi à en mettre deux dans le même match contre Bordeaux quand je jouais à Monaco. C’est Gaëtan Huard qui était dans les buts de Bordeaux quand même… Tous les grands gardiens français en ont pris un : Bats, Lama, Huard, Perez… C’est devenu une spécialité maison.

Sans tomber dans le piège

D’ailleurs on en voit moins aujourd’hui, selon toi pourquoi ?

On est sur un jeu plus physique, plus rapide alors que nous, on était plus technique.

Tu as participé au fameux 4-1 face au Real en 1993. Tu gardes un souvenir en particulier de ce match de fou ?

C’était magique. En plus l’entraineur (ndlr : Artur Jorge) ne m’était pas vraiment favorable mais il m’a mis titulaire car on avait perdu 3-1 là bas. Donc pour gagner il a mis l’équipe qu’il fallait. Du coup je me retrouve titulaire en attaque avec Weah et Ginola. 3 attaquants avec derrière Valdo en 10, Paul Le Guen et Vincent Guerin au milieu. Et en défense Colleter, Sassus, Antoine Kombouaré et Ricardo. Je revenais de blessure mais je courrais comme un dingue. J’avais même fait venir au Parc le chirurgien qui m’avait opéré car ça faisait 7 mois jour pour jour que je m’étais blessé. Sur le but d’Antoine je ne peux même pas te l’expliquer. Et en face il y avait Butragueño, Zamorano, Míchel…

Tu penses que le PSG peux les battre cette saison ?

Oui. Mais il y a certains endroits où il ne faut pas faire de faute et éviter les coup-francs. Et puis Zizou connait l’importance de ce match, ils jouent tout sur ce match. Mais il y a un vrai coup à jouer sans tomber dans le piège et ne pas finir à 10.

Et aller au bout ?

Si tu bats le Real, ça veut dire que tu vas au bout.

Suis-tu la progression de Kylian Mbappe ? Lui trouves-tu des similitudes avec ton jeu frais et spectaculaire ?

La grande similitude c’est la vitesse pour partir de loin. J’avais cette vitesse. Et surtout au Parc car à l’époque le terrain était immense, on avait l’impression que le ballon ne sortait jamais. Depuis le terrain a été raccourci. Mais ça favorisait le jeu en contre. J’avais ce jeu là. Mais Kylian a une aisance naturelle qui lui permet de prendre pas mal de décisions. Il peut se retourner très vite et il a la vision. Mais quand il va trouver le calme dans une certaine position il va ajouter un plus dans son jeu. Le problème en étant à droite c’est qu’il doit avoir un pied gauche magique, en plus du droit. Dans cette position ça te permet d’envelopper le ballon comme le faisait Thierry Henry sur le côté gauche.

Sur la fin de ta carrière tu fais 6 clubs anglais en 5 ans, c’est quoi ce parcours ? Tu t’étais mis au golf ?

Ah Ah. Je voulais faire un 18 trous et je me suis arrêté à 6. Non en fait je n’avais pas envie de raccrocher. Et puis l’Angleterre… Tu es dans un univers de foot où plus tu descends en niveau plus tu tombes sur des amoureux du football. Et pourtant je ne voulais pas y aller au départ, j’avais 36 ans en 1997. Mais à Leyton Orient, pour disputer le Play Off de montée en division supérieure, tu joues à Wembley ! Là tu te motives, c’est vraiment pro même à ce niveau. Je suis resté 2 ans à Leyton puis je suis allé Kingstonian qui était encore un niveau au dessous, niveau CFA en fait. Et on a été en finale de la Umbro Cup qui était le sponsor de l’équipe d’Angleterre. Et on a encore joué la finale Wembley ! Et le match était retransmis à la télé ! Imagine ça en France ! Du coup j’ai fait des piges car je ne voulais pas arrêter ma carrière.

C’est mon club de référence

Tu continues d’aider le PSG dans la recherche de talents en Afrique ? Tu es toujours ambassadeur du club là bas.

Non plus maintenant pourtant j’ai vécu de belles expériences notamment avec un tournoi organisé pour des U16 en Malaisie avec toutes les meilleures équipes de la région. Comme je parlais anglais ça aidait.

Le PSG reste ton club de coeur encore aujourd’hui ?

Ah oui. J’ai joué 7 ans au PSG. C’est mon club en France, c’est celui qui m’a mis en lumière avec ces retournés qui restent dans la tête des gens aujourd’hui. C’est mon club de référence même si j’ai vécu une super saison à Cannes avec un certain Zizou qui commençait avec nous.

Tu retournes souvent au Parc ?

Oui je suis invité. Et pourquoi pas un jour y travailler ?

Ça t’intéresserait ?

Oui ou au moins pour nous mettre en avant, pour qu’on se sente concernés en tant qu’anciens. Qu’on soit présenté aux joueurs actuels pour échanger.

Quelles sont tes activités aujourd’hui ?

J’ai passé les diplômes de coach. J’ai eu la chance de pouvoir entraîner l’équipe nationale de Guinée avec Luis Fernandez en entraineur principal et Kaba Diawara en coordinateur en 2015. Ça a été une superbe expérience. Je m’occupe aussi du club des petits anges à Paris dans le 7ème (ESPA) en tant que directeur sportif. Alphonse Areola et Christopher Nkunku en sont issus. Mais c’est un club amateur. Et puis j’ai aussi lancé un stage à mon nom au Saut du Loup entre Bordeaux et Toulouse. C’est pour des enfants allant de 6 à 14 ans et ça a lieu cet été.

L’interview se termine. On quitte Amara qui décide de rester pour se faire une petite grille PMU tranquille avec les habitués du quartier. Un homme simple.  


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Xavier Chevalier