Sébastien Parraud

par

Il a une bonne gueule, parle bien, est supporter du PSG mais il a surtout réalisé le documentaire événement « PSG : ET DIRE QUE CE CLUB A FAILLI NE PAS EXISTER » .
On revient avec lui sur cette aventure incroyable à bien des niveaux.

 – – – – [ Interview ] – – – –

Virage : Que raconte ce documentaire ?

Sébastien Parraud : Il raconte la genèse du PSG, à savoir : quand et comment est né le club, qui en sont les fondateurs et qui a posé les premières pierres. Même si la date de création officielle du club est en 1970, l’idée a été pensée en amont. Du coup le documentaire part de 1969 jusqu’au rachat du club par Daniel Hechter.

Virage : Quand est-ce que le documentaire sera disponible et comment ?

SP : Il le sera à partir du 14 décembre en exclusivité sur le site www.spicee.com


crédits : Spicee

Virage : Qu’est ce qu’il apporte de plus par rapport aux autres documentaires déjà sortis sur le PSG ?

SP : Cette période là n’a jamais été traitée. Ceux qui connaissent bien le club pensent généralement au plus loin jusqu’au gang des « chemises roses », la période Hechter avec Jean-Paul Bemondo, Francis Borelli et Alain Cayzac. Mais rares sont les personnes de notre génération qui peuvent parler de la période qui a précédé cette dernière. Et surtout comment a été monté le club. L’idée était donc de rendre à Cesar ce qui appartenait à Cesar, de retrouver les premières fondations, les premières racines du club. Et puis en tant que réalisateur, il était aussi important pour moi de montrer que depuis sa création jusqu’à aujourd’hui, on parle toujours du même club, qu’il y a un fil conducteur. Ce documentaire n’est pas une « vieillerie » mais une histoire qui raconte les débuts.

Pierre Phelipon, Jean Djorkaeff, Jean-Pierre Destrumelle, Jean-Claude Bras, Roland Mitoraj
Pierre Phelipon, Jean Djorkaeff, Jean-Pierre Destrumelle, Jean-Claude Bras, Roland Mitoraj

Virage : Qui est à l’origine de ce documentaire ?

SP : C’est Jean-Noël Touron. Il ne vient pas du monde des media. Il était commercial chez SFR et il est passionné par le PSG. En tant que fan il s’est posé la question de savoir qui était derrière la création du club. Il a amassé tout un tas d’informations à ce sujet mais ne savait pas comment mettre le tout en images. C’est par le biais d’un ami qu’on a été mis en relation. Je l’ai aidé à refaire le puzzle et, à partir des informations dont on disposait, j’ai écrit une histoire à raconter.

C’est grâce à De Gaulle si le PSG est né

Virage : Qu’est-ce qui lui a donné envie de produire ce documentaire alors que ce n’est pas son métier ?

SP : C’est juste la passion. Il était même prêt à co-produire le documentaire. Il a entamé des démarches auprès de Canal+ et de France 3 qui n’ont pas suivi. France 3 a d’ailleurs refusé en argumentant qu’il n’y avait pas de femmes dans le documentaire et qu’ils en avaient besoin pour leur panel… Difficile d’inventer des protagonistes qui n’ont pas existé… Il était du coup un peu désemparé et ne savait plus à qui le proposer. C’est là que je suis intervenu en proposant le projet à Spicee qui est une Web TV. Comme le documentaire n’est pas 100% sportif mais raconte surtout une histoire humaine, un fait de société, une histoire politique, ça a fonctionné.

Virage : Pourquoi politique ?

SP : C’est grâce à De Gaulle si le PSG est né. Car lorsqu’il décide de raser le Parc pour faire passer le périphérique, il impose de faire reconstruire un stade à condition qu’il y ait une équipe résidente à Paris pour le rentabiliser. Et il confie le dossier à une équipe de professionnels.

parc-virage-spicee

Virage : Le processus de production a-t-il été long ?

SP : Il y a eu un travail d’écriture et de re-écriture de la trame. Et puis un gros travail de recherche d’archives, d’images, de vidéos. On a par exemple les premières images en couleur du PSG, filmées en super 8 par un fan, que personne n’a jamais vues. Sans parler des personnes à contacter pour monter des interviews pertinentes et les recherches de financement. Globalement on a commencé à tourner début février 2016. Mais à partir de là ça a été très vite car le PSG nous a très rapidement ouvert les portes. On a eu des journées de tournage au Camp des Loges, au Parc des Princes, un accès au siège du club, aux archives. J’ai été très agréablement surpris par l’accueil du PSG

Virage : Le fait d’être toi même supporter du PSG t’a-t-il aidé dans la préparation de ce film ?

SP : Il n’y a eu aucun parti pris de ma part. Même si le PSG est le club de mon coeur, je me sens capable de faire le même travail pour un autre club historique comme Saint-Etienne, l’OL, même Marseille. Du moment qu’il y a une histoire à raconter. Mais c’était vraiment plaisant de le faire sur le PSG car j’ai appris des choses. On a tourné dans un Parc des Princes vide, j’ai passé des nuits à scruter des archives de l’INA et je suis tombé sur des trésors. C’était super jouissif.

Virage : Les personnes interviewées ont été difficile à convaincre ?

SP : Non. Jean-Noël les avait déjà contacté en amont et ils étaient tous super partants.

Daniel Hechter est obligé de
réclamer ses places au Parc

Virage : Tu as senti un attachement fort au club chez ces personnes ?

SP : Oui mais… Tous les premiers protagonistes de l’histoire du club ont un brin d’amertume. Ils sont toujours amoureux du club mais surtout de la période qu’ils ont connue. Ils suivent le PSG à chaque match, mais ils regrettent que le club ne fasse pas plus appel à eux, qu’il n’y ait pas un peu plus de respect des anciens, une reconnaissance. Par exemple Daniel Hechter est obligé de réclamer ses places au Parc alors que théoriquement il y a 2 places qui lui sont réservées à chaque match. Daniel Hechter quand même, président du club, créateur du maillot historique…

Patrick Levasseur (Kiné), Robert Vicot, Just Fontaine, Daniel Hechter - Saison 1973-74
Patrick Levasseur (Kiné), Robert Vicot, Just Fontaine, Daniel Hechter – Saison 1973-74

Virage : De ton point de vue, la création du PSG est-elle un cas unique dans le football moderne ?

SP : En France oui mais pas dans l’histoire du football moderne. Pour la simple et bonne raison que le PSG a été monté sur le principe des socios.

Virage : En effet, vous racontez le rôle qu’a joué le président mythique du Real Madrid, Santiago Bernabéu, dans la création du PSG avec ce concept de socios. Tu étais au courant de cette histoire ?

SP : Absolument pas. Je l’ai appris par Jacques Ferran que nous avons interviewé. Ancien grand journaliste sportif à l’Equipe, il a aujourd’hui 96 ans mais se souvient de tout. Je ne te raconte pas toute l’histoire, le public la découvrira dans le documentaire mais la conclusion c’est que le PSG n’est ni plus ni moins que le fils du Real Madrid. Alors on aime ou on aime pas le Real mais le projet a été construit sur le même modèle. Un modèle ancré dans le peuple.

Jacques Ferran
Jacques Ferran

Virage : Cet attachement populaire a été important ?

SP : Oui et j’ai voulu montrer que le PSG a toujours été un club populaire. Populaire mais bourgeois à la fois. Il y a toujours eu cette ambivalence. Toutes les classes parisiennes se retrouvaient dans une même enceinte, dès le départ et encore aujourd’hui.

Sans l’énergie et l’enthousiasme de ces personnes, le PSG n’aurait jamais existé

Virage : Qu’est-ce qui t’a marqué le plus lors de la préparation de ce documentaire ?

SP : L’insouciance. L’insouciance des joueurs qui ont rejoint le club comme Jean Djorkaeff et de ceux qui ont monté le club. Sans l’énergie et l’enthousiasme de ces personnes, le PSG n’aurait jamais existé et on aurait pas le PSG d’aujourd’hui. Il y avait un rapport humain assez incroyable entre les joueurs et les dirigeants.
Et puis parce qu’on parle aussi de football moderne, ce qui m’a marqué c’est que le PSG a été un club visionnaire dès le début. La stratégie économique des fondateurs n’est pas celle d’un club de foot de l’époque. Elle est celle d’une vraie entreprise. Guy Crescent*, a notamment développé le club comme un vrai business. Il était le patron de Calberson à l’époque, il ne venait pas du sport mais a appliqué des principes qui fonctionnent en entreprise. Il a fait basculer le PSG dans l’ère professionnelle dans une période charnière pour le football français, celle où Fernand Sastre** a repensé le foot professionnel et amateur français.

* Membre fondateur du PSG, président du club en 1971 puis président du Paris F.C. de 1973 à 1975
** Secrétaire général de FFF de 1969 à 1972, membre du conseil du PSG de 1970 à 1972
Pierre Bellemare, Guy Crescent, Harold Kay - 1er février 1970
Pierre Bellemare, Guy Crescent, Harold Kay – 1er février 1970

Virage : Pourquoi Denis Podalydès en voix narratrice ?

SP : Il y a eu plusieurs options envisagées. J’aurais bien aimé Nicolas Duvauchelle car c’est un vrai fan et parce qu’il incarne la nouvelle génération. Et j’aimais bien l’idée de mélanger le passé avec une voix jeune. Mais Nicolas a du partir sur le tournage d’un film au moment où on a eu besoin de lui. On a aussi pensé à Roschdy Zem mais il était pris par la réalisation de son film. On a continué nos recherches pour trouver quelqu’un de différent par rapport aux voix habituelles, avec une voix posée. Jean-Noël nous a proposé Denis car il est supporter, certes récent, mais supporter du PSG et amateur de football. Il a été littéralement sur le cul quand il a découvert le docu en salle de montage.

Virage : Vous avez prévu d’envoyer une copie à Nasser ?

SP : Oui c’est en cours. On est en train de faire la traduction car il en voulait une copie en anglais. Nasser est au courant du projet et c’est lui qui a demandé personnellement une copie.

Virage : Et à Zlatan ?

SP : Je ne suis pas sûr que ça l’intéresse…

Guy Crescent entouré des "Socios" du PSG. Avril 1970
Guy Crescent entouré des « Socios » du PSG. Avril 1970

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