Bernard Lama Virage

Bernard Lama

par

« Le Chat ». Il est peut être encore, à l’heure actuelle, le meilleur gardien de but
que le PSG ait connu. Son franc-parlé légendaire lui a parfois joué des tours,
mais l’homme est resté intègre toute sa carrière.
C’est en direct de la Guyane qu’il a accepté
de nous accorder un peu de son temps précieux.

Si Brest n’avait pas fait faillite, auriez vous songé jouer un jour au PSG ?

Oui car ça faisait partie d’un plan de carrière. J’ai joué à Lille, à Metz et je voulais finir par jouer dans un grand club. Et le PSG en faisait partie.

Ce pré-contrat que le PSG vous a proposé pour prendre la succession de Joel Bats, vous étiez sûr qu’il serait honoré ?

Oui car c’était signé mais sous réserve d’être performant à Lens où j’ai passé un an avant d’arriver officiellement à Paris. Et à Lens j’ai fait le boulot.

Bernard Lama Virage

Il y a eu une des discussions avec l’OM durant votre passage à Lens. Vous n’avez pas été tenté de rejoindre le sud et son climat plus clément ?

C’était déjà le grand OM, qui allait être champion d’Europe. Mais non. On a discuté, mais de toute façon Paris était aussi un grand club. Et pour moi c’était la meilleure destination possible, sportivement et humainement. Car ça ne se limitait pas qu’au football. Paris c’est le pouvoir central, là où la politique se fait, c’est le centre des décisions. Ça allait au delà de ma propre personne. C’était important.

L’arrivée à Paris, facile à gérer ? D’autant que remplacer Bats, ce n’était pas facile.

Pour moi ça a été facile. J’attendais ce moment depuis mon arrivée dans la métropole. C’était mon plan de carrière. Et puis Joël est resté au club dans l’encadrement, et en entraineur des gardiens. On a donc développé une relation à deux qui a été constructive. On s’est développé en même temps. On a vraiment été dans la complicité, ainsi qu’avec les autres gardiens du club, Richard Dutruel ou Luc Borrelli.

Si Bats était resté, vous auriez pu être dans la même situation qu’Alphonse Aréola avec Gigi Buffon. Comment analysez-vous la chose ?

Ils sont tous les deux dans une phase différente de leur carrière. Ils peuvent s’apporter mutuellement des choses. Alphonse doit murir. Il a déjà de l’expérience mais en tant qu’homme et que compétiteur Gigi va lui apporter beaucoup. Il va lui amener un plus et lui faire gagner du temps. Gigi est un compétiteur hors norme. Et c’est pour ça qu’il est venu à Paris. Qu’il a été recruté. Et puis au moins ça a été annoncé clairement dès le départ par le club. Les 2 joueurs savent comment ça va se passer. Ils savent qu’ils doivent faire le boulot, prouver sur le terrain à chaque match.

Vos maillots au PSG sont restés mythiques. Vous aviez votre mot à dire dessus ?

Bernard Lama VirageAbsolument. Déjà j’étais libre de porter ce que je voulais. Et sans vouloir me la raconter je crois avoir révolutionné les tenues de gardien à mon époque. J’avais une influence directe sur toute la tenue, du maillot aux chaussures. Avec Nike on développait des matériaux novateurs. On a aussi travaillé sur la gamme de chaussures Tiempo qui revient à la mode aujourd’hui. J’avais ma propre styliste ! J’avais développé aussi une gamme de gants avec Reusch qui avait des coutures retournées pour que les gants soient plus proches des doigts. Et cette philosophie je l’ai eu dès le début de ma carrière, c’était même dans mon contrat, dès mon arrivée à Lille.

Et si le PSG vous proposait une collab’ ?

Je travaille actuellement sur le lancement d’une nouvelle marque qui sera divulguée en février. pourquoi pas, on va y réfléchir !

En 1997 vous êtes suspendu pour consommation de cannabis lors d’un stage de l’équipe de France aux Pays Bas (lol). Avec le recul vous trouvez que la peine de 5 mois dont 2 fermes était disproportionnée ?

Non. Je n’ai pas de problème avec cette suspension. Je n’ai pas respecté les règles et je l’assume. En tant que professionnel on se doit de montrer l’exemple. Et puis je n’avais pas intérêt à avoir le système contre moi. Déjà ça aurait pénalisé le club mais aussi ma carrière. Après le traitement que j’ai subi de la part de la fédération, c’est autre chose. Disons que ma personnalité forte, le fait que je l’ouvre, que je ne sois pas dans le système, que je ne sois pas du sérail, n’a pas aidé. Quand je suis arrivé en France je me suis fait tout seul, je me suis un peu « incrusté ». Mais en vérité, ça m’a rendu plus populaire au près du grand public. Même à la fédération où beaucoup d’employés étaient de mon côté. Mais surtout au Parc. Ça m’a rapproché des fans, du peuple. Déjà que j’étais un de ceux qui étaient parmi les plus proches des supporters, ça a accentué les choses…

4 mai 2000. Dernier match sous les couleurs du PSG. Victoire 3-0 contre Montpellier. Vous êtes partis la tête haute, porté par vos coéquipiers avec le public qui scandait votre nom. Pas de sentiment d’inachevé ?

Le fait d’être parti entre temps à West Ham et de revenir, c’était déjà une façon de finir proprement mon histoire avec le PSG. J’étais parti dans de mauvais termes la première fois. Là je revenais dans de meilleures conditions. Et pourtant j’ai sacrifié de grosses offres de l’étranger pour re-signer à Paris. Mais c’était le bon choix. Après mon départ en 2000 n’a pas été facile. On m’a fait partir parce que je dérangeais. J’avais une grosse influence sur le groupe. Et les dirigeants me craignaient un peu. Ça les arrangeait que je parte. Dommage car je serais bien resté dans l’organigramme. Dans l’encadrement. Et ceux qui étaient à la tête du club étaient une fois de plus des gens de passage. Lamarche et Bergeroo… Pourtant j’ai fait bouger les choses en revenant. Je leur ai beaucoup apporté.

Résumé du match du 4 mai 2000

J’ai lu que vous aviez pensé finir votre carrière au Brésil. Est-ce vrai ?

Oui. Lors de mon retour à Paris. J’avais une offre du Flamengo mais je suis resté à Paris. J’avais une mission ici. Je voulais finir mon parcours et les chants et la banderole au Parc le 4 mai, c’était ma récompense.

Vous êtes toujours très impliqué dans la politique en Guyane aujourd’hui. Vous n’avez pas des envies électorales comme Mister George ou Salomon Kalou ?

La politique ce n’est pas forcément se faire élire. Ça passe aussi par l’économie, la formation, l’encadrement. C’est ce que je fais avec ma société Dilo, une entreprise d’eau minérale. Et avec mon engagement pour le football guyanais. Il y aussi l’académie Diambars que j’ai créée avec Patrick Vieira et Jimmy Adjovi-Boco entre autres. L’objectif de cette association est de profiter de l’engouement de la jeunesse pour le foot, pour promouvoir l’éducation. Ma famille a toujours été investie en politique dans cette région. Je le fais à présent à ma manière.

Vous n’avez pas pensé à monter une académie PSG en Guyane. On sait par exemple que Kevin Rimane est originaire de Guyane.

Le football français, le PSG inclut, ne travaille pas et n’investit pas assez dans les territoires d’outre-mer. Ils préfèrent travailler avec l’Afrique par exemple. Et à Paris ils sont plus focalisés sur les grosses vedettes que sur la formation. Et pourtant Odsonne Edouard (ndlr : joueur formé au club et jouant au Celtic de Glasgow) est né à Kourou. Mike Maignan (ndlr : formé aussi au club et gardien du Losc) est né à Cayenne. On a de bons jeunes ici. Thomas Lemar, champion du monde, a été formé en Guadeloupe. Il y a encore beaucoup à faire…

Depuis votre départ du PSG, quel gardien vous a impressionné à Paris ?

Bernard Lama VirageIl n’y en a pas. Landreau ou Letizi avaient des profils de patrons mais ça n’a pas été concluant. Franchement aucun.

Même pas Buffon ?

Buffon si tu regardes bien ses matchs, il est très en difficulté quand le ballon est dans ses pieds ou sur les prises de balle. En fait c’est surtout un compétiteur, un mec qui harangue les joueurs. Un gagneur. C’est un grand personnage mais d’autres gardiens sont bien meilleurs que lui. Et puis encore une fois, on sait pourquoi le PSG l’a fait venir.

Vous auriez un message pour les supporters ?

Qu’ils continuent à y croire, à encourager les garçons. L’époque a changé depuis que je suis parti mais une chose est sûre. Malgré les attaques des media, des clubs adverses, des institutions, le PSG est un grand club. Gagner la coupe d’Europe c’est une chose, mais le fait de la disputer chaque année est presque plus important. Et le PSG est le seul club français actuel à pouvoir avoir cette garantie, et surtout à y arriver. Et ça c’est être un grand club.

Crédits photos (c) Panoramic


Xavier Chevalier

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