#ASK Jean-Marc Pilorget

par

En novembre, vous lui avez posé vos questions
via Internet et les réseaux sociaux,
Jean-Marc Pilorget (435 matches avec le PSG) y répond.
Un grand merci à lui.


Est-ce que lorsque vous êtes entré au centre de formation de PSG, est-ce que c’était votre équipe préférée ?
Oui, le PSG est et restera mon équipe préférée. Je suis né à Paris j’ai rejoint le PSG à 16 ans (1974). L’année d’avant signer au centre de formation, j’avais refusé un contrat avec Strasbourg. J’ai refusé parce que ce n’était pas l’endroit où j’avais envie d’aller et je voulais me laisser une petite chance avec le PSG. Et j’ai bien fait d’attendre.

Le Parc de mon enfance en 82 était souvent aux couleurs vertes quand on recevait Saint-Etienne et Auteuil abritait les supporters adverses. Toi le capitaine emblématique aurais-tu rêvé de jouer dans un Parc bondé, avec la splendeur de nos deux virages ? Et que représente le Parc ?
Tu as raison pour les matches face à Saint-Etienne. C’est une certitude il y avait plus de Vert que de Rouge et Bleu. Saint-Etienne était la meilleure équipe française. Paris est une grande ville et il y a toujours eu beaucoup de supporters d’autres clubs à Paris.

J’aurais aimé jouer plus souvent dans un stade plein plutôt que « dégarni », même s’il l’était moins que le Matra à l’époque. J’ai quand même connu de supers ambiances et le début des virages. En 1989, il y avait beaucoup plus de monde au Parc qu’en 1975. Les Kops commençaient à se structurer, Boulogne, c’était vraiment top à voir. Les virages sont le point de départ de l’ambiance au Parc.

J’adore le Parc. Cela peut paraître un peu « prétentieux » mais ce stade c’était « mon jardin », dans le sens ou c’était un endroit où je me sentais vraiment très très bien, où j’avais l’impression d’être chez moi. J’ai vécu de belles histoires dans ce stade. C’est pour ça que pour moi, ça reste un stade magique. Et même aujourd’hui quand j’y retourne, et même s’il a énormément changé, j’ai toujours des ondes positives.

Jean Marc Pilorget Virage PSG
Jean-Marc Pilorget et Jean-Claude Lemoult au Parc face au FC Nantes de Vahid Halilhodžić en 1983 © Icon Sport

Aujourd’hui on expose davantage les classements des buteurs ou passeurs décisifs, moins celui de l’assiduité. Soyez certain que le fait d’être leader du classement des matchs joués avec le PSG est reconnu par tous les supporters qui suivent le PSG depuis plusieurs décennies.
Merci pour cette reconnaissance.

Pensez-vous que votre record* tombera un jour ?
A un moment donné j’ai pensé que non et maintenant je pense que peut-être. Il y en a un qui pourrait y arriver, c’est Marquinhos car il est jeune et a déjà disputé un certain nombre de matches. A moins qu’à un moment où il soit amené à quitter le club.

Dans l’effectif actuel, quel est le joueur qui pourrait te ressembler le plus ? Celui que tu aimerais avoir dans ton équipe ?
Le plus, je dirais Marquinhos même si nos registres sont différents. Mais, je ne sais pas, je ne le connais pas mais il a l’air d’avoir une mentalité bien trempée et en même temps d’être quelqu’un de calme. J’aime bien ce garçon. Il me donne l’impression d’aimer le club. Et celui que j’aimerais dans mon équipe ? Mbappé. Quel entraîneur n’aimerait pas l’avoir dans son équipe ? Pour moi il est LE plus grand joueur des années à venir.

Vous avez carte blanche pour le prochain mercato, que faites-vous ?
Je laisse ça aux journalistes (sourires).

Tu as presque connu les débuts du club, des années bonnes et d’autres galères, tu n’étais malheureusement plus là pour le 1er titre européen. Quel est ton point de vue sur ce club aujourd’hui, les stars, l’ambition et éventuellement la solution pour enfin remporter la LDC ?

J’ai toujours suivi l’évolution du club. Les bons choix faits par la direction ou les moins bons. On a tous notre avis sur ce qu’il faudrait faire ou ne pas faire. Mais pour être honnête, pour ça il faut être à l’intérieur du club, de l’équipe pour sentir ces choses-là. La critique est la chose la plus simple à faire et dans tous les domaines. Ce n’est pas trop mon truc.

La 1ère clé de la réussite pour moi c’est l’osmose du trio de décideurs : président, directeur sportif, coach et quand je dis ça, je le mettrais bien dans l’autre sens : coach, directeur sportif, président. Là, c’est ma casquette de coach qui me fait dire ça. Cela ne se passe pas forcément de la sorte. Car le football aujourd’hui est souvent inversé. Mais dans un club, quand le binôme président-coach ou trio président-directeur sportif-coach, ne s’entend pas, c’est le début de la fin.

Que représente pour toi le Parc des Princes ?
Pour moi c’est le plus beau, le plus chaud de tous les stades. C’est THE stade.

Aurais-tu rêvé de jouer au Parc avec le virage Auteuil et le Kop de Boulogne bondés ?
Bien sûr, j’aurais adoré.

C’est quoi ta plus grande joie et ta plus grande peine avec Paris, pourquoi ?
Ma plus forte émotion reste la finale de Coupe de France face à Saint-Etienne en 1982 (2-2, 6 tab à 5). C’est le match le plus fou que j’ai joué. Les sensations, les émotions, ça reste très personnel. Tous ceux qui ont connu une grande victoire, avec une explosion de joie l’ont sûrement ressenti. On est hors de soi. Un supporter peut connaitre ça aussi. Il y a tout eu : l’égalisation de Dominique Rocheteau dans les arrêts de jeu, Francis Borelli qui embrasse la pelouse, le public qui envahit le terrain. Il y a eu ensuite le titre de champion (1986) mais c’est une joie différente car préparée. Quand on est un jeune joueur, gagner un 1er titre avec son club, c’est fabuleux.

Jean Marc Pilorget Virage PSG
L’égalisation de Rocheteau dans un Parc en feu en 1982 © Icon Sport

J’ai revu le match il n’y a pas très longtemps sur l’Equipe TV. Je l’ai revu avec plaisir. C’était drôle aussi avec les commentaires de l’époque, Je chambrais Didier Roustan : « Là tu te trompes, ça ne va pas se passer comme ça » (sourires). J’ai pris grand plaisir à regarder. Les matches à l’époque me semblaient assez lents mais celui-ci, je l’ai trouvé très tonique. J’en ai parlé avec Christian Lopez (défenseur de Saint-Etienne, ndlr), on avait fait un entretien croisé dans la presse. Il a eu le même sentiment.

Mon plus mauvais souvenir, c’est mon dernier match. Mon dernier avec le PSG, au Parc (1989). J’ai toujours eu la faculté de gommer les mauvais souvenirs et garder les bons. C’est pour ça qu’à ce jour, je ne sais pas contre qui je jouais. Je ne sais pas, c’est peut-être une forme de protection. Mais dans ma vie sportive comme dans ma vie personnelle, j’essaie toujours de garder le positif.

A jamais le premier.
Merci à vous

Avez-vous toujours le maillot que vous portez sur la photo publiée pour l’appel aux questions ? Quel est pour vous la meilleure saison que vous ayez passé sous les couleurs parisiennes ?
Non. Je crois qu’il me reste un seul maillot. Un maillot blanc, RTL. Tous les autres je les ai donnés. J’ai eu beaucoup de belles saisons mais si je devais en ressortir une, je dirais l’année 1986 avec le titre de champion. Ça a été la plus complète, la plus intense aussi bien sur le terrain qu’en dehors. Nous étions vraiment un groupe soudé. On a fait plein de choses ensemble aussi en dehors du foot.

Quel maillot préférez-vous avoir porté ? Que pensez-vous du maillot cette saison ? Et de façon générale quel est votre maillot préféré depuis 50 ans que le club existe ?
Je dirais le 1er celui que Daniel Hechter a conçu. Un grand monsieur de la mode et notre président. Ce que je pense du maillot de cette saison ? Pour moi un maillot, son design, sa couleur ce n’est pas le plus important. Le plus important c’est ce que tu en fais quand tu l’as sur toi. Comment tu te comportes. Et je pense que ça, ce sont des choses qui parlent forcément à un supporter.

Un exemple récent : un mec comme Cavani, adoré par les supporters du PSG : quand il avait ce maillot, il donnait le maximum qu’il soit bon ou mauvais. Quand on enfile ce maillot on essaie d’y faire honneur, chaque fois qu’on le porte. Pour moi c’est de loin le plus important. Enfin Je n’ai pas de maillot préféré depuis la création du club. Le plus important, c’est ce qu’on en fait. C’est comme une personne, c’est ce qu’elle est à l’intérieur qui est important.

Vous avez-eu comme président Daniel Hechter et Francis Borelli ? Avez-vous une anecdote sur l’un comme sur l’autre ?
Daniel Hechter est mon 1er président. C’est un homme très simple, très timide et très à l’écoute des gens. Je ne l’ai pas connu longtemps mais je suis heureux d’avoir rencontré un Monsieur comme lui. Une grande figure de la mode et celui qui m’a fait signer mon 1er contrat. Pour l’anecdote, ce qui me vient c’est quand le président et le coach (Just Fontaine) étaient sur le terrain, chacun avec un cigare quand on s’entraînait.

Francis (Borelli), j’en ai tellement dit sur lui que je ne veux pas en rajouter mais c’était quand même un bon joueur de football. Je l’ai vu faire des matches caritatifs dans des petits stades. Et il avait une particularité : c’est le seul joueur qui jouait les 2 mi-temps du même côté devant la tribune officielle (sourires). Cela me faisait rire.

Quelle relation entretenez-vous avec la direction actuelle ?
Je n’ai pas de contact. Seulement avec certaines personnes qui bossent à l’intérieur du club. Jérôme Touboul, Christian Gavelle et Michel Kollar.

Vous souvenez-vous de votre premier et de votre dernier match avec le PSG ? Et lequel vous a le plus marqué ?
Sans problème, PSG-Reims. Le dernier, comme j’ai dit, je ne sais pas. Le 1er, déjà c’est une belle sensation car c’est le 1er match avec ce maillot du PSG sur moi, avec les pros. Et au Parc (PSG-Reims, 2-3, 21.12.1975, ndlr). Avec comme adversaire Carlos Bianchi. Quand vous jouez défenseur cela vous met tout de suite dans le bain (sourires). On perd malheureusement mais cela reste un bon souvenir car nous étions 4 jeunes du club lancés ce soir-là (Thierry Morin, Lionel Justier, François Brisson et moi), et on a eu la sensation d’avoir fait ce qu’on nous avait demandé. Après le match, il y a une personne, je me rappelle, qui m’a dit : « C’est bien, il faut continuer ». C’est Daniel Hechter. Et celui qui a été remarquable du début jusqu’à la fin pour notre intégration c’est Jean-Pierre Dogliani.

Quelle est votre vision sur l’évolution du football ? (ex. Super Ligue)
L’évolution du foot suit un peu l’évolution de la vie où l’économie, le business va prendre de plus en plus de place. On cherche par tous les moyens à être le plus rentable possible. Pour moi ce n’est plus du sport mais c’est du business. La Super Ligue ? Moi j’aime quand la C1 donne ses chances au plus de clubs possible.

Jean Marc Pilorget Virage PSG
Le pénalty décisif face à Saint-Etienne en 1982 © Icon Sport

Votre tir au but en finale de Coupe de France : est-ce que c’est votre plus grande émotion ? Avez-vous gardé une réplique de la coupe, une médaille, ou le maillot quelque chose de ce match ? Je vous dis merci Monsieur Pilorget
Oui. Je ne peux pas l’oublier car ça reste gravé et quand il m’arrive de croiser des gens qui étaient au Parc, on en reparle souvent. Donc oui. Il faut savoir que j’ai failli ne jamais tirer. Au début de la séance de tirs au but, le coach Georges Peyroche demande qui veut tirer le 1er ? Je lève la main. 2ème tireur ? Je lève la main, à chaque fois je lève la main et à chaque fois il choisissait quelqu’un d’autre (sourires). J’ai commencé à me dire qu’il ne me faisait pas confiance. Je dis ça en rigolant mais une fois les 5 tireurs passés, je dis : « C’est bon, j’y vais ! » Et j’y suis allé. De ce match, je n’ai rien gardé de matériel. Rien du tout. Les souvenirs sont dans ma tête et dans mon cœur. Mon maillot ? Je pense que j’ai dû le garder sur le moment, et le donner après. A l’époque, il faut savoir qu’on ne pouvait pas donner ou échanger nos maillots comme aujourd’hui. Pour la Coupe, on avait des jeux de maillots différents, donc on pouvait plus facilement les donner. Mais en championnat, on rendait à la fin du match, on en avait 2 par match, et on les rendait pour les laver.

Avec quels coéquipiers tu t’entendais le mieux, as-tu gardé contact ?
Le football vous savez c’est comme une entreprise, on se fait des copains, beaucoup. Des amis, beaucoup moins. Donc il n’y en n’a pas énormément. Le 1er malheureusement n’est plus là, c’est Alain Polaniok**.

Alain Polaniok (PSG, 1986-1989) et Alain Couriol (PSG, 1983-1989), ce sont deux frères. Avec Alain Couriol, on ne se voit pas souvent mais c’est comme mon frère. On était ensemble en Bretagne fin août, chez des amis, pour la finale de la Ligue des Champions. On a vu le match ensemble.

Dominique Lokoli, on s’appelle de temps en temps, j’ai une grande affection pour lui. On prend des nouvelles. Il a perdu une fille, comme moi. Et son fils Laurent est sportif de haut niveau, il joue au tennis. Il y a Dominique Bathenay, aussi.

Que penses-tu de la pelouse du Parc comparée à celle que tu as connue ?
J’y ai mis les pieds une fois il y a 4 ans. On était venus sur la pelouse pour fêter le 1000ème match au Parc. Elle est magnifique, c’est un régal. Aucune comparaison avec la pelouse de l’époque, bien qu’elle était quand même pas trop mal.

Pour toi qu’est-ce qui caractérise, identifie le PSG ? Pourquoi est-il un club à part ?
La passion, la folie, l’impatience. Le PSG est à part car c’est le club de la capitale. Adoré, détesté mais il ne laisse pas indifférent.

Quel est le joueur le plus fort avec qui tu as pu jouer au PSG ?

Les 2 plus forts : Safet Sušić et Mustapha Dahleb.

Que penses-tu de la fuite des jeunes titis du PSG ? Ne penses-tu pas qu’il faut éduquer les jeunes pour qu’ils apprennent l’histoire du club et pour mieux s’identifier au PSG et se projeter au club pour leur carrière ?
Je pars du principe que les jeunes, il faut leur inculquer bien sûr le respect, bien se comporter, être irréprochables. Et l’envie de gagner, toujours. Cette envie de gagner, pour moi elle est très très importante. Ça se voit quand on regarde un gamin comme Mbappé. Depuis longtemps, il a cette envie de gagner. Il a déjà beaucoup gagné et il a encore très envie.

Si vous deviez changer quelque chose dans votre histoire avec ce club vous changeriez quelque chose, si oui quoi ?
Sans aucun doute la fin. J’aurais aimé que ça se passe autrement. Mon dernier match, je savais que c’était le dernier mais peu de gens, hormis le coach (Tomislav Ivić) et moi le savaient. J’aurais aimé dire au revoir. Et merci.

*435 matches avec le PSG, entre 1975 et 1979, à ce jour le joueur le plus capé du club.
**Milieu de terrain du PSG (1986-1989) disparu en 2005.


Emilie Pilet

Laisser un commentaire

Découvrez les articles de