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La fête est finie

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Avec le début de la crise sanitaire et la fin du ballon rond de compétition,
on peut se poser cette question qui demeure encore aujourd’hui sans réponse :
« Les gens qui n’aiment pas le foot, que faisiez-vous
de votre temps libre avant l’invasion corona ? »


Aujourd’hui on s’aperçoit à quel point nos rendez-vous footballistiques dépassaient les seules 90 minutes où le PSG éclairait le terrain de sa superbe. Ils rythmaient les doses de kif de toute nos semaines, apportaient une récompense bienvenue qui faisait oublier nos soucis. Et même quand le foot professionnel était sur pause, à l’intersaison ou à l’occasion de la trêve hivernale, on scrutait la rubrique des transferts jusqu’à loucher. On s’enivrait des rumeurs putaclicks en pleine conscience. Ce n’était pas brillant, pourtant ça faisait le taf.

Mais là, en l’absence de perspectives tangibles d’un retour à la normale et de l’achèvement des différentes compétitions où Paris reste en lice : on perd pied. On a beau plonger la tête la première dans la nostalgie des matchs passés, se pencher sur les forces encore en présence en Ligue des Champions ou se faire un récap’ des plus beaux tifos de l’année en Europe, rien n’y fait. On a l’impression d’avoir été dépossédé de notre jouet préféré et surtout, on ne sait pas du tout quand on va nous le rendre. En somme, on se rend compte que le foot est à l’âge adulte ce que le doudou est à l’enfance, une porte blindée, protectrice et essentielle, ouverte à notre imaginaire.

Alors, bien sûr, il est parfaitement compréhensible que le foot soit relégué au rang d’activité non essentielle, à l’heure où le monde tremble devant la peste, à l’heure où certains risquent leur vie pour sauver celles des autres, à l’heure où toutes les certitudes sont à ranger au placard. Mais, affirmons-le ici, haut et fort : ça nous fait bien chier !

L’OMS définit l’addiction comme  « un état de dépendance périodique ou chronique à des substances ou à des comportements ». Le syndrome de dépendance est lui définit par « un ensemble de phénomènes comportementaux, cognitifs et physiologiques dans lesquels l’utilisation d’une substance […] entraîne un désinvestissement progressif des autres activités ». Osons alors poser la question : Le football est-il une drogue ? Nous pensons en tout cas qu’il n’y a aucune honte à considérer que les symptômes de sevrage (de manque), bien qu’ayant un retentissement somatique négligeable dans ce cas, puissent apparaitre chez nous pendant cette période troublante. Ce constat nous permet d’établir ainsi le fait que le foot est bien plus qu’une simple distraction hebdomadaire. En effet, comme toutes drogues à son bénéfice primaire, le foot se trouve être un remède, un bol d’air, qui soulage parfois ceux qui souffrent, autant qu’il peut les enfoncer.

La fête est finie virage PSG

Première constatation, il n’y a plus d’horizon, puisque plus de calendrier, donc fin du temps. On ne peux plus compter les jours au réveil en attendant le prochain match. On a l’impression de jouer les Bill Murray dans le film prémonitoire « Un jour sans fin » de Harold Ramis. Il n’y a plus aucun dribble de Neymar, aucune louche de Verratti pour nous faire oublier la laideur du monde.  Plus d’échappatoire au quotidien, on est maintenant obligé de parler avec notre conjoint, de tout mais surtout de rien.

Plus de Parc des Princes, donc plus de regard de satisfaction à l’arrivée en tribune, à la sortie, dans les transports en commun. Plus de buts annoncés trois fois par le Speaker « Tony » Montana, plus de chanson, plus de tifo (nostalgie papier toilette), plus de fumi, plus de capo qui t’engueule. Se rappeler de ces chants d’ultras à l’extérieur du Parc face à Dortmund et avoir peur qu’ils soient les derniers de notre Histoire.

Plus d’arbitre à insulter, plus d’adversaire à mépriser. Plus de haine gratuite et inutile. Parce qu’on n’aura pas eu l’occasion d’aller chier dans le Vélodrome et de refermer le couvercle une dernière fois. On est devenu civilisé. On applaudit à 20H, mais pas pour la rentrée des joueurs sur la pelouse du Parc.

Et pourtant on aurait pu connaitre l’orgasme. Imaginez : on allait arriver à 9 titres de Champions de France, égaliser l’OM et revenir à 1 longueur du record de Saint-Etienne. Jouer et gagner la dernière Coupe de la Ligue contre la bande du cynique Aulas. On pouvait vivre une magnifique finale de Coupe de France contre les Verts, hommage à notre 1er trophée de 1982, clin d’oeil magnifique pour nos 50 ans. Et puis la Ligue des Champions, enfin.

La fête est finie virage PSG

Malheureusement on ne peut plus croire dans ce club puis être déçu dans la foulée. C’est un adieu au socle de la religion rouge et bleu. Plus de coupables expiatoires à tous nos maux. Plus de quotidien l’Equipe à acheter pour se torcher avec. Plus de zapping entre Canal+ et l’Équipe TV les soirs de match. Se dire que malgré cette épreuve inédite et terrible, le Corona a quand même eu du bon : Stéphane Guy, l’Équipe du Soir et sa clique ne sévissent plus. Pourtant il existe d’autres motifs de satisfaction.

Sauter de joie dans son salon quand on apprend que Bein décide de rediffuser un PSG-Nice de… 2014… (Javier, Ibra, Lucas, Motta, Maxwell, Rabiot, Blaise, Sirigu, Van der Wiel, Alex, Lavezzi, tous ces MIA…). Esquisser un sourire malade quand on retombe sur le même match dans la nuit… Et qu’on le revoit intégralement. Regarder sept fois la première mi-temps de PSG-Dortmund et n’en retirer aucune honte ni lassitude. De façon générale, regarder tous les replays et faire semblant de ne pas connaitre la fin.

Revenir à des joies simples. Jouer tous les jours une heure au foot avec son gamin, avec une balle en mousse dans la cour pour ne pas rendre fous les voisins. Et se prendre pour Javier quand on essaye de le dribbler, lui qui n’en demandait pas tant. Se demander comment on aurait réagi en temps normal en apprenant la mort de Pape Diouf et rougir de honte… Avoir peur pour Payet : ce confinement risque de le transformer en véritable éléphant de mer. Se rappeler que lors de notre dernier match, Neymar avait une coupe de cheveux décente, et qu’on peut y voir une lueur d’espoir.

Alors faut-il préférer avoir peur d’une repli défensif de Kurzawa ou d’un résultat positif au Corona. Difficile à dire. Mais toujours est-il que Paris nous manque, cruellement.

Pour conclure on reprendra les paroles d’Orelsan, qui écrivait dans le titre « Dans la ville, on traîne » tiré de l’album prophétique « La fête est finie » :

« On a traîné dans les rues, tagué sur les murs, skaté dans les parcs, dormi dans les squares, vomi dans les bars, dansé dans les boîtes, fumé dans les squats, chanté dans les stades… J‘ai tellement traîné dans les rues d’Paris*, avec une bouteille où tout l’monde a bu dedans, entre deux mondes en suspens, criminelle, la façon dont j’tuais l’temps… ».

Criminelle ? Peut être. Innocente, sans doute. Inconsciente, certainement. Sans limite, absolument. Comme notre passion pour ce club et ce sport qui, on l’espère, revivront bientôt, comme tout le reste.

*nous avons délibérément adapté les paroles 


La rédaction du Virage

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