Messi Palaiseau

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Si seule compte l’objectivité, Messi est le meilleur. Point.
Les discussions deviennent alors inutiles. Elles le sont. Est-il possible tout de même d’aller voir ailleurs, là où le génie et les chiffres ne suffisent pas ?

J’ai tellement haï l’Argentin… aujourd’hui, c’est un peu comme si Thanos rejoignait les Avengers. Ce n’est pas possible. Ça n’existe pas. Et c’est pourtant là, dans ma télé, sur les réseaux. Les footix et les autres ne parlent que de ça. Le virus, la politique antisociale, la planète Terre qui se meurt, le curé assassiné, tous relégués en fin de JT. C’est une déflagration, un miracle, une faille spatiotemporelle. La fin d’un mythe et le début d’une légende. Ou l’inverse…

Messi est un enfant du Barça. Messi est le golem du Barca. Messi devait mourir en Catalogne et il va respirer encore au PSG. Moi, dans l’absolu, je n’en voulais pas du nain rouquin. Il nous avait fait trop souffrir, il n’était pas des nôtres. Et puis, il était moche. La Pulga… on dirait une maladie vénérienne. Le héros d’un cartoon. Et il est donc là, presque souriant, à la fenêtre au Bourget, avec son t-shirt blanc où est inscrit Ici c’est Paris. Comme s’il fallait encore ces mots pour que la réalité s’incarne. Nos ennemis pleurent. Leurs larmes sont sincères. Elles n’ont pas fini de couler. Il leur était facile de haïr Neymar, le sale gosse insoumis. Mais Messi, le talent total et le bon élève, avec son unique carton rouge…

Ils l’ont trop adoré pour le brûler aujourd’hui. Ils vont devoir inventer des choses improbables pour l’effacer de leurs cœurs. Condamnés à toutes les apostasies. Ils vont serrer les poings et les dents à chaque fois que Messi foulera la pelouse avec nos couleurs. C’est très certainement idiot et un peu mesquin mais cette idée m’enchante. Sur Facebook, un sudiste poste un article de presse à l’époque où Diego avait failli venir à l’OM. Voilà. Ils vont revendiquer des fantômes, des fantasmes pendant que nous, nous applaudirons de la chair et du sang. Du concret. Notre Histoire. Leurs frustrations. Bien sûr, nos plus fervents détracteurs pointent du doigt l’argent du Qatar, trop arabe pour être honnête. L’idiot utile Juan Branco menace d’un procès le PSG. Ils en sont déjà là. Ils s’agitent dans leur propre vide.

« Le football n’est pas du tennis »

Ici, c’est Paris. Avec Messi. Enragez, trépignez, ironisez, priez, maudissez. Il est trop tard. Je ne suis pas complètement aveuglé. Évidemment que seuls le PSG et City pouvaient s’offrir la star qui s’habille encore au rayon enfant. Mais est-ce la faute du Prince et de Nasser si le Barça affiche le même déficit qu’un pays africain dans un SAS ? Maradona, Ronnie, Ibra, Iniesta, Xavi, elle est longue la liste de tous les joueurs emblématiques partis du Barça sans fête d’adieu ni diplôme d’honneur. Barcelone est un moraliste sans morale. Il est enfin puni. Et comme il faut. Neymar puis Messi. Double peine (et tration). La remontada est officiellement enterrée (en fait, elle l’était déjà. Les récents et répétitifs échecs du Barça en LDC contre Liverpool, la Roma, Bayern, ou Paris, je continue ?, le démontrent impitoyablement).

Les arbitres vont même peut-être désormais avantager le PSG. Allez savoir. Messi est à Paris. L’impossible n’existe plus. Oui, le meilleur joueur de football en activité (voire de toute l’histoire pour les plus exaltés) est parisien et je ne peux que m’en réjouir. Mais cette signature comme tombée des Cieux doit-elle pour autant faire de moi un fan hystérique et sans passé, sans recul ? Quand je vois l’excitation des supporters au Bourget ou devant le Parc… le football n’est pas du tennis. Une idole ne garantit aucun titre. Et pourtant, aux micros des journalistes, les « cette fois, avec Messi, la LDC, c’est pour nous ! » pleuvent. Quelle naïveté… Dois-je simplement me prosterner ?

L’arrivée de Messi impose plusieurs visions de notre futur. Elles ne sont pas toutes féeriques. Que va devenir Angel par exemple ? « On s’en fout, on a Messi » ne suffira pas à me rassurer. Et cette phrase inédite et trop facile, on risque de l’entendre tout le temps. Messi va devenir ce couteau-suisse, cette formule magique, ce pass sanitaire VIP… ll n’a plus 25 piges non plus. Il faudra savoir exister sans lui parfois. Et donc construire une équipe qui saura jouer sans lui. Il faudra… il y a aussi le cas Icardi. Va-t-il devoir offrir sa femme à Lionel pour effacer l’affaire Maxi Lopez ?

Messi est un joueur collectif qui arrive dans un collectif qui n’en a jamais été vraiment un. Messi est un joueur qui défend peu, pour ne pas dire jamais. Avec Neymar et Mbappé, ça commence à faire beaucoup… et au milieu, Messi va-t-il exiger que son pote Paredes soit titulaire ? Peut-être pas. Comment Mbappé va gérer tout ça ? Il ne peut que jubiler techniquement parlant. Mais il sait aussi que Messi va lui faire de l’ombre. Il devra faire avec. Et Neymar, le meilleur ami ? Qui avait quitté le Barça pour gratter son ballon d’or loin de Lionel ? De retrouver son pote, est-ce que ça va l’aider à être plus performant, moins seul à l’heure des décisions cruciales sur le terrain ? Celui que je plains le plus dans cette nouvelle aventure, c’est sans le moindre doute Pochettino. Le casse-tête ! Survivra-t-il à ce concours de teubs intergalactique ? Il ne manquerait plus que Zidane le remplace cet hiver… les Phocéens ne s’en remettraient pas.

« Messi a choisi Paris par défaut »

Messi, c’est le petit con que tu avais envie d’attraper dans la cour après un dribble insolent. Le gamin meilleur que toi. Toujours. Messi, c’est l’ennemi que tu insultes et applaudis en même temps. Combien de fois l’ai-je maudît ce farfadet au visage de quatrième rôle dans un Seigneur des Anneaux ? Et je vais apprendre à l’aimer. Parce que son football, malgré le temps qui a passé, reste ce football imprévisible, lumineux, assassin. On ne peut pas arrêter Messi. On peut le casser mais pas le stopper. J’ai hâte de le voir affoler les défenses adverses. De contempler Alvaro transpirant et tâclant dans le vide. Je n’oublie pas que Messi a choisi Paris par défaut. Que si le Barça avait été moins con, il serait encore là-bas. Avec ses copines Alba et Piqué. Mais l’époque est ainsi faite. Le pragmatisme l’emporte sur tout le reste.

Messi et son père ont pleuré mais ont signé au PSG. Leurs larmes à eux aussi étaient sincères. Mais contrairement aux fans cités plus haut, ils les ont séchées sans attendre. Messi me fait un peu penser à Johnny Hallyday, quand le chanteur se plaignait qu’après impôts, il ne lui restait que quelques millions pour vivre. Messi n’est ni un révolutionnaire ni un fils exemplaire. Il aurait pu rester à Barcelone, jouer pour presque rien. Devenir ce héros éternel pour tout un peuple. Il est riche pour cent générations. Mais non. Ses larmes en direct étaient celles d’un môme qui doit quitter le nid douillet familial pour la première fois. Plus de la peur que de la tristesse en fait.

Et puis, Messi, est surtout la preuve que le Qatar accélère à un an et demi de sa Coupe du Monde. Quitte à, une énième fois, placer les individualités au dessus du Club. Du court terme en or massif. Nous construisons toujours sur du sable. Mais la plage est belle. Et la marée montante. Messi ? Mais si ! Dingue. Ce soir, je pense au prochain clasico. S’il a lieu au Vélodrome, ils vont être délicieux ces milliers de sifflets qui descendront des tribunes. Tous ces cœurs vexés et brisés qui préféreront salir qu’honorer leur ancien Dieu. Vivement. PSG4LIFE


Jérôme Reijasse

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