Si le Paris Saint-Germain est une machine qui tourne bien en cette deuxième partie de saison, c’est sans doute grâce aux performances répétées de son quatuor lusitanien. Hommage aux 4 joueurs portugais portant la tunique rouge et bleu.
RAMOS A LA PLAYA
Ramos. Que voulez-vous que j’écrive sur Ramos ? Ramos a la playa ? Ramos, je l’aime. Voilà. Je serais à peine foutu de dire pourquoi. Le football n’est pas qu’une affaire de statistiques. Il y a des joueurs que vous choisissez en toute subjectivité. Parfois pour quelques gestes lumineux (Pastore4ever. Javier qui nous a ensorcelés en quelques secondes). Pour un but à l’arrache qui t’offre une victoire que tu n’espérais plus. Ramos. Mbappé parti poursuivre sa quête du prix Nobel de la Paix (si le Boulard de Bondy était chanteur, on l’appellerait Bono…), j’imaginais Ramos capitaine de notre attaque. Un buteur à l’ancienne, pas hyper sexy, servi dans les meilleures conditions par Dembélé, Barcola, Hakimi, Neves, Mendes, Vitinha…
J’aime Ramos et je lui dis adieu ! Je sais que notre histoire est impossible. Tu es un vrai 9 chez Enrique Gonçalo. T’es mort dans le film mec. Et puis, la vox populi et les médias t’ont trouvé un chouette surnom : supersub. Ça arrange tout le monde. Pratique Supersub. L’expression à la con. Solsjkaer, bla-bla-bla. C’est nul. Un placard de première ! Le sparadrap du capitaine Haddock.
Moi, je veux Ramos titulaire indiscutable. Je veux qu’on accepte qu’il soit décevant quelques mois avant qu’il ne nous emporte. Je veux qu’il soit le fils de Pauleta. Et je vais le perdre. Ramos a la poisse. J’exagère ? Un boucher havrais non sanctionné le découpe en fin d’été alors que ses premières minutes de la saison promettaient beaucoup, Dembélé qui devient R9, la signature de Kvara, n’en jetez plus. Ça y est : tu es devenu roue de secours Gonçalo. Ton sort en est jeté. Tu as eu ta chance et tu n’as pas su la saisir. Je l’entends pas mal cet argument. Celui des impatients, des comptables et des amnésiques. Je n’ai pas oublié les sifflets pour Edi. Ramos n’en est pas là. On ne le siffle pas. Pas encore. Mais on le sous-estime. On le relativise. On l’aime de loin le supersub… il n’y a pas de victime dans cette histoire. Je vais même finir par croire que ça ne concerne que lui et moi. On marche sur l’eau depuis décembre. Fini le handball pénible. On gagne tous nos matches ou presque, on joue collectivement de manière parfois admirable, Enrique est devenu ce dieu vivant. Y’a même des ânes pour croire que Donnarumma est enfin un grand gardien… bref.
Paris fait zizir depuis des semaines. Ramos se ridiculiserait s’il revendiquait une place de titulaire mais il a le droit de croire qu’il a ce qu’il faut. J’ai droit de le croire. Et il va partir. Peut-être rejoindra-t-il la cohorte des attaquants espoirs éteints par Paris : Guedes et toute la clique. Ceux qui disparaissent mollement. Dans l’indifférence. Peut-être fera-t-il les beaux jours d’un club cool. Je ne lui souhaite que le meilleur. Parce qu’à moins d’une cascade de blessures et une faille spatio-temporelle, oui, alea jacta est mon pote. Je ne te connais pas Gonçalo mais je devine que cette place en or sur le banc parisien, ce n’est pas ta façon de voir le monde. Tu veux forcément autre chose. Et à ton âge, on veut jouer. J’espère qu’à ton âge, on veut jouer. Je prie que les biffetons qataris ne te coupent pas les ailes. Je ne veux pas que tu te Draxlerises.
J’en ai marre du gâchis, des rendez-vous manqués, des précipitations. À chaque fois que je t’ai vu célébrer un but sous nos couleurs, tu étais exactement à ta place. Ouais, j’ai revu Pedro. Ouais, Gonçalo, je t’aime aussi parce que tu aurais pu jouer quand j’étais abonné en tribune K bleu bas. Un attaquant pas franchement glamour. Mais capable de planter comme un crevard. Tu es peut-être un fantôme finalement. Certains soirs, quand je parviens encore à rêver du meilleur pour mon club, je me dis que Ramos avec Nuno, Vitinha et Le kid Neves, ça pourrait ressembler à une évidence. Le gang des Portugais. Une sorte d’alliance infernale. Jules hier me teste : « Papa, si tu devais choisir entre Ramos qui va jouer ailleurs titulaire ou Ramos supersub vraiment supersub, le gars qui te fait gagner le match d’une vie ? ».
Font chier les gosses. Ils ont souvent raison. J’ai envie que Ramos écrive un chapitre de notre si belle et tumultueuse Histoire. PSG4LIFE.

VENI, VIDI, VITI
Milieu de terrain petit format dans un monde de Golgoths, Vitinha promène sa fine barbiche et son serre-tête élastique sur la pelouse, tête haute. Décalé. Un look d’Ibère période Renaissance, qui n’a rien du simple caprice de dandy : c’est un avertissement. Ne vous y trompez pas : Vítor Machado Ferreira, dit « Vitinha », est un conquistador.
Ils ont cessé depuis longtemps de le sous-estimer, ceux qui ont vu Vitihna tirer un penalty. Ils ont suivi son gabarit, trop léger pour impacter. Ils ont mis leurs pieds dans ses pas d’élan, trop lents pour envoyer un missile. Tous ont suivi son cheminement, son regard droit qui ne lâche pas le gardien du trajet. Et but. But, chaque fois. Vous êtes arrivés à destination. L’homme a la tête plus froide que les mers arctiques, et le sang plus bouillonnant que les Caraïbes.
Regarder Vitinha tirer un penalty, c’est tout comprendre du bonhomme. La force de caractère, la volonté d’atteindre son objectif. Le calme et la détermination, focalisés entièrement sur un seul chemin… Fils de Vasco de Gama ou Magellan, Viti est de la trempe des conquérants océaniques. Tant qu’il n’aura pas rejoint son objectif, il poursuivra son chemin.
Echappé de ces temps où la marine portugaise régnait sur les mers du Globe, Vitinha parcourt le rectangle vert. Improbable conquistador, debout sur le pont il passe en revue les positions de son armada : Barcola(rge), qui file au plus près des lignes de touche, au bord du gouffre. Khvicha le Pirateskhelia, dernière recrue, lieutenant plein de promesse. Et Dembélé, le Baron Ousmane, désormais converti en découvreur des ultimes confins.
L’explorateur prend note de la position des frégates qui sillonnent les eaux. Pointes qu’il a pour charge d’envoyer vers de nouveaux espaces. Les ballons arrivent à Vitinha. L’adversaire presse, se rapproche, coupe les lignes, et lui voit plus loin. Viti décide sur quel point de la carte il expédiera un trait. Il choisit s’il vaut mieux prendre le temps de rester dans des eaux sûres. Revenir à la base. Avoir la sagesse de réorganiser les positions… ou soudain, coup de canon, lancer une passe au loin. Dessiner sur la carte du terrain cette unique flèche qui déterminera sort et avenir d’une terra incognita.
Chaque ouverture du milieu lance un raid pensé par le navigateur. Chaque mission explore les zones encore grises. Partout s’élancent nos navires, voiles dehors, croisant d’imprévisibles trajectoires. Le Portugais expédie ses ballons et trace de nouvelles voies, pour les autres. Pour ses coéquipiers.
Être celui qui plantera le drapeau en terrain ennemi lui importe peu, finalement. L’élégance racée du Conquistador est ailleurs : Vitinha porte la responsabilité de l’ensemble. Il sait le projet collectif, l’organisation du tout. L’importance de la mission toute entière plus que celle du dernier nom, du dernier pas.
Mais s’il faut prendre ses responsabilités, débloquer une mission d’exploration compromise, lâcher le milieu du terrain pour monter aux avant-postes, alors on voit l’amiral rejoindre la ligne. Prendre un coup-franc décisif. Frapper à l’entrée de la surface. Assumer un penalty. Toujours avec la même fausse nonchalance, classe ultime de la noblesse d’âme et non de sang. Et le front levé. Toujours aussi. La marque des grands.
Vitinha vient. Vitinha regarde. Vitihna vainc.
Viva Vitinha.

JOAO NEVES ME FAIT PEUR
D’abord, j’ai peur parce que Joao Neves, ça commence un peu comme Joao Alves.
Mais Neves joue sans gants et Genghini est depuis longtemps inoffensif.
Autant Donnaruma fait narquois, autant Joao sent la malice, l’ironie et le contre-pied à la Joe Pesci aux dépens de Ray Liotta dans Les Affranchis.
Neves, je le garderai bien d’ores et déjà pour toute sa carrière, si j’étais à la tête de PSG.
Belle histoire à écrire que celle du Portugal Saint-Germain. Vue du terrain, des tribunes et du staff.
Depuis Santillana, on n’avait pas vu un type d’1m 74 avec un tel timing. Il a beau avoir le bassin maradonien et le barycentre verrattien, c’est peut-être de la tête que Neves est encore le plus perturbant.
Barcola et Neves, Bradley et Joao, un dessin animé.
Comme bien des grands joueurs, Neves joue tout seul mais au service des autres.
Un BG à l’ancienne, le sourire shiny du baby-sitter amoureux de la milf alcoolo dans Dallas. Ses feintes de corps quand le grand couillon balèze à ses trousses croit encore pouvoir épouser son ombre. Imprévisible comme Dembélé. En plus hula hoop.
Si on n’a toujours pas remplacé Motta, on tient un Verratti. Un Verratti qui décroche la lune au-dessus de la tête des goliaths sur les corners. Un Verratti qui tire au but même de loin. Un Verratti qui prend des jaunes mais sans saouler les hommes en noir.
Comme Marco, c’est un charmeur : il sourit à celui qu’il a vexé et qui l’a descendu. Un Verratti, surtout, qui, comme le vrai, sait toujours où ira la balle après un contre favorable. Comment elle va rebondir. Quel effet va la faire tournoyer et vers où. Neves est toujours dans le sens du foot. Suivez son regard, vous saurez où il faut jouer.
Après avoir subi une faute, Joao préfère se relever et jouer le ballon plutôt que se tourner vers le sifflet pour ouin-ouiner.
Le plus grand point commun entre Marco et Joao, c’est leur sourire, leur joie d’être sur le terrain pour nous rendre heureux.
Neves, ça rime avec Babyface.
Ça faisait longtemps qu’en regardant un de nos joueurs je ne m’étais pas dit qu’on était en train de devenir un grand club.
Symptôme. J’ai déjà peur du jour où il ne jouera plus. Ça ne trompe pas, s’agissant d’amour.

NUNO MENDES, L’AILE ET LE PARE-CHOCS
Depuis que je suis gamin le poste d’arrière gauche me fascine, et je n’ai jamais compris pourquoi il était aussi difficile pour une équipe d’avoir un arrière gauche de qualité, c’est tellement une denrée rare qu’on nous fait croire depuis trente ans que Lizarazu (l’homme de petite taille avec une collection de vestes en cuir dans téléfoot) était un “grand” arrière gauche, dans le plus grand club du monde on en a eu des joueurs à ce poste, Maxwell, Tiéné, Sorin, Kenedy, Domi, Cobos, Armand, l’autre qui.. Mais si l’autre là… qu’on adorait et qui a préféré signer où il ne fallait pas, on en a eu des mauvais, des très mauvais, il y en a même un qui avait de beaux yeux mais qui lui était TRES TRES mauvais.
Le poste d’arrière gauche c’est un peu toi et ta chance, alors quand on t’a vu arriver en 2021 cher Nuno, on a foncé pour voir tes highlights au Sporting sur Youtube pour jurer à tout le monde qu’on te suivait depuis quelques saisons et valider ta signature d’un air tout à fait convaincu avec la petite moue qui va bien pour féliciter Campos. (NDLR: la mauvaise foi est une compétence qu’il faut travailler lorsque vous êtes supporter de foot/ auteur chez Virage).
Tu t’es chargé de nous mettre d’accord dès tes premiers matchs, tes montées sur l’aile, ta vitesse, ton élégance et ta technique, tu es né pour être Parisien, “oui mais quand même des fois, son repli défensif…” “il est beau ou il est pas beau?” “si, il est beau” “bon bah voilà, nous emmerde pas avec son repli défensif on t’a expliqué que c’était difficile de trouver des arrières gauches, tu veux qu’on rappelle Layvin?” “non non, merci, “bon bah il est super lui alors.”.
Nous voilà tous d’accord pour se dire que ton arrivée au club est une bénédiction pour ce poste si difficile à pourvoir, ton entente, avec l’autre là qui a signé en Espagne dans un club dont j’ai oublié le nom, a fait de notre flanc gauche l’un des plus redoutables, si ce n’est le plus redoutable d’Europe, la mauvaise foi tout ça tout ça on ne revient pas dessus. Alors oui, l’équipe penchait, sérieusement, voire dangereusement de ton côté, avec un attaquant face à toi qui pensait que le travail défensif était un truc réservé aux autres (pb: les autres dans l’équipe pensaient aussi que c’était un truc réservé aux autres) t’avais pas toujours le beau rôle ni la tâche facile.
Aujourd’hui dans ce PSG aux multiples visages, aux multiples tactiques et possibilités, à la mentalité irréprochable, tu es devenu le Tonic de cette équipe liquide, tu deviens décisif, tu marques, bon peu mais dans les matchs où ça compte, tu donnes de la passe décisive, tu compenses parfois des errances par des retours stratosphériques qui font que dans la même action on te hurle dessus pour finalement t’applaudir (“mais il est beau ou il est pas beau?” “si, faut avouer, il est beau…” “bon bah fous lui la paix avec son repli défensif”, alors on est fier de te compter pami nous, fier de te savoir fier d’être parisien, pour de nombreuses années encore.
Au moment où je te parle, c’est Liverpool qui va se dresser face à nous en ligue des champions, l’équipe la plus impressionnante cette année, et face à toi, sur ton côté, tu seras mis au supplice par un certain Mohamed Salah, comme tu l’as compris je t’aime beaucoup hein on ne revient pas là-dessus, mais tu vas devoir nous prouver que tu sais te mettre au niveau du monstre que tu vas affronter, cette double confrontation s’annonce épique, ces deux équipes, ces deux stades de légende, tout doit être et tout va être beau, je te souhaite de réaliser une double confrontation qui te fera entrer dans toutes les mémoires (attention, comprends bien ce que je dis, parce que Tilo Kehrer a réalisé un PSG/ Manchester United qui lui aussi est resté dans toutes les mémoires)
C’est une fierté de te compter parmi nous, pied gauche sur l’accélérateur à fond sur le périph’ extérieur.
