Neymar hurle, et la caravane passe

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C’est désormais acquis, Neymar passera une troisième saison à Paris. Malgré ses souhaits répétés de retrouver Barcelone, le Brésilien s’est heurté à l’intransigeance de Leonardo. Il est certainement le meilleur joueur à avoir joué sous les couleurs parisiennes. Mais est-ce suffisant pour entrer dans l’Histoire du PSG ?


La question peut sembler incongrue car pour marquer les esprits durablement dans le football, très bien jouer est un excellent point de départ. Et Neymar a incontestablement un talent hors du commun. Sa technique, bien sûr, saute aux yeux et peut faire s’embraser le stade. Son sens du spectacle le rapproche de ses légendaires compatriotes : Ronaldinho, Rivelino, Ronaldo, Zico et même le Roi Pelé. Mais il se distingue surtout par son sens tactique, sa vision du jeu et une rapidité d’exécution exceptionnelle. Buteur, passeur, dribbleur, meneur, déflagrateur, enchanteur, Ney est tout cela à la fois. Mais il lui manque un détail pour écrire durablement l’Histoire. Un grand joueur ne peut totalement entrer dans la Légende sans un lien fort avec son public. Et dans ce domaine, Neymar n’égale même pas Francis Llacer.

Il a pourtant eu le privilège de côtoyer des joueurs adulés. Xavi, Iniesta, Puyol, Messi à Barcelone. Et bien sûr Cavani à Paris. Ces grands noms du football ne sont pas seulement d’excellents joueurs qui ont su se rendre indispensables. Ils renvoient aussi une image qui touche les supporters et qui leur a assuré une place éternelle dans le cœur de ceux-ci. Ils ont chacun leurs atouts pour séduire les fans. Combativité, attachement au club, communion avec les Ultras… Même s’il faudrait être naïf pour ne pas y voir une petite dose de communication bien orchestrée (les premières déclarations de Mauro Icardi, Keylor Navas et Sergio Rico depuis leur arrivée à Paris sont des modèles du genre), cela permet de tisser un lien. Le foot est un sport, mais il est aussi une passion totalement déraisonnable pour des centaines de millions de personnes dans le monde. C’est un paramètre important à prendre en compte. Neymar semble l’avoir oublié.

La carrière de ce joueur de seulement 27 ans est déjà jalonnée d’épisodes qui ont contribué à en faire l’archétype du mercenaire. Encore à Santos, il aurait eu un accord avec le Real Madrid pour un transfert. Il aurait même passé sa visite médicale. Mais il s’est finalement engagé avec Barcelone au terme d’un feuilleton nimbé de soupçons de corruption. En 2017, lors de son transfert retentissant à Paris, il remet publiquement en question les compétences de Bartomeu. 2 ans plus tard, Ney est prêt à tout pour retourner dans son ancien club alors qu’il est toujours en conflit juridique avec ses dirigeants à propos d’une prime. Peu importe ce qui a été dit ou ce qui a été fait. L’honneur, le respect des contrats, la reconnaissance, le sens des responsabilités… tous ces beaux principes n’ont pas leur place dans la réflexion des Neymar père et fils. Les principes ne paient pas. Le point commun entre ces différents événements marquants de sa carrière, c’est le silence. Neymar Jr a besoin de conseillers en communication pour faire le choix de ne rien dire. Entretenir le doute, ne surtout fermer aucune porte. Seule entorse à cette règle, le « meilleur souvenir de vestiaire » évoqué cet été devant la presse brésilienne. Le choix de ce souvenir qui a laissé une plaie béante dans nos petits cœurs sensibles ne peut pas être anodin, malgré ce que Neymar père a pu dire pour tenter d’éteindre l’incendie. Sans succès.

Le mélodrame qui s’est joué cet été porte la marque de tout ce que le foot business comporte de dérives. L’histoire ne s’est pas terminée comme l’espérait le Brésilien puisqu’il se voit contraint et forcé de rempiler pour une troisième saison à Paris. Lui qui a voulu provoquer son départ, mécontent du traitement médiatique en France et vexé par les reproches répétés d’une partie des supporters, il se retrouve pris au piège pour la première fois. Il était habitué à mener la danse, mais Leonardo lui a montré qu’il maîtrisait parfaitement la samba. Son retour sur la pelouse du Parc des Princes s’annonce brûlant et il le sait. Doit-on s’attendre à une guerre de tranchées toute la saison ? Espérons que non. Il n’y aurait pas de vainqueur. Mais si Neymar est suffisamment professionnel pour se remettre dans le bon sens et qu’il redevient ce joueur fantastique que l’on connaît, tout le monde en sortira gagnant. Le PSG aura retrouvé un leader technique capable de faire la différence à chaque moment. Et Neymar montrera au FC Barcelone (ou à d’autres prétendants) qu’il est toujours un excellent investissement.

Des performances de haut niveau ne pourraient qu’aider à redorer le blason du Ney. Et je ne vois pas comment on pourrait ne pas le souhaiter. Au risque de me répéter, on parle là d’un des meilleurs joueurs du monde. Parmi les icônes passées par Paris, seuls Ronaldinho, Sušić et peut-être Ibrahimović pouvaient rivaliser en talent pur. Pourtant, la suite de l’histoire semble déjà partiellement écrite. A la fin de la saison, nous aurons très certainement droit au tome 2 des tribulations et états d’âme de Neymar. Une prolongation de contrat semble aussi probable qu’un triplé de Verratti en finale de C1. Son départ, à Barcelone ou ailleurs, sera très difficile à éviter. Le prix du transfert aura baissé car il ne restera que 2 ans de contrat. La marge de négociation de Leonardo sera plus mince, et il faudra se montrer plus souple avec les clubs intéressés tout en préservant les intérêts du club. Une tâche à la portée du directeur sportif.

Puisque la carrière de Neymar n’est qu’une éternelle guerre d’influence avec ses employeurs, puisqu’il a choisi de vivre dans un mercato permanent, ne soyons pas surpris. Neymar est un génie de passage, un magicien itinérant qui ira vendre ses talents ailleurs tôt ou tard. Prenons en notre parti, profitons de sa présence tout en sachant que la rupture arrivera vite. Et quand ce sera le moment de se quitter, pas de larmes, c’était prévu. C’est froid, cynique, mais c’est lui qui l’a voulu. Neymar marquera peut-être l’Histoire du football. Mais je ne crois pas qu’on pourra dire de lui qu’il a marqué l’Histoire du Paris Saint-Germain. ll faudrait une coupe aux grandes oreilles pour infléchir la tendance.

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