Mon cher Emir

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Mon cher Émir. Puis-je me permettre de rappeler à votre altesse sérénissime quelques points importants bien que je suppose que vous ayez
d‘autres humains à fouetter dans la vie.

Rappelez-vous, il y a dix ans votre rachetiez un club, le Paris Saint-Germain, pour à peu près vingt secondes d’éjaculation d’un de vos pipe-lines. Ce club, plus communément appelé le PSG, est un club de football. Je vous dis ça car je pense que vous l’avez confondu avec une agence de Relations Publiques. Ça peut se ressembler, ça peut arriver.

Je sais bien qu’au fond, le foot, vous vous en foutez. Quand on a un fond souverain de plusieurs milliards d’euros, le coût du PSG, c’est peanuts pour vous. Il vous fallait de la belle image pour votre pays. Et c’est réussi. Eut-ce été du curling ou de la GRS avec la même exposition médiatique et vous auriez aussi signé. Mais contrairement aux relations publiques, il ne suffit pas d’inviter des grands noms, de mettre de la lumière et des paillettes pour que ça marche au football. Et c’est ce que vous croyez. Et il n’y a personne autour de vous pour vous dire que c’est faux.

Le Nasser, il est sympa mais il est aux bottes. Il ne vous dira jamais que le clinquant, l’ostentatoire, l’accumulation, c’est pas le football. Peut-être pense-t-il que ça marche. Les Golden Galactiques avec finition platine et diamants, non, ça ne marche pas. Le football se construit peu à peu, c’est un arbre qui pousse, qui se renforce, qui a besoin d’un tronc pour que ses branches aillent chercher les étoiles. Vous, vous arrivez avec un sapin coupé, un beau sapin, un énorme sapin, vous rajoutez des boules, des guirlandes, des décorations. Mais au fur et à mesure, votre sapin, coupé, dépérit. Il perd ses aiguilles, il se dénude, il s’assèche.n

Voilà où on est actuellement au PSG, le club de football que vous avez acheté. Celui où vous pensez qu’en accumulant les grosses boules, les décorations, le sapin ne va pas mourir. Ben si. On n’est pas loin de l’agonie et vous devez encore en être à croire qu’on ne peut pas perdre avec Mbappé, Neymar et Messi. Mais si.

Pendant que Liverpool ajoute bijou sur bijou à un collectif un million de fois plus rôdé que nous, pendant que d’autres clubs construisent patiemment leur effectif, vous pensez qu’il suffit de donner les clés du camion à un joueur génial acheté 222 millions pour que tout se mette en marche. Mais non. C’était il y a quatre ans, quatre ans de lent développement du jeu, d’expression collective perdus. D’entraîneurs de talent hachés menus par tout l’extra-sportif, les Relations Publiques. Vous vous accrochez encore à vos convictions, et dépensez 80 millions pour un joueur qui repartira dans deux ans et qui a laissé la flamme qui l’animait en Catalogne. C’est une bonne idée. Non. Le foot est une science inexacte où 7+4 ou 8+3 ne font pas forcément 11. Où Paris ne sera jamais le Barça. Où les illusions se perdent tellement souvent. Dont celles de Kylian Mbappé qui a compris que ce PSG là n’allait nulle part.

Dans le vrai foot, si un joueur sur onze décide de marcher plutôt que de courir, Messi, pas Messi, il sort immédiatement. Même Sušić courait plus que lui. Quand des joueurs de talent décident de ne pas soutenir leurs partenaires en défendant avec eux, pour eux, c’est dehors. Le plus grand football vient de la plus grande dévotion pour ses partenaires. L’effort supplémentaire. L’espace recherché. La création de solution. L’offrande constante à l’autre.

Cher Émir, cher ami, il n’y a plus rien de tout ça au PSG. Et d’ailleurs, il n’y a même plus de couleurs. Nous jouons chez nous en noir. Un beau noir pétrole. Plus d’idées, plus d’identité, plus de jeu. Comme on dit chez nous : « On est mal, patron, on est mal » mais ça, Nasser ne vous le dira probablement pas. C’est pourquoi j’ai sorti ma plus belle plume pour cette missive désespérée que je vous adresse en guise d’épitaphe : cher Émir, il est temps d’arrêter les conneries.

P.S : Si vous essayez une fois de plus de virer Phil Collins, je viendrai personnellement boucher tous vos pipe-lines avec des housses de couette DJ Snake. Tenez-vous le pour dit.


Safet Sous X

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