Thiago Silva Virage PSG

Thiago Silva
nous nous sommes tant ressemblés

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Lorsqu’on lui a prêté des velléités de départ, contre les amnésiques gueulards
et les trop jeunes pour savoir, mièvre, suranné et déjà désuet supporter parisien
des années 80, j’ai défendu NEYMAR.
Au soir de son dernier match au Parc,
j’en ai autant pour THIAGO SILVA.

Neymar, il n’y en aura peut-être pas d’autre avant longtemps. Thiago Silva, il n’y en eut pas d’autre avant. Depuis nos entrailles-archives, Indiana Jones du Parc et de ses princes, Champollion de nos bâtisseurs de pyramides, Cortès et Corto de nos châteaux en Espagne, j’ai bien l’honneur de vous confirmer que jamais nous n’avions compté dans nos rangs défenseur central si grand, capitaine si évident, professionnel si constant.

En 2012, quand ils sont tous arrivés, Zlatan, c’était un cracheur de feu, un lanceur de couteaux, un dandy en « ic » qui venait chez nous se remplir les fouilles, gonfler ses stats et dorer sa future retraite. Rang et salaire inespérés pour ce grand joueur de petits matchs, nous le savions – comme nous savions que c’était alors ce que nous méritions. Formé au Fluminense, raffiné à Porto, successeur de Maldini et partenaire de Nesta au Milan, salaire mis à part, Thiago pouvait aspirer à mieux que nous. Et était trop jeune pour une pige royale de mercenaire. La preuve, il est resté. Huit ans. Comme Safet, il est devenu français. Zlatan, dans une Ligue 1 en chantier (ou en démolition), a trop facilement tout cassé pour qu’on puisse bâtir une équipe autour de lui. Sa fonction était de faire éclater au grand jour une sacrée vérité : la Ligue 1 est un championnat quelconque, voire médiocre.

Thiago Silva Virage PSG
« Cette force qui guide mes pas » © Panoramic

O monstro, comme l’appellent ceux qui ont joué avec lui, avait le profil et surtout, semblait-il, les épaules pour nous emmener vers la Terre promise. Ces yeux d’honnête homme rieur. Un sourire de bon fils – comme Javier, ça nous changeait des bad boys. Ce regard qui sait se baisser devant les supporters les soirs de naufrage. Cette inaltérable aisance à passer du rictus au sourire éclatant. Une implication minutieuse, attentive et sérieuse. L’humilité du vrai leader qui laisse en rigolant les dix faire les malins – le 5 (même floqué 2) n’est jamais que le 10 de la défense. Libéro élégant et fidèle comme le défunt Sciera, technique et fluide comme l’impérial Beckenbauer – ils furent l’un comme l’autre des cinq et demie -, intelligent et bien placé comme le malin Baresi. Buteur régulier. Décisif. Dans le top 1 de nos meilleurs joueurs de tête.

Thiago, surtout, est si agréable à regarder évoluer. Logique. Rationnel. Harmonieux. Relâché. Fluide et implacable comme un Oscar de La Hoya des grands soirs. Plus Chico Buarque que samba. Si jamais cette machine ne s’enrayait, elle serait inhumaine de perfection. Capable de royalement feinter l’incongru et zélé pécore presseur – ce précieux petit frisson délicieux qui parcourt alors le Parc, nappé de fierté, d’un zeste de trouille et de moquerie immédiatement réparatrice (T’as cru que t’allais baiser Thiago ?). De diagonales dans les pieds ou dans la course. De remises immédiates et sèches à la Motta pour désorienter l’incongru zélé mentionné ci-dessus (mettons Delort). Netteté de ses contrôles – rappel, selon saint Platini, le football, c’est le contrôle (voir Zidane). Tacleur – rare – de légende. Etouffeur de buteur – l’Edi de Naples en cauchemarde encore. Déplaceur d’offensives adverses vers les ailes – où, déployant les siennes, il récupère et nettoie le ballon, essuie-glacise le panorama et distribue le jeu. Peu de toiles, au final.

Thiago Silva Virage PSG
Un volontaire pour un but qualificatif en finale ? © Panoramic

Et c’est pas tout : épanouissant : Marqui, Presnel et Marco, dans une salle des trophées pleine de LDC, en 2028 ou 2029, diront ce qu’ils lui doivent – compensateur constant et généreux : David Luiz, Van der Viel, Meunier, Layvin, cent fois, sans lui, auraient fini sous nos quolibets et injures ensevelis – rédempteur ambassadeur de l’image de notre équipe rutilante et un peu vulgaire parfois, car humble, respectueux et sympathique pour vingt-cinq, rassurant d’humanité, de diplomatie et de bonne conduite – un arbitre dût se jeter sur sa main pour qu’il prît un rouge au Parc – au top tout au long d’une saison : l’alpha et l’oméga, l’indépassable horizon quotidien, c’est le championnat, pas Jérôme Reijasse qui me contredira : il faut d’abord nettoyer tout le monde chez soi – intelligent, au point de ne jamais ou presque commettre une de ces fautes dites « intelligentes »…

On pourrait, en revisitant les anthologies et les bilans de PSG sous Thiago Silva, ou, plus simplement, en parcourant sa fiche wikipédia – toutes les déclarations de grands voyant, à juste titre, en lui le meilleur défenseur du monde y sont soigneusement recensées et sourcées -, recueillir la matière d’un volume de contes, de légendes et d’exploits aussi merveilleux qu’édifiants et comme lui exemplaires. Un autre, plus didactique, sur l’art et les manières de conduire une défense.

Et j’entends rire ma belle-progéniture, moqueur Neymarien de 17 ans, qui si souvent m’a subi, blâmant, tançant, fustigeant, au choix, Thiago la fiotte, Thiago la chiasse, Thiago le seul Brésilien au monde à jouer comme un Argentin au centre d’une défense hollandaise ou schleuhe. Thiago que, lui, jamais il ne cessa de défendre. De respecter. D’admirer – longtemps un ample poster d’O monstro, puisque c’est ainsi que finissent par l’appeler ceux qui finissent par oser avouer l’aimer, orna un important mur de sa chambre. Suspendu de sa demie-finale de world cup en 2014 et pourtant tenu responsable des 7 buts boches (Benzema’s ghost in Knysna). Absent du plus grand match de toute notre histoire, le 4-0 contre le Barça au Parc. Jouant bas, si bas, durant la remontada (de merde) – et s’il ne faisait qu’appliquer les directives d’Emery, c’est pire. Infoutu, une fois n’est pas coutume, de relever, de relancer, de regonfler Kehrer contre Manchester. Les fesses dans l’herbe sur le but d’Haaland. Les nerfs fragiles – malgré la volonté de fer qui lui permit de se relever d’une incroyable tuberculose et de, finalement, nombreuses et emmerdantes blessures.

Thiago la frousse. Thiago la foi et les foies. Nous avions besoin d’un père pour nous botter le cul. Thiago Silva fut un oncle. Et en trouille un frère. Le genre de joueur qu’il nous aura fallu manger pour grandir. Thiago Silva avait peur comme un supporter du PSG sous Thiago Silva. Thiago Silva, c’est nous. Depuis 2012, PSG lui ressemblait tellement.

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Gregory Protche

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