Le calendrier de l’Avent du Virage

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Après les classiques calendriers chocolats, les échantillons de make-up et les bières,
il fallait bien que quelqu’un ait l’idée d’un calendrier de l’Avent spécial PSG
Ou plutôt spécial Virage PSG ! C’est désormais chose faite. Notre concept :
chaque jour, du 1er au 25 décembre, découvrez un nouvel article
commémorant un match du PSG, signé par un auteur différent.

La première idée proposée en Team Building pour ce calendrier Virage était une opération en mode « Dieux du Stade », où chacun et chacune des rédacteurs poserait nu sous un maillot Rouge et Bleu. Ce concept ayant assez vite été écarté pour d’évidentes raisons tenant à la fois à l’hygiène publique et à la protection de l’enfance, il a fallu se rabattre sur un projet plus classique. 

Le thème de ce calendrier de l’Avent Virage PSG sera donc « le match le plus marquant de votre histoire parisienne ». Alors préparez-vous à voyager à travers l’Europe aux côtés de nos auteurs, pour retrouver le temps des terrains boueux et des tacles aux genoux. Préparez-vous aussi à découvrir des invités surprise venus nous raconter LEUR match : sans rien vous dévoiler, ça va parler tribunes,
scénarios mythiques et joueurs légendaires.

Quel match pour clore ce projet un peu dingue de Calendrier PSG ? Il fallait un point d’orgue, une rencontre iconique. Ce sera PSG – Rapid Vienne, la finale de la Coupe des Coupes 1996. Et pour incarner ce qui reste aujourd’hui encore le plus grand titre remporté par les Parisiens, nous avions besoin d’un homme ayant vécu l’aventure de bout en bout : du départ en car la veille de la rencontre jusqu’aux jardins de l’Elysée, le lendemain. C’est Christian Gavelle, photographe officiel du Paris SG qui nous fait l’amitié de nous offrir sa finale, en cadeau. Joyeux Noël à toutes et tous !

La veille du match nous avions rendez-vous dans l’après-midi au Parc des Princes pour partir en car jusqu’à Bruxelles. Bon, j’ai su par la suite que Michel Denisot, avait demandé à Bernard Lama si le photographe que j’étais convenait pour suivre l’équipe durant ces deux jours, ou si le groupe préférait que l’on prenne quelqu’un d’autre. Bernard l’avait rassuré en disant « il n’y a pas de problèmes que ce soit Christian »… Mais en revanche Luis Fernandez avait été surpris de me voir débarquer !

Il faut dire que Luis était tendu depuis l’arrivée de Noah dans le groupe. Yannick avait été appelé pour fluidifier les rapports humains, apaiser les tensions, et Fernandez l’avait mal vécu. Il avait précisé : « en tout cas il ne touche pas aux aspects sportifs ». Alors quand je suis monté dans le bus avec les joueurs, Luis a eu l’air surpris et m’a dit : « Ah bon t’es là toi aussi ? ». Je ne me suis pas vraiment senti le bienvenu !

Après quelques heures, sur l’autoroute, on a fait un stop sur une aire de repos. Les joueurs voulaient grignoter quelque chose et ils se sont dirigés vers le Restoroute. Un fois à l’intérieur, Luis s’est détendu en se postant derrière la caisse : « OK, 2 hot dogs pour la défense centrale, et monsieur c’est quoi pour vous ? ». J’ai d’ailleurs gardé une photo de ce moment-là ou je pose avec Le Guen et Guérin.

Tous ces joueurs ont porté ce maillot…

À Bruxelles nous avons logé dans un hôtel du centre-ville. Je bossais pour un projet de bouquin en noir et blanc sur les « coulisses du club », comme on disait en 1996. Aujourd’hui on parlerait plutôt de projet « inside » ! Je cherchais à faire un max de photos pour garder une trace de toutes les étapes de ces moments d’un avant match que j’espérais voir devenir historique. J’ai fait des photos avec Nouma qui était parti tondre Dieng avec sa tondeuse perso. Les gars m’invitaient dans leur chambre… Je n’ai pas été convié à tout mais je me souviens de la balade du matin, un journaliste de TF1 suivait aussi le groupe avec une grosse caméra, Bernard Lama l’avait prise en main pour faire lui-même des interviews de ses coéquipiers dans une atmosphère bon enfant

Raconté comme ça on a l’impression que tout le monde était très zen mais sur le moment c’était quand même tendu. J’ai su après coup qu’il y avait eu beaucoup de discussions autour du onze de départ entre Luis, Denisot et Moutier. Ils n’étaient pas d’accord, notamment sur la titularisation de certains joueurs.

Dans le hall de l’hôtel, Guy Adam avait marqué le nom de tous les anciens de l’histoire du PSG sur un paper board avec comme commentaire : « tous ces joueurs ont porté ce maillot, ils sont avec vous ce soir ». Bon évidemment, aujourd’hui ce ne serait plus possible, il y a trop de joueurs qui ont porté le maillot du club, mais là, ça faisait déjà quand même des centaines de noms. C’était assez fort comme idée.

Ngotty, bras levés pour l’éternité

Pendant la rencontre j’étais derrière les cages de Vienne, les filets à ma gauche. Le seul but du match est un coup franc très lointain. Sur le moment, je sens qu’il peut se passer quelque chose, mais je suis masqué par pas mal de joueurs qui sont entre le ballon et moi, donc impossible d’anticiper ce qui va se dérouler. Puis, quand Ngotty frappe et marque j’ai une chance inouïe. Il court directement dans ma direction.

© Christian Gavelle / PSG

Ça se joue à une fraction de seconde, alors je déclenche au moment où Bruno Ngotty lève les bras en l’air vers le ciel pour célébrer son but. Sur cette photo, le bout de ses doigts sont pile dans le cadre. Comme s’il en portait le bord de la photo : il rentre au millimètre près dedans. Incroyable. J’ai d’autres photos prises après : les joueurs à terre, la joie collective, mais celle de Ngotty, les bras en l’air, elle est très forte, parce qu’elle restera pour l’éternité.

En fait j’ai deux photos de cette finale qui sont devenues iconiques dans l’histoire du PSG. Il y a tellement de matches où ça se passe moins bien, où le gars qui marque part de l’autre côté et vous ne l’avez que de dos… Pour un photographe, quand il y a des soirées importantes évidemment il faut être bon techniquement, rester concentré, mais il demeure toujours une part d’inconnue et de chance. Donc je n’ai pas la frappe, mais sur la joie du buteur on va dire que je suis pas mal.

Finalement, ce but est surtout beau parce qu’il donne la coupe. Dans le jeu, le match en lui-même n’était d’ailleurs pas extraordinaire. C’était crispé jusqu’au bout, l’enjeu était énorme. Est-ce que le match va basculer ? Est-ce que je me prépare à faire la photo de la remise de la coupe, ou à vivre un drame ? Cette photo de Bruno Ngotty illustre un peu cela : la joie d’être allés la chercher.

Pas deux fois le même soir !

Pour comprendre aussi l’autre photo célèbre de cette finale, il faut revenir au cliché du onze de départ. Lors de la présentation des équipes j’ai eu un souci : je prends les joueurs en même temps que tous les autres photographes de presse, mais on est au coude à coude, ça se bouscule pour choper l’axe et un gars me tire en arrière. Je tombe sur le dos, je suis masqué, impossible de doubler la prise. Je n’ai qu’une photo du 11… ça commence mal.

© Christian Gavelle / PSG

Pour la remise de la coupe, le scénario est quasiment identique : il y a de nouveau plein de photographes. Les mêmes, on est encore au coude à coude, c’est très mobile, un gars me tire, je tombe, et tous les photographes passent devant moi, je me dis que je suis en train de rater LA photo du sacre. Il y a un mur humain devant moi, je suis par terre, je ne vois plus rien, c’est cuit.

Puis, je ne sais pas pourquoi, peut-être parce que ça ne devait pas m’arriver deux fois le même soir, mon regard tombe sur ce cube en bois. Un cube sur lequel les cameramen s’asseyent pour filmer le banc pendant le match. Alors je vois ce carré, et je le prends, je monte dessus, il n’était pas très haut, je me mets en format vertical, d’instinct je sens que ça va pas tenir en horizontal… Il faut savoir que je fais très peu de vertical, mais là je grimpe sans rien savoir, je me mets sur la pointe des pieds, mon ventre est sur les têtes des mecs devant moi, je sais pas comment je suis net, je fais deux photos et je tombe à la renverse.

C’est ma 2e photo « historique » dans l’histoire du PSG. Quand Luis porte Bernard Lama sur ses épaules et qu’ils soulèvent la coupe. Même après ma mort, cette photo sera à nouveau publiée. Même quand je ne serai plus là des supporters la verront encore. Elle n’a rien d’extraordinaire mais voilà : ces deux photos font partie de l’Histoire.

Après le match, c’est une joie intense, qui dure des heures. Les joueurs qui chantent dans le vestiaire, le Kakabona. Ils chantent Saga Africa aussi. Il y a des joueurs partout, torse nu, qui tapent dans les mains, et ils me sollicitent énormément, alors je fais des photos avec la coupe pour chacun d’entre eux : Youri, Le Guen, on reste des heures. Bonheur total.

Le cadeau de Raí à un père

Christian avec la coupe entouré des joueurs © Collection personnelle

Beaucoup de choses reviennent et se mêlent… Mon fils est né en mars de cette même année, deux jours avant le match à Parme, je n’avais donc pas pu partir avec l’équipe. J’avais appelé Jean-Philippe d’Hallivillée, qui était alors attaché de presse du Club, pour lui dire mon envie de garder un souvenir pour mon fils : « ça me ferait plaisir que Raí me garde son maillot pour lui ». Mes collègues avaient également informé discrètement Thierry Rolland et Jean-Michel Larqué de sa naissance, et les commentateurs avaient fait une dédicace en direct pendant le match. Des copains ont donc appris par la télé que j’étais papa, le lendemain j’avais plein de messages sur mon répondeur. Mais après ce match à Parme, j’ai revu Raí et il m’a dit qu’il s’était fait voler tous ses maillots. Il n’avait pu m’en garder aucun.

© Collection personnelle

Le soir de Vienne, deux mois plus tard donc, dans le vestiaire du sacre Raí revient me voir et sans rien dire m’offre son maillot de la finale. Je n’ai jamais su si c’était à cause de Parme, et pour mon fils ! J’ai enfilé le maillot et je suis allé choper le short de Youri que j’ai mis par-dessus mon jean, ainsi que les chaussettes de Le Guen et je suis rentré à Paris comme ça. Même à la fête organisée à Canal cette nuit-là, et dans les locaux du Parisien, pour l’impression du journal, j’étais avec le maillot, le short et les chaussettes. Je suis rentré dans cette tenue vers 4 ou 5h du matin chez moi.

Les joueurs qui partaient du Camp des Loges le lendemain matin pour aller à l’Elysée, on se souvient tous : ils voulaient se peinturlurer les cheveux mais Alain Roche qui avait été envoyé acheter les bombes de peinture n’avait trouvé que… du vert. Ni bleu ni rouge ! Du coup beaucoup de gars se sont peints en vert. Lama qui remet un maillot à Chirac. C’était la folie… On a remonté les Champs dans des 4×4 Frontera de notre partenaire auto, mais des supporters montaient sur les capots des voitures… Ça devenait chaud, les carrosseries des SUV étaient défoncées. On a donc monté les Champs pour commencer, et à la descente on a dû écourter.

Au Parc aussi ça ne s’est pas bien passé. Il y avait un podium au centre du terrain pour présenter la coupe aux supporters, mais quand les joueurs sont arrivés le terrain a été envahi, ils ont dû rentrer précipitamment dans le vestiaire. Ce qui n’a pas empêché les gars de faire la fête. Ils faisaient de la musique avec des canettes de coca qu’ils tapaient les unes contre les autres.

Ce jour-là, Joël Bats a dessiné la coupe des vainqueurs de coupe sur un mur du vestiaire, et les joueurs ont tous signé tout autour. La semaine passée, au Parc des Princes j’ai croisé une visite organisée et le guide disait que personne ne savait qui avait dessiné cette coupe. Je suis intervenu pour expliquer que c’était Joël Bats. Pour qu’on n’oublie pas. Parce que même si cette compétition n’existe plus, elle reste à jamais la première victoire européenne de notre club de coeur.

© Collection personnelle

L’histoire commence avec la fin d’un championnat, dans un salon d’hôtel anonyme, vers 3h du matin. L’équipe de Radio France vient de terminer ses reportages d’après-match, de boucler les sujets d’actu du soir et des plier son matos. Après avoir vainement cherché un bar encore ouvert à la sortie du stade, ces trois hommes et cette jeune femme sont finalement retournés dans le palace de la zone de province où ils allaient devoir essayer de trouver le sommeil. Nous sommes le 18 mai 2008. Hier, le Paris Saint-Germain a battu Sochaux. Il a sauvé sa place en Ligue 1. Pour cette veille de Noël, Bruno Salomon nous parle du jour où le PSG n’est pas mort.

Cette nuit de Sochaux-PSG, à l’heure où on a quitté le stade Bonnal, tout était fermé dans la banlieue de Monbéliard. Pourtant nous aurions bien eu besoin de nous poser autour d’un verre. Alors quand nous débarquons à l’hôtel, même nos derniers espoirs en prennent un coup : oui la patronne est là, mais elle a les yeux déjà bien endormis. Nous sommes quatre, trois journalistes de France Bleu et un collègue de France info, à lui expliquer notre situation en mode comm’ de crise : on vient de vivre un moment ouf, on veut juste prendre un verre, et jusqu’ici c’est mission impossible. La patronne est devant ses tables vides. Elle a tout rangé depuis longtemps, mais quand elle voit nos têtes, sans doute pas très fraiches, elle doit y lire un truc qui fait pencher la balance.

« Écoutez je vous fais confiance. Il est tard, moi je suis crevée, alors je vous laisse le frigo ouvert. Vous notez ce que vous buvez, et demain on verra pour les comptes. En attendant, moi, je me couche. »

Le néant qui s’ouvrait sous les pieds du PSG

Au vu du contexte, on a été plus que raisonnables. Une ou deux bières chacun, qu’on a savourées en refaisant le match. Et pour moi le PSG c’est cette bière-là. La meilleure bière de toute ma vie. Savourée à parler jusque 5h du matin d’un ballon qui roulait éternellement vers les buts sochaliens. Il faut dire que je venais de vivre ce qui aujourd’hui encore reste la semaine la plus éprouvante de ma carrière. Mais c’est impossible à comprendre si on ne se replace pas le contexte.

Si on rembobine la cassette vidéo (après tout on est en 2008, ça existait encore), cette saison elle nous ramène au tout début de l’aventure entre France Bleu et le club de la capitale. France Bleu avait attaqué les commentaires de matches du PSG le 05 janvier 2008, à peine six mois auparavant. Et pour chaque rencontre, sur tous les stades de France, on a entendu des « Paris en L2 ». D’abord pour chambrer. Jusqu’à cette dernière semaine. Le PSG était relégable après la 37e journée. Vraiment. On avait préparé des émissions quotidiennes, où on passait en revue tous les scénarios possibles. On a écouté les supporters, discuté avec d’anciens joueurs, essayé de comprendre comment s’en sortir. Mais même quand on coupait les micros, c’était impossible de s’échapper.

Les gens se rendent pas compte mais quand tu joues la descente, chaque jour, les potes, les collègues, les auditeurs, toute la semaine, tout le monde te parle de ça. À force ça te martyrise, t’as plus envie. T’es en mode « attendez calmez-vous là, y a encore un match à jouer ! ». Le samedi matin, on avait décidé de partir tôt, et nerveusement on était déjà entamés. Pour être bien identifiés aux abords de Bonnal, on avait choisi de prendre un gros break, entièrement couvert de stickers Radio France. L’après-midi, on sort de l’autoroute et au premier rond-point, bam, contrôle de police. Les mecs arrêtent toutes les voitures qui ont une plaque 75.

On explique aux gendarmes : « oui, bonjour, on est journalistes, et on vient couvrir la rencontre ». Le mec nous répond : « oui, bonjour on est gendarmes, et on s’en fout : vous me videz la voiture ». Il a fallu ouvrir le coffre, déballer tout le matériel, ils cherchaient si on transportait pas des barres de fer, ce genre de trucs. Ça nous a mis direct dans l’ambiance « match pourri ».

Ce ballon qui roule en slow motion vers les cages de Richert

La pression est montée toute la journée. Deux heures avant le coup d’envoi, même les journalistes étaient en stress. C’était surréaliste de voir la presse flippée du néant qui s’ouvrait sous les pieds du PSG. Et plus le coup d’envoi approchait, pire c’était. Je suis descendu prendre l’ambiance sur la pelouse, en même temps que les joueurs. Je m’entends bien avec des mecs comme Chantôme, Landreau, d’habitude on discute un peu, mais là ils sont blêmes. Je ne les avais jamais vus comme ça, gris de peur, et instantanément je me suis dit « je sens pas le truc ».

Pourtant Diané a ouvert la marque. Sur ce but, je ne devrais pas le dire mais il y a eu un énorme soulagement en tribune de presse. Tous ces journalistes qu’on présente comme anti-parisiens ils se congratulaient, sautaient, serraient le poing. On s’est tous dit « c’est bon, on va dérouler ». Mais non. J’ai revu les images du match, depuis. Le but qu’on encaisse, sur la fameuse égalisation de Ndaw, le marquage c’est apocalyptique. Les joueurs sont arrêtés, tétanisés. Comme dans un cauchemar. C’est là que tout Bonnal, toutes les tribunes se sont mises à chanter « Paris en Ligue 2, Paris en Ligue 2 ». Mais cette fois-ci la L2 on y était, vraiment.

À ce moment-là, au micro tu transpires, c’est improbable. Et peu après, notre envoyé spécial, qu’on avait placé dans la tribune des supporters parisiens intervient en direct. J’ai regardé dans sa direction et j’ai vu le parcage se faire enfoncer. À l’antenne ça fait : « bagarre générale entre supporters parisiens ! ». Tout foutait le camp, il n’y avait RIEN qui allait. C’était clair : on y allait tout droit.

Des matches, j’en ai commenté beaucoup. D’après mes archives, j’en suis à 900 environ : du National avec Grenoble à la finale de la Ligue des Champions. Je n’ai jamais ressenti cette peur. Nous étions tous pris dans un film d’horreur grandeur nature. Mais maintenant il faut parler de Amara Diané. On peut lui reprocher d’être parfois un peu dilettante. De ne pas avoir exploité tout son talent. N’empêche que ce joueur, il mérite une porte du Parc des Princes à son nom, ou une statue, ou des santons, puisque c’est Noël, je sais pas. Ce jour-là, c’est le seul qui n’a pas eu peur. Sur le deuxième but, ce ballon qui roule reste à jamais le slow motion le plus fou de la terre. Quand tu vois le déboulé de Diané, le plongeon de Richert, il y a toute une saison qui défile dans ce ballon qui se traine vers les cages, toute la destinée du PSG. S’il n’était pas rentré, est-ce que le Qatar aurait racheté le PSG ? On serait où aujourd’hui ?

Et Amara marqua © Icon Sport

Mais Diané a marqué. Dans la tribune juste à côté de moi, il y avait Michel Kollar, l’historien du PSG(*). Je me vois encore en train de sauter vers lui, d’agripper la grille qui nous séparait et de la secouer comme un dingue. C’était la délivrance la plus jouissive que j’ai connue, suivie par les pires secondes. Il fallait conserver le score, les mecs n’arrivaient pas à jouer, c’était horrible. Mais c’est passé. Alors c’est de ça, qu’on a parlé, à 3h du matin, abandonnés dans ce salon d’hôtel avec nos bières. Cette scène-là je la retiens car c’est le jour où j’ai compris. J’ai su, dans cet hôtel des abords de Sochaux que la folie du PSG était pour moi aussi. Que j’avais en moi cette part d’ado que je garderai toute ma vie, comme le PSG. Ce jour où j’ai connu la plus grosse peur de ma carrière et le coup de sifflet final au kiffe le plus énorme.

Ce match, il m’a donné un recul pas possible. Je profite de tout ce qu’il y a. Le jour où on est partis jouer ce quart de finale à Barcelone, sous Ancelotti, je me suis retrouvé devant le Camp Nou et je me suis dit « maintenant ça y est, t’es là ». J’ai repensé aux années passées avec le PSG, tous les trucs improbables, à Epinal, en coupes face à des équipes de National, à ces chants de Bonnal qui nous envoyaient en L2. J’ai été envahi par une énorme émotion.

Ce Sochaux-PSG c’est une étape dans ma vie, comme dans celle de ce club. On est passé à deux doigts et ça a laissé des traces. Je suis parti quelques jours plus tard pour aller en bord de mer. Je suis resté des heures, juste à regarder les bateaux passer. J’avais besoin de couper. Mais c’est un match qui m’a construit. Que je porte dans ma peau.

(*) Voir Calendrier jour 13.


Pour cette 23ème case du Calendrier de l’Avent PSG, partons au nord, toujours plus au nord, mais pas au pays du Père Noël. Fabrice, ancien président des Supras a préféré prendre le traîneau de ses souvenirs et nous faire atterrir à Glasgow. Pas de rennes volants dans sa hotte, mais les lumières du Celtic et des Rangers, pour deux déplacements au monde du football vrai.

Tout cela remonte à longtemps. Milieu des années 90. Je sais que ce calendrier est consacré aux matches du Paris SG, mais parce qu’il n’y a pas que le carré vert dans le football, j’ai décidé de vous parler d’autre chose. De deux déplacements magiques, dans les Highlands.

Bien sûr, il y a le stade et le jeu. Mais l’atmosphère contre le Celtic avec son public si singulier, ces échanges d’écharpes, ces renvois de chants entre tribunes, ça demeure une expérience assez rare. Tu savoures, et pourtant ce qui m’a le plus marqué était aussi ailleurs. Autour du stade. Pas loin.

Toutes les histoires qu’on a racontées depuis sont vraies. Oui, l’ambiance était très bon enfant, on l’a tous vu d’entrée. Naturellement, les gens voulaient un souvenir, le plus souvent l’écharpe l’équipe d’en face et créer un lien par un mot. Aussi les Écossais avaient applaudi les Parisiens à la fin du match, cela relève des règles de l’exception grammatical footballistique. Souvenons nous aussi de ces échanges de chants entre parcage parisien et tribunes écossaises. Nous, on se regardait et on savait que l’on vivait un moment rare.

Dans le football, il y a la rivalité qui est toujours présente. On est adversaires et nous ne sommes pas là pour nous faire de cadeau par définition. Mais ces soirs-là, on sentait le Respect, le vrai. J’avais compris entre l’aéroport et leur stade, qu’il y aurait quelque chose de spécial.

Dans cette période de coupe d’Europe, nous étions parfois en avion, organisé avec le club. Un déplacement comme ça, c’est toujours sympa parce que même si on n’a pas besoin du PSG pour prendre l’avion, ça prend un petit côté « exclusif » qui va bien. Ça regroupe les supporters à l’aéroport, et ça crée une cohésion assez cool.

L’amour du club rentre dans la vie des gens

Je pensais à aller faire un tour dans la boutique. Inévitable. Je suis un collectionneur, le matériel c’est ma came. Tout petit, j’ai commencé par écrire aux clubs français. Je recevais des cartes de joueurs avec leurs autographes. Les mecs te répondaient dans les années 80 ! Ça paraît tellement dingue aujourd’hui.

Ensuite, quand j’ai grandi, je déviais les trajets de vacances de la famille pour aller faire des stops dans les boutiques des clubs de l’hexagone. Il fallait s’arrêter pour acheter un fanion, un souvenir. Sur un On Tour Familial en Belgique en 1988, mes parents se sont tapés peut-être tous les stades et boutiques possibles. C’était bien avant mon engagement au Parc, mais j’ai toujours gardé ça. Même maintenant j’ai besoin de me soigner (rires), demander aux gars de chez moi, comment je les harcèle avec mon Musée qui verra le jour, j’en suis sûr. Pour l’instant, je suis un archiviste accumulateur mais c’est pour le bien de tous et pour l’avenir, pour ne pas perdre une miette de la petite histoire dans la grande Histoire du Virage Auteuil.

A Glasgow donc, stop à la boutique. Et là, belle claque. Il y a boutique, c’est vrai mais au pays du ballon rond, il y a surtout LEUR boutique. C’était peut-être, il y a 25 ans, rien de tout ça n’existait en France mais pas plus aujourd’hui.

Je me retrouve là avec devant moi une chambre d’enfant recréée de toute pièce, avec un lit, des meubles, du papier peint, une lampe de chevet, tout aux couleurs du club mais du sol au plafond. Rayon suivant. La bijouterie. Même une femme qui n’aime pas le foot vous prendra un truc dans ce qui est proposé. Tourne la tête vers les alcools. Tellement les bouteilles étaient stylisées et imaginatives, t’as envie d’alimenter ou de créer un côté bar dans ton salon.

© Icon Sport

Faire un Lego du bus de l’équipe, avec un joueur en fac-similé, c’est pas ça qui change les recettes du club. Mais le gamin va y jouer avec des années et le gardera. T’as des jouets du PSG toi ? Ah oui les Pop. Yaouh grandiose. Là c’est des choses qui se retrouvent dans les chambres. À travers ces objets, l’amour du club rentre dans la maison, dans une cuisine, dans la vie des gens. 

Le Parc des Princes a une âme de par son architecture, une âme brute de béton, mais en 2021, il manque toujours ce truc qui ne s’achète pas. Au stade écossais, un vague souvenir mais précis à la fois d’une entrée presque banale, un peu sur le côté, type voie de livraison. Peut-être, seuls les employés du club l’empruntaient. Mais matérialisée et pas par une simple grille. Non, un portail bien lourd, bien Versaillais, énorme et majestueux, frappé aux couleurs et blason du club. Je ne doute pas que j’extrapole avec le temps mais ce dont je suis sûr, c’est que les détails font la différence.

Ce sont des symboles. Sans symbole. Pas d’âme. Une statue de joueur en bronze, c’est culturel. De Florence avec Batigol à Cologne en passant par Wembley ou Benfica mais à Paris, on n’a pas l’idée. C’est trop compliqué ou peut-être trop Authentiks 😉. Eux c’est dans leurs gênes. C’est leur façon de faire, de vivre.

Alors Messieurs les grands penseurs de la porte de Saint-Cloud, commencez peut-être pour être avant-gardistes, par dédier une petite partie de notre stade à vos supporters qui ont passé leur vie à suivre leur club de cœur et qui se sont arrêtés à cause de la grande faucheuse. Si vous les commémoriez, vous trouverez du sens à votre vie de dirigeants parisiens et vous sortirez peut-être de votre rôle de vendeur de maillot à 150€. L’appel est lançé.

Il y a peut-être un truc spirituel

Le Bobine s’égard… revenons à la culture anglo-saxonne une minute.

Chacun a peut-être débarqué dans ce type de ville où toutes les maisons sont côte à côte, identiques, toutes ces rues entières qui sont tournées vers le stade. Vous ne me direz pas qu’il n’y a pas un truc là-bas ! Comment ne peut pas être jaloux d’un peuple qui peut se dire supporters depuis deux ou trois générations, quand tu bois une bière, c’est après le job et avant le stade. Ton club, tu le respires. C’est ça le pays du football, non !?

Même si l’équipe est mauvaise, ces gars iront au stade. A Paris, cela se passerait comment, hein ? Là-bas les mecs y vont en famille depuis des générations, c’est en eux. 

On peut parler de Culture. Ou aller plus loin. La vérité c’est qu’il y a l’esprit mais sans se l’inventer. Cette façon de représenter le club ça rajoute quelque chose. Il y a peut-être un truc spirituel. Qui t’habite. Te transporte. Le doute n’a pas sa place.

Cette façon de vivre le football, c’est ce qui donne un sens à ton investissement, ce qui toute ta vie te donnera envie d’aller au stade. Chez toi. Quand tu as ce côté spirituel, ça donne un sens à tous tes sacrifices. Personnellement, j’ai eu parfois quelques doutes et je me sentis un peu seul. Et à 49 balais bientôt, ceux qui me donnent de la force, ce sont les gars du groupe à qui on a tout enlevé mais qui sont là, toujours là en silence. Supras Forever.


Alors que Noël, et donc la fin de ce calendrier de l’Avent PSG, approchent à grands pas, Audezio vous propose aujourd’hui de revivre ce qui reste comme l’une des plus belles sorties du Parc des Princes de l’ère qatari : PSG – Chelsea, et le fantastique but en toute fin de match d’un génial meneur de jeu argentin (non pas celui-là, un autre).

Parc des Princes, Mercredi 2 avril 2014, 22h35…

La foule est en liesse, Javier Pastore vient de marquer un des buts les plus iconiques de sa carrière parisienne… le PSG mène 3 à 1 et a un pied en demi-finale de Ligue des champions. Et pourtant, personne n’aurait pu prédire que l’Argentin pourrait être décisif dans ce genre de match. Personne… sauf quelques irréductibles « Pastoristes ».

Après s’être baladé en phase de poule et sorti le Bayer Leverkusen sans encombre, les hommes de Laurent Blanc héritent du Chelsea de Mourinho (double vainqueur de l’épreuve avec 2 clubs différents) et ses hommes, tous aussi des habitués de la LDC ayant pour certains remporté l’édition 2012.

Le match sent la poudre des grandes joutes européennes et le PSG vise le dernier carré d’une compétition qui avait failli s’offrir à lui la saison passée après 2 matches aboutis face à l’ogre barcelonais sans pour autant réussir à se qualifier. Zoom donc sur ce 2 avril où quand la Ligue des Champions reprend ses droits sous le printemps parisien et pour ce match aller des quarts de finale.

Dès la sortie du métro de la ligne 9, l’atmosphère est déjà palpable… électrique. Les chants s’entendent alors qu’on n’a pas encore dépassé l’église de la Porte de St-Cloud. Et puis il y a cette odeur particulière, cette sensation, ce sentiment ineffable que l’on va vivre une grande soirée dans ce stade mythique, une de plus. Car oui, c’est bien au Parc que se sont écrites les plus belles pages de notre jeune histoire et c’est ici que bat le cœur du PSG.

Ce joueur qu’on kiffe, sans raison

Moi, je kiffe chacune des minutes avant le lancement de la fameuse musique, le Parc est plein et on attend que ça démarre… et vite ! Merci Pocho Lavezzi, le gars sûr en LDC, qui dès la 3e minute ouvre le score… Hazard viendra égaliser peu après avant que David Luiz, pas encore Parisien, ne donne l’avantage à son futur club grâce à un CSC.Oui, vous le noterez, je parle de ce match mais je ne m’y attarde pas trop curieusement car pour moi, aussi intense soit-il, il prend une autre dimension à la 84e minute.

Mon chouchou, Javier « 27 » Pastore, est lancé par Laurent Blanc pour la fin de match. Un moment où les 2 équipes semblent se contenter du résultat. Le Parc accueille froidement celui qui fut son idole autrefois mais qui traverse alors une phase délicate à Paris. Avec l’arrivée d’Ibrahimovic et consorts, il est clairement rentré dans le rang sur le terrain et dans le cœur des supporters.

Après avoir longtemps tergiversé lors de ses débuts, Lolo « Gasset » White finit par installer un système en 433 avec notamment ce trio du milieu de terrain Thiago Motta – Verratti – Matuidi. Cavani exilé sur une aile, Pocho sur l’autre autour d’un Zlatan désormais bien installé à Paris. Plus de place préférentielle pour un meneur de jeu comme Javier qui a en plus été particulièrement décevant en début de saison et devra se contenter des miettes.

À plusieurs reprises, grand fan de ce joueur depuis ses années palermitaines, je me suis pas mal de fois attelé à défendre celui qui incarnait pour moi le football romantique d’autrefois. En tant qu’abonné du Parc, on sympathise assez rapidement avec nos voisins et très vite, les discussions sont assez passionnées autour de nos joueurs fétiches, ceux que l’on kiffe sans trop d’explications mais qui insupportent certains. On ne compte plus le nombre de soupirs agrémentés d’un « pfff 42 millions… », ou encore les regards de travers en ma direction après une passe ratée d’« El Fiasco »

Pastore était ce genre de joueur, capable de diviser. On aime ou on n’aime pas mais il ne laisse pas indifférent. Je fais partie de ceux qui ont toujours cru, ceux qui ont eu ce coup de cœur inexplicable lors d’un premier but contre Brest, après une feinte de corps et un joli piqué (oui, il m’en faut peu). Il a fallu débattre avec certains et leur expliquer que même dans la grisaille, il y aura toujours un geste de génie, une action de classe qui peut débloquer une rencontre. Et qui servira dans un grand match, je le sais, je le sens…

Le crépuscule des derniers numéros 10

Retour donc à cette fameuse 93è minutes, quand Jallet demande au public de pousser pour les dernières secondes avant d’effectuer une touche anodine proche du poteau de corner londonien. On joue les arrêts de jeu depuis deux minutes et le ballon échoue sur le pied droit de Javier encerclé par trois défenseurs. Un dans le vent, puis un second, il semble s’enfermer le long de la ligne de fond de jeu, puis double contact pour éliminer Lampard…

Pastore christique © DR

Le Parc frissonne, se lève, le génial 27 fonce vers le point de penalty et face à 2 défenseurs qui se dressent devant lui, il décoche une frappe du gauche à ras de terre dans un trou de souris, entre Petr Cech et son premier poteau. Explosion du Parc pour son Prince. Tout le monde debout, les larmes de joie coulent sur mes joues, je prends mon cousin dans les bras et nous laissons exploser notre bonheur. Autant pour le joueur que pour nous, ses défenseurs, ce but est une délivrance. Et comment oublier ce plaisir dans les yeux de nos voisins « détracteurs » qui viennent nous taper dans la main comme si c’est nous qui avions marqué ce but…

Ok, notre aventure européenne s’arrêtera deux semaines plus tard, un match que Pastore aura débuté sur le banc au grand regret de son entraineur. Mais pour Javier, c’est le début du retour en grâce qui le verra effectuer derrière sa plus grande saison sous le maillot parisien.

Cette action reste pour moi une des plus belles des années QSI, celle d’un homme que j’ai le plus aimé derrière Safet Sušić. Dans un sport en constante évolution qui aura vu disparaitre tour à tour le 5 (libéro), le 9 (le renard des surfaces), vint le tour du 10. Pastore était l’un des derniers résistants, el Ultimo Diez. Celui qui symbolise le crépuscule des derniers 10 à l’ancienne, après lui, plus rien ne sera jamais pareil…

Gracias Flaco


Le Calendrier de l’Avent c’est un texte par jour, sur un match du PSG, par un auteur donné. Mais l’Avent c’est surtout ce rite qui remonte bien avant les religions du Livre. Cette lutte contre les jours qui raccourcissent, contre la Nuit qui s’installe. Cette promesse d’une renaissance de la Vie. Il fallait donc que quelqu’un se dévoue, et l’aborde, ce fameux match le plus sombre de l’histoire des supporters Rouge et Bleu. Aymeric, nous emmène affronter bien plus que Montpellier : c’est l’injustice, la peine et la mort, qu’il combattit un soir de mai 2010. Et c’est une claque que vous allez recevoir.

Depuis plusieurs semaines, on le sent, on le sait quelque chose se trame. Tous les mecs du virage le disent, on va prendre cher, mais sous quelle forme ? Depuis des mois, les antagonismes entre Auteuil et Boulogne se sont intensifiés et les sorties de stade comme les parcages sentent le soufre… Franchement ça devient pesant.

Pour moi, j’ai toujours considéré qu’un supporter du PSG faisait partie de la famille, peu importe son origine, sa culture, sa religion. Entendre les deux entités historiques se déchirer me soule. Personnellement il est pour moi hors de question d’insulter Boulogne, moi qui suis carté Supras depuis 91, moi qui ait participé à la création de ce Virage Auteuil, adolescent, je n’ai aucune envie d’insulter et de cracher sur le kop d’en face avec qui j’ai toujours adoré faire des échanges qui résonnent encore dans ma tête : Alleeeeeeez Pariiiiis !

Et puis en 1982, pour mon premier match au Parc et jusqu’en 91 j’ai été à Boulogne, là où il faut l’avouer tout a commencé en 85 !

Bref, on vient de gagner la coupe de France contre Monaco, but d’Hoarau et on finit péniblement le championnat à la 13ème place ! Mais tout ça est secondaire, tout ça importe peu ! Je suis inquiet, je ne peux pas croire les bruits que j’entends : ils veulent nous virer ! Impossible ! Je suis là depuis 1982, je n’ai rien fait, j’ai toujours tout donné pour ce club, ces couleurs sont les miennes, je vis pour ce club, on ne vire pas les gens comme ça !

Et puis il y a quelques jours, « Boat » et « Amar » ont vu Leproux et les yeux dans les yeux, il leur a dit : « On a trop besoin de vous ! ».

Installé en virage avec mes potes et mon frère, on profite quand même parce que c’est le dernier match de la saison, on ne va plus venir au Parc avant la saison prochaine… Alors même si on prend 3 pions par les mecs de la Paillade mais on s’en tape… Et tout à coup, la rumeur se répand dans le virage, c’est fini les gars !!!! Les gars c’est fini, oh vous entendez, c’est fini ! On va tout faire péter, parce que Paris c’est nous, on va leur montrer les gars !

Et de partout ça commence à chanter : « ça va péter, ça va péter… ». Jusqu’à ce qu’un méga craquage explose, la tribune devient rouge de colère, de frustration et moi je suis là, pris entre l’excitation de vouloir crier ma haine et la stupeur … L’arbitre siffle la fin de notre saison, on perd lamentablement 1-3 avec une réduction du score d’Erding ! Anecdotique ! La prise de conscience prend alors forme et on décide de ne pas quitter le Parc, on descend en rouge pour demander à parler aux dirigeants. Et le temps passe, les CRS et les policiers sont là face à nous !

Auteuil s’embrase © Icon Sport

On voit alors Boulogne se faire vider de force… Puis vient notre tour, je vais voir des stadiers, je leur dis : « putain les mecs vous venez avec nous en parcage, vous prenez des coups, vous recevez des hameçons lestés au vélodrome avec nous, vous nous connaissez et là vous venez nous faire ça… ». Un des stadiers me répond : « laisse tomber, c’est mort, en plus nous on veut rentrer chez nous ce soir, il est tard et les dirigeants nous ont promis des primes pour vider le stade… ».

Je peux pas croire ça, c’est tellement minable, tellement écœurant d’en arriver là. Je vois des filles se faire sortir par les cheveux, on essaie de résister un peu et tout le monde y passe, après avoir bloqué les portes on ne peut que céder… Je ne sais même plus l’heure qu’il était, minuit, 1h peut être ! On se retrouve alors devant Auteuil, sur le rond-point, les regards dans le vide, quelques insultes volent encore mais le silence et la torpeur s’installent très vite.

Mon frère en a marre et me dit : je rentre !

Je me retrouve alors seul, seul, seul… C’est fini, vraiment fini…

Alors ils l’ont fait, ils nous ont virés, jetés, niés. Ils ont effacé en une soirée toutes mes années Parc, depuis 1982, tout ce qu’on a créé. Toutes ces années, à œuvrer pour suivre et supporter ce club quoi qu’il nous en coûte en argent ou en temps ! Ils nous brisent 30 ans de notre vie, 30 ans d’histoire, en faisant un amalgame et en punissant 15 000 personnes comme ça.

Je me sens humilié, insulté, rejeté !

Je suis assis dans ce Paris silencieux, je n’entends plus rien, ne vois plus rien et soudain mes yeux se remplissent de larmes, je pleure et les larmes ne s’arrêtent pas… À ce moment, rien à foutre qu’on me voit ou pas, je suis triste, tellement triste, et j’ai tellement mal, comme si j’avais perdu quelqu’un, une partie de moi était morte. J’avais des messages de chez moi qui me demandaient où j’étais… Aucune envie de répondre et je savais déjà que mon retour chez moi allait être mouvementé, qu’on allait me prendre pour un fou.

Pleurer pour du foot !!! C’est ridicule ! Quelle injustice ! Pendant des nuits je n’ai pas dormi, j’ai joué un rôle pour continuer à vivre en société. Plus jamais le Parc ne sera comme avant !

La seule chose qui me console aujourd’hui avec 11 années de recul et 2 ans de boycott c’est d’avoir vécu les années 80, les coupes 82, 83, le premier titre, le début de la vie des tribunes en 85, puis la création d’Auteuil, les années Canal et l’apogée du supporterisme parisien où nous étions respectés partout en Europe !

Et ça rien ni personne ne pourra jamais me l’enlever et ça n’a pas de prix !

Paris c’est NOUS !


Le Calendrier de l’Avent de Virage, c’est peut-être un cadeau pour vous, mais pour le Patron du site, qui se tape toutes les mises en ligne, ça veut dire beaucoup de boulot. Mais parce qu’il illustre bien l’adage selon lequel les supporters du PSG sont un peu masos, Xavier Chevalier a tenu à participer au délire, en y allant de son propre match. Une finale pleine de doutes, de joies, de souffrance. Une finale remportée à l’arrachée, contre toute attente. Une finale « made in PSG » quoi, la dernière finale de l’ancienne ère : PSG – Monaco 2010.

Quand Arno P-E m’a soumis cette idée de Calendrier de l’Avent, je fus d’abord perplexe, car réussir à publier un texte par jour, et ce pendant 25 jours d’affilé, ça relevait de la prouesse voire de l’exploit pour l’équipe Virage. On est un peu fainéant à la rédaction, on prend notre temps. Mais après tout pourquoi pas. Challenge relevé. En tant que rédacteur en chef, je me suis donc senti obligé de ressortir la boîte à souvenirs et il faut l’avouer, il n’est pas facile de choisir UN match parmi tous ceux auxquels j’ai pu assister depuis le milieu des années 80. Plutôt que de sélectionner un grand classique, j’ai choisi une soirée à la fois symbolique mais aussi synonyme de souffrance. La finale de Coupe de France 2010 face à Monaco.

Ce samedi 1er mai 2010, me voilà donc au Stade de France. Un stade que je déteste car ce n’est pas pour moi un stade de foot. 1998 n’a jamais pu rien y faire. Je n’éprouve rien quand j’entre dans cette enceinte. Quand on est habitué au Parc des Princes, on devient difficile. Je suis accompagné de mon vieux pote « Mémé », que nous appelons aussi « Dany » alors qu’il s’appelle Christophe. Trop long à vous expliquer. En tout cas avec « Mémé » on supporte tous les deux le PSG depuis toujours. On a fait plein de matches ensemble au Parc, et majoritairement des purges. 

Il faut dire que depuis 2005 le PSG est médiocre, pour ne pas dire mauvais en championnat et ailleurs. Empêtré dans le milieu de tableau malgré un effectif à peu près correct pour la Ligue 1. Cette saison 2010 lors de la finale nous sommes 11èmes et on vient de se faire taper chez Grenoble, la lanterne rouge, 4-0. Une vraie performance. Alors autant vous dire qu’on n’arrive pas confiants. Je ne sais même pas ce qui nous a motivé à acheter nos places. Peut-être que « Mémé » les avait chopées d’ailleurs gratos chez SFR pour qui il travaillait à l’époque. Aucun souvenir. Ou tout simplement le fait qu’on en ait vu d’autres et que ça restait la Coupe de France, notre Précieux. Et que c’était la dernière occasion aux deux vieux du PSG de la gagner : Ludo Giuly et Claude Makélélé.

Bref on arrive au stade. On se retrouve pas loin du parcage parisien placé côté nord. Juste derrière nous, deux papys, supporters de Paname. Sympathiques au premier regard mais qui vont vite devenir absolument insupportables. Pourtant Paris commence fort contre toute attente. Car en face c’est le Monaco de Nenê. Une équipe qui avait dû éliminer successivement Tours (L2), Lyon (L1), Bordeaux (L1), Sochaux (L1) et Lens (L1) pour arriver en finale. Joli tableau de chasse. Alors que nous s’il vous plait : Aubervilliers (CFA 2), Évian (National), Vesoul (CFA), Auxerre (L1) et Quevilly (CFA). Un parcours de chattards. Et puis Monaco nous a battu en L1 à l’aller et au retour. Mais on sent que Paris a l’habitude des grands rendez-vous et ce quelques soient les effectifs. Le premier quart d’heure est pour nous, puis on commence à subir. Je suis tendu. Je crains surtout très fort le pied gauche de Nenê qui est un joueur que j’apprécie. Je ne le sais pas encore mais Robin Leproux le kiffe aussi et fera tout dans les semaines qui suivent pour le faire venir à Paris, contre l’avis d’Antoine Kombouaré. En tous cas Monaco reprend du poil de la bête, surtout leur attaquant Pino qui est à deux doigts de marquer sur un superbe slalom géant dans notre défense en mousse. 

Comment peut-on se mettre dans des états pareils ?

Mi-temps 0-0, on respire, enfin pas moi. Il est hors de question que j’assiste à une défaite de mon club en finale. Et ça va continuer à monter durant toute la deuxième mi-temps. Mon palpitant s’accélère, les deux vieux derrière n’arrêtent pas de traiter nos joueurs d’incapables trop payés alors qu’ils font un match courageux notamment Apoula Edel qui sort 3 beaux arrêts (fait rarissime), Christophe Jallet omniprésent, et Mevlut Erding toujours aussi volontaire. Jamais compris ces supporters (surtout des anciens) qui insultent leurs joueurs pendant 90 minutes. La fin du match approche, je n’en peux plus. Je quitte la tribune pour aller aux chiottes me calmer. Il faut carrément sortir du stade, du coup je suis au calme pour passer mes nerfs en silence. Et je me regarde dans la glace en me demandant comment je peux me mettre dans des états pareils. Je me demande même si je vais retourner dans le stade tellement je suis à bout. J’ai trop vécu de désillusions, ce soir une défaite de plus serait de trop. Mais j’y retourne. Je peux pas laisser « Mémé » tout seul. 

Le but de la délivrance © Icon Sport

La prolongation commence. Je me bouffe les doigts. Je ferme les yeux sur chaque action monégasque. On arrive en fin de 1ère prolongation et là le miracle. « Maké » fait une feinte puis passe la balle à « Jaja » qui frappe immédiatement, Ruffier repousse le boulet de canon sur la tête de Guillaume Hoarau qui n’a plus qu’à pousser le ballon au fond des filets. Pas le but le plus difficile à mettre dans sa carrière mais quelle putain de libération. Je vois Mevlut Edring sortir du banc avec sa parka Pitch faire un 100 mètres de malade pour féliciter Guillaume et faire des sauts de cabri, j’en chiale. Tout le virage parisien et une grosse partie du SDF explosent littéralement. Je saute sur « Mémé » et croyez-le ou pas, j’étreins également les deux papys derrière moi qui sont dans le même état que nous. Et je leur dis « Je ne veux plus jamais vous entendre les critiquer », ils se marrent. Ils savent. Ils ont l’expérience. Ca fait partie du jeu. 

On tient toute la deuxième prolong’, Edel multiplie les interventions, Sammy Traoré remplace « Jaja », homme du match, rien ne peut plus nous arriver. Victoire 1-0 dans la souffrance la plus totale. Je suis heureux et soulagé pour cette équipe qui en a bavé. Que la presse n’a cessé d’humilier, parfois sans doute à raison. Mais c’est mon équipe, celle qui une fois de plus va chercher la Coupe de France pour sauver sa saison.

Et puis le contexte était tellement particulier. Le jeudi de la même semaine, le gouvernement avait dissout par voie de décret cinq associations de supporters parisiens. 15 jours plus tard, c’était le fameux PSG-Montpellier, dernier match au Parc de la saison, dernier match des deux Virages tels qu’on les avait connus depuis l’existence de groupes ultras à Auteuil et Boulogne. Le 18 mai, Robin Leproux présentera officiellement son plan aux autorités. La suite on la connait…


Oh oh oh ! Bonjour les petits supporters du PSG, est-ce que vous avez été sages cette année ? Oui ? Alors vous méritez un petit cadeau. Pour la case d’aujourd’hui dans notre calendrier de l’Avent PSG, je confie donc mon traîneau magique à Viola, Capo des Lutèce Falco, pour qu’il vous emmène faire un petit tour le 30 avril 2000, du côté de Furiani !

Propos du sympathique responsable de la sécurité du SC Bastia devant Furiani, dans une ambiance incandescente et hostile, avant de rentrer dans le stade et de rejoindre un parcage visiteur improvisé fait de rubalise et des gendarmes mobiles continentaux pas vraiment rassurés :

« Si le Sporting gagne, il n’y aura pas de problèmes, ce sera la fête, vous pourrez aller en ville, même dans les bars, vous vous ferez chambrer. Bon s’il y a match nul, ce sera peut-être un plus chaud, faudra peut-être éviter le centre-ville, les bars, et aller à la plage. Ce serait mieux pour vous je pense. »

Silence…

Propos d’un fan du PSG parmi la petite cinquantaine d’ultras de la capitale présent ce soir-là :

« Monsieur, et si le PSG gagne !?! »

Silence, rires gênés…

« Mais enfin ça n’arrivera pas, Bastia est invaincu cette saison à Furiani, on joue l’Europe, le peuple turchini est surmotivé, vos joueurs sont encore sous le coup de la lamentable défaite face à Gueugnon… Et puis surtout ce serait mieux pour vous, sinon la sortie du stade sera compliquée, et la soirée bien plus tendue que celle que vous avez vécue hier soir Place Saint-Nicolas. Je me rappelle une sortie des Marseillais où ils avaient dû se cacher en tribune officielle, ramper pour sortir du stade, et d’embrouilles jusqu’à l’aéroport, vous savez, les gens, ils sont chauds, ils sont un peu fous ici… »

Que croyez-vous qu’il arriva ? Bien entendu notre glorieux Paris Saint-Germain gagna à Furiani pour assurer la 2ème place derrière Monaco et la qualification en ligue des champions, validant une belle saison où l’on a vu un grand Laurent Robert malgré des cartons rouges et des sautes d’humeur de débile, un Okocha magique replacé en 6, une belle doublette d’attaque Christian/Laurent Leroy et un PSG de Bergeroo surprenant et revanchard avec son maillot gris et blanc à l’extérieur (stylé mais pas très aux couleurs du club), beau 2ème derrière un Monaco imprenable.

Un long week-end de bronzage

Retour sur déplacement inoubliable et riche en émotions pour la cinquantaine de mecs du Virage Auteuil (LF91, TM93, SA91) et Boys85 présents.

Le premier déplacement où des fans parisiens avaient posé les couleurs à Furiani, en décembre 98 avait montré qu’un déplacement sur l’Île de beauté pouvait être un peu « folklorique » (avec prise d’otage par les chauffeurs de taxi à l’aéroport et retour dans l’avion des joueurs aux frais de la princesse).

Ce chaud et ensoleillé weekend du premier mai à Bastia restera inoubliable pour tous les présents.

Une semaine avant, le PSG nous offrait un incroyable fail dont seul ce putain de club a le secret, une défaite en finale de la coupe de la ligue au Stade de France contre les forgerons de Gueugnon, alors en D2. La lose totale. La cerise sur le gâteau d’une belle saison où au final tu avales le noyau.

Il est important de dire que cette défaite lamentable de notre club enlevait une place en coupe de l’UEFA par le championnat, place que jouait une équipe de Bastia roublarde et rugueuse, intraitable à Furiani, un temps où il y avait moins de caméra et la magagne corse jouait à plein. Bref, la défaite du PSG n’arrangeait pas du tout le SCB et ses bouillants suiveurs, et pendant tout le weekend on s’est fait embrouiller pour ça, comme si nous étions nous responsables, comme si c’était nous les joueurs, alors qu’au final on avait bien la rage et la honte.

Match le dimanche à 17h, on avait 20 ans, la ferveur et l’instinct migrateur, un voyage en train de nuit le vendredi en fraudant pour pas mal d’entre nous, un train Regio italien où on doit descendre faute de tickets mais qui nous permet une superbe baignade dans un village ligure. Un Ferry Savona-Bastia et là, à peine posé le pied au port, les premières menaces, coups de pressions « Auteuil, Boulogne, vous êtes morts. »

Une soirée ou nous profiterons pour visiter la jolie ville de Bastia, pisté par des mecs, sans agressions physiques mais avec ce sentiment de traquenard permanent. On passera une bonne partie de la soirée dans un café de la place Saint-Nicolas où au final les autochtones, la clientèle du bar, des quadragénaires fans de foot et de Pietra, seront sympathiques et accueillants, chambreurs mais protecteurs face à une jeunesse bastiaise toujours à l’affut dehors.

ITW Zavatt, Capo des Boulogne Boys Virage PSG
Arrivée à Furiani © Collection personnelle Zavatt

Une nuit à 15 dans une chambre d’hôtel, une journée de plage de rêve le lendemain où on prendra des coups de soleil et il l’heure d’aller au stade. On arrive tous ensemble, tous les Parisiens présents, que des ultras, avec un cortège où on porte nos écharpes mais silencieux et une arrivée devant Furiani impressionnante. Grosse hostilité, pression, mais pas d’attaque physique. Néanmoins tu n’en mêmes pas large. Il y a la fierté de venir en bas poser nos bâches et nos couleurs, en indépendant, sans aide du club, comme des grands mais il y aussi ce sentiment de far-west, que la Corse c’est spécial, bouillant.

Un étau se resserre en tribunes, et là… Igor Yanovski

Les gendarmes mobiles nous escortent finalement devant le stade, tant bien que mal et nous revoilà au départ de ce récit avec le responsable sécurité du SCB. On a des places, ce qui n’était pas garanti, mais pas de parcage en bonne et due forme, juste un coin de tribune, en haut de la tribune principale de ce stade pittoresque, séparé de la faune nustrale par un ruban et quelques gendarmes mobiles qui n’en menaient pas large. On se fera insulter tout le match, de Français, d’Arabes, de Parisiens, de Gaulois, par une tribune composée de types ayant deux à trois fois nos âges, de têtes à jouer dans la série (qui n’existait pas encore) Mafiosa. Il fait beau, il fait chaud, on voit les étangs de Biguglia, la Méditerranée, la petite gare de Furiani, on est 50, fiers, solidaires, un peu flippés quand même, on chante pour Paris les bâches à la main. Quelle fierté.

La joie sur le but d’Igor © Canal Historique

Côté terrain, le souvenir du match est vague mais à la 70ème, Robert ouvre le score. Quelle saison de Laurent Robert, sa patte gauche, de la dynamite. On exulte mais ça brasse dans le stade, c’est hostile, la bâche des Boys est sauvée après une épique partie de tir à la corde. On recule plus haut dans la tribune, comme un étau qui se resserre et là arrive un but incroyable, un but que je n’oublierai jamais, un peu comme celui de Diané à Sochaux en 2008. Igor Yanovski, le rouquin russkov, pas un poète ou un esthète du football, sort un lob piqué de 25 mètres et double la mise. Un bijou de feuille morte, un ballon au ralenti, une action hors du temps où tu sens le ballon descendre doucement vers le fond des filets, Eric Durand le portier bastiais mystifié et tout un stade outragé….

Exfiltrés en fourgon de CRS

Sur le moment, avouons que la joie est bien contrecarrée par l’angoisse et la peur. La fin de match est tendue, houleuse, ambiance de corrida et Bernard Lama sort un penalty en toute fin de match. Le PSG va gagner à Furiani, le PSG va le faire, le PSG va assurer sa place en C1 mais le PSG va fâcher très fort la populace de Furiani. Bastia mettra un but sur pénalty anecdotique à l’ultime seconde mais le peuple turchini est déjà dehors à attaquer les gendarmes, à essayer de caillasser notre tribune.

Émeute, bombes agricoles, lacrymos, c’est l’apocalypse dehors avec on ne sait combien de types en bas de notre coin de tribune à vouloir nous faire la peau. On sait que l’on ne pourra pas rentrer avec l’avion des joueurs, c’est l’angoisse, il va se passer du temps avant que nous puissions quitter le stade, le temps que les forces de l’ordre continentales ne matent la colère des Corses. Beaucoup de temps… Alors certes dans un décor de carte postale mais on a eu le temps de bien avoir peur. Sortir à minuit pour un match à 17h, c’est assez inédit. Les Lama, Yanovski, Rabesendratana, Muratti and co étaient déjà dans l’avion à jouer à la belotte ou à se gratter les couilles que nous étions toujours bloqués dans Furiani, plus à se demander comment on va sortir de ce traquenard que de savoir si on a envie de jouer le Milan AC, Manchester United ou le Bayern en coupe d’Europe des clubs champions la saison suivante.

Bref on ne chante pas « on vient, on gagne et on s’en va » …

Ces moments au stade resteront uniques, avec son flot de nervosité, de tension, de peur, de fierté aussi. Notre petite troupe parisienne sera exfiltrée à minuit en fourgon de CRS jusqu’à une plage à quelques kilomètres du stade, au sud, à l’opposé de Bastia. Non loin d’une caserne où on nous a fait comprendre qu’il n’était pas question de venir demander de l’aide, car les gendarmes étaient à cran suite à de nombreuses fusillades sur les murs de ladite caserne.

On passera la nuit en mode projet blairwitch, baignade de rêve le lendemain matin, 3h de marche pour retourner au port de Bastia, où, ironie de l’histoire, certains autochtones salueront la belle victoire du PSG et la courageuse présence de ses ultras. On ne se sentira en sécurité néanmoins qu’une fois le ferry parti en mer Thyrénéene, heureux et fiers d’avoir représenté Paris et se léchant les babines à penser aux futurs déplacements en Ligue des Champions la saison suivante, et surtout ravis de pouvoir enfin se mettre de la Biafine.

Une victoire mythique à la fin d’une saison où le Paris SG aura surpris, se mêlant à la course au titre jusqu’à la défaite à Louis 2 à Monaco en janvier (avec un rouge de Laurent Robert, docteur Jekyll et mister Hyde) alors qu’on n’attendait rien de ce PSG de Bergeroo ayant joué quasi le maintien (ah le fameux 4 mai 91) la saison précédente. Bien entendu, la saison suivante, avec beaucoup d’ambition, ce fut nouvel accident industriel avec l’équipe qui se saborde à Sedan et le limogeage de Bergeroo et le retour de ce bon vieux Luis Fernandez qui n’apportera pas grand-chose en plus si ce n’est un master class tactique (on rigole) au stade du Riazor à la Corogne.


Pour cette case 18 du calendrier de l’Avent PSG, Étienne Basso souffle les bougies d’un match devenu légendaire. Le 18 décembre 2008, il y a 13 ans jour pour jour, le PSG affrontait Twente, et réservait à ses supporters un scénario dont seul le club de la capitale a le secret.

Noël, c’est l’occasion pour de nombreuses familles de se réunir. Parfait pour aller assister à un énième match entre frères que je voyais une fois tous les deux ans. Je lui ai demandé ce dont il se souvient de ce match et ses réponses sont retranscrites ici en citation. Une chose est sûre, on ne s’attendait pas à vivre un match légendaire au Parc ce soirlà.

En ce 18 décembre 2008, PSG joue sa dernière chance de qualification pour cet ultime match de poule en coupe de l’UEFA. À cette époque, pas de matchs retour et 5 équipes par groupe : Manchester City, tout fraîchement racheté par un fonds d’investissement D’Abu Dhabi et entraîné par Roberto Mancini. Le Schalke 04 de Manuel Neuer, 3e de Bundesliga et quart-finaliste de la précédente Ligue des Champions. Le    Racing Santander et le FC Twente, deux clubs dont j’ignorais l’existence avant le tirage au sort.

Les Qataris n’arriveront dans la capitale que deux saisons plus tard. Les Parisiens sortent de deux années catastrophiques à jouer le maintien, à valser les entraîneurs et présidents et finira 16e du dernier championnat. Ils se qualifient en coupe d’Europe par la plus petite des portes qu’il puisse exister : un penalty litigieux de dernière minute en coupe de la ligue tiré par Bernard Mendy à 2km/h. Le Paris SG fera néanmoins un mercato encourageant pour compenser les départs de plusieurs cadres comme Pauleta, Yepes, Mendy ou Alonzo. Il voit plus grand et arrive à mettre la main sur Giuly, Makelelé, Sessegnon, Kezman pour faire un très bon début de saison puisqu’à l’approche de la trêve hivernale il occupe la 4e place de L1, avec notamment des victoires contre Bordeaux, Marseille et Lyon.

Un contexte un peu particulier (on avait déjà l’habitude avec l’UEFA)

Non seulement la victoire est impérative, mais il faut en plus que Paris fasse un meilleur résultat que Santander, qui lui reçoit Manchester City. Alors que les deux matchs se jouent logiquement dans la même soirée, Manchester City et Twente ont déjà validé leur billet pour les 16e. Ça ne va cependant pas empêcher les supporters extérieurs de venir nombreux.

L’ambiance sera d’ailleurs très anglaise dans Paris et aux abords du Parc des Princes. Nous arrivons devant l’entrée du Parc pile quand le cortège hollandais est escorté sous nos yeux en tribune F. Après avoir constaté le stéréotype du grand Hollandais aux cheveux blonds, on prend la direction d’Auteuil. On sent la tension et je prends conscience de l’importance du match que je sens bien. Le frangin, lui, n’a pas le même feeling :

« Déjà, avant le match, du mouvement devant le Parc avec les supps hollandais… qu’on a vu d’assez près d’ailleurs et qui étaient prêts à la fight. Et là je me suis dit, tiens, eux sont prêts, chauds, motivés. Pourquoi pas moi ? J’ai peut-être loupé un évènement, un critère m’a échappé, ou bien c’est tout simplement mon sentiment de supp blasé, comparé à un match qu’eux considèrent important ? Mais il me semble qu’eux sont déjà qualifiés… nous on joue la 3e place contre les Espagnols à distance qui reçoivent City. »

Quant à la qualification, il n’est pas très confiant non plus :

« Je me souviens qu’on se faisait tellement chier devant les matches que je n’y croyais pas. Par exemple je n’avais pas le même pressentiment, la même « odeur » qu’avant le match que contre le Steaua… Là on savait qu’il allait se passer quelque chose. Twente je m’attendais vraiment à un match moyen, et qu’on se fasse sortir dans l’anonymat face à un adversaire quelconque. »

Le Match

On commence par les compos :

PARIS S.G. : Landreau – Ceara, Camara (Chantôme 63), Sakho, Armand – Clement, Bourillon, Pancrate (Giuly 72), Sessegnon (Hoarau 63) – Luyindula, Kezman. Ent : Le Guen

TWENTE : Boschker – Stam (Wellenberg 70), Douglas, Wielaert, Braafheid – Denneboom, Brama, Janssen (Perez 75), Arnautovic, Huysegems – Tioté. Ent : Mac Laren

Bien que l’adversaire soit en effet déjà qualifié, on comprend alors plutôt rapidement qu’ils vont vouloir jouer le coup à fond ; Equipe A et 1300 supporters un jour ouvré. En tribune, on remarque plusieurs supporters avec des radios ou le tout nouveau smartphone d’Apple, sorti quelques mois plus tôt. Les rares propriétaires de ces téléphones feront constamment la liaison avec le match de Santander.

Dès l’entame du match, on sent les Parisiens sereins, en jambes et agressifs sur le ballon. Peguy Luyindula profite de son pressing haut et d’une erreur défensive pour propulser le ballon dans les filets adverses du côté Boulogne. À 1-0 à la 8e minute, l’équipe est bien en place.

© Icon Sport

« On est à Auteuil, bonne ambiance (comme d’hab) mais rien d’extraordinaire non plus. Le match part bien puisqu’on marque vite et on mène facilement. Ce qui donne finalement le pire sentiment sur terre : l’espoir. on se dit que c’est possible. »

Puis à la 20e minute, notre opérateur radio Apple nous ramène à la réalité car Santander a aussi ouvert le score. La pression monte. Twente aura quelques occasions qui passeront pas loin des poteaux de Landreau, mais c’est Sessegnon qui double la mise à la 23e avec un beau contrôle/une-deux/tir croisé petit-filet. Paris prend l’avantage dans la course à la qualification jusqu’au deuxième but de Santander 7 minutes plus tard.

Là on sent qu’ils vont nous faire chier encore longtemps et qu’ils vont pas lâcher le morceau.

Mi-Temps : 2-0 sur les deux matchs. C’est pas grave, on se rassoit et on se détend en fumant une clope devant ce bon vieux trophée Wanadoo. Je reste serein mais je ne m’attendais pas à ce que Manchester City soit dominé. Une chose est sûre, tout le monde est tendu et nous sommes en train d’assister à un match qui s’annonce fou. Est-ce qu’on va rentrer chez nous dépités, ou avec la qualification ?

Le jeu reprend comme on l’a laissé, et PSG obtient un péno, côté Auteuil désormais. Le Parc exulte et je suis content de voir Kezman s’avancer pour le tirer. Il avait été décevant au vu de son salaire et son statut d’ancien joueur de Chelsea. On sait comment ça se passe à Paris, s’il le met au fond il peut reprendre de la confiance. Je vous laisse imaginer la tension à ce moment… mais c’est mal tiré et repoussé par le gardien. C’est pas possible, on est maudit ! Et là, le coup de massue sur la tête, on apprend que Santander a triplé la mise. Le frérot est dépité :

«Je me souviens que je me dis : mission impossible. Faut marquer 2 fois et on n’a pas d’occasions franches, on peut même prendre un but ou deux. Donc je ne vois pas comment on peut s’en sortir. »

Je lui réponds que non, que vu l’emballement du match moi j’y crois encore.

Péguy Luyindula rentre dans l’Histoire du Paris SG

Puis à la 84e qui de mieux pour marquer ce 3e but que Mateja Kezman ! Il se rachète en reprenant un long centre de Ceara du bout du pied. Il en manque plus qu’un et le public va pousser. À 20 ans, je n’ai jamais vu le Parc comme ça, même contre Marseille. C’est une osmose, tous les supporters gardent les yeux fixés sur le terrain, la boule au ventre, en gueulant sur chaque ballon touché. ON VA LE FAIRE PUTAIN, on peut plus passer à côté

Et ce qui devait arriver arriva seulement 2 minutes plus tard, alors que nous venions de finir de célébrer le 3e but. Mon corps est encore bouillant quand je vois un de nos joueurs sur le côté envoyer un long ballon en avant. À ce moment je croyais que Giuly voulait juste dégager vers le but adverse, mais voilà qu’en regardant devant moi je m’aperçois que le gardien reste sur ses pas. Il ne sort pas ! Le ballon en profondeur est en fait millimétré pour Luyindula à la lutte avec le défenseur adverse.

© Icon Sport

Le Parc hurle de toute ses forces car on dirait bien que le Parisien va être le premier dessus ! Je n’oublierai jamais cette fraction de seconde où tout le Parc retient sa respiration lorsque notre numéro 8 choisit de dribbler le gardien au lieu de tirer. Qu’estce qu’il fait ?… Pourquoi il tire pas …. !? Luyindula fera en fait une feinte de frappe osée, et marquera le but de la qualification.

« Evidemment le Parc explose, on se retrouve quelques rangs plus bas, non sans égratignures… Je me souviens des joueurs et du banc qui sont entassés sous Auteuil/G… que le Parc retrouve le temps de 10/15 minutes la saveur d’une victoire historique en coupe d’Europe. »

Peguy Luyindula vient d’entrer dans l’histoire du Paris Saint-Germain comme Amara Diané quelques mois plus tôt ! Il conclut cette soirée de malade et impose à Santander la qualification Parisienne. Il ne peut plus rien nous arriver désormais. L’arbitre siffle la fin du match, PSG s’impose 4-0 et Manchester City marquera même un petit but en toute fin de match (90e). Le club ira d’ailleurs jusqu’en 1/4 de finale de l’UEFA.

« Pour moi ce qui fait que cette soirée est spéciale, ce sont les changements de sentiments, le scenario : d’abord, je n’y crois pas, puis vient l’espoir, puis je pense que ce n’est finalement pas possible et qu’on ne le fera pas. Puis la délivrance, coup sur coup en fin de match. Et c’est aussi finalement le seul match à grosses sensations qu’on a fait ensemble pendant une période où on était abonnés et très actifs, mais où ces sensations, ces feelings se faisaient rares ! Donc il me reste en mémoire pour ça, le scenario, mais aussi et surtout un moment magique qu’on a pu partager. »

Merci Paris.


Case après case, le calendrier de l’Avent PSG dévoile de nouvelles facettes du club de la Capitale. Des matches glorieux, des joueurs légendaires, des victoires quelconques mais devenues iconiques pour l’un d’entre nous… Manquait l’évocation de la face plus sombre du football moderne, avec tout ce qu’elle comporte de plus ambiguë. C’est Rabiot Jacob qui s’y colle, avec le fameux PSG – Galatasaray.

À mon tour d’étrenner ce calendrier de l’avent du PSG by Virage. J’ai choisi de raconter un souvenir pas si heureux, malgré la victoire et qui me fera prendre conscience d’un principe bien ancré depuis dans mon esprit : la passion rend con.

Nous sommes le 13 mars 2001, j’ai 14 ans. Ce mardi soir, j’ai la permission de sortie parentale pour assouvir ma (jeune) passion pour le PSG. Je ne suis pas allé souvent au stade, peut être deux ou trois fois. Jamais seul, toujours accompagné par ma famille (mon cousin, abonné à côté des tribunes Boulogne).

Ce soir-là, il a décidé d’emmener avec lui ses trois cousins pour leur premier match de Ligue des Champions, cette Ligue des Champions pour laquelle le PSG s’est qualifié en finissant deuxième la saison d’avant mais dont il est déjà éliminé avant même de jouer ce match sans enjeu.

Le Parc, je l’aime et peu importe le nombre de fois où j’y suis allé, chaque nouvelle visite est comme un dépucelage. L’entrée par l’extérieur où j’entends ce bruit masqué, la déambulation dans les couloirs où le bruit du terrain me parvient et soudain l’entrée dans la tribune pour prendre en pleine face le bruit, la joie, le froid aussi. Cette sensation indicible de se sentir chez soi quand on rentre dans cet espace qui fleure (à l’époque) les substances illicites.

Auteuil et Boulogne électrifiés

Dès notre arrivée ce soir-là, outre les sensations habituelles et le plaisir de voir des supporters donner de la voix alors même que le match n’a pas commencé, je remarque en face une tribune inhabituelle pour moi. D’habitude, les visiteurs au Parc se font discret ou ne chantent que lorsque leur équipe marque. Pas cette fois-ci. En face de moi, le parcage rugit, chante, affiche banderoles et fumigènes, je sens d’entrée que ça va être spécial. Et je m’en réjouis. J’ai hâte de voir ce duel de supporters entre les Turcs et la tribune voisine d’Auteuil. Même Boulogne, pourtant loin, semble impatiente de participer à la bataille.

Le match commence et quel début ! Dès la troisième minute, Christian ouvre la marque et fait chavirer l’ambiance du Parc. Bien que nous sachant déjà éliminés, nous ne boudons pas notre plaisir de dominer rageusement une équipe qualifiée pour le tour suivant. Le PSG confirme son bon début de match en doublant la mise par Christian à nouveau. 30 minutes de jeu, le PSG a fait le break.

Si sur le terrain tout se passe bien, en tribune, l’ambiance commence doucement à changer. Les chants ont fait place aux insultes, Boulogne et Auteuil sont électrifiés et l’atmosphère englobe tout le Parc, jusque dans notre tribune. Pour autant, les supporters turcs ne se sont pas calmés et enchaînent les chants, les cris et les démonstrations d’agressivité.

Quand la soirée sombre dans l’horreur

Comme beaucoup au Parc, je me trouve galvanisé par le score et je ressens cette supériorité sur nos adversaires du soir, y compris en tribune. Je chante plus fort que jamais et je sens monter en moi une agressivité, un bouillonnement en réaction à ces tensions. Je l’ai dit : la passion rend con.

La deuxième période a commencé, sous une atmosphère toujours plus tendue. Les Turcs provoquent les supporters d’Auteuil qui font dangereusement tanguer la misérable grille de sécurité les séparant des Stambouliotes. Soudain, un fumigène est projeté depuis la tribune des visiteurs sur le terrain. Dans mes souvenirs, c’est le point de bascule. Je me souviens m’être levé scandalisé et de hurler ma haine avant de me faire rasseoir, presque de force, par mon cousin qui, lui, a senti le vent tourner et l’atmosphère changer. Il me recommande de me faire discret et de me calmer, au cas où des supporters turcs seraient dans notre tribune.

Paris au mois de Mars 2001 © Icon Sport

Finalement, en face, les grilles ont fini par céder et la soirée sombre dans l’horreur. Les supporters d’Auteuil ont envahi le parcage visiteur et chacun se met sur la tronche à coup de ceintures et de barre de fer. Je vois ça de loin, hypnotisé, médusé. J’entends, de loin, comme dans un rêve, la tribune Boulogne chanter et je mets quelques secondes à distinguer les paroles : « Auteuil, tuez-les ! ». Ça y est, on a basculé. Ce n’est plus du foot, c’est une bataille rangée.

« C’est pas ça, le foot. C’est pas ça, le foot » répète, comme un mantra, mon cousin à mon petit frère de dix ans dont c’est le premier match au Parc. Il a raison bien sûr, mais tort à la fois. Le foot, c’est l’humain, l’humain c’est aussi la passion, la violence, l’exacerbation de nos sentiments les plus primitifs, causés par des couleurs sur un maillot. La passion peut mener à la haine, oui, la passion rend con.

Le match est arrêté, nous nous exfiltrons nous-mêmes du Parc, pour échapper à cette violence. Dans la voiture, mon cousin a mis la radio et on entendra, quelques minutes après notre départ, que le match a repris. Je me souviens avoir dit « Eh, ça a repris ! On y retourne ? ». Malgré tout ce que j’avais vu, la passion du Parc était plus forte et j’ai sincèrement voulu y retourner.

Définitivement, la passion rend con.


Quelle meilleure couleur que le rouge, pour un calendrier de l’Avent ? Et parce que le nôtre présente un match des Parisiens chaque jour, ce rouge sera celui du club de Liverpool. Arnaud Ramsay, journaliste de sport et biographe revit pour nous la demi-finale de Coupe d’Europe de 1997, en tribune de presse.

Certains collectionnent les blasons (héraldiste), d’autres les coquillages (conchyophile) ou bien les porte-clés (copocléphile). Moi, ce sont les tickets de matches du PSG, du moins ceux auxquels j’ai assisté. Ils sont rangés en vrac dans divers sacs noir éparpillés au fond de la cave. Pas sûr que cette curiosité fétichiste porte un nom.

Je n’ai hélas pas eu la présence d’esprit de conserver le tout premier du premier jour du reste de ma vie. Une saine idée parentale. J’avais dix ans, j’agitais une feuille blanche sur laquelle j’avais écrit « Allez Baratelli », persuadé que mon héros me repèrerait dans les gradins. En face, le Barcelone de Bernd Schuster et de leur jeune recrue argentine, Diego Maradona. Côté Paris, Mous Dahleb, Jean-Marc Pilorget, Dominique Bathenay, Dominique Rocheteau, Luis Fernandez, Nambatingue Toko. J’apprends la défaite : 4-1, certes en amical.

Un baptême au goût de virus pour lequel il n’existe pas de vaccin. Je me suis tout de suite senti chez moi au Parc des Princes. Du plus beau stade du monde j’aime tout : le nom, l’architecture, l’odeur, le bruit et la fureur. J’y suis allé des dizaines, des dizaines et des dizaines de fois. Dans toutes les tribunes. Pour toutes les compétitions. Par toutes les températures. De toute façon, on y est bien installé partout.

Welcome to the legendary fans

Journaliste, j’ai commencé à fréquenter la tribune de presse. Un autre regard, un autre monde. Plus besoin de payer son billet ni de trop faire la queue : quel luxe. Malgré la carte de presse, se faire accréditer, lorsqu’on n’était pas en CDI, relevait du parcours du combattant, surtout quand on avait le défaut d’être jeune. Jean-Paul Oudot, le syndic de presse, grand ancien de L’Équipe tombé à Furiani et relevé avec des séquelles, n’était pas du genre facile à convaincre.

J’ai insisté, m’appuyant sur une récente interview de Raí, dont je venais de publier le portrait dans Télérama ; une des rares fois où le magazine culturel réservait deux pages au ballon ; Raí le valait bien. « Ah bon, Télérama parle de foot maintenant ? Première nouvelle. En plus, t’es pigiste… », a-t-il grogné. Bref, pas gagné. Mais mes lamentations ont fini par fonctionner. À moi la tribune réservée aux médias, ce jeudi 10 avril 1997, pour la demi-finale aller de feu la Coupe des Vainqueurs de Coupe, celle remportée la saison dernière. Je suis en joie. En plus, je ne bosse pas en direct, j’ai juste à profiter du spectacle, de l’ambiance.

Un peu plus de 35 000 spectateurs contre Liverpool. Le Parc, coloré, est respectueux : « Welcome to the legendary fans », est-il écrit sur une banderole, hommage aux 4000 Anglais ayant traversé la Manche. Bon, ok, ce ne sont pas les Reds les plus flamboyants de l’histoire. Mais, sur la pelouse, y’a quand même Steve McManaman et Robbie Fowler, ah ouais, et aussi Jamie Redknapp, John Barnes, Stan Collymore. Costaud. Rigolards à l’échauffement, hyper détendus, ils s’y voient déjà, d’ailleurs.

Sur le banc du PSG, bye bye Luis Fernandez, bonjour Ricardo et Joël Bats. Bats, je l’adorais. Alors gardien, il m’avait donné son short après que, pour le petit journal que je rédigeais en solo à la machine à écrire, j’avais insisté pour l’interviewer. À l’époque, les matins des matches au Parc, les joueurs déposaient leur voiture au parking du stade et grimpaient dans le bus stationné en face pour la mise au vert : ils étaient tous accessibles pour un autographe ou une photo. Bats, aussi timide que moi, avait fini par prendre ma liste de questions et m’avait répondu une longue lettre par courrier, que j’ai conservé.

Paris en totale maîtrise

La partie commence fort. Patrice Loko marque mais le but est refusé pour un hors-jeu qui n’existe pas. Pas grave : on joue depuis à peine dix minutes quand Leonardo, qui n’a pas planté depuis six mois, ouvre le score et s’en va communier avec ses partenaires et le public. Et dire que le Brésilien partira dans quatre mois. Pas un très joli but mais on s’en fout, on prend. Puis Benoît Cauet, avant la mi-temps, exploite une bévue aérienne de David James, habitué du genre. Je jubile. En tribune de presse, on ne doit pas trop exprimer sa joie. L’objectivité n’existe pas mais au moins donner l’illusion… 2-0 à la pause en demi-finale : on est bien, tintin. La maîtrise est totale. Le public est plus qu’acteur du match : sa ferveur transcende les joueurs.

Leonardo après son but © Icon Sport

Ne pas flancher. Tenir, et pourquoi pas en planter un troisième pour bien enfoncer le cou rouge des British avant le retour. Jérôme Leroy m’écoute : à six minutes de la fin, bien servi par Cyrille Pouget, tout juste entré à la place de Loko, il plante joliment. Bernard Allou remplace un très bon Leroy pour conserver le score. Liverpool et son maillot rouge floqué Carlsberg n’ont pas existé. Bernard Lama a passé une soirée tranquille. Raí, comme d’hab, a été majestueux. Quelle belle soirée. Je suis fier. Fier et heureux. J’habite Boulogne, je rentre à pied en sifflotant. Sur mon nuage. Paris est presque en finale.

Ce sera fait quinze jours plus tard, en souffrant : Liverpool inscrit un deuxième but à dix minutes de la fin. Anfield gronde, pousse, hurle en espérant provoquer les prolongations. L’atmosphère est irrespirable devant l’écran. Lama, Le Guen, Ngotty, Algerino & co tiennent bon. Et hop, en route pour une deuxième finale de C2 d’affilée. À Rotterdam, mi-mai, le PSG cédera face à Barcelone sur un penalty de Ronaldo. Un match, celui-là, que j’ai pratiquement oublié.


Bonbon du jour bonjour ! Parce que rayon fêtes de noël, il faut bien reconnaître aux Teutons une certaine expertise, le Bayern devait forcément intervenir à un moment ou à un autre dans ce Calendrier de l’Avent Virage. C’est Grégory Protche qui a sorti la cannelle, les emporte pièce en forme d’étoile et qui s’est mis en cuisine, pour vous préparer un petit Bayern – PSG en mode pain d’épices.

Silence sur l’Allianz. Coronavirus rules ! Mon Neymarien, Oudima, dans son fauteuil de beau-fils unique, vient d’avoir 18 ans. Et de choper le covid – mais on ne le sait pas encore à cette heure (19 h 55). PSG se déplace. Nous recevons : les fathers and sons Reijasse – Jérôme et Jules, alors U10 – et Cécé – Jean et Victor, qui boxe lui en U16.

Jérôme, Jean et moi sommes les plus vieux. Tout le temps. Et les plus chiants. Humours douteux. Snobs. Provocateurs. Castrateurs. Vexants – donc susceptibles. Champions du monde de sabrage de conducteurs durant les podcasts. Sweet Dick Willie et ses copains, dans Do the right thing. Ceux qui répondent « Boycotte plutôt ton coiffeur ! » au jeune pétitionnaire anti-Zemmour.

Notre excuse : nous sommes pareils quand nous ne sommes que trois ou en solo chacun chez soi – les soirs où on se réunit, deux de nos compagnes retrouvent le sourire. En vrai, je suis presque « soulagé » d’accueillir : nous sommes en plein travaux de toiture depuis février et ça se passe – naturellement – très mal. Malfaçons, bâches de protection, poussière, sciure et ambiance électrique at home. Le match va nous détendre !

On toque. « Police alleuhmandeuh ! » (avec l’accent boche de Roger Carel). Je vous présente Jérôme.

Sur le pas de la porte, Jean, pour le faire bisquer, défend Jeff Bezos. Jérôme se tourne vers Vic et, très Paul Meurisse, lâche : « Tu sais que tu peux changer de père, il existe des procédures. Moi je t’adopte pour te sauver des griffes de ce type ! » Jules, Vic et Oudima rient aux larmes. Les deux darons se réconcilient sur le dos de notre façade rafraîchie : « C’est une maison rose… ».

On file à la cuisine fumer et dépiauter d’avance le cadavre de l’inéluctable défaite. Notre indigence tactique nous condamne. Jérôme est formel. L’absence de Levandowski rendra à peine l’addition moins douloureuse. Profondément enthousiaste, optimiste et espérant, il abat la carte lose, pour exorciser en verbalisant. Aussi – il nous connaît – pour nous amener en réponse à storyteller, à improviser comme des jazzeux, sur une grille de narration aussi lyrique, donc quasi ridicule, que favorable… qui l’apaisera quelques secondes.

La box tousse. Une fois, deux, trois…

Ce dont Jean et moi, produits d’enfantines lectures mythologiques (les Année du football de Jacques Thibert), tapissées de faits d’armes wagnériens, d’exploits fiévreux et de renversements insensés, nous acquittons d’autant plus volontiers qu’à l’opposé de Jérôme : au fond de nous, depuis le début, nous n’y croyons plus. Ou alors… contre toute logique ! PSG ne fonctionnant qu’aux conditions aberrantes ! Équipe de coupe, équipe de coups. Ad lib.

Le match commence. Écran noir. La box s’éteint ! Oudima la relance. Les boîtes à câbles mettent autant de temps à démarrer que les télés d’antan. L’image revient. Hein !? Quoi !? Nos téléphones crépitent des messages des Viragiens sur le groupe WhatsApp. Jérôme hurle « Kiki a marqué ! », au moment où il apparaît à l’écran. On attendra pour revoir l’arconada inimaginable de Neuer.

Si ça c’est pas un signe !

© Icon Sport

À nouveau, la box tousse. Une fois. Deux. Trois. À chaque coup, dans ma direction, en un culpabilisant chœur de teens de feuilletons ricains : « OH ! NOOOOOOOON ! » Ponctué d’un éclat de rire général. Tout sera donc dingue ce soir ! Full moon ? Les fameuses conditions aberrantes.

28e, la plus belle passe décisive de Neymar depuis qu’il est à Paris est pour Marqui. La box est restée allumée. Another sign ! 0 – 2 ! Sauf que deux minutes plus tard Marqui se blesse… Les gamins accusent le coup.

Cause-conséquence à la parisienne : qui marque de la tête, oublié par Danilo ?

– ÉVIDEMMENT CHOUPO ! POURQUOI N’Y A-T-ON PAS PENSÉ AVANT ? ON AURAIT DÛ ÊTRE DEUX FOIS PLUS VIGILANTS… TU VOIS, JULES, C’EST ÇA PARIS !

Les canons du Bayern navaronnent en vain un Navas en état de grâce.

« Tous nos joueurs ont le même regard ».

Un des cinq autres l’a dit, mais qui ?

Et la box de s’éteindre, de se rallumer. Jusqu’à la mi-temps.

Il ne pouvait plus rien nous arriver

Oudima descend son ordi pour le brancher, en hdmi, à la télé. On était trop fébriles pendant la première période pour penser à cette solution… On en rit. Tout fait rire ce soir. Sauf que n° 2 : RMC refuse de diffuser sur cet ordi… HEIN !? Oui, j’ai casqué régulièrement, sinon on ne l’aurait pas sur la télé via la box ! Ouais mais, justement, sur la box, hein… Je transpire sur le mien d’ordi, vérifie dans mes mails… c’était juste une ponctuelle opération cadeau accompagnant l’abonnement télé… Je ne suis plus abonné sur internet ! On n’a que la box. Angoisse. Honte. Dans le salon, ils en sont à imaginer tracer chez Jérôme en bagnole. Les joueurs reviennent. Trop tard. Le film continue.

J’essaie sur l’ordi d’Oudima de trouver un lien de stream. Les « OH ! NOOOOOOOON ! » et les rires retentissent à chaque caprice de la box. On est tous pris dans le film. Ça y est, j’en ai un ! On branche sur la télé. Image dégueulasse, alors avec la neige sur le terrain. La tête victorieuse de Müller nous abat. 2 – 2. D’autant que nous avons un nouveau souci : le stream étant en léger différé, on a reçu des notifs WhatsApp avant de voir le but ! Double pain. En communion parfaite, nous éteignons nos téléphones pour vivre cette Bérézina dans les conditions de notre direct. Le stream à son tour merde et se fige. Une fois. Deux.

« OH ! NOOOOOOOON ! » Une fois. Deux.

Au nom d’un scientisme farfelu, selon lequel ce repos forcé l’aurait requinquée nous relançons la box ! Miracle ! Et même double miracle ! L’image revient juste après le deuxième but de Kylian… 2 – 3 ! Il ne pouvait plus rien nous arriver.

Ni à nos joueurs, ni à nous, ni à la box.

Épilogue. Lendemain. Les gens d’SFR-RMC m’expliquent. Un défaut de fabrication : en raison de l’électricité statique, les grilles d’aération des box retiennent la poussière environnante, qui s’accumule dessus jusqu’à empêcher le refroidissement… et déclencher l’extinction de sécurité. Un coup d’aspirateur et la box est comme neuve. Oudima, pas bien depuis la veille, va se faire tester. Positif (quatre jours de lit). Je préviens Jérôme et Jean. Qui se font tester avec Jules et Vic. Négatifs. Ultimes miracles.


Un jour, un match, une autrice. Parce que la participation au Calendrier de l’Avent Virage n’est pas réservée aux garçons, après Pia Clemens pour le jour 9, aujourd’hui c’est Mel Champou qui arrête de buller et nous livre son échantillon Rouge et Bleu. Accrochez-vous, on part en Bretagne, et ça défrise.

À force, je me suis dit que j’étais le chat noir. Au début des années 2000, j’ai enchaîné quelques déplacements, tous plus piteux les uns que les autres.

J’ai vu Le Havre, pour un match nul nul nul. Je suis allée à Metz, me faire traiter de « mange-merde » par un lorrain alcoolique (pléonasme ?), et concéder une défaite 1-0. J’ai visité Guingamp, on a perdu et un vieux m’a mis un coup de canne en tribunes. Mon frère et ses potes ont failli se battre avec la bande d’octogénaires bretons et alcooliques assis derrière nous (oui je les attirais, et ça n’a pas changé je vous rassure). Même quand je suis allée au Stade de France pour une finale de coupe de la Ligue, le PSG a réussi à se faire battre par Gueugnon.

À force, de petite sœur mascotte, je me voyais lentement reléguée au rang de porte-poisse, voire d’indésirable.

Faut dire que ces matches à l’extérieur, déjà de base c’était toujours un peu tendu. Parce que le grand frère était pas très sociable, on faisait ça en indépendants. Ça claque hein ? En fait c’est juste un bien grand mot pour dire que vu qu’on était pas cartés, on achetait nos places en dehors du parcage parisien, et on partait en Super5 comme des gros touristes. Des heures à écouter la K7 des Stones que le grand avait coincée dans l’auto-radio, bien joué, et à refaire le monde à 2, 3, 4 ou 5 (oui on tenait à 3 sur la banquette, c’était le bon temps, avant qu’on signe tous au FC Asado).

Pour ce Rennes-PSG, en janvier 2002, j’étais donc dans mes petits souliers. Une demi-douzaine de déplacements, et zéro victoire. Des sandwiches triangles, oui, des chiottes d’autoroute revenus à la vie sauvage, oui, des humiliations, frustrations, on-en-a-plein-le fion, OUI, mais des victoires, NON.

Paris, Paris, on t’enc…

Ce samedi de janvier, une fois arrivés Route de Lorient, quand le pote du pote de mon frère nous a tendu les tickets et qu’on s’est retrouvés en plein virage, on a vite compris qu’on était de la breizh. Pile dans la tribune des furieux. Le « vis ma vie de cassos », grandeur nature.

Alors déjà, moi, pour vous expliquer, de base je suis assez lâche. Genre quand il y a des emmerdes, je laisse les autres passer devant, et une fois qu’ils se sont fait péter la gueule, éventuellement je leur tamponne le front avec un mouchoir. Si j’en ai d’avance et si la victime ne saigne pas trop, parce que après pour ravoir les fringues merci bien. Donc on a rangé les maillots PSG, et une fois perdue au milieux des mangeurs de galettes, autant vous dire que je faisais autant la maligne qu’une hôtesse dans une séance de dédicaces du bouquin d’un greffé du foie.

Et pourtant c’était tentant hein ! Avant match, la mascotte fait le tour du terrain : un mec déguisé en paquet géant de farine de sarrasin. Je vous jure que c’est vrai. Mais j’ai fermé ma gueule. Pas folle la guêpe. J’avais envie hein. Bah j’ai rien dit.

À l’annonce des équipes, quand tous les Parisiens se sont fait prêter les uns après les autres des activités sexuelles que l’Église et les vendeurs de tabourets condamnent, la même : j’ai BIEN fermé ma gueule.

Letizi ? Ah bah oui, enclumé oui. El Karkouri, Pochettino, Potillon, Heinze ? Que des emplumés, chuis d’accord moi, youhou. Cristobal, Dehu, Arteta, Ronaldinho, PAREIL, on vous enchule tous, et au lait Ribot s’il le faut (après enquête, c’est genre du lait qu’une autre personne a déjà à moitié digéré avant vous, c’est breton, faut pas chercher). Et même pour Alex et Aloisio, notre petit duo d’attaquants Brésiliens, les demoiselles de Rochefao-Paulo, j’ai rien dit. Voilà, voilà. C’est long hein, onze joueurs finalement.

Un match en mode « poker face »

Sauf que déso mais pas déso, on a ouvert le score. Un coup-franc de Ronnie dans la lulu sa mère, 1-0, 20ème minute. Là, fermer sa grande bouche, je te jure ça devient compliqué. Et quand pile avant la mi-temps, Alex double la marque, juste devant nous, 2-0 merci bien, se retenir de hurler faut être moine bouddhiste ceinture noire minimum quatorzième dan pour le faire… Mais on l’a fait.

© DR

Oh mais la jubilation ma parole. Même Bruel en finale des championnats de Vegas avec un flush à l’ouverture dans la main il avait moins la pression que nous pour garder la poker face, sérieux. Genre on se regardait et on disait rien mais dans les yeux « YOUHOU SA RACE ON VA SE LES FAIRE ! » (oui on est assez vulgaire en langage zyeux dans la famille).

45 minutes à tirer. T’as fait je sais pas combien de galères, t’es en plein dans la zone rouge, tu tiens ta victoire, Luis il fait rentrer tous les défenseurs de la terre t’es en 8-1-1, et t’as QUARANTE-CINQ minutes à tirer. Les plus longues de ma vie. Vous laissez pas pipoter : attendre la péridurale le jour de ton accouchement, avec les contractions de la mort, bah à côté de ça c’est oualou.

Surtout quand Battles ou chaipluki marque en fin de match. 2-1 t’en peux plus. Et les locaux qui chantaient leur « galette – saucisse je t’aime » en boucle. Tu vas voir de quelle saucisse tu vas en manger des kilos mon gars…

Je crois que c’est là qu’on a craqué. C’était les arrêts de jeu. On gagnait. ENFIN ON GAGNAIT. Pire que ça : JE gagnais. Parce que zeuby y avait plus de modestie, de faut « rester lucide », ENFIN JE GAGNAIS.

Alors quand les Parisiens, à l’autre bout du stade ont chanté le « Ô Ville Lumière », on l’a repris.

C’était con, on s’est fait foutre dehors. Sens la chaleur, de notre coeuuuuureuuu. Je sais même pas comment on est sortis entiers, (voici notre faiiiirveur), mais alors qu’un steward du genre son blouson aurait pu servir de tente Quechua pour 4 nous « raccompagnait », ouais on l’a chanté. Quand nous marchons près de toi, dans cette quêteuuuh (quéquette).

Et bah c’était bon.


Le Calendrier de l’Avent du PSG en est à son treizième jour : eh oui, on a déjà dépassé la moitié de cette aventure ! Pour marquer cette étape symbolique, place à celui qui s’intéresse à TOUTE l’histoire du club parisien. Témoin et archiviste, statisticien et supporter, Michel Kollar aborde l’un des matches les plus célèbres des Rouge Bleu, seul club au monde capable de vous transformer une boulette en coup d’éclat.

Si le PSG-Real Madrid a marqué les esprits des supporters du PSG, par son apothéose exceptionnelle et le coup de boule de « Casque d’Or » Antoine Kombouaré, la remontée (sic) face au Steaua Bucarest en août 1997 reste pour moi LE moment magique au Parc des Princes.

Un joueur suspendu aligné à l’aller (le pauvre Laurent Fournier) pour un fax égaré, une défaite 0-3 sur tapis vert en Roumanie alors que les Parisiens s’étaient inclinés 2-3 : une crise presque normale pour nos Rouge et Bleu moqués par la France entière. « Une boulette à 70 patates ! », le prix d’une qualification pour la déjà lucrative Ligue des champions, titrait alors ironiquement le quotidien sportif préféré des fans du PSG…

Un fax, un marabout et Capitaine Raí

Mais ce 27 août 1997, un homme va changer la donne : capitaine Raí, qui a hérité du brassard six mois plus tôt, et qui va persuader tous les acteurs du club, des joueurs à la blanchisseuse, qu’un exploit est possible. Il réunit ses troupes et les motive comme jamais, sans oublier les supporters qui vont arriver en stade pleins d’espoirs et de certitudes malgré les circonstances.

Le Parc est en transe avant le match, et je me souviens de ce sentiment unique dans cette enceinte mythique dès mon arrivée en tribune. Une onde incroyable dans les travées, une forme de magnétisme, presque mystique, et cette certitude : il ne peut rien nous arriver, l’exploit est à portée de pieds.

Michel Denisot parlera bien plus tard d’un marabout qui aurait ensorcelé les joueurs de Bucarest pour expliquer cet exploit, mais ce succès, c’est le Parc et l’ambiance exceptionnelle qui vont le forger. Un sentiment que j’ai aussi connu quelques années plus tard en 2008, quand les Parisiens sont revenus de l’enfer face à Saint-Étienne pour remporter un point ô combien précieux et sauver le club d’un humiliante relégation en Ligue 2, validée huit jours plus tard par un succès à Sochaux, LE déplacement que je n’oublierai jamais…

© DR

Les premières 45 minutes face à Bucarest sont incroyables face à des Roumains qui semblaient déjà tétanisés par l’enjeu, mais surtout par l’ambiance lors de l’échauffement. Un premier but sur penalty de Raí, 2-0 (encore Raí), 3-0 (Marco Simmonneeee), jusqu’à cette relance magique de la ligne de but initiée par Paul Le Guen, un relais tout en finesse de Leonardo et cette course éperdue de Florian Maurice vers les buts, accompagnée à la télévision par un désormais classique « oui mon petit » de l’inégalable monsieur Thierry Roland.

4-0 zéro à la pause et la qualif déjà en poche, quatre passes décisives au final pour Leonardo, avec une dernière offrande en seconde période pour son ami Raí, et un succès 5-0 pour conclure une folle soirée.

Michel Denisot rendra alors hommage au 12ème homme : « Il a été plus grand que jamais. Merci au public, le meilleur de France ! » Sur cette soirée où tout le Parc a poussé, difficile de le contredire !

Mais Paris restera toujours Paris : malgré la volonté et les cris d’amour des supporters, Leonardo quitte officiellement le club le lendemain de cet exploit, direction le Milan AC. L’histoire retiendra que ce départ vers la Lombardie est l’une des rares plus-values du PSG sur le marché des transferts…

Paris a déjà son remplaçant : la locomotive de Porto, le blond brésilien Edmilson… qui deviendra l’un des plus gros bides de notre histoire ! 24 ans heures de répit et notre PSG redevient ce club qu’on aime et déteste sans compter… Ici c’est (à jamais) Paris !


Le calendrier de l’Avent spécial Virage PSG c’est chaque matin, du 1er au 25 décembre, un nouvel article, d’un nouvel auteur, qui vous fera (re)découvrir un match de l’histoire parisienne. Aujourd’hui c’est Jean-Pierre, supporter historique du Paris Saint-Germain, qui nous emmène un 12 septembre 1996, au Lichtenstein pour un FC Vaduz – PSG un peu hors du temps (0-4).

Avec ma femme, je ne sais pas pourquoi, on a décidé d’aller voir ce match (sourires). À l’époque, on habitait à Romans-sur-Isère. On avait pris la voiture, traversé la Suisse, et 600 km plus tard, nous voici arrivés à Vaduz, la capitale du Lichtenstein.

Le match se jouait à Eschen, à côté de Vaduz, car leur stade n’était pas homologué pour ce type de rencontre européenne. Le PSG, récent vainqueur de la Coupe des Coupes, remettait son titre en jeu. En face, une équipe composée de joueurs amateurs, dont le football n’était pas le métier.

J’ai choisi ce match car pour moi, il a un côté complètement atypique. J’en ai fait, des matches*. J’en ai fait, des déplacements : Naples, Turin, Munich, Glasgow… Et des pays parfois plus inattendus comme la Finlande, la Norvège, Chypre… Vaduz, c’est vraiment à part. C’est à mille lieux de l’idée que l’on peut se faire d’un match de Coupe d’Europe.

Pour ce 1/16è de finale aller de la Coupe des Coupes, nous sommes arrivés dans un grand parc (imaginez le Bois de Boulogne, en plus grand). Très vert, très calme. Nous l’avons traversé pour arriver au stade. Tout ce qu’il y a de plus champêtre. Le banc de touche était composé de chaises. Comme des chaises que l’on aurait ramenées d’une salle à manger.

En décalage complet

La tribune, c’était 3 rangées de sièges, le public assis sur le béton. Avec ma femme, nous étions au 2è rang et juste derrière nous, il y avait des fauteuils de jardin pour la presse. Dont Eugène Saccomano qui était sur Europe 1 à l’époque, et qui nous a dit qu’il était venu en moto. C’était marrant de voir les 5 journalistes français assis derrière et décontractés, en train de blaguer.

Cette rencontre, c’est comme une bouffée d’air frais, en pleine nature. Le Lichtenstein, c’est joli. Nous étions au pied des Alpes. C’était très bucolique.

Le PSG l’a emporté 4-0. Avec des buts de Paul Le Guen, Dely Valdes, Leonardo et Bernard Allou. Au match retour, je crois que l’on gagne 3-0. J’étais au Parc.

L’ambiance à Eschen ? Honnêtement, il n’y avait pas d’ambiance. Il y avait l’image mais pas le son (sourires). C’est aussi cela qui m’a marqué. Les gens étaient là. Ils prenaient du bon temps, un peu comme un déjeuner sur l’herbe avec un match de football au milieu. Il faut l’avoir vu pour l’imaginer. C’est en décalage complet avec l’image que l’on peut se faire d’un match de foot. Pour les spectateurs, c’était une façon d’aller prendre l’air.

J’ai fait plusieurs déplacements européens, même face à des équipes plus modestes comme à Chypre, la saison 1992-1993. Mais nous étions une poignée de supporters (c’était face à l’APOEL Nicosie, but de Jean-Luc Sassus 1-0). Mon 1er déplacement européen, c’était en Finlande pour Kuusysi Lahti – PSG (13 septembre 1989). Cela s’est soldé par un magnifique 0-0 (sourires).

Niveau jeu, niveau spectacle, comme ce n’était pas trop ça, juste à côté du stade de Lahti, il y avait un tremplin de saut à ski. On avait passé notre temps à regarder le saut à ski. Mais il y avait beaucoup plus de monde et c’était un vrai stade de foot. En Finlande, nous étions une cinquantaine de supporters du PSG. Au Lichtenstein, nous n’étions pas beaucoup c’est certain.

Mais Vaduz, c’était hors du temps. Différent. J’ai aimé vivre ce match.

*Abonné depuis les années 1970, Jean-Pierre a fait plus de 1 000 matches au Parc, et plusieurs centaines de déplacements pour voir le PSG jouer.


Qui dit calendrier de l’Avent dit fêtes de fin d’année, boules de neige, et moufles tricotées par grand-maman. Qui dit calendrier de l’Avent PSG dit matches en plein hiver, supporters aux boules gelées, et moufles oubliées avant d’aller au Parc. Aujourd’hui, c’est au tour de JJ Buteau de nous raconter son match Rouge et Bleu, et le moins qu’on puisse dire c’est que ça ne va pas chauffer.

Lorsque notre aimé et vénéré rédacteur en chef eu la brillante idée de faire un calendrier de l’avant, il a fallu, une fois la stupeur d’admiration passée devant un tel génial concept, choisir un match. J’ai alors cherché dans les méandres de ma mémoire rouge et bleue un match en lien avec Noël et… la froidure.

Je me suis alors remémoré des matches où notre défense fit des cadeaux aux adversaires. Il y en avait un peu trop et même si ce sont des cadeaux, ce ne sont pas vraiment de joyeux souvenirs en cette période de fêtes.

J’ai alors cherché un match au parc ou j’ai eu froid. Enfin « froid » reste faible comme mot… Je parle de la sensation où vous ne sentez plus vos orteils, où le béton du Parc semble ne faire plus qu’un avec vos pieds, où ce vicieux petit vent glaçant vous gifle en continu pendant deux heures, faisant venir les larmes aux yeux et la goutte au nez. Et il y en a eu quelques un durant toutes ces années…

Mais pourquoi s’infliger ça ?

Mon esprit se remémora alors un match finalement pas si lointain mais en même temps aux antipodes de la situation actuelle du club. Un match de la triste et lugubre période Colony Capital. Comment ne pas se souvenir de tous ces matches où en plus de la température sibérienne, nos joueurs nous proposaient une nouvelle horrible prestation ? Je me revois dire, « mais pourquoi on s’inflige ça ? ».

Oui pourquoi ? Sûrement pour l’amour de ce club qui ne tardera pourtant pas à nous renier et à nous rejeter quelques mois plus tard avec une impitoyable froideur. Rejetés et karcherisés de sang-froid par les pères fouettard Bazin et Leproux. Zola et Dickens réunis n’auraient pas pu imaginer écrire pire scénario pour décrire la violence, la cruauté, la misère et l’injustice que nous ont fait subir les pires dirigeants de notre histoire. Nous en portons toujours les stigmates aujourd’hui. Bref, je ne veux pas jeter un froid en cette festive période et je m’éloigne du sujet.

© Icon Sport

L’objet de mon choix est un 32ème de coupe de France. Un derby. PARIS SAINT-GERMAIN F.C. – F.C.M. AUBERVILLIERS (CFA2). Sûrement un des matches au Parc avec une des températures les plus basses. Nous sommes le dimanche 10 janvier 2010. Le journal télévisé s’ouvre sur la terrible vague de froid qui paralyse la France. Les transports bloqués par la neige, les voies maritimes bloquées par la glace, les avions restés au sol. Au Parc, il est annoncé plusieurs degrés en dessous de zéro, mais en ressenti on est plus proche de la cave en troisième sous-sol d’un igloo en pleine tempête de neige au cœur de l’Oural du nord une nuit d’hiver.

Nous ne sommes que quelques milliers, le parc sonne vide comme un réfrigérateur de fin de mois. Les discussions en dehors du mercure tournent autour du fait que ce genre d’adversaire et de match aurait pu être notre quotidien si deux ans plus tôt n’avait eu lieu le miracle de Sochaux. Certains craignent que malgré tout à l’avenir nous finissions par connaître la déchéance de la relégation étant donné les choix et les non investissement de notre grigou de propriétaire. « Et toi tu te serais réabonné si on était descendu ? » « Bien sûr ! Plus que jamais » Ah si on avait su à l’époque que onze ans plus tard le ballon d’or et le meilleur gardien du monde seraient des nôtres…

Une compo d’équipe mystique

En ce dimanche soir notre gardien est un jeune Arménien d’à peine 22 ans et demi, j’ai nommé Apoula Edel. Qui ce soir-là ne nous gratifiera pas d’une de ses légendaire boulettes. Non. Signant même un superbe arrêt face à l’ex-marseillais Steve Marlet, occasionnant un troisième cleen sheet consécutif. Bon OK c’était face à Grenoble, Vannes et donc Aubervilliers. Mais dix jours plus tard contre Monaco tout rentrera dans l’ordre avec une défaite 0-1 au Parc où il marquera lui-même l’unique but de la rencontre.

Pour le plaisir je vous offre le reste de la composition de l’équipe. En défense, à droite, le mystique Marcos Cearà. Dans l’axe Papus Camara et Sammyradona Traoré, le breton Sylvain Armand. Au milieu, le pas encore tout à fait chauve Christophe Jallet le titi prépubère Clément Chantôme, avec l’expérimenté capitaine Claude Makélélé complété par le « à jamais buteur contre Saint-Etienne » Jérémy Clément(*), pour une attaque composée du fort comme un franco-turc Mevlüt Erding et de la légende de Twente Péguy Luyindula (**).

Autre époque… Seule la laideur des maillots est toujours d’actualité. En 2010 peut-être en hommage à notre propriétaire américain notre maillot ressemblait à une tenue de base-ball. Cette année en 2021 nous avons la tenue de basket en hommage à « bankable » Jordan. Rendez-vous l’année prochaine pour la version kimono en hommage à Teddy Riner ou combinaison moto en hommage à Fabio Quartararo

Je m’égare et j’ai déjà dépassé le nombre de mots qui m’est alloué pour ce calendrier. Alors pour finir sur ce match, belle victoire 5 – 0 du PSG, avec un dernier but signé Jean-Eude Maurice sur pénalty. Une autre époque je vous dis. La suite ? Pas de quoi se réchauffer, déplacement à Guingamp puis à Lille en championnat… Le tour suivant en coupe ? Evian, et encore au Parc. Encore une belle soirée d’hiver en perspective…

(*) Voir le Calendrier de l’Avent, jour 8. (**) Voir le Calendrier de l’Avent, un jour prochain… Eh oui il faut être patient dans la vie.


Deux semaines après la rencontre en terre celte, c’est au tour du peuple de Derry de se déplacer à Paris. Les premières retrouvailles se font dès la veille du match dans des enclaves irlandaises du Boulevard de Clichy, au pied de la butte Montmartre. Le lendemain, le jeudi 28 septembre 2006, dès le début de l’après-midi, des centaines de supporters nord-irlandais et parisiens se retrouvent sous la Tour Eiffel pour prolonger les liens d’amitiés créés lors du match aller.

Pendant près de cinq heures, les touristes purent assister à des scènes totalement insolites. Une fraternité rare entre deux tifoseria, lesquelles ne s’étaient jamais rencontrées avant le match aller. Accompagnés de tambours [notamment l’officiel du Brandywell, dont j’ai eu la chance de pouvoir me servir un peu], les chants à la gloire des deux équipes enjolivent l’esplanade. Alors que Santa-Claus profite du soleil, des parties de football sont improvisées, des packs de bières sont liquidés, des écharpes et drapeaux sont à nouveau échangés. Des photos bâches de part et d’autres, les deux communautés se mélangeant derrière les mêmes bannières. Les Lutece Falco sortent leur « Irish Clan« , alors que les Candy-Stripes exposent leur « City till I die« . Ces derniers sortent le message « Mathieu toujours avec nous« , rendant ainsi hommage à un jeune supporter décédé, membre de l’association Boulogne Boys 1985. Cette bâche avait été donnée au match aller par les BB85 aux supporters de Derry [Ces derniers la ressortiront également à deux reprises dans leur tribune pendant le match]. A 19h00, un cortège commun traverse le Pont d’Ièna avant d’emprunter l’Avenue de New York en direction du Parc des Princes. Certains prennent le métro pour profiter au maximum avant le match des bars aux Portes d’Auteuil et de Saint-Cloud.

Une fois en tribune, dans le prolongement du Virage Auteuil, les supporters de Derry poursuivent leur bon-esprit. Ils sont également parfaitement accueillis par l’ensemble du Parc des Princes. A l’entrée des joueurs, de nombreux messages fleurissent : « Welcome to Derry’s fans » chez les Authentiks, « Fáilte Go Paris« , Bienvenue à Paris, chez les Boulogne Boys, « Ceád Mile Fáilte« , Cent mille bienvenues, chez les Lutece Falco. Ces derniers mettent en scène une animation « Irish Clan » accompagnée par le message « You’re now entering free Paris ».

La victoire 2-0 [buts d’Edouard Cissé et de Pedro Pauleta] et la qualif des parisiens n’altèrent en rien l’irish spirit. Les chants perdurent, et les échanges aussi : au « Derry, Derry, … » lancé par le Virage Auteuil, les Rouge et Blanc répondent par un « Paris, Paris, …« , avant que tous chantent d’une même et seule voix : « We love Derry, we do, We love Paris, we do,… « . Au-dessus de la grille en coursives, ou à travers le filet entre les deux tribunes, à la mi-temps ou longtemps après la fin du match, chacun essaie d’échanger encore une écharpe ou un drapeau.

A la sortie du stade, les fans de Derry ont le droit à une haie d’honneur au niveau du parvis de la tribune Auteuil. Plus tard dans la nuit, bon nombre de supporters des deux équipes se retrouvent devant l’Eglise Saint-Eustache à Châtelet, en terrasse du Quigley’s Point Irish Pub, dont le tenancier est originaire de Derry. La bière coule à flot. La communion est parfaite. Plus tard, c’est au Corcoran’s Irish Pub de Saint-Michel que les derniers membres des Rouge et Blanc et des Rouge et Bleu finissent les derniers fûts. Un ultime drapeau me fut offert par des fans nord-irlandais.  Comme ça, par simple gentillesse. Un geste gratuit, en remerciement de cette soirée unique. Sur le drapeau, l’inscription « Red White Army« . Quelle offrande !! C’est vers 4h00 du matin, alors que certains tentent de plonger dans la fontaine de Saint-Michel, que je prends le chemin du retour. Dans ma tête, un refrain tourne en boucle. Les paroles s’entremêlent :

“I’m Derry till I die.
I’m Derry till I die.
I know I am, I’m sure I am
I’m Derry till I die.
I’m Paris till I die.
I’m Paris till I die.
I know I am, I’m sure I am
I’m Paris till I die.”


Le calendrier de l’Avent de Virage PSG est garanti sans fruits à coque, sans gluten, et totalement exempt d’huile de palme. Chaque matin, c’est donc l’âme sereine que nous vous proposons un nouveau texte, évoquant le match le plus emblématique d’un supporter, ou d’une supportrice. Pas de risques d’allergies. Mais parce qu’une saison n’est pas faite que de PSG–Real, dans ce calendrier on tombe parfois sur un match face à un club inconnu. Ou oublié. À croire que pour Pia Clemens, présentatrice de l’émission 100% PSG sur France Bleu, au Parc des Princes qu’importe l’adversaire, pourvu que l’on ait l’ivresse des tribunes.

Dans le groupe, il y avait les pour et les contre.

Les pour, j’avais envie de leur faire des câlins tellement ça me touchait. Les contre, j’aurais pu leur en vouloir. Mais dans le fond, je les comprenais. Parce que je savais. S’ils refusaient que je vienne, ce n’était pas uniquement parce que j’étais une fille. Non. C’était parce que j’avais été cette fille de dix-sept ans qui ne saisissait pas comment des garçons si intelligents pouvaient soutenir un club de gros fachos. Comment on pouvait s’enflammer pour des millionnaires qui couraient derrière un ballon. Comment on pouvait s’intéresser au football.

Et puis lentement, à bas bruit, sans tout de suite m’en apercevoir, j’avais été mordue. Envoûtée. Empoisonnée d’amour. Pendant des années, j’avais regardé les matchs chez moi, en secret. Des putain de longues années. Et à force, j’avais fini par y aller sans eux.

Toute seule, la première fois, pour la claque originelle. J’étais hôtesse d’accueil chez NRJ et j’avais barboté la place d’un auditeur qui n’était pas venu la chercher. Le fou. En même temps à l’époque, le Tout Paris ne se bousculait pas au portillon : c’était Moustache qui officiait sur le banc. Après ce premier choc, j’avais de temps en temps trouvé des victimes pour m’accompagner, mais toujours en latérale. Jusqu’à cet après-midi d’été.

Le championnat venait tout juste de reprendre. On accueillait une équipe quelconque. De l’Est, peut-être. Je ne me souviens ni du jour, ni de l’année, ni de l’adversaire mais ça n’a aucune importance. Ce jour-là, il manquait des garçons dans le groupe. Encore en vacances à Naples, à Bamako, peut-être à Kiev. Et pour la première fois, ceux qui étaient là m’ont proposé de les accompagner.

Je ne me souviens pas non plus des joueurs, des fautes, ni des buts. Ce qui me reste, ce sont les fins de phrases, dans les chants, où je me retrouvais toute seule à chanter parce que tout le monde sauf moi savait qu’il fallait s’arrêter. Ces paroles que je connaissais presque parfaitement, mais pas tout à fait, alors bien obligée de faire un peu de yaourt. Ces gestes que j’imitais en espérant très fort que personne ne remarquerait que je les faisais en vrai pour la première fois alors que merde ! Ma place ici, je l’avais méritée.

Et la grecque arriva. Toute à mon bonheur et – comme pour tout le reste depuis le début du match – avec une demi-seconde de retard par rapport aux autres, je me suis tournée dos au but, les bras sur les épaules de mes amis. Le type derrière moi ne s’était pas encore tourné. On s’est retrouvé face à face. Il m’a regardée avec un sourire enveloppant, peut-être un peu protecteur. En tout cas, profondément gentil.

« Première fois au Parc ? »


Le calendrier de l’Avent Virage PSG, c’est un nouveau souvenir Rouge et Bleu par jour, offert par un auteur chaque fois différent. Aujourd’hui, Arno P-E vous propose de frissonner et de revivre cette fameuse journée de 2008 où le PSG a bien failli mourir.

Samedi 10 mai 2008, avant-dernière journée de Ligue 1. C’est un PSG relégable qui reçoit Saint Étienne. Alors que Pauleta se prépare pour son dernier match dans ce stade, au delà du périphérique, la France entière attend une possible mise à mort. Les choses sont claires : le Paris Saint-Germain a rendez-vous avec son destin.

La saison 2008 n’aura été qu’une lente agonie. Après un début raté, les joueurs n’ont jamais réussi à remonter dans le classement. Pire, de matches perdus en occasions manquées, c’est tout le groupe qui voit s’évanouir sa confiance. Le staff technique, dépassé, ne trouve pas la solution. Pauleta, meilleur buteur de l’histoire du club est jugé hors de forme. Lui qui portait l’attaque du PSG à bout de bras n’est plus titularisé que pour des bribes de matches par Paul Le Guen. En pleine crise, les actionnaires décident d’imposer au Président Alain Cayzac un adjoint sorti de nulle part. Ce pantin sudiste montrera vite toute l’étendue de ses qualités pro, plus adaptées à un rôle de vendeur de voitures dans « Plus belle la vie » que de dirigeant de club. L’électrochoc de cette arrivée aura pour seul effet un énième drame : faire démissionner Cayzac, dernier dirigeant historique parisien.

Paris doit être sauvé

Une équipe perdue. Un staff démuni. Une direction à l’encéphalogramme plat. Le navire parisien prend l’eau de toutes parts. Et pourtant, dans le soleil de cette fin d’après-midi du mois de mai, les fidèles du PSG gagnent lentement le Parc des Princes.

Il règne une atmosphère irréelle porte de St Cloud. Des appels ont retenti toute la semaine. Le Parc doit être plein. Sur les réseaux, les associations de supporters ont tenté de rameuter leurs ouailles. Paris doit être sauvé. Rames de métro bondées. Voitures garées partout dans Boulogne, en vrac. La foule, la masse Rouge et Bleu pénètre le stade. Dense. Totalement silencieuse. Infinie. Partout, les appels ont été entendus.

Après je ne peux témoigner que de ce que j’ai vu. Le Virage Auteuil s’est rempli, j’en étais. Les travées se sont chargées de supporters. Les derniers rangs sont occupés. Et l’on se serre encore, sans râler. Les escaliers en béton sont investis, et cela ne suffit pas. On fait de la place à un inconnu, on aide. Tous les espaces, tous les murets, toutes les grilles sont envahis. On se tasse. Et partout le silence, épaules contre épaules. Et partout la même idée… Il plane sur le Parc un voile noir.

Il n’y aura rien à gagner ici. Pour ce dernier match au Parc de la saison, il n’y aura pas de plaisir. Nulle joie. Même une victoire ne sauverait pas définitivement Paris. Ce voile qui obscurcit tout, nous le savons, c’est la Mort. Le seul objectif de ces condamnés : tout faire pour que le club ne crève pas sous leurs yeux.

Personne ne peut nier qu’il a eu peur, ce 10 mai. Aucun Parisien. Mais personne n’a reculé. J’ai vu au coup d’envoi le Virage exploser et tout donner. Il en fallait du courage et de la folie pour être là, pour supporter cette équipe incapable d’aligner trois passes. Le Parc a poussé comme jamais, malgré le ventre noué. Et malgré chaque ballon perdu, pas un sifflet. Malgré chaque tir raté, pas une injure. Juste pousser. Juste encourager.

Le coup-franc de Pauleta détourné sur le poteau. Son face à face avec Viviani remporté par le gardien stéphanois. Les occasions avortées. Le doute, qui suinte. Les mots que personne ne veut prononcer : « quand ça veut pas… »

Le PSG virtuellement en ligue 2

Puis, la 45e minute. Le tout jeune Payet, qui manquait alors de bouteille mais s’est rattrapé depuis, qui déborde sur le côté gauche, face au Virage Auteuil, frappe au ralenti (comment pourrait-il en être autrement ?). Dans les buts parisiens, Landreau repousse la balle, incapable de la bloquer (comment pourrait-il en être autrement ?). Et Perrin, pas encore reconverti dans sa belle carrière d’artisan boucher spécialiste de la malléole bondynoise, qui transperce les filets. Comment pourrait-il en être autrement… Saint-Étienne ouvre la marque. Le PSG est virtuellement en Ligue 2.

Pire scénario. Pire moment. Pire saison. Pire du pire du pire. Sauf que là survient l’impensable. Personne ne peut croire ça et peu m’importe, j’ai vu ce que j’ai vu. Là, les pieds dans l’eau, je le jure, j’ai vu le Virage se redresser. Physiquement. J’ai vu le mur des supporters relever la tête, immense. J’ai vu la vague, la vague de mille voix, la vague monstrueuse grandir et atteindre la voûte du Parc, grimper jusqu’au point d’équilibre ultime sous la chape de béton… Le frisson. J’ai vu et je vois encore les Capos, silhouettes embarquées au milieu des flots, un pied sur la rambarde et prêts à verser par-dessus bord, je les ai VUS HURLER… et la vague Rouge et Bleu s’abattre sur la pelouse. Rang par rang. Supporter par supporter. Le Virage Auteuil a croulé, monstrueux, une mer de sons, une lame de cris sans mots, sans signification. Juste la peur ignoble qu’il fallait abattre, juste la rage contre l’injustice, juste le souffle du désespoir.

La marée a englouti le Parc, et alors que Saint-Étienne dominait, jamais ils n’ont pu marquer de nouveau. Oui, j’ai vu des combattants en larmes hurler 45 minutes non-stop. J’ai vu la folie déformer les traits. J’ai vu Jérémy Clément reprendre un ballon, du droit, ravager la lucarne de Viviani pour l’égalisation. J’ai vu les pleurs de Pauleta. J’ai vu enfin, hébété, les écrans au coup de sifflet final. 1-1.

Ils ne peuvent pas comprendre, ceux qui n’aiment pas le PSG. Tant pis. Jamais je n’ai été aussi fier d’être Parisien que ce 10 mai 2008. Il restait encore une étape, un match à Sochaux, pour sauver définitivement le club. Mais ce jour-là, au moins, le peuple Rouge et Bleu l’avait prouvé : dans le malheur ou dans la gloire, fidèles à nos couleurs.


Le calendrier de l’Avent spécial Virage PSG c’est chaque matin, du 1er au 25 décembre, un nouveau témoignage, d’un nouvel auteur, qui vous fera (re)découvrir un match marquant de l’histoire parisienne. Aujourd’hui c’est Jean-Michel Badiane qui nous ramène au 18 mars 1993, pour un certain PSG-Real Madrid (4-1).

J’ai grandi à Vauréal dans le 95. Petit, j’ai eu la chance d’aller au Parc avec mes parents. Le match qui me vient en premier, c’est PSG-Real en 1993.

Mon père, qui était pilote d’avion dans le privé, avait eu 2 places par un de ses clients. Quelques jours avant le match, il lui dit : « Vous aimez le foot ? » Mon père lui dit que oui. Et son client : « Cela vous dit 2 places pour PSG-Real ? Je ne vais pas les utiliser ». Mon père : « Oui, avec plaisir ».

J’avais 9 ans et je venais de rentrer au PSG dans les équipes de jeunes. Mon idole, c’était George Weah. J’étais comme un dingue. Rien que l’idée d’aller le voir jouer, ça me rendait heureux.

Chaque fois que j’allais au Parc avec mes parents, je le vivais comme un jour exceptionnel. Le matin, je me levais, j’étais surexcité.

Il faut savoir que je dors très peu depuis que je suis tout petit, je suis insomniaque. Et cette nuit-là, avant PSG-Real, mon père m’a dit que je n’avais pas dormi du tout. A l’école, je dis à tous mes copains : « Ce soir, on va sortir le Real ». Ils répondent : « Vous n’allez rien sortir du tout ». J’avais beaucoup de copains de classe qui étaient supporters de l’OM.

Mon père avait pris son après-midi pour aller au Parc tôt. Car mon père, il avait un rituel. Il ne voulait pas rater un échauffement. C’est-à-dire que même moi, quand je jouais en équipe 1ère avec le PSG, je voyais mes parents, ils étaient déjà là avant que l’on commence à s’échauffer (sourires).

Mon père avait pris son après-midi

Dès l’échauffement, on est présents. Tu as envie de tout voir quand les joueurs s’échauffent. Quelqu’un comme George Weah, je ne le quittais pas des yeux. Comment s’échauffe mon idole ?

Je disais à mon père : « Papa, on va battre le Real ce soir. » Mon père : « Les battre ne suffit pas ! ». D’habitude on allait chez ma tante avant, elle habite à 2 rues du Parc. Mon père en profitait pour se garer dans son parking et on passait la voir.

Dans la voiture, je dis à mon père : « Tu gares la voiture et on peut aller tout de suite au Parc ? Sinon ça va nous retarder ? ». Il dit : « D’accord on passera la voir après ». J’étais comme obnubilé par le match.

On était en B Rouge ou C Rouge. Le but de George Weah, la demi-volée de Ginola, Valdo, le coup franc de Zamorano, la tête de coach Kombouaré… Il y a un côté irrationnel car il ne faut pas oublier que cette saison-là, Antoine Kombouaré jouait peu. S’il ne marque pas, on aurait retenu le but encaissé à la 92ème. Il était un peu fautif car il avait été battu de la tête par celui qui a remis le ballon à Zamorano. 4 minutes plus tard, c’est lui qui marque et devient « Casque d’Or ».

Il y a des rendez-vous comme ça dans une carrière.

Donc moi, j’étais le petit garçon qui a sauté de joie sur son but et j’ai ensuite eu la chance de le connaître et de l’avoir comme coach, en CFA au PSG. On est toujours en contact, tout comme avec Vincent Guérin, Laurent Fournier, Alain Roche… À 9 ans, j’allais les voir jouer.

Le lendemain j’étais fier à l’école

Et quand je travaillais bien à l’école, la récompense que m’offrait mon père, c’était tous les lundis, d’aller voir l’équipe pro du PSG s’entraîner, au camp des Loges.

Ce qui m’a marqué aussi, c’est le silence quand Zamorano marque. J’avais dit à mon père : « Mais on n’est pas éliminés ? » Il y a eu un tel silence. Et puis la qualification au bout des arrêts de jeu. C’était fou. Les gens n’avaient pas envie de quitter le stade. On a mis beaucoup de temps pour rejoindre la voiture. On n’est pas allés voir ma tante. Il était vraiment tard. Je pense qu’elle dormait.

Ensuite le temps de renter à Vauréal (60 kms), dans la voiture, mon père me dit : « Je peux te faire un mot pour ne pas que tu ailles à l’école demain matin ». Moi je ne voulais pas. J’étais trop pressé. Le lendemain j’arrive le premier à l’école. J’étais fier. Le 19 mars 1993, je bombais un peu plus le torse (sourires).

Chez les jeunes avec le PSG, on s’entraînait 3 fois par semaine au camp des Loges et dès le lendemain, on ressentait comme une effervescence. Pourtant, ce n’est pas nous qui avions joué, mais chez tout le monde les parents, les enfants, on sentait cette fierté d’appartenir au PSG.

Je me rappelle aussi que notre éducateur Monsieur Jarry remettait chaque mois à un joueur, un ballon dédicacé par les pros, ou un maillot « historique » du PSG. Quelques semaines après PSG-Real, il m’avait remis un ballon avec les signatures de tous les joueurs de l’époque. Un ballon que j’ai toujours.


Le calendrier de l’Avent spécial Virage PSG c’est chaque matin, du 1er au 25 décembre, un nouveau témoignage, d’un nouvel auteur, qui vous fera (re)découvrir un match marquant de l’histoire parisienne. Aujourd’hui au tour de Raphaelo, qui réchauffe nos cœurs avec un petit PSG – Toulouse estival, ouvrant la saison 1997/1998. Et parce qu’il en a un peu plus, on vous le met aussi.

C’est l’histoire d’un drapeau, une ode à Marco Simone. C’est celle du jour où je suis devenu supporter du PSG. L’été ou tout a commencé.

En juillet 1997, j’ai 10 ans, je me fais marave à la récré. C’est vrai. Marco Simone vient de signer au PSG. Je vais aller habiter à Toulouse, mon père vient de se faire muter. On passe l’été à Biarritz en famille. Mon cousin est là. Lui est abonné au Parc, c’est un Supras. On entend quoi ? Le PSG joue à Pau en amical contre Toulouse.

Édouard Cissé, 19 ans, vient de signer pour 500k€ en provenance du Pau FC. Dans le deal, le club béarnais a inclus l’organisation d’un match amical dans son stade du Hameau. Et à la fin, tout le monde à la buvette pour « le saucisse-baguette à tata Suzette » (sic). À l’époque, les bonus de transferts c’était autre chose. On fait quoi ? Bah on y va, mon cousin (Greg), mon frère, mon père et moi.

Motif Hechter, Batman noir en son centre

Greg a quelques tendances ultras. Il chante et anime la tribune d’habitude. Il nous propose d’en mettre plein les yeux à Marco Simone pour ses débuts. On va fabriquer un drapeau. Greg l’a déjà imaginé dans sa tête. On demande à Mamie un drap, on découpe ça. On achète des bombes de peinture et on s’y met. Greg fait, nous on assiste. On tient les pochoirs.

La fierté est immense. La passion est en train de naître. Motif Hechter en fond, un emblème de Batman noir au centre avec un numéro 9 blanc en son cœur.

On prend la route le 24 juillet après le déjeuner. Le match est en milieu d’après-midi. Je suis comme un dingue pendant 1h30. J’avais déjà découvert le Parc 3 ans plus tôt mais c’était trop tôt justement. Greg aussi trépigne. Ça m’avait marqué. Il est abonné. Il va à tous les matches et pourtant il n’en peut plus et veut sortir son drapeau.

On achète nos billets à la billetterie du stade directement. Dans mes souvenirs le stade est champêtre. En fait il y a une belle tribune d’honneur et une plus petite derrière un but. C’est un demi stade, côté opposé rien. Les mecs se sont amassés derrière les grillages de l’enceinte de l’autre côté, sans ticket. On est derrière le but, tout près du terrain, c’est la folie. On perd 2-1 contre le Toulouse de Laurent Battles qui vient de monter en D1. Simone nous a ignoré, mais on a kiffé.

Le drapeau n’est pas mort, mon cousin l’a encore. Trois mois plus tard il vient nous voir à Toulouse justement. Chatte max ! Il y a un TFC-PSG ce week-end là. Il a le drapeau, il le ressort. Entre temps, il y a eu un PSG-Steaua Bucarest de folie. Mon match préféré. Je me souviens exactement d’où j’étais, de ce que je faisais, du match entier. Ça y est, je suis du PSG.

Encore un demi-stade pour ce match contre le TFC. Le Stadium n’est ouvert qu’à moitié. La Coupe du Monde arrive mais il n’est pas terminé. Mon frère embarque Mamar, son pote du foot. Lui ne comprend pas pourquoi on est venu à Toulouse pour supporter Paris. En même temps, il dit que quand il va voir quelque chose à Toulouse c’est du rugby. On croise Just Fontaine dans les coursives. La soirée démarre bien.

Mon premier contact avec l’univers Ultra

On est au 2ème rang. Dès l’échauffement on gueule, on veut le maillot de Marco. On a accroché le drapeau à la grille juste devant nous. Il rentre au vestiaire, nous fait un signe. Il vient après. Tu connais. On ne baisse pas le rythme, on continue à crier. Les sexagénaires derrière nous veulent qu’on s’asseye. Nous on se fie à Greg et à Auteuil, ça ne se passe pas comme ça.

Un bon match de Paris, cette fois. Victoire 2-O du PSG grâce à Maurice et un CSC d’Arribagé. Nous on donne tout ce qu’on a pour motiver Simone. Serial buteur en début de saison, il ne marque plus. On sent qu’il est frustré. Il vient de se faire faucher par Teddy Richert. Il s’énerve contre l’arbitre et le pousse des deux mains. Une folie aujourd’hui. Il ne prend qu’un jaune pour une main volontaire sur son contrôle. Ses actions sont magnifiques. Il récupère même la passe toulousaine du coup d’envoi après l’ouverture du score parisienne. Ça combine avec Maurice, Gava, Raí, Jérôme Leroy… mais ça ne passe pas pour lui.

Simone est remplacé dans les 5 dernières minutes. Il file au vestiaire. On ne le reverra pas.

Toulouse, l’adversaire, la ville m’auront fait vivre mes premières grandes sensations de supporter. L’espoir d’un échange avec notre star. La déception de sa trahison. Il nous avait dit qu’il venait après, putain… C’était sans le savoir mon premier contact avec l’univers ultra. Les chants, le folklore de l’animation graphique d’une tribune. Ce drapeau. Il est devenu quoi ce drapeau ?

Pour beaucoup PSG-Bordeaux de 1999 c’est celui de Feindouno. Notre défaite au Parc qui a privé Marseille du titre. C’est déjà ça. Ce soir là, c’est aussi le dernier match de Marco Simone au PSG. Ce soir-là, il porte un brassard fabriqué par un certain Greg, un supporter des Supras, venu lui apporter la semaine précédente au Camp des Loges : un brassard avec le motif Hechter en fond, un emblème de Batman noir au centre avec un numéro 9 blanc en son cœur.


Le calendrier de l’Avent spécial Virage PSG vous offre chaque matin sa petite douceur. Du 1er au 25 décembre, un nouvel article, d’un nouvel auteur, pour (re)découvrir un match marquant de l’histoire parisienne. Aujourd’hui Café Crème Sombrero n’a jamais aussi bien porté son nom, puisque son témoignage a des airs de délicieuse friandise : une finale de coupe de France mythique : le PSG – OM de 2006.

Les fêtes de fin d’année me rendent toujours nostalgique. Alors quand l’idée de piocher dans nos souvenirs liés au PSG a été lancée, il n’a pas fallu trop me forcer pour que je m’y replonge. Et puisque cette période est souvent l’occasion de retrouvailles familiales, il y a un match en particulier dont je me souviens : la finale de la Coupe de France 2006 contre Marseille.

La finale tombait le même soir qu’un repas prévu de longue date, et les hommes de la famille avaient habilement rappelé cette curieuse coïncidence et pris l’initiative d’allumer la télé pour, disaient-ils, « suivre le score de temps en temps ». Le gène de la mauvaise foi est très fort dans ma famille. Mais en tant que seul fervent Rouge et Bleu de ce côté de l’arbre généalogique, je savais que ce match revêtait une importance particulière car j’avais à mes côtés mon cousin, indécrottable Marseillais. L’un de nous allait passer une meilleure soirée que l’autre. Et même si je ne me privais pas pour chambrer, j’avoue que je n’étais pas en pleine confiance.

C’était une finale de Coupe de France, la compétition populaire par excellence, et la gagner avait à l’époque une saveur très différente d’aujourd’hui où elle n’est ni plus ni moins qu’un prérequis de début de saison.

Deux frappes auront suffi…

Il y avait de la tension et ce n’était pas un gigot trop cuit et des flageolets fades qui allaient la faire baisser. Fort heureusement, cette finale a bien tourné pour le PSG. Deux frappes ont suffi pour envoyer Barthez brouter le gazon et ainsi lui signifier un brutal retour à sa condition de quadrupède bêlant.

Le miracle Vikash porté par l’Aigle © DR

C’est d’abord Bonaventure Kalou qui a ouvert le feu en début de match. Mais c’est surtout le second but, un coup d’éclat signé de l’artiste Vikash Dhorasoo, qui est resté gravé dans ma mémoire. Une récupération en milieu de terrain, une percée plein axe en résistant aux charges du troupeau sudiste, et enfin une frappe puissante que l’ex-divin chauve ne peut qu’effleurer sans l’empêcher d’aller mourir au fond du but.

La suite de la soirée fut joyeuse, ponctuée de chambrage sans aucune retenue (vous pouvez bien garder Déhu), ce qui a encore rehaussé la saveur de ce souvenir. Mais pas celle du gigot et des flageolets, malheureusement…


Après les chocolats, les échantillons de make-up et les bières, découvrez notre calendrier de l’Avent spécial Virage PSG ! Chaque matin, du 1er au 25 décembre, un nouvel article, d’un nouvel auteur, vous fera (re)découvrir un match marquant de l’histoire parisienne. Aujourd’hui Arnaud Legrand nous emmène au début des années 2000, pour un PSG – Troyes en mode chaud-froid.

4 janvier 2004. Je vais enfin connaître ma première à Auteuil. J’en rêve depuis mon baptême du Parc sept ans plus tôt. Une rencontre de coupe de France contre Troyes m’offre l’occasion de passer le pas (ou plutôt la barrière puisque je suis alors un habitué de la G). Si l’affiche n’est pas incroyable, cela a l’avantage de promettre une première en douceur : le PSG est à la trêve 4ème de Ligue 1, avec notamment une belle fin d’année 2003 (victoires à Marseille, contre Bordeaux, nul à Lyon…), et Troyes fréquente l’étage du dessous.

Je reste conscient que le PSG est le PSG, qu’on n’est ainsi jamais à l’abri de rien (principe qu’on assimile très vite en tant que supporter parisien), mais enfin tout de même l’optimisme est de mise. Le jour J la compo renforce ma confiance : y sont en effet présents la majeure partie de nos titulaires dont les stars Pauleta (qui accomplit une belle première saison), Sorin (qui ne peut pas perdre, on vérifie alors empiriquement ce qui sera théorisé par la suite) et surtout Heinze, l’idole du Parc (si on avait su…).

Je prends place dans le VA, l’émotion est là, le peuple parisien un peu moins. Disons même qu’au-delà d’Auteuil, le Parc est franchement clairsemé. La ferveur n’a de limite que la température extérieure. Glaciale. Bref les ingrédients d’une grande soirée de foot ne paraissent pas forcément réunis au premier abord. D’ailleurs c’est l’après-midi. Mais qu’importe ces basses contingences, je me retrouve enfin à Auteuil, dans le carré des Supras, le rêve se concrétise.

J’écoute attentivement le discours de Boat, qui encourage à revivre un Steaua en tribunes… La ferveur envahit le bloc, les chants partent de plus en plus fort… Non en réalité notre capo (s’il devait me lire : pour qui je conserve encore aujourd’hui le plus grand des respects) se contentera d’un fort avisé « va falloir chanter les gars parce que sinon on entendra les mouches voler » ! Responsabilité posée, torches craquées, chants entonnés. Une ambiance fort sympathique s’amorce, et je suis juste heureux d’être là… pendant 20 minutes.

Juanpi Sorin face à Troyes © DR

Troyes a en effet décidé de donner au baptême des allures de cauchemar. À moins que ce ne soit le PSG qui poursuive ce sinistre projet. La responsabilité se débat,  a réalité est là : on est alors à peine à la moitié de la première mi-temps et les Parisiens sont menés 2-0. Bonne année, merci PSG ! Mon club adoré verse dans son registre préféré : Paris est pathétique. J’y crois quand même, il reste plus d’une heure à jouer. Mais le temps défile. Sans que le score ne daigne bouger. Ça ne joue pas forcément très mal, mais on n’y arrive pas, notre équipe d’habitude solide et efficace n’est pas dans un bon jour. Nos petits gars (bien plus âgés que moi) du centre, Ogbeche et Benachour, rentrent, ce qui rend l’équipe encore plus sympathique à mes yeux. Mais pas plus réaliste. La fin du match approche et je l’échangerais bien contre la fin du monde. Plus personne ne semble y croire et la tristesse me glace encore davantage que ce dimanche sibérien.

Vient alors la 88ème minute. Coup-franc pour Paris. Signe que tout fout le camp, Gaby (qu’as-tu fait Judas ?) s’empare du ballon. Je ne sais pas s’il s’y est déjà essayé dans sa carrière, mais je n’ai pas souvenir de l’avoir vu en planter un. On s’imagine donc déjà récupérer la balle dans le Virage. L’argentin s’élance. Trajectoire parfaite. Sous la transversale. Incroyable… L’espoir renait.

Il reste cinq minutes. On s’arrache les cordes vocales. On ne chante plus. On hurle. Un Twente avant l’heure ! Il faut que ça le fasse, je prie le Dieu des Parisiens (tout en ayant conscience qu’il y ait peu de chances que Raí m’entende) qu’il intervienne sans trop tarder… On rentre dans les arrêts de jeu. Ca attaque fort (idée pertinente compte tenu de la temporalité), Sorin déboule dans la surface, se bat…et parvient à transmettre à Batho. Frappe enroulée. Egalisation. Le délire. Je suis plus que secoué dans tous les sens du terme. À mon émotion s’ajoute une découverte scientifique :  l’homme vole, en tout cas le Viragiste. Des mecs décollent en effet des rangs supérieurs du bloc et se réceptionnent plusieurs rangées plus bas sur nous (dans une allure de crash). C’est n’importe quoi mais d’une logique magnifique : passion, communion, contusion.

C’est ça Paris. Le pathétique qui ramène sa face bien connue. Et le magique qui derrière reprend ses droits et remet les tripes à l’endroit. Ou à l’envers. Dans un état en somme qui s’apparente à ce Virage Auteuil à peine rempli mais qui à cet instant me prouve qu’il est le plus bel endroit de la Terre. On est en prolongation contre Troyes à domicile mais cela vaut un titre.

Derrière Pauleta marque très vite le troisième. Paris gagne. Et ira cette année-là au bout de la CDF, histoire de donner encore plus de relief à ce petit bout d’histoire où le Parc est rentré en fusion dans un froid polaire.


Le calendrier de l’Avent spécial Virage PSG, garanti sans sucres ajoutés vous propose chaque matin, du 1er au 25 décembre, un nouveau témoignage, d’un nouvel auteur, qui vous fera (re)découvrir un match marquant de l’histoire parisienne. Place à Jérôme Reijasse pour le PSG-Caen du 12 août 2018. Un match pas anodin pour tout le monde.

Je voulais au départ raconter mon PSG-Galatasaray, celui de la grande baston. Moment traumatique pour beaucoup mais soirée festive, hallucinogène et indélébile pour moi et mes amis abonnés de l’époque. Mais en fait, non. Si je m’avoue les choses, ce PSG-là appartient au passé, à mon passé et il ne reviendra jamais. Je dois faire avec la réalité. Je dois avancer, coûte que coûte, même si le romantisme s’est fait malle, même si le Qatar a effacé beaucoup de choses.

Et donc, j’opte finalement pour ce PSG-Caen, match estival de reprise. Un match presque gagné d’avance. Je me souviens à peine du score. 3-0, dont un pion du roi Ney. Aussi les débuts de Tuchel au Parc si je ne m’abuse. Mais là n’est pas l’important. Ce soir-là, un dimanche soir, j’emmène mon fiston pour sa première fois au Parc des Princes.

Quand je lui annonce que Xavier nous a donné deux places, il écarquille, il saute de joie et me dit qu’il m’aime. Avant de se jeter dans mes bras. Moi, tout au fond, je sais que le cadeau est peut-être empoisonné. Je sais que je vais précipiter mon fils dans un monde cruel, douloureux, incertain et peut-être pour toujours. Et puis, je vais revenir au Parc. Que je ne fréquente plus depuis l’infâme plan Leproux. Cette idée ne me plaît pas plus que ça…

Ligne 9. Direction Porte de Saint-Cloud. Tout le monde descend. Jules regarde, tout le monde, partout. Il court maintenant, il ne veut rien louper. On y est. Tribune Boulogne. “Oh, c’est Buffon dans les buts” dit-il. Moi, j’ai compris, en quelques secondes. Ici, ce n’est plus chez moi. Plus jamais. Pas grave. Jules, lui, est aux anges. Il n’avait vu du foot qu’à la télé. Il découvre les tribunes, cette perception des choses complètement différente et il aime ça.

Les adieux de Javier © Icon Sport

Cerises sur le gâteau : il a le droit de voir Kimpembé, Mbappé et Aréola présenter la coupe du monde. Mais surtout, de faire ses adieux à Javier Pastore. Il est là, en bord de terrain, Javier, il sourit et c’est comme s’il pleurait. Et je pleure avec lui, de l’intérieur. Jules comprend et me serre le bras, me dit qu’il reviendra peut-être un jour.

Coup de sifflet final. Paris l’emporte tranquille. Jules reste sur son siège quelques minutes encore. Il savoure, il enregistre, il est au Parc et aimerait bien que cet instant dure éternellement. Dans le métro, il s’endort dans mes bras. Il est contaminé, c’est une évidence. Et je ne ressens finalement aucun remord.

C’était écrit.


Un calendrier de l’Avent spécial Paris Saint-Germain, en voilà une excellente idée Arno-PE. Choisir un de ses matches références et l’offrir aux nombreux, de plus en plus nombreux, fidèles lecteurs de Virage. Quelques minutes de réflexions, et l’évidence s’impose. Qui dit Noël, dit Père-Noël, et qui dit Santa Claus, dit Derry. Montez dans mon traîneau, je vous propose une excursion dans mes albums photos [jusqu’ici restés très privés] à la rencontre de Derry City, et de ses merveilleux supporters. Le voyage se fera en deux étapes bien sûr : un aller, puis un retour. C’est cadeau.

C’est parti, direction Derry, ville frontalière de l’Irlande du Nord, la deuxième plus importante du pays après Belfast. Connue pour son passé trouble, la ville est divisée entre Catholiques et Protestants. Terre d’un certain Dimanche Sanglant [30 janvier 1972], qui a marqué à jamais les ruelles du quartier du Bogside [le fief des Catholiques et de l’IRA, l’organisation para-militaire pro-indépendance], et dont les fresques en sont aujourd’hui un témoignage poignant. Le mur « You’re now enterring free Derry » en est l’un des principaux vestiges, et marque l’entrée du quartier depuis 1969. Son cimetière, niché en haut d’une colline, domine le Brandywell Stadium, l’antre des Candy-Stripes. C’est dans ce stade champêtre, dont le terrain était à l’époque entouré d’une piste en sable servant aux courses de lévriers, que le 14 septembre 2006 les Rouge et Blanc du Derry City Football Club ont eu rendez-vous avec les Rouge et Bleu parisiens [1er tour Coupe de l’UEFA].

Les 3500 places étant loin d’être suffisantes pour l’affiche du soir, c’est bien au-delà du mur d’enceinte, lequel était recouvert de fils de fer barbelés, que la Red & White Army prit place. Certains s’installèrent sur deux bus à impériale, d’autres sur le toit des perrons avoisinant, ou bien à flanc de colline. Quelques-uns osèrent se positionner directement dans les allées du cimetière ! Les quatre-cents parisiens présents, en majorité des membres des principaux groupes ultras du Virage Auteuil et du Kop de Boulogne, furent placés au bout de la principale tribune, avec une vue imprenable sur le terrain, et sur le reste du stade.

Tôt dans l’après-midi, et longtemps après le match, la communion fut parfaite entre les supporters des deux équipes. The Gweedore Bar et le Peadar O’Donnell’s, deux établissements de Waterloo Street, se souviennent encore des ces litres de bières écoulés, de ces écharpes et drapeaux échangés, de ces cortèges de nord-irlandais et de français qui, le temps de quelques heures, ont fait bien plus que soutenir leurs propres couleurs. Après le match, même l’arbitre de la rencontre et ses assesseurs se joignirent à nous pour boire une pinte de Guinness !

C’est au terme d’une nuit de fête, et après un 0-0 aussi soporifique que prometteur pour les deux équipes, que nous nous donnâmes rendez-vous deux semaines plus tard au pied de la Tour Eiffel. Deux semaines pendant lesquelles un refrain résonna dans nos têtes, et dans nos cœurs :

« We love you Derry, we do,
We love you Derry, we do,
We love you Derry, we do,
oh Derry we love you ! »


Pour ouvrir le bal, il est temps d’introduire avec fierté le parrain de ce calendrier. Journaliste, chroniqueur, connaisseur du foot… le présenter davantage serait une insulte. L’écouter est toujours un plaisir. L’interviewer fut un honneur. Aussi laissons-lui la parole, et pour ce premier jour, remontons grâce à lui jusqu’à un temps que les moins de 40 ans ne peuvent pas connaître… 

Ma première rencontre avec le PSG remonte aux années 1976-77. Alors pour retenir un match, spontanément, je dirais que le PSG – OM gagné 5-1 à la fin des années Hechter serait un bon choix. Ne serait-ce que pour le talent de Dahleb, qui avait survolé cette rencontre… Après, si je laisse filer les années, il y a l’époque Borelli, les premiers titres. Et ensuite l’arrivée de Canal. Bien sûr avec Canal les Parisiens ont eu plus de résultats, mais c’était encore le début. Décidément, choisir la rencontre qui représente le mieux ce qu’est le PSG n’a rien d’évident !

J’hésite entre deux matches. Deux finales de Coupe de France. Celle de 1982, je l’ai commentée sur TF1, aux côtés de Michel Denisot. Tout le monde connaît les images : 1982 c’est la reprise de Rocheteau, Borelli qui embrasse la pelouse… Pelouse qui sera envahie pendant plus d’une heure, match arrêté. Alors pendant ce temps on s’est retrouvés à commenter rien du tout avec Denisot, ça laisse des souvenirs. Mais ça reste la première victoire du PSG, le premier titre. La saveur est particulière.

Pourtant, c’est la finale de 1983, le PSG – Nantes, que je vais garder, même si je l’ai suivie dans des conditions spéciales. Pour moi, c’est ce match-là qui est le plus « ADN du PSG ».

Pour replacer le contexte, en 1983 le jeu, c’est l’équipe de Nantes. Ils sont favoris, déjà champions, tout le monde les voit faire le doublé. Le Paris SG se retrouve mené 2-1 mais gagne 3-2, après un très grand match de football. Des Parisiens pas favoris, qui renversent la situation face à une équipe de Nantes très forte : pour moi c’est ça Paris.

De mémoire Zaramba ouvre la marque pour le PSG, sur un coup-franc lointain. Nantes va ensuite marquer deux buts, d’abord par Baronchelli, et surtout le fabuleux but de José Touré. Contrôle de la poitrine, dos au but, jongle pied droit, encore pied droit, frappe du gauche, et la balle qui n’a pas touché le sol. Magique.

Avant de raconter la suite, je dois préciser que cette finale a une saveur particulière : je n’aurais pas dû y assister. Je ne commentais pas ce soir-là. À l’époque les finales c’était une année sur Antenne 2 (l’ancien nom de France 2), et une année TF1. Comme TF1 l’avait eue en 1982 c’est au tour d’Antenne 2. Le lendemain je faisais Téléfoot, mais je ne devais pas travailler ce soir et j’avais le choix entre assister au match ou aller avec des potes voir Crosby, Stills & Nash en concert à l’hippodrome d’Auteuil.

J’ai hésité jusqu’au dernier moment. En 1983, j’habitais entre le Parc des Princes et la Porte d’Auteuil, et en sortant de chez moi, je me suis dit « merde, des concerts, il y en aura d’autres, une finale il n’y en a qu’une », et au dernier moment je suis allé au Parc. Ça tient à ça.

Avant le coup d’envoi, Didier non loin du Président Mitterrand et de Francis Borelli en train de lui présenter ses joueurs.

Le bruit du ballon dans les filets

Quand je ne commentais pas, j’aimais être au bord de la pelouse avec les photographes. Même si au ras du terrain on voit moins bien ce qui se passe de l’autre côté, au moins on sent le jeu, le but. En première mi-temps, j’étais derrière le but parisien, face à Touré sur son action et je ne sais pas pourquoi, j’ai décidé de rester au même endroit. Du coup en seconde période, j’ai pu suivre les attaques du PSG. On ne peut pas anticiper ça, mais j’étais idéalement placé pour voir le but de l’égalisation de Safet Sušić. Pile dans l’axe. J’ai vu la frappe, le ballon venir tout droit vers moi et s’arrêter dans la lucarne : « WOooshHHH ». C’est fou, aujourd’hui encore, j’ai le souvenir précis du bruit de ce ballon dans le petit filet. Celui-là je sais que je l’aurai toute ma vie.

C’est un but, et un titre qui ont vraiment une place particulière pour moi. À cette époque on était proche des joueurs. J’adorais Sušić, j’étais très pote avec Luis, je connaissais bien N’Gom, j’avais joué contre lui. Le club n’avait rien à voir avec ce qu’il est devenu. Georges Peyroche était l’entraîneur et les lendemains de match avec lui c’était relax. Souvent il me laissait m’entraîner avec eux. On faisait un petit match, des tirs des 18 mètres, des conduites de balle, tranquilles. Des bons souvenirs.

Si aujourd’hui j’avais 25 ans, comme journaliste TV, pas sûr que si je me pointe comme ça, Pochettino me demanderait ma pointure, et me filerait une paire de crampons en 43-44 en me demandant de venir taper le ballon avec le groupe. Borelli, Peyroche, pour eux le PSG c’était la famille : le soir on mangeait ensemble à Saint-Germain. On rigolait.

Il ne faut pas que les tout jeunes supporters regrettent de ne pas avoir vécu cette période-là, ou une autre. Il n’y a pas d’âge d’or : chaque génération vit ses propres matches de légende. Pour moi, le PSG, c’est cette incroyable finale gagnée contre Nantes. Eux, leur match référence viendra. C’est aussi une chance.


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